Collection complète des œuvres de M. de Florian/Fables/1/Les Deux Voyageurs

Pour les autres éditions de ce texte, voir Les Deux Voyageurs.

Fables de FlorianLouis Fauche-BorelVolume 9 (p. 41-42).


FABLE IV.

Les deux Voyageurs.


Le compère Thomas & son ami Lubin
Allaient à pied tous deux à la ville prochaine.
Thomas trouve sur son chemin
Une bourse de louis pleine ;
Il l’empoche aussitôt. Lubin, d’un air content,
Lui dit : Pour nous la bonne aubaine !
- Non, répond Thomas froidement,
Pour nous n’est pas bien dit ; pour moi c’est différent.
Lubin ne souffle mot ; mais en quittant la plaine,
Ils trouvent des voleurs cachés au bois voisin.
Thomas tremblant, & non sans cause,
Dit : Nous sommes perdus ! — Non, lui répond Lubin,
Nous n’est pas le vrai mot ; mais toi c’est autre chose.

Cela dit, il s’échappe à travers le taillis.
Immobile de peur, Thomas est bientôt pris ;
Il tire la bourse & la donne.

Qui ne songe qu’à soi quand sa fortune est bonne
Dans le malheur n’a point d’amis.