Considérations sur la France – Édition 1829/Post-Scriptum

POST SCRIPTUM.

La nouvelle édition de cet ouvrage[1] touchoit à sa fin, lorsque des Français, dignes d’une entière confiance, m’ont assuré que le livre du Développement des vrais-principes, etc., que j’ai cité dans le chap. VIII, contient des maximes que le Roi n’approuve point.

» Les magistrats, me disent-ils, auteurs du livre question, réduisent nos états-généraux à la faculté de faire des doléances, et attribuent aux parlemens le droit exclusif de vérifier les lois, celles mêmes qui ont été rendues sur la demande des états ; c’est-à-dire qu’ils élèvent la magistrature au dessus de la nation. »

J’avoue que je n’ai point aperçu cette erreur monstrueuse dans l’ouvrage des magistrats français (qui n’est plus à ma disposition) ; elle me paroît même exclue par quelques textes de cet ouvrage, cités aux pages 128 et 129 du mien ; et l’on a pu voir, dans la note de la page 135 : que le livre dont il s’agit a fait naître des objections d’un tout autre genre.

Si, comme on me l’assure, les auteurs se sont écartés des vrais principes sur les droits légitimes de la nation française, je ne m’étonnerais point que leur travail, plein d’ailleurs d’excellentes choses, eût alarmé le Roi ; car les personnes mêmes qui n’ont point l’honneur de le connoître, savent, par une foule de témoignages irrécusables, que ces droits sacrés n’ont pas de partisans plus loyal que lui, et qu’on ne pourroit l’offenser plus sensiblement qu’en lui prêtant des systèmes contraires.

Je répète que je n’ai lu le livre du Développement, etc. dans aucune vue systématique. Séparé de mes livres depuis long-temps ; obligé d’employer, non ceux que je cherchois, mais ceux que je trouvois ; réduit même à citer souvent de mémoire ou sur des notes prises anciennement, j’avois besoin d’un recueil de cette nature pour rassembler mes idées. Il me fut indiqué (je dois le dire) par le mal qu’en disoient les ennemis de la royauté ; mais s’il contient des erreurs qui m’ont échappé, je les désavoue sincèrement. Etranger à tous les systèmes, à tous les partis, à toutes les haines, par caractère, par réflexion, par position, je serai assurément très-satisfait de tout lecteur qui me lira avec des intentions aussi pures que celles qui ont dicté mon ouvrage.

Si je voulois, au reste, examiner la nature des différens pouvoirs dont se composoit l’ancienne constitution française ; si je voulois remonter à la source des équivoques, et présenter des idées claires sur l’essence, les fonctions, les droits, les griefs et les torts des parlemens, je sortirais des bornes d’un postscriptum, même de celles de mon ouvrage ; et je ferais d’ailleurs une chose parfaitement inutile. Si la nation française revient à son Roi, comme tout ami de l’ordre doit le désirer, et si elle a des assemblées nationales régulières, les pouvoirs quelconques viendront naturellement se ranger à leur place, sans contradiction et sans secousse. Dans toutes les suppositions, les prétentions exagérées des parlemens, les discussions et les querelles qu’elles ont fait naître, me paraissent appartenir entièrement à l’histoire ancienne.

FIN.
  1. C’est la troisième en cinq mois, en comptant la contrefaçon française qui vient de paroître. Celle-ci a copié fidèlement les innombrables fautes de la première, et en a ajouté d’autres. (Note de l’édit. de 1821.)