Contes de l’Ille-et-Vilaine/Le Cheval sellé et bridé

Contes de l’Ille-et-Vilaine
Contes de l’Ille-et-VilaineJ. Maisonneuve (p. 269-270).


LE CHEVAL SELLÉ ET BRIDÉ

On voyait autrefois la nuit, dans la pâture de Lantouchais, située près du château de la Perdrilaye, commune de Pipriac, un cheval sellé et bridé.

D’où venait-il ? On ne l’a jamais su.

Les étrangers et les voyageurs, qui n’en avaient pas entendu parler, ou bien encore les jeunes insensés du pays, qui voulaient faire parade de leur bravoure, et qui le montaient, étaient emportés dans une course folle, vertigineuse, à travers bois et landes jusqu’au lever du jour. Ils rentraient chez eux anéantis, brisés.

Le curé de Saint-Just, informé de la présence de cet animal qui faisait des incursions dans sa paroisse, bénit une branche de coudrier et la donna à un cavalier habile, en lui disant d’aller, sans crainte, enfourcher le cheval sellé et bridé.

Le gars se rendit, à minuit, dans la pâture de Lantouchais où il rencontra ce qu’il cherchait. Il se dirigea vers la bête qui se laissa approcher et monter. Aussitôt dessus, il la fouailla de sa baguette.

Le cheval trembla des pieds à la tête ; puis il fit des bonds terribles, cherchant à jeter son cavalier par terre sans pouvoir y réussir. Il eut bientôt le corps couvert d’écume, ses jambes fléchirent, et, finalement épuisé, n’en pouvant plus, il tomba mort au pied d’un menhir.

Quand, le lendemain matin, on alla pour le voir, à l’endroit où il avait expiré, on ne l’y trouva plus. Le diable, qui devait être son compère, l’avait emporté, depuis cette nuit on ne l’a revu ni à Pipriac, ni ailleurs.

(Conté par Mlle Le Gall qui habite
le château de la Perdrilaye.)