Correspondance 1812-1876, 1/1831/LII


LII

AU MÊME


Paris, 10 janvier 1831.


Je suis inquiète de toi, mon cher enfant. Tu m’as écrit pour me dire que tu avais été malade ; ne l’es-tu pas encore ? Si je ne reçois pas de tes nouvelles aujourd’hui, j’aurai bien du chagrin. Écris-moi donc exactement deux fois par semaine, je t’en prie ; si tu es malade, prie ton papa ou ton oncle de m’écrire. Pour moi, je me porte bien et je cours beaucoup ; mais je n’ai pas encore été au spectacle, parce que je travaille le soir. J’ai été trois fois chez ta bonne maman Dudevant sans pouvoir la trouver. Il paraît qu’elle sort souvent. Je lui ai laissé ta lettre, et j’y retournerai aujourd’hui.

J’ai déjà marchandé ton habit de garde national. Il sera bien joli, j’y joindrai un schako avec une flamme rouge. Je voudrais que tu pusses voir les hussards d’Orléans. Tu aurais bien envie d’être habillé comme eux. Ils ont une veste gris bleu garnie de mouton noir et un pantalon rouge ; le plumet est noir, il n’y a rien de plus élégant.

J’ai vu M. Blaize[1], qui m’a bien demandé de tes nouvelles. Dis à ton papa de dire à madame Decerf que j’ai fait sa commission. Dis-lui aussi de me donner des nouvelles de madame Duteil. Je n’ai pas encore le temps d’écrire des lettres. Je n’écris qu’à toi.

Embrasse bien ton papa pour moi, ainsi que ton oncle et ta tante. Dis à ton oncle qu’en descendant son escalier un peu trop fort, j’ai fait écrouler douze marches. Embrasse bien fort ta sœur de la part de sa maman ; parle-t-elle un peu de moi ? Et Léontine se porte-t-elle bien ? Enfin donne-moi des nouvelles de tout le monde, et dis bien des choses de ma part à Eugénie, à Françoise, etc.

Adieu, mon cher amour ; écris-moi donc et surtout porte-toi bien, sois sage, et aime toujours ta mère, qui t’embrasse mille et mille fois.

  1. Artiste peintre qui avait fait les miniatures de George Sand et de son fils, l’année précédente.