Chefs-d’œuvre poétiques des dames françaises/Marseille d’Altoviti

MARSEILLE D’ALTOVITI.


Mademoiselle Marseille d’Altoviti naquit à Aix en 1550. Elle était fille de Philippe d’Altoviti, d’une maison illustre de Florence, premier consul d’Aix, et de Renée de Rieux, baronne de Castellane et de Châteauneuf. Cette demoiselle fut tenue sur les fonts de baptême par la ville de Marseille. Une contestation s’étant élevée entre son père et Henri d’Angoulême, grand-prieur de France et gouverneur de Provence, ils s’attaquèrent tous deux et se poignardèrent.

Marseille d’Altoviti cultiva la poésie assez pour faire voir qu’elle avait le talent de versifier, mais trop peu pour se faire une réputation. Il ne reste d’elle que quelques stances à la louange de Louis Bellaud de la Bellaudière et de Pierre-Paul de Marseille, tous deux restaurateurs de la poésie provençale. Elle mourut à Marseille en 1606.


STANCES.


Nul n’aura dans le ciel partage,
S’il n’a chanté par l’univers
Le rare phœnix de notre âge,
Paul et Bellaud unis en vers.

Mercuriens, disers poëtes,
Enfans des neuf muses chéris,
Je sacre aux lauriers de vos têtes
Deux fleurons de mirthe choisis.

Atropos a voulu dissoudre
Un couple d’amis si très-beau,
Mettant Louis Bellaud en poudre
Sous le froid marbre du tombeau.

Mais de quoi lui sert son envie ?
L’amour a dompté son effort ;
Car Paul lui redonne la vie
Malgré la cruauté du sort.