Collection complète des œuvres de M. de Florian/Fables/3/Le Parricide
Pour les autres éditions de ce texte, voir Le Parricide.
FABLE XIX
Le Parricide
Un fils avoit tué son père.
Ce crime affreux n’arrive guère
Chez les tigres, les ours ; mais l’homme le commet.
Ce parricide eut l’art de cacher son forfait,
Nul ne le soupçonna : farouche & solitaire,
Il fuyoit les humains, il vivoit dans les bois,
Espérant échapper aux remords comme aux lois.
Certain jour on le vit détruire à coups de pierre
Un malheureux nid de moineaux.
Eh ! Que vous ont fait ces oiseaux ?
Lui demande un passant : pourquoi tant de colère ?
Ce qu’ils m’ont fait ? Répond le criminel :
Ces oisillons menteurs, que confonde le ciel,
Me reprochent d’avoir assassiné mon père.
Le passant le regarde ; il se trouble, il pâlit,
Sur son front son crime se lit :
Conduit devant le juge, il l’avoue & l’expie.
Ô des vertus dernière amie,
Toi qu’on voudroit en vain éviter ou tromper,
Conscience terrible, on ne peut t’échapper !