Correspondance générale, Texte établi par J. Assézat et M. TourneuxGarnierXIX (p. 455-456).


XXIV

AU MÊME[1].
À Paris, ce 1er dimanche de juin 1760.
Monsieur,

J’apprends que des personnes mal instruites ou mal intentionnées m’attribuent une brochure intitulée : Préface de la Comédie des Philosophes[2]. Je crois devoir vous prévenir que je n’ai aucune part, quelle qu’elle puisse être, ni directe ni indirecte, à cet ouvrage, et que je n’en connais ni n’en soupçonne l’auteur. Si les recherches les plus rigoureuses que j’ose vous demander en grâce d’ordonner vous conduisent à quelque découverte contraire à ce que j’ai l’honneur de vous assurer, j’aurai mérité toute votre indignation moins pour avoir eu la moindre connaissance de ce qui a rapport à la brochure en question que pour vous avoir menti indignement en le niant. Il est bien malheureux pour moi d’avoir à vous importuner sans cesse et qu’il ne suffise pas toujours d’être innocent pour être tranquille. Je n’ai point été à la pièce des Philosophes. Je ne l’ai point lue. Je n’ai point lu la préface de Palissot et je me suis interdit tout ce qui a irait à cette indignité. Loin de ces injures atroces, je ne serai point tenté de manquer à la promesse que je me suis faite et que je me suis tenue jusqu’à présent de ne pas écrire un mot de représailles. Quand les honnêtes gens veulent bien s’indigner pour nous, nous sommes dispensés de l’être.

Je suis, avec un profond respect, etc.



  1. Inédite. Communiquée par M. Rathery.
  2. C’est la brochure qui fit enfermer Morellet à la Bastille.