Comédie humaine - Répertoire/R

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Rabouilleuse (La), sobriquet de Flore Brazier, qui, par la suite, devint madame Jean-Jacques Rouget, puis madame Philippe Bridau. — Voir ce dernier nom.

Rabourdin (Xavier), né en 1784, ne connut jamais son père. — Il était le fils d’une femme belle et élégante qui vécut dans le luxe et le laissa orphelin et pauvre à seize ans, âge auquel, sorti du lycée Napoléon, il entra comme surnuméraire au ministère des finances. Promptement appointé, Rabourdin fut sous-chef à vingt-deux ans et chef à vingt-cinq : un protecteur inconnu l’avait ainsi fait avancer ; cette même influence occulte lui ouvrit la maison de M. Leprince, ancien commissaire-priseur, veuf et riche, dont il vit, aima et épousa la fille unique. À partir de ce moment, privé par la mort, sans doute, de son puissant protecteur, Rabourdin vit sa carrière enrayée ; malgré les efforts d’un travail dévoué et intelligent, il occupait encore, à quarante ans, le même poste, lorsqu’en 1824, par la mort de M. Flamet de la Billardière, vint à se produire la vacance d’une place de chef de division. Cette place, qu’il ambitionnait et qu’il méritait, fut donnée à l’incapable chef de bureau Baudoyer, soutenu par l’église et la finance. Dégoûté, Rabourdin envoya sa démission. Il avait rédigé un très remarquable projet de réforme administrative et sociale qui contribua peut-être à son échec. Durant sa carrière ministérielle, Rabourdin demeurait rue Duphot. Il eut de sa femme deux enfants : Charles, né en 1815 ; une fille, née en 1817. Vers 1830, Rabourdin eut à passer aux finances ; il y revit Laurent et Gabriel, ses anciens garçons de bureau, neveux d’Antoine, alors retraité et apprit d’eux que Colleville et Baudoyer étaient devenus percepteurs à Paris (Les Employés). Sous l’Empire, il assistait aux soirées de M. Guillaume, le marchand de drap de la rue Saint-Denis (La Maison du Chat qui pelote). Plus tard, il fut invité avec sa femme, au fameux bal donné par César Birotteau, le 17 décembre 1818 (César Birotteau). Resté veuf, Rabourdin était, en 1840, directeur d’un chemin de fer en projet ; il vint, à cette époque, se loger dans une maison de la place de la Madeleine, récemment achetée par les Thuillier qu’il avait connus au ministère des finances (Les Petits Bourgeois).

Rabourdin (Madame), née Célestine Leprince, en 1796 ; grande, belle, très bien faite ; élevée par une mère artiste ; peignait, était bonne musicienne, parlait plusieurs langues, et même avait quelques notions scientifiques. Mariée toute jeune par son père, alors veuf, elle tint un salon, où l’on pouvait voir, en 1824, à défaut de Jean-Jacques Bixiou, consigné, le poète Canalis, le peintre Schinner, le docteur Bianchon, qui l’appréciait particulièrement ; Lucien de Rubempré, Octave de Camps, le comte de Granville, le vicomte de Fontaine, F. du Bruel, Andoche Finot, Derville, Châtelet, alors député ; Ferdinand du Tillet, Paul de Manerville et le vicomte de Portenduère ; une rivale, madame Colleville, avait surnommé madame Rabourdin la Célimène de la rue Duphot. Très gâtée par sa mère, Célestine Leprince se croyait destinée à un grand personnage. Aussi, quoique M. Rabourdin lui plût, hésita-t-elle d’abord à se marier avec lui, en raison surtout du nom qu’il lui donnait. Elle l’aima, du reste, sincèrement, mais l’entraîna dans de grandes dépenses. Elle lui resta toujours strictement fidèle, bien qu’elle eût pu lui procurer la place de chef de division qu’il convoitait, en s’abandonnant à Chardin des Lupeaulx, secrétaire général du ministère des finances, très épris d’elle. Madame Rabourdin recevait les mercredis et les vendredis. — Elle mourut en 1840 (L’Interdiction. — Les Employés).

Rabourdin (Charles), étudiant en droit, fils des précédents, né en 1815, demeurait de 1836 à 1838, à Paris, dans un hôtel de la rue Corneille. Il y connut Z. Marcas, l’aida dans sa détresse, le soigna à son lit de mort et suivit, seul avec Juste, étudiant en médecine, le convoi du grand homme inconnu jusqu’à la fosse commune du cimetière Montparnasse. Après avoir raconté à quelques amis la navrante et courte histoire de Z. Marcas, Charles Rabourdin s’expatria sur les conseils mêmes du défunt ; il s’embarqua, au Havre, pour les îles de la Malaisie, ne trouvant pas à se faire une position en France (Z. Marcas).

Racquets (Des). — V. Raquets (des).

Ragon, né vers 1748 ; parfumeur à Paris, rue Saint-Honoré, entre Saint-Roch et la rue des Frondeurs, dans le courant et jusqu’à la fin du XVIIIe siècle ; petit homme de cinq pieds à peine, à figure de casse-noisette, galant et prétentieux. — Il céda son magasin de la Reine des Roses à son premier commis, César Birotteau, après le 18 brumaire. Ancien parfumeur de Sa Majesté la reine Marie-Antoinette, M. Ragon demeura toujours un zélé royaliste, et, sous la République, les Vendéens se servirent de lui pour correspondre avec les princes et le comité royaliste de Paris. Il recevait alors et renseignait l’abbé de Marolles, auquel il montrait le bourreau de Louis XVI, dont il lui révélait l’identité. En 1818, victime de la spéculation Nucingen, dite « affaire des mines de Wortschin », Ragon occupait, appauvri, avec sa femme, un appartement de la rue du Petit-Bourbon-Saint-Sulpice[1] (César Birotteau. — Un Épisode sous la Terreur).

Ragon (Madame), née Popinot, sœur du juge Popinot, femme du précédent, avait le même âge à peu près que son mari ; c’était, en 1818, « une grande femme sèche et ridée, au nez pincé, aux lèvres minces, avec un faux air de marquise de l’ancienne cour » (César Birotteau).

Ragoulleau[2] (Jean-Antoine), avocat à Paris, fut l’objet d’une tentative d’extorsion de signature et d’assassinat de la part de la veuve Morin, qui fut condamnée, sur diverses dépositions, entre autres, celle de Poiret aîné, à vingt ans de travaux forcés, le 11 janvier 1812 (Le Père Goriot).

Raguet était garçon de peine chez le parfumeur César Birotteau, en 1818 (César Birotteau).

Raparlier, notaire à Douai, dressa, en 1825, les contrats de mariage de Marguerite Claës avec Emmanuel de Solis, de Félicie Claës avec le notaire Pierquin et de Gabriel Claës avec mademoiselle Conyncks (La Recherche de l’Absolu).

Raparlier, huissier-priseur à Douai, sous la Restauration ; neveu du précédent ; fit l’inventaire chez les Claës, après le décès de madame Balthazar Claës, en 1816 (La Recherche de l’Absolu).

Rapp, général français, né à Colmar, en 1772 ; mort en 1821. — Aide de camp du premier consul Bonaparte, il se trouvait, un jour d’octobre 1800, en service aux Tuileries auprès de son chef, lorsque le proscrit corse Bartholomeo di Piombo se présenta inopinément. Rapp, qui se défiait de cette figure et des Corses en général, voulait, pendant l’entrevue, rester aux côtés de Bonaparte, qui fut obligé de le repousser en souriant (La Vendetta). Le 3 octobre 1806, veille de la bataille d’Iéna, Rapp venait faire une communication importante à l’empereur, au moment où Napoléon, sur le terrain même, recevait mademoiselle Laurence de Cinq-Cygne et M. de Chargebœuf, arrivant de France pour solliciter la grâce des deux Simeuse et des deux Hauteserre impliqués dans un procès politique et condamnés aux travaux forcés (Une Ténébreuse Affaire).

Raquets (Des), de Douai, Flamand dévoué aux traditions et aux usages de sa province, oncle très riche du notaire Pierquin, unique héritier, qui recueillit sa succession dans les dernières années de la Restauration (La Recherche de l’Absolu).

Rastignac (Chevalier de), grand-oncle d’Eugène de Rastignac, fut vice-amiral, commanda le Vengeur avant 1789, et perdit toute une fortune au service du roi, le gouvernement révolutionnaire n’ayant pas voulu reconnaître ses créances dans la liquidation qui fut faite de la Compagnie des Indes (Le Père Goriot).

Rastignac (Baron et baronne de) avaient, près de Ruffec (Charente), un domaine où ils vivaient à la fin du XVIIIe siècle et au commencement du XIXe et où leur naquirent cinq enfants : Eugène, Laure-Rose, Agathe, Gabriel et Henri. Ils étaient pauvres, vivaient dans une retraite silencieuse, gardaient une imposante dignité et, ainsi que leurs voisins, le marquis et la marquise de Pimentel, exerçaient, par leurs attaches avec la noblesse de cour, une grande influence sur toute leur province. Invités parfois chez madame de Bargeton, à Angoulême, ils y virent Lucien de Rubempré et purent l’apprécier (Le Père Goriot. — Illusions perdues).

Rastignac (Eugène de)[3], fils aîné du baron et de la baronne de Rastignac, né à Rastignac, près de Ruffec, en 1797. — Il vint à Paris, en 1819, pour étudier le droit ; habita, d’abord, le troisième étage de la pension Vauquer, rue Neuve-Sainte-Geneviève, fut alors en relations avec Jacques Collin, dit Vautrin, qui s’intéressa particulièrement à lui et voulut lui faire épouser Victorine Taillefer ; devint l’amant de madame de Nucingen, seconde fille de Joachim Goriot, ancien vermicellier, et, en février 1820, habita, rue d’Artois, un joli appartement loué, aménagé et meublé par le père de sa maîtresse. Goriot mourut dans ses bras ; seul avec le domestique Christophe, Rastignac suivit le convoi du bonhomme. À la pension Vauquer, il s’était lié intimement avec Horace Bianchon, étudiant en médecine (Le Père Goriot). En 1821, à l’Opéra, le jeune Rastignac faisait rire deux loges des ridicules provinciaux de madame de Bargeton et du « fils Chardon » (Lucien de Rubempré) ; ce qui amenait madame d’Espard à quitter le théâtre avec sa parente, en abandonnant lâchement et publiquement le grand homme de province. Quelques mois plus tard, Rastignac courtisait le même Lucien de Rubempré, alors influent ; il acceptait d’être, avec Marsay, l’un des témoins du poète dans le duel qu’il eut avec Michel Chrestien, à propos de Daniel d’Arthez (Illusions perdues). Au dernier bal masqué de 1824, Rastignac retrouvait à la fois Rubempré, qui avait disparu de Paris, depuis assez longtemps, et Vautrin, qui, en lui rappelant les souvenirs de la pension Vauquer, lui enjoignait avec autorité de traiter Lucien en ami. Peu après, Rastignac devint l’un des habitués du somptueux hôtel installé rue Saint-Georges par Nucingen pour Esther Gobseck (Splendeurs et Misères des Courtisanes). Rastignac assistait à l’enterrement de Lucien de Rubempré en mai 1830 (La Dernière Incarnation de Vautrin). Vers le même temps, le comte de Fontaine demandait à sa fille Émilie ce qu’elle pensait de Rastignac, qu’il nommait, avec plusieurs autres, comme un mari possible pour elle ; mais, connaissant les relations du jeune ambitieux avec madame de Nucingen, elle se déroba par une réponse malicieuse (Le Bal de Sceaux). En 1828, Rastignac cherchait à devenir l’amant de madame d’Espard et se voyait détourné de cette tentative par son ami, le docteur Bianchon (L’Interdiction). Dans la même année, Rastignac se voyait traité d’impertinent par madame de Listomère, pour lui avoir réclamé une lettre écrite et destinée par lui à madame de Nucingen, mais remise, par erreur, à la première de ces deux femmes (Étude de femme). Après la révolution de Juillet, il se trouva présent à la soirée de mademoiselle des Touches où Marsay raconta son premier amour (Autre Étude de femme). À cette époque, il était en relations amicales avec Raphaël de Valentin et pensait épouser une Alsacienne (La Peau de Chagrin). En 1832, Rastignac, devenu baron, était sous-secrétaire d’État au département dont Marsay était le ministre (Les Secrets de la Princesse de Cadignan). Il se fit, en 1833-1834, le garde-malade du ministre mourant, dans l’espoir d’être mis sur son testament. Un soir, vers ce même temps, il emmena souper, chez Véry, Raoul Nathan et Émile Blondet, rencontrés dans le monde, et il engagea fort Nathan à profiter des faveurs de la comtesse Félix de Vandenesse (Une Fille d’Ève). En 1833, chez la princesse de Cadignan, en présence de la marquise d’Espard, des vieux ducs de Lenoncourt et de Navarreins, du comte et de la comtesse de Vandenesse, d’Arthez, de deux ambassadeurs, de deux orateurs célèbres de la Chambre des pairs, Rastignac entendait son ministre révéler les secrets de l’enlèvement du sénateur Malin, affaire datant de 1806 (Une Ténébreuse Affaire). En 1836, enrichi par la troisième liquidation de Nucingen, dont il fut le complice plus ou moins conscient, il possédait quarante mille francs de rente (La Maison Nucingen). En 1838, il vint à l’inauguration de l’hôtel de Josépha, rue de la Ville-l’Évêque, fut l’un des témoins de Wenceslas Steinbock épousant Hortense Hulot, et se maria, lui-même, avec Augusta de Nucingen, fille de Delphine de Nucingen, son ancienne maîtresse, qu’il avait quittée depuis cinq ans. En 1839, Rastignac, pour la seconde fois ministre, et, cette fois, aux travaux publics, venait d’être fait comte presque malgré lui. En 1845, il était, de plus, pair de France et possédait 300 000 francs de rente. Eugène de Rastignac avait coutume de dire : « Il n’y a pas de vertu absolue, il n’y a que des circonstances » (La Cousine Bette. — Le Député d’Arcis. — Les Comédiens sans le savoir).

Rastignac (Laure-Rose et Agathe de)[4], sœurs d’Eugène de Rastignac, deuxième et troisième enfants du baron et de la baronne de Rastignac ; l’aînée, Laure, née en 1801, la seconde, Agathe, née en 1802 ; toutes deux, élevées modestement au château de Rastignac, envoyaient, en 1819, leurs économies à leur frère Eugène, alors étudiant. Plusieurs années après, devenu riche et puissant, il les maria, l’une à Martial de la Roche-Hugon, l’autre à un ministre. En 1821, Laure, reçue avec son père et sa mère chez M. de Bargeton, y admira Lucien de Rubempré (Le Père Goriot. — Illusions perdues). Madame de la Roche-Hugon, en 1839, était mère de plusieurs filles qu’elle conduisit à un bal d’enfants, chez madame de l’Estorade, à Paris (Le Député d’Arcis).

Rastignac (Monseigneur Gabriel de), frère d’Eugène de Rastignac, l’un des deux derniers enfants du baron et de la baronne de Rastignac, était secrétaire particulier de l’évêque de Limoges à la fin de la Restauration, pendant le procès criminel Tascheron, et devint lui-même, tout jeune, évêque en 1832, âgé de moins de trente ans. Il fut sacré par l’archevêque Dutheil (Le Père Goriot. — Le Curé de Village. — Une Fille d’Ève).

Rastignac (Henri de), sans doute le cinquième enfant du baron et de la baronne de Rastignac ; — sa vie n’est pas connue (Le Père Goriot).

Ratel, gendarme dans le département de l’Orne, en 1800, fut, avec son collègue Mallet, chargé de découvrir « la dame » Bryond des Minières impliquée dans l’affaire dite des « chauffeurs de Mortagne », parvint, en effet, à trouver l’accusée ; mais, se laissant séduire par elle, au lieu de l’arrêter la protégea et la laissa fuir, d’accord avec Mallet. Ratel, emprisonné, avoua tout, et, sans attendre son jugement, se suicida (L’Envers de l’Histoire contemporaine).

Ravenouillet, portier de la maison habitée par Bixiou, en 1845, rue Richelieu, no 112, était fils d’un épicier de Carcassonne ; il fut toujours concierge et dut sa première place à son compatriote Massol. — Ravenouillet, quoique sans aucune instruction, ne manquait pas d’intelligence ; d’après Bixiou, il était la « providence à 30 0/0 » des soixante et onze locataires de sa maison, qui lui devaient en moyenne six mille francs par mois (Les Comédiens sans le savoir).

Ravenouillet (Madame), femme du précédent (Les Comédiens sans le savoir).

Ravenouillet (Lucienne), fille des précédents, était, en 1845, élève du Conservatoire de Paris, pour le chant (Les Comédiens sans le savoir).

Raymond, l’un des faux noms de Schirmer (La Famille Beauvisage).

Regnauld (Baron) (1754-1829), peintre célèbre, membre de l’institut. Joseph Bridau, âgé de quatorze ans, fréquentait librement son atelier en 1812-1813 (La Rabouilleuse).

Regnauld de Saint-Jean d’Angely, « clerc en l’estude de maistre Bordin, procureur au Chastelet », en 1787 (Un Début dans la Vie).

Regnault, ex-premier clerc de maître Roguin, notaire à Paris, vint à Vendôme, en 1816 et y acheta une étude de notaire. — Appelé, par madame de Merret, à son lit de mort, il fut son exécuteur testamentaire : en cette qualité, quelques années plus tard, il priait le docteur Bianchon de respecter l’une des dernières volontés de la morte, en cessant de se promener dans le jardin de la Grande Bretèche, cette propriété devant rester, durant un demi-siècle, rigoureusement inaccessible. Maître Regnault s’était marié avec une cousine riche, à Vendôme. — Homme long, fluet, front fuyant, petite tête pointue, face blême, il émaillait continuellement sa conversation de l’expression « Petit moment ! » (La Grande Bretèche).

Régnier (Claude-Antoine), duc de Massa, né en 1746, mort en 1814 ; avocat, puis député à la Constituante ; était grand juge (c’est-à-dire ministre de la justice) au moment du célèbre procès des Simeuse et des Hauteserre, accusés de l’enlèvement du sénateur Malin ; il remarqua le talent montré par Granville dans la défense des accusés, et, un peu plus tard, l’ayant rencontré chez l’archichancelier Cambacérès, il emmena le jeune avocat dans sa voiture et le reconduisit jusqu’à la porte de son domicile, quai des Augustins, en lui donnant des conseils pratiques et en l’assurant de sa protection (Une Ténébreuse Affaire. — Une Double Famille).

Régulus, l’un des garçons du coiffeur Mougin, dit Marius, place de la Bourse, à Paris, en 1845 (Les Comédiens sans le savoir).

Rémonencq, Auvergnat, ferrailleur-brocanteur rue de Normandie, dans la maison habitée par Pons et Schmucke, dont les Cibot étaient concierges. — Rémonencq, venu à Paris pour être commissionnaire, fit, de 1825 à 1831, les courses des marchands de curiosités du boulevard Beaumarchais et des chaudronniers de la rue de Lappe ; puis ouvrit, dans ce même quartier, une boutique misérable d’objets dépareillés. Il vivait là, dans une économie sordide. Il avait pu pénétrer chez Sylvain Pons et avait apprécié à leur juste valeur les trésors du vieux collectionneur ; son avidité le poussa au crime : il provoqua les vols commis par madame Cibot chez Pons, il en profita, empoisonna le mari de la portière pour épouser ensuite sa veuve et s’établit avec elle marchand de curiosités, dans un superbe magasin, sur le boulevard de la Madeleine. Vers 1846, il s’empoisonna lui-même, par mégarde, avec un verre de vitriol qu’il avait mis à la portée de sa femme (Le Cousin Pons).

Rémonencq (Mademoiselle), sœur du précédent, « espèce d’idiote, au regard vague, velue comme une idole japonaise ». — Elle partageait le logement de son frère, dont elle tenait le ménage (Le Cousin Pons).

Rémonencq (Madame), née en 1796 ; ancienne belle écaillère du Cadran bleu, à Paris ; épousa, en 1828, par amour, le concierge tailleur Cibot, s’établit avec lui dans la loge d’une maison de la rue de Normandie, appartenant à Claude-Joseph Pillerault et où demeuraient les musiciens Pons et Schmucke ; se chargea, quelque temps, du ménage et de la nourriture des deux célibataires, les servit d’abord avec fidélité ; puis, excitée par Rémonencq, encouragée par la nécromancienne Fontaine, vola le malheureux Pons. Son mari ayant été empoisonné par Rémonencq sans qu’elle fût d’ailleurs complice de ce crime, elle épousa le brocanteur devenu marchand de curiosités, trôna dans le beau magasin du boulevard de la Madeleine, et survécut à son second mari (Le Cousin Pons).

Rémy ou Remy (Jean), paysan d’Arcis-sur-Aube, contre qui un voisin perdit un procès, à propos du bornage d’un champ. — Ce voisin, du reste pris de boisson, exhalait des plaintes intempestives sur Jean Rémy dans une réunion électorale organisée pour l’élection de Dorlange-Sallenauve, au mois d’avril 1839 : d’après lui, Jean Rémy se battait avec sa femme, et avait, à Paris, une fille qui obtint, sans aucun titre, et par la protection d’un député, un bureau de tabac productif, rue Mouffetard (Le Député d’Arcis).

Renard, ancien capitaine des armées impériales retiré à Issoudun, sous la Restauration ; l’un des officiers du faubourg de Rome, hostiles aux pékins et partisans de Maxence (Max) Gilet. — Renard, avec le commandant Potel, servit de témoin à Maxence dans le duel qu’il eut avec Philippe Bridau et où il fut tué (La Rabouilleuse).

Renard, maréchal des logis dans un régiment de cavalerie, en 1812. — Élevé pour être notaire et devenu sous-officier, il avait une figure de jeune fille et passait pour un « enjôleur ». Ami de Genestas, il lui sauva la vie plusieurs fois, mais lui prit une juive polonaise qu’il aimait, l’épousa à la mode sarmate et la laissa enceinte : Renard avait été blessé mortellement dans un engagement contre les Russes, avant la bataille de Lutzen. En mourant, il avoua sa trahison à Genestas, et le pria d’épouser la juive et d’adopter l’enfant qu’elle allait avoir : ce que fit le naïf officier. — Renard était Parisien, fils d’un gros épicier, « un requin sans dents », qui ne voulut pas entendre parler du rejeton du maréchal des logis. (Le Médecin de Campagne).

Renard (Madame). — V. Genestas (madame).

Renard (Adrien). — V. Genestas (Adrien).

René, l’unique domestique de M. du Bousquier à Alençon, en 1816 ; espèce de jocrisse breton d’une goinfrerie remarquable mais d’une discrétion absolue (La Vieille Fille).

Restaud (Comte de), dont Barchou de Penhoen, condisciple de Dufaure et de Lambert, apprit, le premier, l’existence attristée. — Né vers 1780, mari d’Anastasie Goriot, il fut ruiné et déshonoré par elle, et mourut au mois de décembre 1824, rue du Helder, à Paris, en essayant de lui faire avantager Ernest, son fils aîné, le seul des trois enfants de madame de Restaud qu’il reconnût pour le sien. Dans ce but, il avait feint des dépenses exagérées et s’était constitué le débiteur fictif de Gobseck, assurant à Ernest, par une contre-lettre, la propriété réelle de ses biens. — M. de Restaud ressemblait au duc de Richelieu et avait la tournure aristocratique des hommes d’État du noble faubourg (Gobseck. — Le Père Goriot).

Restaud (Comtesse Anastasie de), femme du précédent, fille aînée du vermicellier Jean-Joachim Goriot, brune superbe, de grande allure, avec des airs de race. — Ainsi que sa sœur, la douce et blonde madame de Nucingen, elle se montra dure et ingrate à l’égard du plus tendre et du plus faible des pères. Elle eut trois enfants, deux garçons et une fille, dont l’aîné seul, Ernest, était réellement de son mari. Pour son amant, Maxime de Trailles, elle se ruina, vendit ses bijoux à Gobseck et compromit gravement l’avenir des siens. Aussitôt après le dernier soupir de son mari, qu’elle guettait impatiemment, elle vola sous son oreiller et brûla des papiers qu’elle croyait contraires à ses intérêts et à ceux de ses deux derniers enfants : elle ne fit ainsi qu’assurer à Gobseck, créancier fictif, la propriété de tout ce qui restait (Gobseck. — Le Père Goriot). Madame de Restaud mourut à la fin de l’année 1843 (La Famille Beauvisage).

Restaud (Ernest de), fils aîné des précédents, et réellement le seul enfant du mari, les deux autres devant avoir pour père naturel Maxime de Trailles. — Tout enfant, en 1824, il reçut, de son père mourant, commission de remettre à l’avoué Derville un paquet cacheté contenant des dispositions testamentaires ; mais madame de Restaud, usant de son pouvoir maternel, empêcha Ernest de remplir sa promesse. À sa majorité, Ernest de Restaud, mis en possession de la fortune de M. de Restaud[5] par Gobseck, créancier fictif du défunt, épousa Camille de Grandlieu, qu’il aimait et dont il était aimé. Par ce mariage, Ernest de Restaud se trouva très engagé dans le parti légitimiste, tandis que son frère Félix, pourvu d’un emploi auprès d’un ministre, sous Louis-Philippe, suivait une voie politique tout autre (Gobseck. — Le Député d’Arcis).

Restaud (Madame Ernest de), née Camille de Grandlieu, en 1813, fille de la vicomtesse de Grandlieu, aima, toute jeune, Ernest de Restaud, non encore majeur, et l’épousa dans les premières années du règne de Louis-Philippe (Gobseck. — Le député d’Arcis).

Restaud (Félix-Georges), l’un des deux derniers enfants du comte et de la comtesse de Restaud ; était probablement fils naturel de Maxime de Trailles. En 1839, Félix de Restaud était chef du cabinet de son cousin Eugène de Rastignac, ministre des travaux publics (Gobseck. — Le Député d’Arcis).

Restaud (Pauline de), fille légale du comte et de la comtesse de Restaud, mais, sans doute, fille naturelle de Maxime de Trailles. — On n’a aucun détail sur son existence (Gobseck).

Reybert (De), capitaine au 7e régiment d’artillerie, sous l’Empire ; né dans le pays Messin. — Il était, sous la Restauration, retiré à Presles (Seine-et-Oise), avec sa femme et sa fille ; il n’avait que six cents francs de pension. Voisin de Moreau, régisseur de la terre appartenant au comte de Sérizy, il eut à se plaindre des procédés de l’intendant, dont il surprit les exactions, et, les ayant fait dénoncer au comte par sa femme, il fut choisi pour succéder à Moreau. Reibert avait marié sa fille, sans dot, au riche fermier Léger (Un Début dans la Vie).

Reybert (Madame de), née Corroy, femme du précédent, comme lui, d’origine noble et du pays Messin. — Elle avait une figure trouée en écumoire par la petite vérole, une taille plate et sèche, des yeux ardents et clairs, et se tenait aussi droite qu’un piquet ; puritaine austère, abonnée au Courrier français. Dans une visite au comte de Sérizy, où elle dévoila les exactions de Moreau, elle obtint à son mari la régie de la terre de Presles (Un Début dans la Vie).

Rhétoré (Duc Alphonse de), fils aîné du duc et de la duchesse de Chaulieu, entra dans la diplomatie et fut ambassadeur. — Pendant plusieurs années, sous la Restauration, il entretint Claudine Chaffaroux, dite Tullia, première danseuse de l’Opéra, qui épousa du Bruel, en 1824. Il connut, tant dans son monde que dans le monde galant, Lucien de Rubempré ; il le reçut, un soir, dans sa loge, à une première représentation de l’Ambigu, en 1821, et lui reprocha d’avoir mis au désespoir Châtelet et madame de Bargeton par ses railleries dans un journal ; en même temps, tout en l’appelant Chardon, il conseillait au jeune homme de se faire royaliste pour obtenir de Louis XVIII une ordonnance qui lui rendit le titre et le nom des Rubempré, ses ancêtres maternels. Le duc de Rhétoré n’aimait d’ailleurs pas Lucien de Rubempré ; à une représentation des Italiens, un peu plus tard, il médisait de lui avec désinvolture, auprès de madame de Sérizy, sérieusement éprise du poète (La Rabouilleuse. — Illusions perdues. — Splendeurs et Misères des Courtisanes. — Mémoires de Deux Jeunes Mariées). En 1835, il épousa la duchesse d’Argaïolo, née princesse Soderini, d’une beauté splendide, d’une fortune immense (Albert Savarus). En 1839, il eut un duel avec Dorlange-Sallenauve, ayant été provoqué par celui-ci, pour avoir, en sa présence et à haute voix, sans se douter que cela pût l’atteindre, fort mal parlé de Marie Gaston, second mari de sa propre sœur, Louise de Chaulieu : la scène eut lieu au théâtre de l’Opéra, en présence de M. de Ronquerolles, qui fut, avec le général de Montriveau, le témoin du duc de Rhétoré ; Dorlange fut blessé (Le Député d’Arcis. — Le Comte de Sallenauve. — La Famille Beauvisage).

Rhétoré (Duchesse de), née Francesca Soderini, en 1802 ; Florentine très belle et très riche, mariée toute jeune, par sa famille, au duc d’Argaïolo, extrêmement riche lui-même et beaucoup plus âgé qu’elle. — Elle fut rencontrée en Suisse ou en Italie par Albert Savarus, alors que, par suite des événements politiques, elle et son mari étaient proscrits et privés de leurs biens. La duchesse d’Argaïolo et Albert Savarus s’aimèrent platoniquement, et Francesca promit sa main au Français, quand elle serait veuve. En 1835, ayant perdu son mari depuis quelque temps, et par suite des machinations de Rosalie de Watteville, se croyant oubliée et trahie par Savarus, dont elle n’avait plus de nouvelles, elle donna sa main au duc de Rhétoré, ancien ambassadeur ; le mariage eut lieu à Florence avec beaucoup d’éclat au mois de mai. — La duchesse d’Argaïolo est désignée sous le nom de princesse Gandolphini dans l’Ambitieux par amour, nouvelle publiée par la Revue de l’Est, en 1834. — Sous Louis-Philippe, la duchesse de Rhétoré croisa mademoiselle de Watteville dans une fête de bienfaisance. Dans une seconde rencontre qui eut lieu au bal de l’Opéra, mademoiselle de Watteville démasqua ses noirceurs et innocenta Savarus (Albert Savarus).

Richard (Veuve), femme de Nemours, dont Ursule Mirouet, plus tard vicomtesse de Portenduère, acheta la maison pour l’habiter, après la mort du docteur Minoret, son tuteur (Ursule Mirouet).

Ridal (Fulgence), auteur dramatique, membre du cénacle qui se réunissait chez d’Arthez, rue des Quatre-Vents, sous la Restauration ; raillait les doctrines de Léon Giraud ; masque rabelaisien, caractère insoucieux, paresseux et sceptique, à la fois mélancolique et gai, surnommé par ses amis le Chien du régiment. Fulgence Ridal, lié avec Joseph Bridau, assistait, avec les autres membres du cénacle, à une soirée qui fut donnée par madame veuve Bridau, en 1819, pour célébrer le retour du Texas de son fils Philippe (La Rabouilleuse. — Illusions perdues). En 1845, vieux vaudevilliste très protégé du ministère, il avait la direction d’un théâtre avec Lousteau pour associé (Les Comédiens sans le savoir).

Riffé, expéditionnaire au ministère des finances (direction du personnel), en 1824 (Les Employés).

Rifoël. — V. Vissard (chevalier du).

Riganson, dit le Biffon, dit aussi le Chanoine, formait, avec sa maîtresse la Biffe, un des plus redoutables ménages de la « haute pègre ». — Forçat, il connut Jacques Collin, dit Vautrin, et le revit à la Conciergerie, en mai 1830, lors de l’instruction judiciaire qui suivit la mort d’Esther Gobseck. — Riganson était de petite stature, gros et gras, avait le teint livide, l’œil noir et enfoncé (La Dernière Incarnation de Vautrin).

Rigou (Grégoire) né en 1756, d’abord moine bénédictin. — Il se maria sous la République avec Arsène Pichard, unique héritière du riche curé Niseron ; fit l’usure, devint maire de Blangy, en Bourgogne, et resta dans ses fonctions jusqu’en 1821, époque à laquelle le général de Montcornet le remplaça. À l’arrivée du général, dans le pays, Rigou essaya de se le concilier ; mais, ayant été immédiatement écarté, il devint l’un des plus dangereux ennemis de Montcornet, et forma avec Gaubertin, maire de la Ville-aux-Fayes, et Soudry, maire de Soulanges, un triumvirat qui, soulevant les paysans contre le propriétaire des Aigues, avec la complicité plus ou moins directe de la bourgeoisie locale, amena le général à vendre sa propriété, que se partagèrent les trois associés. Rigou était égoïste, voluptueux et avare : il offrait l’aspect d’un condor. Par un calembour facile, il était souvent appelé Grigou (G. Rigou). « Profond comme un moine, silencieux comme un bénédictin, rusé comme un prêtre, cet homme eût été Tibère à Rome, Richelieu sous Louis XIII, Fouché sous la Convention » (Les Paysans).

Rigou (Madame), née Arsène Pichard, femme du précédent, nièce d’une demoiselle Pichard, qui fut gouvernante-maîtresse du curé Niseron, sous la Révolution, lui succéda dans cette fonction, et hérita, sans partage, du riche prêtre, qu’elle servit avec sa tante. Elle était connue dans sa jeunesse sous le nom de « la belle Arsène » ; elle menait le curé, quoiqu’elle ne sut ni lire ni écrire ; mariée à Rigou, elle devint l’esclave de l’ancien bénédictin, et perdit sa fraîcheur à la Rubens, sa taille magique, ses dents superbes et l’éclat de ses yeux, dans une couche unique, où elle donna naissance à sa fille, mariée, dans la suite, à Soudry fils. Madame Rigou supporta passivement les infidélités constantes de son mari, toujours pourvu de jolies servantes (Les Paysans).

Rivaudoult d’Arschoot, de la branche Dulmen, famille illustre de la Galicie ou Russie-Rouge, dont les Montriveau étaient héritiers par leur bisaïeul et aux titres de laquelle ils pourraient ou ont pu succéder, à défaut d’héritiers directs (Histoire des Treize : la Duchesse de Langeais).

Rivet (Achille), passementier-brodeur, à Paris, rue des Mauvaises-Paroles[6], dans l’ancien hôtel de Langeais, bâti par cette illustre famille au temps où les grands seigneurs se groupaient autour du Louvre. — Il succéda, en 1815, à MM. Pons frères, brodeurs de la Cour, et fut juge au tribunal de commerce. Il employait Lisbeth Fischer, qui se brouilla avec lui, et il rendit quelques services à la vieille fille. Achille Rivet avait un culte pour Louis-Philippe ; le roi était pour lui « la représentation auguste de la classe sur laquelle il fonda sa dynastie ». Il aimait moins les Polonais, qui troublaient l’équilibre européen ; aussi servit-il volontiers la cousine Bette dans la vengeance que sa jalousie lui inspira, un instant, contre Wenceslas Steinbock (La Cousine Bette. — Le Cousin Pons).

Robert, restaurateur à Paris, près de Frascati, chez qui fut donné, au commencement de 1822, pour le baptême du journal royaliste, le Réveil, un repas triomphal, qui dura neuf heures. Théodore Gaillard et Hector Merlin, fondateurs de cette feuille, Nathan et Lucien de Rubempré assistaient au festin, avec Martainville, Auger, Destains et une foule d’auteurs qui « faisaient alors de la monarchie et de la religion ». « Nous nous sommes donné une fameuse culotte monarchique et religieuse ! » dit, sur le seuil de la porte, un des écrivains les plus célèbres de la littérature romantique. Ce mot, devenu historique, parut le lendemain dans le Miroir ; la révélation en fut attribuée faussement à Rubempré, tandis qu’il avait été rapporté par un libraire, invité au repas (Illusions perdues).

Rochefide (Marquis Arthur de), de noblesse assez récente, fut marié par son père, en 1828, avec Béatrix de Casteran, appartenant à la noblesse la plus ancienne ; son père espérait ainsi faire obtenir à son fils la pairie, qu’il n’avait pu obtenir lui-même. La comtesse de Montcornet s’entremit pour ce mariage. Arthur de Rochefide avait servi dans la garde royale ; il était bel homme et sans valeur réelle, passant beaucoup de temps à sa toilette, convaincu de porter un corset, ne déplaisant à personne, parce qu’il adoptait les idées et les sottises de tout le monde ; sa spécialité consistait à faire courir, et il protégeait une revue hippique. Mari abandonné, il était plaint sans devenir ridicule et passait pour un « bon garçon » ; devenu très riche par la mort de son père et de sa sœur, son aînée, mariée au marquis d’Ajuda-Pinto, il hérita d’un hôtel splendide, rue d’Anjou-Saint-Honoré, où il mangeait et couchait rarement, très heureux de n’avoir pas la sujétion et les frais de représentation des gens mariés et au fond, si satisfait d’avoir été délaissé par sa femme, qu’il disait entre amis : « Je suis né coiffé. » Arthur de Rochefide fut longtemps l’entreteneur de madame Schontz, avec laquelle il finit par vivre maritalement et qui soigna, comme son propre enfant, le fils légitime de son amant ; après 1840, elle épousa du Ronceret, tandis qu’Arthur de Rochefide se remettait avec sa femme. Il lui communiqua aussitôt une maladie spéciale que Madame Schontz, par dépit d’être abandonnée, lui avait communiquée à lui-même, ainsi qu’au baron Calyste du Guénic (Béatrix). En 1838, Rochefide assistait à la fête d’inauguration donnée par Josépha dans son hôtel de la rue de la Ville-l’Évêque (La Cousine Bette).

Rochefide (Marquise de), femme du précédent, fille cadette du marquis de Casteran, née Béatrix-Maximilienne-Rose de Casteran, vers 1808, au château de Casteran (département de l’Orne) ; elle y fut élevée puis mariée, en 1828, au marquis Arthur de Rochefide. — Blonde, sèche, coquette et vaniteuse, femme sans cœur et sans tête, c’était une madame d’Espard moins intelligente. Vers 1832, elle quitta son mari pour fuir en Italie avec le musicien Gennaro Conti, qu’elle avait pris à son amie mademoiselle des Touches ; ensuite, se laissa faire la cour par Calyste du Guénic, rencontré près de Guérande chez cette amie, résista d’abord au jeune homme, puis s’abandonna à lui quand il fut marié. Cette liaison désespéra madame du Guénic ; elle cessa après 1840, par suite des habiles manœuvres de l’abbé Brossette, et madame de Rochefide vint rejoindre son mari dans le splendide hôtel de la rue d’Anjou-Saint-Honoré ; mais elle se retira préalablement, avec lui, à Nogent-sur-Marne pour y soigner sa santé compromise par les suites de la reprise de leurs rapports conjugaux. Avant cette réconciliation, elle demeurait à Paris rue de Chartres-du-Roule, près le parc Monceau. La marquise de Rochefide eut, de son mari, un fils longtemps abandonné aux soins de madame Schontz (Béatrix. — Les Secrets de la Princesse de Cadignan). En 1834, devant madame Félix de Vandenesse, éprise du poète Nathan, la marquise Charles de Vandenesse, sa belle-sœur, lady Dudley, mademoiselle des Touches, la marquise d’Espard, madame Moïna de Saint-Héreen et madame de Rochefide exprimaient leurs idées sur l’amour et le mariage. « L’amour est le paradis, disait lady Dudley. — C’est l’enfer ! s’écriait mademoiselle des Touches. — Mais c’est un enfer où l’on aime, répliquait madame de Rochefide ; on a souvent plus de plaisir dans la souffrance que dans le bonheur ; voyez les martyrs ! » (Une Fille d’Ève). L’histoire de Sarrasine lui fut racontée, aux environs de 1830. La marquise connaissait les Lanty, chez qui elle vit le bizarre Zambinella (Sarrasine). Un après-midi de l’année 1836 ou 1837, dans son hôtel de la rue de Chartres, madame de Rochefide écoutait l’histoire du « prince de la bohème » racontée par Nathan ; après ce récit, elle devint folle de La Palférine (Un Prince de la Bohème).

Rochegude (Marquis de), vieux, en 1821, et possédant six cent mille francs de rente, offrait, à cette époque, un coupé à Coralie, qui se vantait de l’avoir refusé, étant « une artiste et non une fille » (Illusions perdues). Ce Rochegude devait être un Rochefide ; c’est probablement une altération d’état civil qui établit entre noms et familles une confusion, réparée par la suite.

Rodolphe, fils naturel d’une spirituelle et charmante Parisienne et d’un gentilhomme brabançon qui mourut avant d’avoir pu assurer l’existence de celle qu’il aimait. — Rodolphe, personnage fictif, est un des héros de l’Ambitieux par amour, nouvelle publiée par Albert Savarus, dans la Revue de l’Est, en 1834, où, sous ce nom supposé, il a raconté ses propres aventures (Albert Savarus).

Roger, général, député, directeur du personnel au ministère de la guerre, en 1841, camarade du baron Hulot depuis trente ans. — Il éclairait, à cette époque, son ami sur sa situation administrative, gravement compromise au moment où il venait demander, pour le sous-chef Marneffe, un avancement nullement mérité, mais rendu possible par la démission de Coquet, chef de bureau (La Cousine Bette).

Rogron, aubergiste à Provins, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et au commencement du XIXe. — Il fut d’abord charretier, épousa la fille du premier lit de M. Auffray, épicier à Provins ; son beau-père mort, il acheta de sa veuve, pour un morceau de pain, la maison du bonhomme et y vécut, retiré des affaires avec sa femme. Il possédait environ deux mille francs de rente, provenant de la location de vingt-sept pièces de terre et des intérêts du prix de son auberge vendue vingt mille francs. Ivrogne, égoïste, devenu avare sur ses vieux jours, fin, d’ailleurs, comme un aubergiste suisse, il éleva grossièrement et sans affection les deux enfants qu’il eut de sa femme, Sylvie et Jérôme-Denis. Il mourut en 1822, alors veuf (Pierrette).

Rogron (Madame), femme du précédent ; fille du premier lit de M. Auffray, épicier à Provins ; sœur du père de madame Lorrain, la mère de Pierrette ; née en 1743, assez laide, mariée dès l’âge de seize ans ; mourut avant son mari (Pierrette).

Rogron (Sylvie), fille aînée des précédents, née, entre 1780 et 1785, à Provins, mise en nourrice à la campagne, envoyée à Paris, dès l’âge de treize ans, comme apprentie, dans une maison de commerce de la rue Saint-Denis. — Elle était, à vingt ans, seconde demoiselle chez Julliard, marchand de soie en bottes au Ver chinois, et, vers la fin de 1815, achetait, avec ses économies et celles de son frère, le fonds de la Sœur de Famille, une des plus fortes maisons de détail en mercerie, alors tenue par madame Guénée. Sylvie et Jérôme-Denis, associés pour l’exploitation de ce fonds, se retirèrent à Provins dès 1823 ; ils y habitèrent la maison de leur père, décédé depuis quelques mois, et y recueillirent leur cousine, la jeune Pierrette Lorrain, orpheline de père et de mère, nature délicate qu’ils traitèrent grossièrement, et qui mourut à la suite d’un acte de brutalité dont elle avait été victime de la part de Sylvie, vieille fille jalouse, recherchée pour sa dot par le colonel Gouraud, et qui se croyait trahie par lui pour Pierrette (Pierrette).

Rogron (Jérôme-Denis), de deux ans moins âgé que sa sœur Sylvie, fut, comme elle, envoyé à Paris, par son père ; dès son plus jeune âge, entra chez un des plus forts marchands merciers de la rue Saint-Denis, la maison Guépin, aux Trois Quenouilles, et en fut le premier commis à dix-huit ans. Associé ensuite avec Sylvie pour l’exploitation du fonds de mercerie de la Sœur de Famille, il se retira avec elle, en 1823, à Provins. — Jérôme-Denis Rogron, homme chétif, d’esprit très borné, était entièrement dirigé par Sylvie, qui avait « du bons sens et le génie de la vente ». Il laissa persécuter Pierrette Lorrain par sa sœur, et, appelé devant le tribunal de Provins, comme responsable de la mort de la jeune fille, se vit acquitté. Dans sa petite ville, Rogron, à l’instigation de l’avocat Vinet, faisait de l’opposition au gouvernement de Charles X ; après 1830, il fut nommé receveur général ; l’ancien libéral, sorti du peuple, disait alors que Louis-Philippe ne serait vraiment roi que quand il pourrait faire des nobles. En 1828, quoique laid et sans intelligence, il avait épousé la belle Bathilde de Chargebœuf, qui lui inspira l’amour insensé des vieillards (Pierrette).

Rogron (Madame Denis), née Bathilde de Chargebœuf, vers 1803, une des plus belles jeunes filles de Troyes, pauvre, noble et ambitieuse, dont son parent l’avocat Vinet avait fait « une petite Catherine de Médicis », et qui se laissa marier par lui à Denis Rogron. Quelques années après ce mariage, elle espérait être veuve à bref délai et pouvoir épouser le général marquis de Montriveau, pair de France, qui lui rendait des soins et commandait le département où Rogron avait une recette (Pierrette).

Roguin, né en 1761 ; pendant vingt-cinq ans, notaire à Paris, était un homme grand et gros, à cheveux noirs, au front très découvert, qui ne manquait pas de physionomie, mais punais. Cette infirmité le perdit : marié à la fille unique du banquier Chevrel, il dégoûta tout de suite sa femme, qui le trompa ; de son côté, il eut des maîtresses payées ; entretint un ménage en ville et fut grugé par Sarah van Gobseck, dite la belle Hollandaise, la mère d’Esther, dont il fit la connaissance vers 1815. En 1818-1819, Roguin gravement compromis par des spéculations indélicates autant que par ses dissipations, disparut de Paris, en ruinant Guillaume Grandet et César Birotteau, mesdames Descoings et Bridau (César Birotteau. — Eugénie Grandet. — La Rabouilleuse). Le notaire Roguin avait eu de sa femme légitime une fille, mariée au président du tribunal de Provins, celle qu’on appelait dans cette ville la belle madame Tiphaine (Pierrette). En 1816, il fit, pour Ginevra di Piombo, des sommations respectueuses au père de cette jeune fille, qui épousa Luigi Porta, l’ennemi de sa famille (La Vendetta).

Roguin (Madame), née Chevrel, entre les années 1770 et 1780 ; fille unique du banquier Chevrel, femme du précédent, cousine de madame Guillaume, du Chat qui pelote, et de quinze ans moins âgée qu’elle ; protégea les amours d’Augustine, fille de sa parente, avec le peintre Sommervieux ; jolie et coquette, fut longtemps la maîtresse du banquier du Tillet ; assista, avec son mari, au célèbre bal donné par César Birotteau le 17 décembre 1818. Elle avait à Nogent-sur-Marne, une maison de campagne qu’elle habitait avec son amant, après la fuite de Roguin (César Birotteau. — La Maison du Chat qui pelote. — Pierrette). En 1815, Caroline Crochard, alors brodeuse, travaillait pour madame Roguin, qui lui faisait attendre le prix de son travail (Une Double Famille). En 1834-1835, madame Roguin, âgée de plus de cinquante ans, avait encore des prétentions et dominait toujours du Tillet, marié, pourtant, à la charmante Marie-Eugénie de Granville (Une Fille d’Ève).

Roguin (Mathilde-Mélanie). — V. Tiphaine (madame).

Romette (La). — V. Paccard (Jéromette).

Ronceret (Du), président du tribunal d’Alençon, sous la Restauration ; était alors un homme grand, sec et mince, au front fuyant, aux cheveux grêles et châtains, aux yeux vairons, aux lèvres serrées. — N’ayant pas été accueilli par la noblesse, il s’était tourné vers la bourgeoisie, et, lors du procès contre Victurnien d’Esgrignon, accusé de faux, il prit parti, tout de suite, contre le jeune homme. Pour faire manquer l’instruction de l’affaire, il s’éloigna d’Alençon ; mais un jugement qui acquittait Victurnien fut rendu pendant son absence. M. du Ronceret manœuvrait en Machiavel, de façon à obtenir, pour son fils Fabien, la main d’une riche héritière de la ville, mademoiselle Blandureau, également recherchée par le juge Blondet pour son fils Joseph ; dans cette lutte, le juge l’emporta sur son chef (La Vieille Fille. — Le Cabinet des Antiques). M. du Ronceret mourut en 1837, président de chambre à la Cour royale de Caen. Les du Ronceret, anoblis sous Louis XV, avaient des armes, avec le mot Servir, pour devise, et le casque d’écuyer (Béatrix).

Ronceret (Madame du), femme du précédent, grande créature solennelle et dégingandée, qui s’affublait des modes les plus ridicules, portait des couleurs vives, se parait excessivement et n’allait jamais au bal sans orner sa tête du turban, alors cher aux Anglaises. Madame du Ronceret recevait chaque semaine et donnait, chaque trimestre, un grand dîner à trois services, tambouriné dans Alençon, où le président essayait de lutter, par une abondance d’avare, avec l’élégance de M. du Bousquier. Dans l’affaire de Victurnien d’Esgrignon, madame du Ronceret, dressée par son mari, excita le substitut Sauvages contre le jeune noble (La vieille Fille. — Le Cabinet des Antiques).

Ronceret (Fabien-Félicien du) ou Duronceret, fils des précédents, né vers 1802, élevé à Alençon ; fut, dans cette ville, le compagnon de plaisirs de Victurnien d’Esgrignon, dont il stimulait les mauvaises dispositions, sur l’instigation de M. du Bousquier (Le Cabinet des Antiques). D’abord juge à Alençon, du Ronceret donna sa démission après la mort de son père et vint à Paris, en 1838, dans l’intention de se pousser par du tapage. Il débuta dans la bohème, où il fut connu sous le nom de l’Héritier, à cause de quelques prodigalités préméditées. Ayant fait la connaissance du journaliste Couture, il fut présenté par lui à madame Schontz, lorette en vogue, lui succéda dans un rez-de-chaussée luxueusement meublé, rue Blanche, et commença sa fortune comme vice-président d’une société horticole : après une séance d’ouverture dans laquelle il prononça un discours fabriqué par Lousteau et payé cinq cents francs, et où il se fit remarquer pour une fleur donnée par le juge Blondet, il obtint la décoration. Plus tard, il épousa madame Schontz, courtisane aspirant à devenir bourgeoise ; Ronceret comptait, par elle, devenir président de Cour et officier de la Légion d’honneur (Béatrix). Achetant un châle pour elle chez M. Fritot, en compagnie de Bixiou, Fabien du Ronceret assistait, vers 1814, à la comédie de la vente du châle Sélim à mistress Noswell (Gaudissart II).

Ronceret (Madame Fabien du), née Joséphine Schiltz, en 1805, femme du précédent ; fille d’un colonel de l’Empire ; orpheline de père et de mère, à neuf ans, elle fut mise à Saint-Denis, par Napoléon, en 1814, et resta dans cette maison d’éducation, comme sous-maîtresse, jusqu’en 1827 ; à cette époque, Joséphine Schiltz, qui était filleule de l’impératrice, aborda la vie aventureuse des courtisanes, à l’exemple de quelques-unes de ses compagnes, comme elle à bout de patience. Elle substitua alors un on à l’il paternel et devint madame Schontz. On la connut aussi sous le pseudonyme de la petite Aurélie. Vive, spirituelle, jolie et instruite, après avoir sacrifié à l’amour vrai, après avoir connu « des écrivains pauvres mais malhonnêtes », après avoir essayé de quelques riches niais, elle fut rencontrée, dans un jour de détresse, à Valentino-Musard[7], par Arthur de Rochefide, qu’elle fanatisa et qui, laissé par sa femme depuis deux ans, contracta avec elle une union libre. Ce faux ménage dura jusqu’au moment où Joséphine Schiltz fut épousée par Fabien du Ronceret. Pour se venger de l’abandon du marquis de Rochefide, elle lui donna une maladie spéciale qu’elle avait fait contracter à Fabien du Ronceret et qui atteignit aussi Calyste du Guénic. Durant sa vie galante, elle avait eu pour rivales, Suzanne de Val-Noble, Fanny Beaupré, Mariette, Antonia, Florine ; elle fut en relations avec Finot, Nathan, Claude Vignon, à qui elle devait probablement son esprit critique, Bixiou, Léon de Lora, Victor de Vernisset, La Palférine, Gobenheim, Vermanton, le philosophe cynique, etc. ; elle espéra même donner sa main à quelques-uns d’entre eux. En 1836, elle demeurait rue Fléchier et était la maîtresse de Lousteau, qu’elle essaya de marier avec Félicie Cardot, fille du notaire ; plus tard, elle appartint à Stidmann. En 1838, elle assistait à la fête d’inauguration donnée par Josépha dans son hôtel de la rue de la Ville-l’Évêque ; en 1840, à une première représentation de l’Ambigu, elle fit la connaissance de madame de la Baudraye, alors en ménage avec Lousteau. Joséphine Schiltz finit « madame la présidente du Ronceret » (Béatrix. — La Muse du Département. — La Cousine Bette. — Les Comédiens sans le savoir).

Ronquerolles (Marquis de), frère de madame de Sérizy, oncle de la comtesse Laginska ; l’un des Treize, et un des meilleurs diplomates du gouvernement de Louis-Philippe, l’ambassadeur le plus habile après le prince de Talleyrand ; servit admirablement Marsay, pendant son court ministère et fut envoyé en Russie (1838) avec une mission secrète. Il était sans héritiers directs, ayant perdu ses deux enfants pendant le choléra de 1832. Il avait été député du centre gauche, sous la Restauration, pour un département de la Bourgogne, où il était propriétaire d’une forêt et d’un château dépendant des Aigues, commune de Blangy. Soudry disait à propos de Gaubertin, l’intendant, chassé par le comte de Montcornet : « Patience ! nous avons pour nous MM. de Soulanges et de Ronquerolles » (La Fausse Maîtresse. — Les Paysans. — Ursule Mirouet). M. de Ronquerolles était l’ami intime du marquis d’Aiglemont ; ils se tutoyaient (La Femme de Trente Ans). Seul, il pénétra le premier amour de Marsay et sut le nom du mari de « Charlotte » (Autre Étude de femme). En 1820, le marquis de Ronquerolles provoqua en duel, dans un bal, à l’Élysée-Bourbon, chez la duchesse de Berry, Auguste de Maulincour, dont Ferragus (Bourignard) avait à se plaindre. Également en qualité de « Treize », Ronquerolles, avec Marsay, aida le général de Montriveau à enlever la duchesse de Langeais du couvent des carmélites déchaussées, où elle s’était réfugiée (Histoire des Treize : Ferragus, chef des Dévorants ; la Duchesse de Langeais). En 1839, il fut le témoin de M. de Rhétoré dans un duel qu’eut ce dernier avec le sculpteur Dorlange-Sallenauve, à propos de Marie Gaston (Le Député d’Arcis). Plus tard, il fit une cour assidue à Luigia, la chanteuse, ancienne gouvernante du même Dorlange-Sallenauve (Le Comte de Sallenauve. — La Famille Beauvisage).

Rosalie, grosse fille fraîche, qui fut femme de chambre de madame de Merret, à Vendôme ; puis, après la mort de sa maîtresse, servante de madame Lepas, aubergiste dans cette ville, et finit par raconter à Horace Bianchon le drame de la Grande Bretèche et les malheurs des Merret (Autre Étude de femme. — La Grande Bretèche).

Rosalie, femme de chambre de madame Moreau, à Presles, en 1822 (Un Début dans la Vie).

Rose, femme de chambre de mademoiselle Armande-Louise-Marie de Chaulieu, en 1823, à l’époque où la jeune fille, sortant des Carmélites de Blois, vint habiter l’hôtel paternel, sur le boulevard des Invalides, à Paris (Mémoires de Deux Jeunes Mariées).

Rosina, Italienne de Messine, femme d’un gentilhomme piémontais, capitaine dans l’armée française, sous l’Empire ; maîtresse du colonel de son mari ; elle périt avec son amant, près de la Bérésina, en 1812, le mari, devenu subitement jaloux, ayant mis le feu à une baraque où elle était couchée avec le colonel (Autre Étude de femme).

Roubaud, né vers 1803 ; docteur de la faculté de Paris, élève de Desplein, exerçait la médecine à Montégnac (Haute-Vienne) sous Louis-Philippe ; petit homme blond, avec une mine assez fade, mais des yeux gris trahissant la profondeur du physiologiste et la ténacité des gens studieux. Roubaud fut présenté à madame Graslin par le curé Bonnet, que désespérait son indifférence religieuse. Le jeune médecin soigna, admira, aima secrètement la femme célèbre du Limousin, et devint subitement catholique, au spectacle de la sainte mort de madame Graslin. Elle le chargea, en mourant, d’être le premier médecin d’un hospice fondé par elle aux Tascherons, près de Montégnac (Le Curé de Village).

Rouget (Docteur) médecin à Issoudun, sous Louis XVI et la République ; né en 1737, mourut en 1805, épousa la plus belle fille de la ville et la rendit, suivant la chronique, très malheureuse. — Il eut d’elle deux enfants, un fils, Jean-Jacques, et, dix ans après, une fille, Agathe, qui devint madame Bridau, dont la naissance le brouilla avec son intime ami le subdélégué Lousteau, attendu que le médecin attribuait, bien à tort, sans doute, la paternité d’Agathe au subdélégué. Ces deux hommes se dirent aussi chacun le père de Maxence Gilet, qui était réellement le fils d’un officier de dragons en garnison à Bourges. Le docteur Rouget, qui passait pour un homme profondément malicieux et point commode, était égoïste et vindicatif. Il éloigna très vite sa fille, qu’il exécrait. Après la mort de sa femme, de son beau-père et de sa belle-mère, il devint assez riche et mena une vie débauchée, mais réglée et exempte de scandales. En 1799, émerveillé de la beauté de la petite « rabouilleuse » Flore Brazier, il l’avait prise chez lui, où elle resta, puis devint la maîtresse, et ensuite la femme de son fils Jean-Jacques, et, pour finir, madame Philippe Bridau, comtesse de Brambourg (La Rabouilleuse).

Rouget (Madame), née Descoings, femme du précédent, fille de riches et avares commissionnaires en laines d’Issoudun, sœur aînée de l’épicier Descoings, qui épousa la veuve du sieur Bixiou et mourut sur l’échafaud avec André Chénier, le 25 juillet 1794. — Assez malingre dans sa jeunesse, célèbre, pourtant, par sa beauté, quand elle se maria, né un peu sotte sans doute, elle passait pour être fort maltraitée par le docteur Rouget, qui put, d’ailleurs, se croire trompé par elle en faveur du subdélégué Lousteau. Madame Rouget, privée de sa fille, qu’elle aimait, et ne rencontrant aucune affection chez son fils, dépérit rapidement et mourut au commencement de l’année 1799, sans laisser de regrets à son mari, qui avait justement « tablé » sur sa mort prématurée (La Rabouilleuse).

Rouget (Jean-Jacques), né à Issoudun en 1768, fils des précédents, frère de madame Bridau et de dix ans son aîné ; sans aucune intelligence ; follement épris de Flore Brazier, qu’il connut tout enfant, chez son père, il fit de cette fille sa servante-maîtresse à la mort du docteur, souffrit qu’elle installât auprès de lui son amant, Maxence Gilet, et finit par l’épouser en 1823, à l’instigation de son neveu Philippe Bridau, qui, ensuite, le conduisit à Paris et prépara savamment la mort rapide du vieillard en le lançant dans la débauche (La Rabouilleuse). Après le décès de J.-J. Rouget, les La Baudraye (de Sancerre) achetèrent une partie de son mobilier et se le firent expédier d’Issoudun sur Anzy, leur château, jadis propriété des Cadignan (La Muse du Département).

Rouget (Madame Jean-Jacques). — V. Bridau (madame Philippe).

Rousse (La), surnom significatif de madame Prélard. — Voir ce dernier nom.

Rousseau conduisait une voiture publique, qui faisait le transport de la recette de Caen, et qui fut attaquée et pillée par les « brigands », au mois de mai 1809, dans le bois du Chesnay, à quelque distance de Mortagne (Orne). — Rousseau, considéré comme le complice des assaillants, fut impliqué dans le procès qui suivit cette affaire ; mais on l’acquitta (L’Envers de l’Histoire contemporaine).

Roustan, Mameluk, au service de Napoléon Bonaparte. — Il accompagnait son maître la veille de la bataille d’Iéna (13 octobre 1806), quand Laurence de Cinq-Cygne et M. de Chargebœuf le virent prenant le cheval de l’empereur, qui mettait pied à terre, un moment avant qu’eux-mêmes pussent aborder Napoléon pour implorer de lui la grâce des Hauteserre et des Simeuse, condamnés comme complices de l’enlèvement du sénateur Malin (Une Ténébreuse Affaire).

Rouville (de). — V. Leseigneur (madame).

Rouvre (Marquis du), père de la comtesse Clémentine Laginska ; dissipa une fortune considérable, à laquelle il avait dû son mariage avec une demoiselle de Ronquerolles. Cette fortune fut en partie dévorée par Florine « une des plus charmantes actrices de Paris » (La Fausse Maîtresse). M. du Rouvre était le beau-frère du comte de Sérizy, qui, lui aussi, avait épousé une Ronquerolles. Marquis sous l’ancien régime, M. du Rouvre fut créé comte et fait chambellan par l’empereur (Un Début dans la Vie). En 1829, M. du Rouvre, ruiné, habitait Nemours ; il avait, près de cette ville, un château qu’il vendit à Minoret-Levrault dans des conditions désastreuses (Ursule Mirouet).

Rouvre (Chevalier du), frère cadet du marquis du Rouvre, bizarre personnage, vieux garçon, s’enrichit en trafiquant sur les terres et sur les maisons, et dut laisser sa fortune à sa nièce, la comtesse Clémentine Laginska (La Fausse Maîtresse. — Ursule Mirouet).

Rouzeau, imprimeur à Angoulême, au XVIIIe siècle ; le prédécesseur et le maître de Jérôme-Nicolas Séchard (Illusions perdues).

Rubempré (Lucien Chardon de) né en 1800, à Angoulême ; fils de Chardon, chirurgien des armées républicaines, qui devint pharmacien dans cette ville, et de mademoiselle de Rubempré, sa femme légitime, descendante d’une très noble famille. — Journaliste, poète, romancier, auteur des Marguerites, recueil de sonnets, et de l’Archer de Charles IX, roman historique. Il brilla un moment dans le salon de madame de Bargeton, née Marie-Louise-Anaïs de Nègrepelisse, qui s’éprit de lui, l’entraîna à Paris et l’abandonna aussitôt, à l’instigation de madame d’Espard, sa cousine ; se lia avec les membres du cénacle de la rue des Quatre-Vents, et particulièrement avec d’Arthez ; fit, d’autre part, la connaissance d’Étienne Lousteau, qui lui révéla les dessous honteux de la vie littéraire, le présenta au célèbre libraire Dauriat et le conduisit à une première représentation du théâtre du Panorama-Dramatique, où le poète vit la charmante Coralie. À première vue, elle s’éprit de lui, et il resta son amant jusqu’à la mort de l’actrice en 1822. Lancé par Lousteau dans le journalisme libéral, Lucien de Rubempré passa tout d’un coup dans le camp royaliste et débuta au Réveil, organe ultra, avec l’espoir d’obtenir du roi une ordonnance qui lui attribuât le nom de sa mère. En même temps, il se mit à fréquenter le monde aristocratique et ruina sa maîtresse. Il fut blessé en duel par Michel Chrestien, qui l’avait provoqué pour avoir « éreinté », dans le Réveil, un très beau livre de Daniel d’Arthez. Coralie morte, il partit, sans ressources, pour Angoulême à pied, avec vingt francs que Bérénice, la cousine et la servante de sa maîtresse, avait reçus d’amants de hasard. Il faillit mourir de fatigue et de chagrin, auprès de sa ville natale ; il y retrouva madame de Bargeton, devenue la femme du comte Sixte du Châtelet, préfet de la Charente, conseiller d’État. Accueilli d’abord par un article enthousiaste d’un journal local et par une sérénade de ses jeunes concitoyens, il quitta brusquement Angoulême, avec la pensée du suicide, désespéré d’avoir amené la ruine de son beau-frère David Séchard. Sur la route, il rencontra le chanoine Carlos Herrera (Jacques Collin-Vautrin), qui l’emmena à Paris et se chargea de sa fortune. En 1824, dans une soirée passée au théâtre de la Porte-Saint-Martin, Rubempré fit la rencontre d’Esther van Gobseck, dite la Torpille, alors fille soumise en sortie : le poète et la courtisane s’éprirent mutuellement d’une passion folle. Un peu plus tard, s’étant risqués au dernier bal de l’Opéra de l’hiver 1824, ils y auraient compromis et leur sécurité et leur bonheur, sans l’intervention de Jacques Collin, dit Vautrin et si Lucien ne s’était pas dérobé à certaines curiosités malveillantes, grâce à une promesse de souper chez Lointier[8]. La vie d’ambition et de plaisir de Lucien de Rubempré, aspirant à devenir le gendre des Grandlieu, accueilli des Rabourdin, protecteur de Savinien de Portenduère, amant de mesdames de Maufrigneuse et de Sérizy, aimé de Lydie Peyrade, se termina à la Conciergerie, où il fut détenu, comme auteur ou complice de la mort d’Esther et des vols commis chez elle, crimes dont il était innocent ; il se pendit dans sa prison, le 15 mai 1830 (Illusions perdues. — Les Employés. — Ursule Mirouet. — Splendeurs et Misères des Courtisanes). Lucien de Rubempré habita successivement à Paris l’hôtel du Gaillard-Bois, rue de l’Échelle, une chambre au quartier Latin, hôtel et rue de Cluny[9], un logement rue Charlot, un autre rue de la Lune, en compagnie de Coralie, un petit appartement rue Cassette, avec Jacques Collin, qui le suivit encore au moins dans l’une de ses deux résidences du quai Malaquais et de la rue Taitbout (ancien logis de Beaudenord et de Caroline de Bellefeuille). Il repose au Père-Lachaise, dans un magnifique monument qui contient aussi les restes d’Esther Gobseck et où se trouve une case réservée à Jacques Collin. — On a de Lucien de Rubempré, sous le titre de les Passants de Paris, une série d’articles fins et piquants.

Ruffard, dit Arrachelaine, voleur en même temps qu’agent de Bibi-Lupin, chef de la police de sûreté en 1830. — Complice, avec Godet, de l’assassinat des époux Crottat commis par Dannepont, dit la Pouraille (La Dernière Incarnation de Vautrin).

Ruffin, né en 1815, fut le précepteur de Francis Graslin, à partir de 1840. — Ruffin avait la vocation de l’enseignement, possédait de vastes connaissances ; d’une âme excessivement sensible « qui n’excluait pas la sévérité nécessaire à qui veut gouverner un enfant » ; d’une figure agréable, patient et pieux, il fut amené à madame Graslin, de son diocèse, par l’archevêque Dutheil, et eut, pendant neuf ans au moins, la direction du jeune homme confié à ses soins (Le Curé de Village).

Rusticoli. — V. La Palférine (Charles-Édouard Rusticoli de).


  1. Partie actuelle de la rue Saint-Sulpice, comprise entre la rue de Seine et la place Saint-Sulpice ; la fraction entre la rue Garancière et la place s’appela, précédemment encore, rue des Aveugles.
  2. La véritable orthographe du nom, relevée sur des pièces authentiques, est Ragouleau et non Ragoulleau.
  3. Il existe une première biographie abrégée d’Eugène de Rastignac, ainsi que le remarque une récente publication de M. S. de Lovenjoul.
  4. Mesdemoiselles de Rastignac sont ici biographiées ensemble, et sous leur nom de jeune fille, car on ignore laquelle des deux épousa Martial de la Roche-Hugon.
  5. Le blason des Restaud était : de gueules à la traverse d’argent accompagnée de quatre écussons d’or chargés chacun d’une croix de sable.
  6. Cette voie, que le prolongement de la rue de Rivoli a fait disparaître, allait de la rue des Lavandières-Sainte-Opportune à la rue des Bourdonnais.
  7. Le Nouveau Cirque occupe actuellement, rue Saint-Honoré, l’emplacement de l’ancien Valentino.
  8. Le restaurant Lointier, situé rue Richelieu, en face de la rue de la Bourse, était fort à la mode vers 1846.
  9. C’est aujourd’hui le « Grand hôtel de Flandre et hôtel de Cluny », 8,  rue Victor Cousin.