Catéchisme d’économie politique/1881/18


Texte établi par Charles Comte, Joseph GarnierGuillaumin (p. 111-115).
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CHAPITRE XVIII.

De la source de nos Revenus.


Qu’appelez-vous nos revenus ?

Ce sont les profits qui se renouvellent journellement et sur lesquels vivent les familles, les individus.

Où est la source de nos revenus ?

Elle est dans nos fonds productifs, qui sont nos facultés industrielles, nos capitaux, nos fonds de terre.

Comment une valeur nouvelle sort-elle chaque jour, chaque année, de ces valeurs permanentes ?

L’action de nos fonds productifs attache une utilité à des produits ; cette utilité leur donne de la valeur, et cette valeur compose un revenu aux propriétaires des fonds productifs.

Éclaircissez ce fait par des exemples.

Un cultivateur qui fait naître du blé ne le tire pas du néant ; mais il tire du néant l’utilité, la faculté de nourrir qu’il communique aux matières qui composent le blé. De là une valeur nouvelle mise au monde, une valeur que ce cultivateur doit à ses facultés industrielles, qui sont son intelligence et sa force corporelle ; à sa charrue et à ses animaux de labour, qui font partie de son capital ; à son champ, enfin, qui fait partie de ses fonds de terre. Dès lors le cultivateur peut vivre de son blé, ou de ce qu’il obtient en échange de son blé.

Comment ce cultivateur peut-il se faire un revenu quand il ne possède ni capital, ni terre ?

Il achète alors les services d’un capital et d’un fonds de terre, c’est-à-dire qu’il emprunte de l’argent et loue une ferme, de la même manière qu’il achète les services de ses valets et de ses moissonneurs par le salaire qu’il leur paye ; et sur le revenu total de la ferme, il ne lui reste plus, pour son propre revenu, que les profits de son industrie personnelle.

Que concluez-vous de là ?

Que les services productifs que peuvent rendre une industrie, un capital, un fonds de terre, sont le premier revenu de nos fonds, et que la production n’est qu’un premier échange où nous donnons nos services productifs pour recevoir des produits. Ces produits sont ensuite échangés contre de l’argent, des vivres, des habits, contre toutes les choses dont la nature nous a fait des besoins ou qui peuvent contribuer à la satisfaction de nos goûts.

Les personnes qui ne possèdent point de fonds productifs n’ont donc aucun revenu ?

Non.

Comment vivent-elles ?

Sur le revenu d’autrui.

Dans quels cas le revenu d’une personne est-il plus ou moins grand ?

Il est d’autant plus grand que, dans cet échange des services productifs contre des produits, on obtient une plus grande quantité de produits, c’est-à-dire d’utilité produite, et qu’on donne une moins grande quantité de services productifs.

Éclaircissez cela par un exemple.

Si un arpent de terre donne une fois plus de blé qu’un autre arpent, le revenu du premier est double du revenu de l’autre. Un attelage de la même valeur, qui, dans le même espace de temps, laboure une fois plus de terrain, est un capital qui donne un revenu double de celui d’un autre attelage. Si dans le même nombre de jours, avec un même capital et un même terrain, un cultivateur obtient une fois plus de blé qu’un autre, son revenu industriel est double.

L’augmentation du revenu est le résultat de ce que nous avons nommé les progrès de l’industrie.

Cette augmentation de revenu est-elle toujours au profit de l’auteur de ces progrès ?

Non, pas toujours ; quand un homme est parvenu à obtenir des mêmes fonds productifs une plus grande quantité de produits, si les produits restent au même prix, son revenu est augmenté ; mais si la concurrence le force à baisser ses prix en proportion de l’accroissement de sa production, ce sont les revenus des consommateurs qui en sont accrus.

Comment les revenus des consommateurs sont-ils accrus par la baisse d’un produit ?

Quand l’homme qui consacrait 36 francs de son revenu à l’achat d’un sac de farine n’est plus obligé de le payer que 30 francs, son revenu se trouve accru de 6 francs pour chaque sac de farine qu’il est dans le cas d’acheter, puisqu’il peut employer ces 6 francs à l’achat de tout autre produit.

Le revenu d’une personne peut-il provenir de différentes sources ?

Certainement ; le revenu total de chaque personne se compose de la somme de toutes les valeurs que cette personne retire de l’exercice et de l’emploi de ses facultés industrielles, de ses capitaux et de ses fonds de terre.

De quoi se forme le revenu d’une nation ?

Le revenu d’une nation est la somme de tous les revenus des particuliers qui la composent.

Qu’est-ce que le revenu annuel d’un particulier, d’une nation ?

Ce sont toutes les portions de revenu, tous les profits qu’ils recueillent dans tout le cours d’une année.