Carnet de guerre d’Émile Chollet


E. M. CHOLLET


1er Génie Cie 22/4.


S. P. 514.


11ème Division Coloniale. — A. O.


EM Chollet



Bobine 1
18.1-17 - Ma tente au camp de Salonique
23h --- Prisonnier Bulg. vingt tombes du cimetière Milit.


Femmes Serbes dans un champ près du cimetière Milit.

3 février 17 - Femmes sur une tombe de soldat serbe.
5 " " - au camp de Zentenlik -
9 février - femme dans la Mosquée de Ménidjévarda
10 février - le cantonnement de repos à (...) R. de Vertecop
13 février - à Ostropo - le lac du cantonnement.

Bobine 2
18/2.17 - 1 L'Eglise où l'on cantonne à Pozdès.
2 - Monastir au loin avec les crêtes d'un pin chez les Bulgares. -
3 - Les cuistots
4 - Au chantier
5 - Monastir du chantier
6 - Creuzot
7 - Em. Chollet
8 - Pranon - Creuzot - Moi. -

Bobine 3
1
2
3
4
5
6
7 (...) - Poirier - Pinon - Bruzot
8 Pinon - Bruzot

Bobine 4
1 Monastir (... ...)
2 -----------------
3 (...) de Nigathani
6 Quilis Cantonnement cote 1442
7 Le départ - 6 mai 1917
8 Le nouveau cantonnement près des lignes. -


Camp de Salonique. 23 janvier 1917.

9h. — Hier soir j’ai acheté un répertoire faute d’autre carnet, au bazar lyonnais ; rue Enitia. J’ai l’intention de continuer mon journal interrompu neuf jours.

Hier fut une journée très très froide, j’ai dîné aux projecteurs avec H Clouzat, puis ayant quelques achats à faire, je suis parti à 17h 1/4 au Bazard. J’ai rencontré Guarigues puis Perrier de mon escouade, je leur ai dit de m’attendre un peu puis nous avons fait un tour ensemble. Ayant besoin de papier à lettres (censuré) je vais à la Papeterie Française. Un homme s’y faisait déjà servir justement des boîtes de papier à lettres : on lui en fait voir une de la valeur du 1.45 en France ; le prix ? 4 francs. Je n’en ai pas demandé davantage ! je suis parti, Les Grecs exagèrent… Ensuite, voulant une pile pour ma lampe électrique, nous entrons dans un tout petit magasin (Perier en voulait une aussi !) je demande le prix, 2.50 me répond le Grec, bien entendu je n’en veux pas ; nous sortons : Guarigues dit « on n’a pas tout perdu ». Il a chipé une pile au type ! ça c’est pas mal ! (il faut dire qu’ici c’est normal, ce qui est trop cher, on le vole [illisible] d’ailleurs acceptent ça) Mais le plus rigolo de l’histoire c’est qu’en rentrant Perrier essaye la pile sur sa lampe, et on s’aperçoit que cette pile est noire, elle ne vaut plus rien, ou presque. Le Grec et un sale voleur et Guarigues un voleur volé !…

Ce matin il fait plus beau temps. Le soleil à l’air de vouloir se montrer. Le vaguemestre vient pour ramasser les lettres, j’en envoie à MMes  Livillec et [illisible] (une carte) une lettre à MM. [illisible], une carte à M. [illisible] et une à MMe  [illisible]. Si seulement je recevais des lettres !…

Il y a 4 jours, j’en ai reçu de Mademoiselle Germaine, c’est long !

Hier une de Papa après un Mandat.

15h. — Le vaguemestre n’a pas rapporté de lettre mais j’espère bien que ce soir il m’en rapportera quelques unes. Le temps est splendide, j’écris dehors et n’ai pas du tout froid.

22 h — Je rentre de Salonique. Pas de lettre encore !

J’ai passé la soirée avec Rabusseau et Devenay. (censuré)


Nous avons causé (censuré) de notre famille des changements que nous trouverons à la Maison. Devenay encore pis que Moi, puisqu’il y va bientôt y avoir 4 ans qu’il n’a pas vu les siens.

Comme ma Petite Sœur va être grande, dire qu’Elle va avoir 12 ans le 23 février, dans un mois !

(censuré)

… Et puis j’ai causé de mon pauvre Grand-Cou, comme nous aurions été heureux pourtant de nous revoir je l’aimais tant mon vieux Grand-Père. Je n’ai fini de faire comme lui, moi aussi, j’aurai été combattre hors de France, cher Pipin je le vois encore le jour où je t’ai quitté avant de rejoindre mon régiment, il était bien peiné, ces dernières paroles qu’il m’a dites les voici : « et surtout écoute bien tes chefs. »

Quelques temps après mes Parents m’écrivaient qu’il était mort. Dire que plus jamais je ne le reverrai !… C’est la volonté de Dieu !

Il ne faut pas penser à tout cela, ça affaiblit le moral, et il faut l’avoir très très fort.

Il est 10 h 1/4. Je vais dormir.


24 janvier — 10 h : Encore couché sous la tente, il fait froid ; le soleil aujourd’hui ne veut pas se montrer.

Le vaguemestre vient de passer je lui ai donné mes lettres, il a dit que tantôt, il y aurait du courrier si seulement j’en recevais (censuré)

(censuré) lorsqu’on est couché on n’entend plus de bruit, je met la tête sous ma couverture et je songe, (censuré) me lève pour aller déjeuner.

À 15 h. Je suis allé aux baraquements des Projecteurs pour voir mon copain Felouzat sgt tourner à la section No 1. Quel peinard ! il est là bien tranquille certain soir, son bureau est archi-chauffé, tandis que nous ici on gèle, couchés sur la terre, car la natte de jonc qu’on nous a donné n’existe plus elle est mitée. Enfin !… (censuré) la guerre va bientôt finir, j’en suis sûr. Ce que je voulais ce sont des lettres et malheureusement je n’en reçois pas.

À 17 h je suis allé à Salonique (censuré) acheté une boîte de papier à lettres (censuré). J’ai rencontré Rabusseau à la Tour Blanche à 19 heures, nous avons fait un petit tour ensemble puis sommes allés au « Cristal » boire des bocks et manger des « baisers ».

À 20h1/2, j’ai quitté Rabusseau et j’ai regagné le Camp comme chaque soir à pied, pour une fois je ne me suis pas trompé de chemin, l’autre jour j’ai erré dans le Camp pendant 1/2 heure avant de trouver ma tente, cela n’a rien d’étonnant avec la nuit noire que nous avons.

Voilà 5 ou 6 fois que je rentre seul le soir, ça n’a rien de très drôle, on fait une demie-heure de chemin dans une plaine hérissée de blocs de pierre c’est l’ancien cimetière Israélite, puis tout près sont les marabouts des tziganes, ça n’est pas très rassurant ; enfin depuis que nous sommes ici il n’y a pas eu d’attaques ! Ce qu’il y a de drôle c’est qu’en marchant on laisse une trace de feu sous ses pas, cela vient de l’humidité sur le phosphore des os. Bonne nuit à tous ceux que j’aime !


25 janvier. 9h. Quel sale temps ! La pluie a tombé toute la nuit, et ça continue, ce matin il y avait encore de l’eau dans la tente, j’ai réparé la fuite pendant que l’escouade était partie à la corvée d’eau car il faut l’aller chercher assez loin à une source.

Cette journée va-t-elle m’apporter des lettres ? Je le souhaite de tout mon cœur. (censuré)


Je viens d’envoyer à Mr  Mouton un petit croquis et maintenant j’attends avec impatience le vaguemestre. (censuré)


27 Une seule lettre du 1er janvier de Papa, ce n’est pas beaucoup : sans doute nos lettres vont Elles à notre retour, alors on n’est pas près d’en avoir.

Le soir je suis allé voir Rabusseau à son Hopital. Je suis resté une heure avec lui, comme nous ne partons que après-demain, je le verrai encore demain soir. (censuré)

Je rentre bien au camp, les routes sont dégoûtantes, heureusement il ne tombe plus d’eau.


26 janvier  : 11h. Je ne me suis pas encore levé. J’ai mangé sous la tente, il fait un temps épouvantable, la toile de tente est trempée par la pluie. Nous partons demain. Quelle veine ! Belle promenade !…

Pas eu de lettres non plus ce matin, c’est désespérant !

À l’instant on appele « aux Patates » C’est bien d’être cabot, cela m’évite de mouiller. Ces pauvres bougres ils vont se tremper…

21h30 — Ce soir, j’ai vu Rabusseau comme d’habitude, nous sommes restés ensemble jusqu’à 20h30 — Pour rentrer j’ai eu la lune qui m’éclairait, assez faiblement c’est le commencement. Quelle boue sur la route, je suis tout crotté. (censuré). Pas de lettres de mes parents, celle de Blagnac est du 9. Près de moi Beauvais en a eu 13, je n’ai pas de chance, ce sera peut-être pour demain, je le souhaite bien fort.

Bonne nuit, je vous embrasse tous très très fort.


27 janvier — 13h — ce matin le soleil s’est un peu montré aussi à 11h on a ouvert la tente. j’ai Il court un bruit : Il y a besoin de génie pour travailler à Salonique, le capitaine se débrouille paraît-il pour que le peloton reste ici, c’est ce qui explique pourquoi nous ne sommes pas partis ce matin comme nous devions ; ça aurait dû cela, malheureusement à l’instant on vient de toucher les vivres de réserve, xxxxxxx alors ???

À partir d’aujourd’hui, je numéroterai mes lettres pour rappel xxxxxxx je le noterai dans la marge de ce journal. Nous ne partons pas encore !

Le soir je suis allé voir Rabusseau à Salonique. en allant je suis passé par le village de turcs sortes de tziganes, ils sont toujours en train de s’amuser, quels fainéants ! Les hommes chantent et jouent de la musique pendant que les femmes dans les camps vont mendier du pain et des restes, sales gens ! à mon escouade ils peuvent toujours venir je ne veux pas qu’on leur donne rien ! si j’étais gouverneur d’un pays comme ça, je voudrais qu’on inflige la schlague à tous les hommes qu’on trouverait à ne rien faire qu’à danser. Saligauts !…


Juin — comme chaque soir j’ai passé rue Vinizilos qui est la plus belle de Salonique, c’était une rue couverte sur une partie ; de chaque côté sont des petits magasins turcs où l’on vend des broderies, toutes sorte de colifichets, des cigarettes, dans l’autre partie, de côté du quai les magasins sont à [illisible]. Vu la circulation active dans cette rue, il est interdit aux voitures d’y passer, ce sont des gendarmes anglais qui sont chargés de cette police, ces gardiens de la paix sont vêtus comme les soldats anglais mais avec beaucoup plus de chic (ils sont bougrement plus élégants que nos gendarmes à nous !…) ils portent sur le bras gauche un brassard noir avec deux lettres rouges : M. P. — pour arme un revolver et une cravache, sorte de fouet, ils s’en servent facilement, un cocher turc traînant une belle dame, s’est enfilé dans la rue défendue ; l’anglais court après le fait tourner et lui colle un joli coup de cravache sur le corps, j’ai trouvé ça bien rigolo !…

En rentrant pas encore de lettres, ça commence à m’ennuyer, les camarades en recoivent du 13-14-15-16-17. Je n’ai pas de chance moi !

(censuré)

(censuré)

28 janvier 1917. Dimanche, pour nous comme chaque jour de la semaine. Il est 14h20, nous avons relevé un côté de la tente, car le soleil s’est montré.

Il court des bruits qui m’ont l’air assez sûr : Une note ministérielle dit de renvoyer en France les classes 15.16.17, je voudrais avoir une certitude à ce sujet, évidemment je serais plus près des miens mais cela m’ennuie quand même, j’aimerais mieux rester ici car je crois le danger moins grand que sur le Front Français et puis peut-être que le Capitaine va réussir à faire employer le Peloton à faire des routes près de Salonique, alors ?… (censuré) Mes parents (censuré) aimeraient mieux me savoir ici dans le dernier cas.

J’attends xxxxxxx avec impatience la vérité sur ce point. Je ne sais pas ce soir.

29 janvier 1917 — Ce matin, j’ai comme d’habitude à 6h1/2 (censuré) malheureusement à cette heure il m’a fallu un livre pour m’occuper à faire faire une corvée car je suis de jour avec mon escouade.

Cette idée de retour en France me hante toujours, je suis allé aux projecteurs pour voir Phelouzat. Lui comme fournier a peut-être des « tuyaux » mais il était occupé avec son lieutenant, je vais retourner tout à l’heure… Le Capitaine et le Chef, sont paraît-il, partis à la recherche d’un hangard, c’est sans doute que le Peloton va rester ici, ça serait bête à ce bon moment de quitter la Compagnie !

Il a fait un temps épouvantable, quelle pluie ! les tentes sont traversées mais à l’instant ça s’arrête et le soleil a l’air de vouloir se montrer. Quelle sale boue dehors.

Encore pas de lettres !…

Il est 18 heures, je suis venu pour la première fois dans un grand baraquement aménagé pour écrire.

Il y a de grandes tables, c’est très bien éclairé par des lampes à pétrole en nombre très suffisant. Il y a aussi une bibliothèque et c’est chauffé. On est tranquille, chacun écrit. C’est une bonne idée que celle-là. C’est d’ici que je vais écrire, on est mieux que sous la tente, les genoux au menton !…


30 janvier 1917 — Aujourd’hui continuation du mauvais temps enfin ça s’arrête, je mange sous la tente, je reste couché jusqu’à 14h.

(censuré)

On joue un peu au piquet.

À 14h je me lève pour aller me laver à la fontaine, il ne fait pas chaud du tout ! je pars pour Phalouzet. Il n’est pas question que la Cl 15 reparte en France tant mieux ! Je crois que la Cie va rester ici quelque temps. Çà serait chic !

Pas encore de lettres ;

Le soir je suis allé à Salonique. La nuit est plus claire quoique il ne fasse pas clair de Lune.

Le vent a presque séché la boue des routes.

(censuré)

31 janvier 1917 — Bonne fête Petite Sœur. Je t’embrasse bien fort.

Aujourd’hui rien de nouveau très mauvais temps, cependant la pluie cesse l’après-midi, mais pour reprendre ce soir !…

J’ai la xxxxxxx diarrhée, assez forte, mais je crois que ça ne durera pas.

Il est 12 heures, je suis au Cercle, — Pas encore de lettre aujourd’hui, je n’y comprend plus rien du tout !

Toute la journée, j’ai joué aux cartes, je n’ai rien à lire alors quoi faire ? (censuré )


Je sens venir le cafard cela s’explique, je n’ai pas de nouvelles.

Allons bonne nuit.


1er  février 1917 — Ce matin mauvais temps.

À 10h1/2 j’étais sous la tente en train de manger lorsqu’on m’a apporté deux lettres. (censuré) Mes parents se tourmentent le 15 croyant bientôt avoir de mes nouvelles. Pourtant ils n’ont dû en avoir que vers le 06. (censuré)


Lorsque je suis allé pour Rabusseau à Salonique, nous avons été manger des gâteaux dans la rue Venizilos, puis de la crème sur le quai —

La nuit était très claire, la lune se montrait mais cerclée, le ciel était nuageux, va t-il faire beau temps demain.


2 février 1917. Ce matin, il tombe de l’eau ça n’est pas drôle du tout — Je ne suis pas encore sorti de la tente, que ce matin à 7h et il faisait froid !… Quelle vie nous menons !

Ça commence à être « barbant » si encore il faisait beau temps, ça pourrait aller !

Nous allons y crever là dessous, ! à l’escouade il y en a déjà un qui est malade, et tous tous nous sommes enrhummés.

Ma diarrhée est finie.

Toute la journée il a tombé de l’eau je me suis levé à 17 h pour venir au Cercle où je suis actuellement, quelle saleté dehors, les routes ont l’aspect de rivières de boues liquide verdâtre. — J’avais les pieds gelés je viens de les chauffer au poêle. —

J’ai lu sur « science et Vie » un article assez intéressant sur les « Causes naturelles de la guerre ». Maintenant je vais écrire à mes Parents.

Je n’ai pas eu de lettres aujourd’hui il n’y a pas de courrier.

3 février 1917. — le matin le soleil paraît un peu aussi, je vais ouvrir la tente et laver mon linge, mais ce soir (il est 16h 1/2) il recommence à tomber de l’eau, — sans doute pour ne pas changer !

J’ai fait un petit croquis. Rien de nouveau,
(censuré)
… Aujourd’hui il n’y a pas de courrier.

4 février 1917. Ce matin dimanche, la journée s’annonce splendide, tant mieux, et elle le sera encore davantage si j’ai des lettres car il y a un courrier d’arrivé.

Je suis encore couché, (censuré)

13h30. le soleil s’est caché mais le temps se maintient sans eau.

Je suis heureux, je ne puis dire combien, j’ai deux lettres de Papa. Maman et Marcelle, du 16 et du 22 de Madame Baronnet du 21 et de Germaine du 21 avec des potins, photos. Comme tout le monde est heureux d’avoir reçu ma lettre annonçant ma bonne arrivée, je puis le dire sans honte j’ai pleuré de savoir leur bonheur à Tous.

Décidément c’est une bonne journée ! en écrivant ces lignes, le lieutt Tavernier m’apporte des les photos qu’il a prises de nous tous chez Mme  Liveillac (censuré)

Je vais écrire de suite.


5 février 1917 Ce matin il y a un brouillard très épais, cela annonce du beau temps pour tantôt.

Sur l’« Opinion » on voit de bonnes nouvelles.

En effet, le temps est splendide il fait même très chaud, il est 15 heures. Tout sèche si seulement cela pouvait continuer ; mon vilain rhume va peut-être enfin se passer. Le soir j’irai trouver Rabusseau. Je viens de faire un petit croquis et une photo.

16 heures. À l’instant on nous affirme qu’officiellement l’Amérique a déclaré la guerre à l’Allemagne, tout le monde rayonne.

Il est 21 heures et demie. Je suis allé à Salonique.

Pour revenir j’ai vu clair, car la Lune est splendide

J’ai pensé, à Grand-Mère, je me tourmente cette arrivée subite à Tours ? J’ai peur qu’elle soit souffrante.

(censuré)

Hier le Capitaine l’avait dit, nous avions reçu l’ordre d’aller faire des Baraquements au-dessus de M (censuré) c’est encore plus loin du front de Salonique, tous nous étions heureux xxxxxxx puis ce soir crac !… contre-ordre, à 16 heures : nous partons après-demain sur Monastir, nous sommes moins gais, heureusement que l’Amérique est là !…

Moi qui m’ennuie le plus c’est qu’attendant une certitude au sujet de notre emploi, je vous l’ai écrit hier à Madame et Monsieur Baronnet et à mes Parents, demain il me faudra écrire le contraire, ça va leur faire de la peine.

(censuré)

Allons, je vais dormir au revoir tous ceux que j’aime.


6 février 1917. Ce matin le ciel est vilain, nous xxxxxxx n’avons pas beau temps, dès 7heures on entend les Turcs qui jouent de la musique (si toutefois on peut appeler le bruit qu’ils font musique !) bande de cochons ils ne foutent rien, tout à l’heure ils enverrons leurs femmes nous mendier du pain. Ils feraient mieux de travailler.

Donc c’est décidé départ demain matin aujourd’hui quartier libre de midi½ à 17h½. Le journal apporte de bonnes nouvelles on se prépare gaiement au départ.

Il est 19h je suis au Cercle.

Tantôt je suis allé voir Rabusseau avec qui je suis resté 2 heures, puis je suis revenu au camp où je comptais trouver des lettres, mais, point, un colis de mes Parents que j’attendais en ayant été averti par lettre puis un autre de Germaine, chère petite mignonne, Merci à tous.


J’ai préparé toutes mes affaires pour le départ. Henrique m’a offert de m’en porter un peu car j’en ai beaucoup. Il va donc me porter les conserves de mes Parents et de Germaine. — Que ça va être dur cette marche ! Ensuite !…


7/2 — 17. : Le matin réveil à 4h½, chose bien inutile puisque nous ne sommes partis qu’à huit heures. Nous avons marché 3h½ maintenant c’est la halte. —

J’en ai assez, je suis très fatigué. Nous mangeons montons la toile de tente : je dors quelque heures l’après-midi. Augé se débrouille pour avoir du foin, nous serons mieux que sur la terre.

En venant nous avons traversé le Galicote nous sommes près du camp de Jamli ? [illisible]. (censuré)


Je vous embrasse tous avant de me coucher il est 18 heures.


8/2 — 17 : Départ à 10h½ ce qui fait qu’on a grandement le temps de se préparer, mais quel vent ! jamais je n’en ai vu un pareil, les toiles de tentes sautent, oh là là !… et froid ! Quel froid, je mets mes gants, mon passe-montagne, tout le monde est emmitouflé, c’est le vent qui est froid Sur la route c’est pénible le vent nous emporte il vient de droite, ça ne va pas être drôle, on va faire 20 kilomètres, c’est dur ! Entre les 2e et 3e pause on traverse le Vardar, la plaine est immense, aucune maison ! la plaine est recouverte d’eau, ce sont des ponts-marais, on passe le village de Teprin (avant le Vardar) je suis bien fatigué.

Enfin on arrive, rien de chaud, 1 boîte de singe pour 3 (comme à 10h) et des haricots rouges à l’huile et au vinaigre, pas la peine, le ravitaillement n’est pas arrivé… c’est gai ! La tente est montée, on est pas trop mal je suis allé chercher de l’herbe sèche dans le champ, il givre… je suis fatigué. Au revoir, je vous embrasse tous très très fort.


9 février 1917 : Kilomètre 48, Yémidji-Vardar. Actuellement nous sommes dans une mosquée c’est là que nous allons cantonner. De la main gauche je tiens la bougie qui m’éclaire. Ce matin nous sommes partis du Km 32 à 11h l’étape n’a pas été trop dure quoique je sois fatigué, il tombe de la neige et fait grand froid, l’étape a été relativement courte, demain paraît-il nous allons faire 24 km ça va être très dur !

Dans la mosquée où je suis il n’y a plus rien que les peintures décoratives de la voûte, leur couleur est belle. J’ai été (comme presque tous) voler du foin, pour nous coucher il fait froid, aussi dans le milieu de la salle on fait du feu, je viens de me chauffer et vais vite y retourner il est 19h½ j’ai bien mangé, j’ai acheté des olives vertes (censuré) au revoir je vous embrasse très très fort.

J’écris très mal, je suis couché sur le côté droit !!!


10-11 février 1917 — Aujourd’hui dimanche : nous sommes au repos, j’ai pu écrire, j’étais trop fatigué pour le faire hier.

Nous sommes à quelques deux ou trois km de Vertecope.

Partis de Yénidji-Vardar hier, après une bonne nuit passée dans la Mosquée. Avant de quitter la ville je suis monté dans le Minaret ; pour arriver à l’escalier en pierre, il m’a fallu faire de la gymnastique avec les poutres, car le départ se trouve à 3 ou 4 mètres de terre, et l’escalier en bois qui conduisait au palier n’existe plus ; l’escalier en colimaçon est très dur, il y a 104 marches pour arriver à la galerie, il est inutile de dire si la montée est fatiguante le point de vue est joli on voit toute la campagne couverte de neige, puis je redescend la soupe est là bien que froide est la même ordinaire et il va y avoir 24 km à faire je crois que beaucoup vont caler en route.

Nous voilà partis, le soleil se montre c’est le dégel, la route est très très mauvaise et le sac bien lourd. Heureusement un camarade qui est aux mulets m’a pris ma grosse musette ! Partout ce ne sont que des marais et à bien des endroits la route est recouverte d’eau, on marche un par un sur des gros pavés pour ne pas avoir les pieds trop mouillés il y a 25 à 30 cm d’eau. Les trois premières poses cela va mais après 16 km je suis bien fatigué. Beaucoup s’arrêtent en route, je suis bien fatigué, les épaules surtout me font grand mal, enfin 5e pose, c’est dur pour repartir, on aperçoit quelques baraquements c’est sans doute là que nous allons, car nous devons avoir 1 jour de repos, bien logés dans un pays, je reprends un peu de forces, nous voici dans… le pays. Mais c’est un centre de ravitaillement et c’est tout, là une ambulance, en face un cimetierre, on s’arrête, hélas c’est encore plus loin que nous devons aller à 2 km et même plus : ⁁(ça va faire 27 à 28 km) le nombre des traînards augmente et le froid arrive vite, nous sommes dans la montagne, on cherche des yeux les baraquements qui vont nous abriter mais rien, le Capitaine oblique, on suit ; nous sommes dans un terrain, vaseux, au bout du duquel se trouve une montagne, on va monter la tente sur son flanc, à ce moment beaucoup perdent courage et s’arrêtent, moi je suis exténué, je m’arrête à mi-pente sur une pierre ; on se f… de nous c’est pas possible autrement. Près de moi le major dit « certainement on se paie la tête de quelqu’un ! » — Le terrain est si trempé l’eau est à fleur de terre. Voilà le pays où l’on doit se reposer — c’est honteux mon m/o venu en auto vient me chercher mon sac, je trouve un endroit à peu près on monte la tente, les officiers montent la leur en dessous de la mienne — Il fait très froid on va sûrement y crever si non c’est qu’on est solide !… Voilà la soupe : une boîte de singe pour trois, une grosse sardine pour trois, il n’y a de chaud qu’un plat d’haricots rouge. Toute la nuit il n’a pas fait chaud enfin aujourd’hui le soleil est revenu le temps est beau il va faire chaud jusqu’à 16 heures.

Bien entendu pas de lettres on n’en aura qu’à l’arrivée et on est pas rendu ! je ne me sens pas plus costaud que cela !!! (censuré) je vous embrasse bien tous mes chers aimés, je vais vous écrire au revoir. —


12-13 février 1917. — Nous devons partir à 11 h — à 9h on se lève on monte notre sac puis à 10h la soupe, nous mangeons très bien, soupe à l’oignon, riz et un beau rôti, nous avons 16 km à faire ça ne va pas être long. Nous partons, la route n’est pas excellente et ça monte. Oh ! que c’est dur, beaucoup « plaquent » en route, quelle côte, on franchit on aperçoit Vodina, quatre ou cinq belles cascades qui descendent de la montagne en un même filet, de la ville les premières choses que l’on voit sont les minarets qui se détachent très blanc sur la montagne. Pour arriver dans Vodina il y a une côte terrible enfin nous traversons le pays qui est comme tout le village turc pas très propre, les maisons toujours pareilles avec leurs premier étage en saillie sur le rez de chaussée. En route nous avons croisé le 62e d’infanterie Italien, eux n’ont pas de sac, ce qui n’empêche qui il y a partout des traînards et que trois fois on les dépasse (eux nous passaient à la pose) mais nous arrivons au cantonnement à Vladova bien avant eux, ils n’ont pas l’air très disciplinés ces soldats-là !

Dans Vladova nous allons être bien il n’y a que quelques maisons. Nous cantonnons dans une ancienne grange, il y a bien des courants d’airs mais on remédie à ce mal avec des toiles de tentes. On fait du feu dans le millieu de la pièce avec de vieilles poutres toutes la nuit il durera on est bien. À 17h la soupe, inévitablement on a du « singe » qu’on a fait un peut chauffer, et des haricots, après autour du feu on raconte des histoires. Le s/off de jour vient nous avertir que le lendemain nous partons à 7h car la route va être longue. — Je me couche et dors bien…

Le matin à 6h on se lève Garrigues fait du chocolat avec le cacao que m’a envoyé Mademoiselle Germaine… ensuite c’est le « jus » — À 7h en route. Il tombe de l’eau quel sale temps ! nous sommes en pleine montagne, la neige recouvre les cimes il n’y a pas trop de côtes, nous longeons un grand marais nous devons aller à Quinconne à Midi on en a « mare » xxxxxxx ça commence à monter furieusement beaucoup j’arrête, ce n’est plus qu’une suite d’hommes isolés, on a faim, moi je n’en puis plus, je fait la « pose » ! Au bout de 10 minutes je reprend mon sac et me remet en route en haut de la montagne tous vont arrêtés on va nous donner la soupe, le Capitaine à cheval parti en avant va nous attendre à Ostravo où l’on doit faire la halte, il va en faire une tête ! mais quoi on n’en peut plus. 5h de marche avec un quart de café dans le corps, heureusement que j’avais pris du chocolat !…

Nous mangeons de la soupe et du bouilli à 13h le Capitaine revient : il n’est pas enchanté il voulait nous faire souper à Ostravo.

À une heure et demie on repart, je me sens mieux, et ça monte ça monte toujours encore il nous faut 2h pour arriver, voyez ça d’ici si nous n’avions pas mangé !. !. Il y a contre ordre nous ne cantonnerons pas à Quinconne mais ici à Ortravo le soleil se montre, on établit nos « maisons » sur le bord du lac dans le sable, nous sommes entourés de hautes montagnes couvertes de neige, nous sommes très très bien, pendant que l’escouade monte la tente, moi je fais ma toilette, ça fait du bien — j’ai pris une photo —

En ce moment j’étais à l’ombre de la tente, xxxxxxx l’endroit est très joli, le lac d’Ortravo est entouré de montagne — demain il y a repos, j’en profiterai pour écrire à mes Parents et à Mademois Germaine. Mais ne peut-on pas avoir froid cette nuit ? On entend très bien le canon, nous devons avoir fait xxxxxxx 100 à 120 Km depuis notre départ de Salonique mais continuer c’est fatiguant !

Au revoir Tous je vous embrasse. — J’oubliais de dire que l’état des routes est épouvantablement mauvais, ce sont des chemins au milieu des montagnes il y a 20 cm. de boue, quelle saleté c’est je crois une véritable incurie, quel malheur !…


14 Février 1917. — Cette nuit il a fait bien froid. Toute la nuit j’ai souffert de la fraîcheur enfin on nous a mis sous des marabouts nous avons chippé du foin, et dans une boîte nous avons fait du feu, nous sommes, pas trop mal.

Le soleil ne se montre pas. —

À partir de 10 enfin, il y a un service de propreté.

Rien de nouveau, nous partons demain matin à 7h. Il est 13h30 — (censuré)

15 — Nous avons du feu sous le marabout, du bois et du charbon que nous a jeté le chauffeur du train qui vient de passer, j’espère que cette nuit nous la passerons mieux que la dernière ! —


15-16 février 1917. — D’abord aujourd’hui 16, je suis très heureux, j’ai des lettres. —

Hier 15 j’étais de jour avec mon escouade, qui bien tombé il, nous nous occupions des mulets, en donnant un coup de main aux mulitons pour bâter et charger. Nous mettions nos sacs sur les bêtes, ça tombait bien, car il y avait 25 km à faire, mais quand même il y a en quelques un mais : les côtes et il y en a en 25 km. Il n’y avait que 3 bêtes à la cuisine roulante qui pèse plus de 15 000 kgs. Le Capitaine n’a pas su prévoir qu’il fallait davantage de mulets il fallait que des hommes tirent à la corde pour monter la première côte au départ il a fallu 1h½. Il y avait 700 mètres environ !… Le train se composait de la « roulante », d’une voiture à deux roues et d’un char à bœufs. — Nous étions, enfin la 1ère côte, obligés de monter une voiture avec tous les chevaux et mulets et de revenir chercher l’autre, les bœufs ont monté seuls. Heureusement —

Nous sommes arrivés à la [illisible] à 3h½ au lieu de midi, pensez si les

xxxxxxx s’appelle Gomitchovo. Il fait au moins — 17°. brou !!! Les hommes attendaient la soupe !…

Nous sommes repartis à 4h½ et nous avons cantonné à Baritza xx dans une grange, j’ai eu bien froid toute la nuit.

Ce matin, nous sommes partis après la soupe à 11h30, l’étape a été courte.

15 kilomètres, et les routes plates et excellentes nous voici arrivés à [illisible] nous sommes sous des marabouts. Le soleil se montre, il ne fait pas le vent épouvantablement glacé qui soufflait hier dans la montagne.

En arrivant j’ai eu le bonheur d’avoir des lettres de tous, je suis très heureux ! Il est 18h 5’ — je m’arrête et vais écrire demain ce soir les lettres ne partiront pas. Je vous embrasse bien. —


17 février 1917 — ce matin je me suis levé à 9 h — Je n’ai pas eu trop froid —

Nous ne partons que tantôt à 13h30. — Il court toutes sortes de bruits sur ce que l’on doit faire. — On entend très fort le canon, je n’y comprend rien, car on est encore assez loin des lignes. — Il est 12h40 — Un avion boche vient de nous visiter, il a fait un grand tour au dessus de nous, et est reparti en vitesse, pris en chasse par un de nos avions. —

J’attends l’heure du départ, sans savoir que faire, j’ai envie d’écrire, mais j’aime mieux attendre notre arrivée, pour le faire. —

À 13.30 exactement nous partons de chaque côté de la route on voit des petites tranchées, puis à 14h55 on passe la frontière nous voici en Serbie.

Je fatigue beaucoup, surtout de mon pied gauche, à l’avant dernière pose je xx m’arrête et met mon sac dans une voiture, qui malheureusement ne va pas loin, puis je monte dans une auto qui s’arrête presque aussitôt, cela me mène quand même 2 ou 3 km et je rejoins la Cie. à 17.1/2 nous arrivons au cantonnement du 1er  Peloton, nous mangeons, je revois quelques camarades puis l’on touche des distributions, car l’on va faire la soupe par escouade, on va à huit kilomètres de là d’ici, faire un abri pour un général, nous devenons 4e section la 25 devient 3e. et va faire des routes d’un autre côté, le 1er  Peloton, continue son travail ici. Nous allons donc être dispersés. — Nous partons à la nuit car les Bulgares voient tout. Dans la plaine la route est pénible, de la boue jusqu’à mi jambe. — Enfin nous arrivons très fatigués on va être bien cantonnés dans une ancienne Église, on torche un peu de paille — Et je dors. —

Pozdis
18 février 1917. — (Dimanche). J’ai très bien dormi, on a de la chance d’être si bien cantonnés, l’eau est à portée, mais de jour il ne faut pas sortir trop, car les Bulgares sont sur la montagne en face à 7 ou 8 Km. — Le temps est splendide, on installe notre plaque pour la cuisine. Le pays s’appelle Pozdis c’est à 2 ou 3 km à droite de Monastir, ça n’a pas encore été bombardé ! — Autour de l’Église et un cimetière, je suis assis sur la pierre d’une tombe. Le temps est splendide.

Le général de brigade est passé ce matin se promenant seul en Père peinard. Nous verrons bien. — Notre travail se trouve à 100 m. d’ici, nous commençons demain matin avant le jour pour revenir à la nuit, c’est le « cuistôt » qui apporte la soupe. — J’ai reçu hier deux colis, je suis très content, il y avait trois rouleaux de pellicules, je viens de faire une photo — et vais maintenant écrire à mes Parents et à Mr  et Mme  Baronnet. Il est 11 13h 40. — Le ravitaillement m’apporte 2 lettres, je suis heureux.


19 février 1917. — Ce matin on a commencé le travail à 6h il a donc fallu se lever à 5h½, ça été dur, on avait plus l’habitude de se lever de si bonne heure.

Le travail est à 50m d’ici, tout simple jusqu’à présent, mais il se compliquera un peu par la suite, j comme caporal, je ne fais rien que parler de travail avec le s/off et faire travailler les hommes, on ne voit pas clair, demain on ne commencera qu’à 6h½ — à 10h½ on revient à la soupe puis à 13h travail jusqu’à 16 17h30 — xxxxxxx pendant le repos les hommes ont fait une table très bien pour manger avec une large pierre tombale sur xxxxxxx quatre pieds en bois. —

Le tantôt tout en m’occupant du travail je me suis fait un lit avec des planches, puis j’ai appris que j’allais être nommé s/off mais ça m’est déjà arrivé une fois cela !… (censuré)


xxxxxxx On n’entend pas un bruit de canon, ça n’est pas ordinaire.

J’espère que le ravitaillement va m’apporter des lettres, ensuite j’irai me coucher et tâcherai de dormir aussi bien que la dernière nuit. Je m’arrête pour me rapprocher du feu, car il fait froid.
(censuré)


20-21-02-17. aujourd’hui Hier, il y a eu un peu d’intérêt dans l’Abri du général. — D’abord : une maison comme celles de par ici, fait en torchis, une charpente primitive très vieille, couverture en tuile, à l’intérieur six pièces, dans les trois dernières on creuse le sol à 1m50 de profondeur, sur toute la longueur, on fait un double mur de [illisible]-à-terre en aménageant l’assise des étais soutenant la charpente ; ce coté-là est fini, il faut en faire autant dans les trois premières pièces, et la charpente repose sur un gros mur de 50 en torchis, le difficile est de démolir le mur sans que la toiture nous dégringole sur la tête, là était l’intérêt : étayer ; et je suis heureux d’avoir imposé mon idée car le s/soff. et un autre cabot voulaient faire autrement que je pensais et (c’est malheureux à dire) alors je suis persuadé que nous aurions tout reçu sur la caboche.

Je suis content de moi et puis le soir j’ai des lettres, je dors très bien.

Aujourd’hui j’ai été chargé de faire une passerelle avec mon escouade et la 14e, j’ai très bien réussi et fait vite, dans la journée cela a été fini. Pas de lettres. (censuré)


22 février 1917. — Aujourd’hui c’est mon jour de repos qui revient tous les 3 jours, c’est chic cela ! donc rien d’intéressant, depuis ce matin de me chauffer et m’embêter, c’est tout ! Je suis resté au lit jusqu’à 8h.(censuré)

À 16 heures, j’apprends une bonne nouvelle ma nommination de Sergent ; je suis content, depuis si longtemps que l’on en parlait — enfin, ça y est le Lt Tavernier, qui n’était pas là au moment, vient à 17h1/2, vient me trouver et m’apprend que je reste à la 4e section avec lui, je suis bien heureux de cela, car j’aurais été très ennuyé d’être affecté ailleurs.

Le cap Lainé me découd un galon de cabot et Breuzot m’en fait coudre un doré qu’il avait de rabiot, c’est chic la solde va changer !… Je suis persuadé de tous les miens seront heureux de ce changement, qui me rendra plus heureux.


23 février 1917. — 24 et 25. — Aujourd’hui 25 ; je n’ai pas écrit ces deux derniers jours, n’ayant rien fait ou vu d’intéressant.

Depuis hier il fait beau soleil l’Après-midi ! ça réchauffe car la nuit il fait très froid mais où nous sommes nous avons chaud, moi je dors comme un Pape. Toujours très bien, ce soir je change de travail je m’occuperai d’une piste, ça sera un peu plus ennuyeux car c’est la nuit de 19 à 2 heures mais je n’aurais pas besoin de toujours y être, c’est le cabot qui reste-là. Je mange maintenant avec mes deux camarades en attendant de manger avec le Lt .

Hier soir j’étais heureux j’ai enfin des lettres une de Papa, une de Marcelle et deux de Mme Baronnet

Aujourd’hui pour la 1re fois depuis près de 6 mois j’ai entendu le sifflement d’un obus — ce sont les Bulgares qui ont bombardé Monastir avec du 210…


26.2.17 et 27 toujours rien de nouveau, cette nuit je me suis fait réveiller à 1h pour aller voir le travail. (censuré)


28.2.17 xxx Cette nuit j’avais dit de me réveiller à 11h, mais j’ai eu la flemme de me lever. Ce matin je suis allé voir le travail, c’était très bien.

Aujourd’hui nous avons commencé à déjeuner en popote c’était très bien.

Le soleil ne s’est pas montré, il tombe même de l’eau, quelle tristesse !

La lettre d’hier soir de Madame Baronnet m’a fait grand plaisir.


1er mars 1917. Aujourd’hui il fait un temps épouvantable la neige a tombé toute la nuit, une couche épaisse en recouvre le sol, qu’est ce que cela va devenir. Nous sommes bien, en popote, hier soir j’ai eu le plaisir de recevoir 3 lettres de mes Parents, une de MMe  Baronnet et une de Mle Germaine, je suis content.


2-3 Mars 1917. La neige a continué à tomber, et tantôt le soleil s’est montré hier et aujourd’hui ce qui fait qu’à terre c’est dégoûtant, la boue commence. Pas de lettre hier, peut-être aujourd’hui, y en aura-t-il, c’est de la faute au mauvais temps. — Aujourd’hui je [illisible], 6 jours de cabot et + de s/off total 21.[illisible] ça commence à être intéressant.

Aujourd’hui j’ai moins froid aux pieds qu’hier oh ! hier, je les avais frigorifiés les pauvres pieds, résultat ; je me suis roulé dans une couverture. (censuré)


4-5-6-7-8 Pendant ces 5 jours il n’y a rien eu d’intéressant, toujours même vie. J’ai beaucoup souffert des dents, puis hier j’ai reçu encore une piqûre contre la typho, ce qui fait qu’aujourd’hui encore je ne suis pas dans mon assiette, hier soir j’ai eu pas mal de fièvre et ce matin j’avais mal de tête mais maintenant c’est passé et mes dents me font moins souffrir. Lettres n’arrivent pas — hier soir j’ai reçu deux colis de mes Parents je suis très heureux mais je trouve un colis trop bien garni, mes Parents sont trop bons.

Depuis quelques jours le temps a changé. Il fait lourd et la nuit on a trop chaud. Aujourd’hui il a plu. Je compte ce soir avoir des lettres. (censuré)


9 et 10 mars 1916. — Aujourd’hui 10 il fait bien mauvais temps, la neige s’est remise à tomber, il fait froid. Quelle scie !… Hier, rien d’intéressant. Aujourd’hui non plus. Je ne sens plus qu’un petit taquinement aux dents et de temps en temps en temps seulement, tant qu’à la piqure c'est passé. Par exemple la nuit les puces m’en font qui sont très ennuyeuses car elles m’empêchent de dormir. J’ai reçu avec plaisir la gazette de l’Atelier. (censuré)

Le Lt Tavernier m’a prêté des livres que j'ai un grand plaisir à lire, depuis le temps ! J’ai vu « le Rêve » de E. Zola et les « Demi-Vierges » de M. Prévost. C’est très bien.

À la Popote toujours très bien ! le Lt  est très gentil et nous rions bien car nous évoquons des manies d’un certain d’entre-nous ! —


11 Mars 1917. Aujourd’hui il fait un temps splendide ça n’est tout de même pas ordinaire !

J’ai reçu hier soir deux lettres de mes Parents et une de Mademoiselle Baronnet, je suis bien content.

Ma bonne Maman m’a écrit quelques lignes, pauvre Maman. Elle a l’air de bien se tourmenter pour moi, comme c’est attendrissant la lettre de sa Maman. Et mademoiselle Germaine aussi Elle m’a fait une lettre bien mignonne.

Ce matin nous avons très bien déjeuner, puis tous les quatre nous sommes allés voir un avion qui avait atterri près de nous, le pilote avait une balle dans l’épaule et le réservoir d’essence troué et encore des égratignures et des trous un peu partout, c’est une chance que l’appareil ne se soit pas enflammé. C’est un boche camouflé aux couleurs Françaises qui a été tiré dessus et notre pilote s’en est aperçu trop tard.

Le bombardement a été assez intense aujourd’hui à la brosse-à-dents et à la cote 1248.

Quel beau temps tout de même ! j’ai mis la table dehors et assis sur une tombe c’est là que j’écris.


12-13. Hier rien de nouveau nous finissons fort l’Abri du général car il doit venir s’installer demain matin à 7h1/2.

Toujours très bien à la Popote, le Lt Tavernier nous a rapporté qu’un commandant d’artillerie qui a des batteries à Léninski, est très pince-sans rire, il dit « chaque jour je leur (les Bulgares) démolit discrètement une maison, comme cela ils ne s’en aperçoivent pas ! » c’est pas mal ce mot !. (censuré)

Aujourd’hui, j’étais de jour, à 6h nous avons été au chantier à 7h1/2 le Général Riou arrivait, il est très content de l’abri il s’est écrié « mais c’est un petit fortin ! » il le trouve même trop bien ; comme il y avait encore qls rondins à mettre sur les [illisible] il n’a pas voulu, disant que ça serait plus utile pour le secteur que pour lui.

Comme Pinon et Lingot sont partis en ballade et le Lt  en reconnaissance, toute la journée je suis seul : Je profite d’être de la (…) enfin pour écrire ces quelques lignes. La journée s’est très bien passée.

Voilà le 3e jour de bombardement des tranchées ennemies, qu’est ce qu’ils prennent les Bulgares ! — 3 avions sont venus se ballader en lançant des bombes, il y a eu des petites émotions mais ils n’ont rien lâché sur nous, il n’y a xx à craindre que les éclats de nos obus bien peu nombreux hélas pour la circonstance d’habitude on fait pourtant mieux que ça mais N. D. D. je me demande ce que foutent nos ajusteurs.

Puis par grosse pièce ils ont bombardé la ligne du chemin de fer — Monastir a trinqué comme à l’habitude — En résumé 1ère journée un peu mouvementée.

xx Je me presse car il faut que j’aille au chantier les hommes retournent au travail, ça leur fait 13h1/2 de travail par jour depuis 5 jours. Va-t-on avoir des refus ? En tous cas ce soir en guise de récompense on a la gnole et ½ quart de vin en moins c’est pas trop mal !… C’est comme un fait exprès à chaque fois que les hommes ont un travail supplémentaire, la ration diminue.

On vient de me remettre une lettre de Petite Sœur et de Mr Ruffech.

Je vous embrasse tous.


14 mars 1917 — Aujourd’hui temps beaucoup moins beau, notre bombardement des tranchées bulgares est arrêté. Rien d’intéressant, je me repose et vais en profiter pour écrire. J’espère ce soir avoir des lettres.

J’ai appris par le Lt  une chose pas ordinaire, ici c’est la 1re  ligne pour l’infanterie, mais pas pour le génie, ce qui fait que nous ne touchons pas la ration forte — ça se passe de commentaire une telle chose !


15.3.17 — Aujourd’hui je suis encore de repos. Il tombe de l’eau j’ai reçu hier une lettre de Madame Baronnet (censuré)

J’ai heureusement de quoi lire, cela passe le temps.

Nous avons aujourd’hui à la popote mangé des crêpes, c’est très chic.


16.3.17 — Je me suis levé ce matin juste pour aller manger, car il fait un temps épouvantable, il pleut et il fait froid.

Hier soir il n’y a pas eu de lettres mais j’espère bien en avoir ce soir.

Après une matinée calme, cet après-midi le canon gronde fort, le bombardement des tranchées bulgares reprend.

Ce soir je vais avec Creuzot à la section travailler sur la route de Monastir à Novak.
(censuré)
Ce matin il est [illisible] un prisonnier.

Sur notre gauche nos troupes ont pris « la brosse à dent », xx en n’ayant eu comme perte que 2 blessés.

Les prisonniers auraient dit que nous avions autant de canons qu’eux de fusils !…


17-18-19-20 — Voilà le quatrième jour que je n’ai rien à dire… ou presque. L’idée générale c’est le contentement. Les affaires marchent très bien, l’ennui, c’est que nous n’avons pas de journaux.

Avant hier nous avons eu 10 œufs à un petit Macédonien pour un morceau de graisse gros comme les deux poings un peu de macaroni et du riz. C’était pas beaucoup pauvre gosse, il nous le faisait bien comprendre. Mes camarades n’ont pas voulu lui donner plus, moi je n’ai pas pu faire autrement que de lui donner une petite pièce et j’avoue que ça n’était pas encore assez.

Nous n’avons plus rien à faire. Je ne sais quel travail nous allons avoir.

Il fait aujourd’hui un temps splendide. Hier soir, j’ai été très heureux. 2 Lettres de mes Parents, une de Madame Baronnet et 2 de Germaine. Je vais leur écrire aujourd’hui. 21.22.23.— Aujourd’hui 23 Mars, nous avons changé de cantonnement, nous sommes certainement beaucoup plus mal.— Le 20 nous avons assisté, hélas impuissants au bombardement par 11 avions du Viro, ça nous a fait une peine très grande et nous avons eu peur pour nos camarades des autres sections, heureusement personne du génie n’a été touché.

Le 23 aucun intérêt, j’ai reçu des lettres de mes Parents.

Hier 22 tout à coup un ordre arrive pour que nous allions cantonner à San Nédéla dans le Monastère, là c’est plus près des lignes et c’est sérieusement bombardé. Les hommes s’équipent et partent par petit groupes. Nous avons regret de quitter Pozdès où nous étions si bien. Tous les 3 nous partons sur les 2 heures et arrivons au Monastère de San Nédéla une heure et demie après. Nous sommes à quelques cent mètres de la ville de Monastir. Un très grand cimetière entoure l’Eglise dans laquelle loge la 3me section, nous la 4me nous cantonnons dans une dépendance au 1er  étage, on entend fort les éclatements aucun n’est encore tombé ici. la nuit je travaille à un boyau et à 1h contre-ordre on cesse le travail on fera autre chose.

Je l’ai déjà dit il nous sommes en bisbille avec le 1er  peloton parti de France avant nous, toujours occupé à l’arrière il part plus en arrière tandis que nous partons plus en avant. C’est le Lt  Comdt la Cie qui fait cela car le Capitaine est évacué. Ces seules phrases me fixerons la mémoire pour plus tard l’histoire est trop longue à raconter…

En arrivant hier soir, j’ai fait un relevé sommaire du bâtiment pour le Général de Division.

Aujourd’hui il faut un temps lourd, le ciel est couvert, je suis tout mal fichu !…

En ce moment les obus sifflent pas mal les éclatements font trembler la maison…

Je vais écrire à mes Parents et à Mademoiselle Germaine. Je vous embrasse tous très fort.


24 Mars 1917.— ici c’est la guerre, c’est moche !

Aujourd’hui, j’ai fait travailler mes hommes de 11h à 17h et ce soir on remet ça. Hier soir à la 3e section il y a eu 2 blessés dont un gravement.

je me sens fatigué, et dire que je ne pourrai me coucher que demain matin ! C’est drôle on se prommène dans le cimetière sans aucune émotion. Une tombe est très ancienne, elle est entourée d’une barrière de bois, il y a un banc, puis sur la pierre tombale, un couvercle de zinc à charnières le lieutenant nous a emmené voir ça c’est pas ordinaire. Il a soulevé le couvercle et l’on voit sous verre, une espèce de tapisserie en jutes et 3 photos de la morte.

Hier soir j’ai reçu une lettre de Papa et de Madame Baronnet. je suis heureux que Monsieur Rabusseau ait averti mes Parents de ma nommination.

je vais profiter d’un peu de temps de libre avant diner pour écrire. Au revoir Chers Tous je vous embrasse très très fort.

25 Mars 1917.— Hier soir je ne suis pas allé au travail c’est Cruzot qui est monté. J’ai dormi à peu près bien. J’ai toujours mal de tête, je ne me sens pas très très costaud.— J’ai reçu deux colis un de Papa et un de Madame Baronnet.

Pourvu que ce soir on ait des lettres et que j’en aies moi — j’en veux de mes Parents, et de Mademoiselle Germaine. Que Dieu m’entende ! 26 Mars.— Aujourd’hui rien de nouveau, pas de lettres hier, va t-on en avoir ce soir. Tout l’après-midi j’ai été avec une équipe pour faire un travail sur une montagne sur le versant face à l’ennemi, qui nous a laissés tranquilles !

Nous avons fait une suspension épatante c’est même un lustre nous avons pris des gouttes de verre à un lustre de l’Eglise, c’est très chic !

Aujourd’hui le bombardement n’a pas été très fort, seulement des gaz asphixiants lancés sur Monastir sont passés par chez nous, sans nous forcer à mettre le masque.


27 mars. Hier soir j’ai eu des lettres de Marcelle, Mlle Germaine et Madame Baronnet. Je suis bien content. Le matin, je suis monté sur la montagne voir le travail, les Bulgares ne tirent pas.

Tantôt je vais enlever le xxxxxxx grillage de mon lit pour mettre des sacs à terre. Il est 9h10. je récrirai tantôt.

Il y a déjà un mois j’ai appris qu’administrativement nous appartenions au 2e Génie si l’on est évacué on rejoint le dépôt de Montpellier.

Il est 17 h je viens de me lever car j’ai dormi un peu, étant de nuit, ce qui ne m’enchante guerre.

A mon réveil, j’ai été tout surpris de voir qu’il tombait de l’eau.

Il y a une batterie de chez nous tout près d’ici, qui ne s’arrête pas de tirer, c’est la vie, quel chahut, ça porte sur le système !…

Je n’ose espérer des lettres ce soir. J’ai appris ce matin que le « H : Viso » et son camarade de route le « Doroté » ont été coulé en Méditérrannée.


28 Mars 1917. Hier soir je suis allé mettre en chantier mes 36 marsouins et l’escouade de sapeurs, il faisait un temps épouvantable, de la pluie en quantité. Puis je suis descendu dîner ; lorsque je suis remonté du chantier les marsouins étaient partis, leur adjudant les avait emmenés, il a bien fait car quoi faire sous une telle chute d’eau ? Il aurait cependant pu m’avertir enfin j’ai pris ça sur moi et j’ai dit au colonel que c’était entendu puis j’ai fait rentrer mes sapeurs.

J’étais trempé ou du moins mon imperméable (heureusement que j’en ai un !) Il faisait nuit très noire je m’étais presque perdu, plusieurs fois je suis tombé dans des trous.

Enfin ça m’a fait coucher à 23h au lieu de 4h du matin.

Le matin le soleil se montre, mais par endroits il y a encore de gros nuages noirs.

Il est 8h45.

Mars. J’ai reçu hier soir une lettre de Papa et de Mlle Germaine 29 mars 1917. Hier je suis allé avec le Lieutenant tavernier à Monastir, c’est la première fois que moi j’y allais. Pauvre ville ! D’abord pour y aller nous passons sur une route sur chaque coté de laquelle il a des pierres. Nous voici en ville, voilà le quartier [illisible], c’est le plus battu par les obus toutes les maisons ne sont plus que ruines et il y a encore des habitants ! Que des gosses surtout, ils jouent dans la rue, là malheureusement comme si de rien n’était. Nous sommes sur les bords du Dragard, les maisons ne valent guère mieux que celles déjà vues. ici une femmes morte, tuée à la porte de sa maison, à demi démolie, là un groupe de femmes et d’enfants, dont quelques unes avec leurs projéniture se détachent pour aller voir les cadavres, elles reviennent en courant.

Plus loin il y a du sang sur le trottoir puis sur la route, partout enfin !

Dans la rue du roi Pierre il y a quelques boutiques à demi ouvertes, j’achète des timbres des cigarettes, puis on va au parc du [illisible] au retour même spectacle, aux coins des rues il y a des marchands accroupis à terre, ils vendent des crayons, gommes, carnets, cigarettes, etc… ici même une vieille femme vend des [illisible], ça ne doit pas rapporter beaucoup !… Au carrefour dangereux, ça tombe dur, les éclats nous sifflent aux oreilles, on est obligé de faire un détour par les champs. Enfin, nous sommes rendus.

Aujourd’hui rien de nouveau le temps est beau, quoique en ce moment il y a de gros nuages.

J’espère des lettres ou au moins des colis pour ce soir. Tout à l’heure il y a eu quelques instants d’émotions, nous étions dans la popote mais en train de lire, les autres jouaient aux cartes. Un sifflement d’obus à sa chute un fort éclatement, tout tremble le plafond s’émiette, le colonel du 34 Colonial qui est au premier crie « aux abris » (ceux qui en ont ça va bien !). Nous courons dans l’Eglise, là on doit être à peu près à l’abri à moins que cela ne tombe dessus. Un second éclatement aussi près mais en avant du Monastère, ça doit être le réglage du tir sur le bâtiment il n’en est heureusement rien, c’est sur la montagne au pied de laquelle nous sommes, que tombent les autres obus, ils ont dû repérer notre ouvrage, et la haut il y a des hommes. Voyant que cela ne tombe pas sur nous je vais derrière le mur voir ; ils tirent bien les cochons, mais il faut faire attention aux pierres et aux éclats ça siffle !…

L’escouade au travail descend, pas un de touché, c’est de la veine. Enfin ils n’ont tiré qu’une dizaine d’obus !


30 mars 1917. Hier soir je suis allé voir les dégâts sur l’abri, c’est très ça été un tir très très précis, le 6e obus a été taper en plein sur le but visé, les saligauds ! Heureusement que les pauvres diables étaient partis au 4e obus.

Et c’est du 150, quels trous ça a fait !…

Nous avons causé de l’attaque, la voilà arrêté il serait un effet du nouveau Monastère. On a eu pas mal de pertes pour rien, c’est triste. Si seulement on pouvait être enfin tranquilles !—

Cette nuit les boches ont lancé des gaz sur Monastir ça revenait ici. à 24 ½ la sentinelle nous a réveillés. 31 Mars. Hier soir j’ai eu une lettre de Papa et de Mademoiselle Germaine. je suis bien content, puis un colis de tabac. Chers Parents ils sont trop gentils.

Aujourd’hui rien de nouveau, on a pêché quelques grenouilles, le cuisinier est en train de les écorcher.


1er-2 et 3 avril 1917. Depuis trois jours il n’y a rien de nouveau, la chaleur devient très forte, trop même, qu’est-ce que cela va devenir !… Aujourd’hui je me décide à dire ce que depuis quelques temps je pense.

Je suis bien déçu hélas ! Quand j’ai été nommé sergent j’étais heureux car je me disais j’aurai peut-être comme camarades des hommes avec qui l’on peut causer, hélas ! trois fois hélas !… Ça n’est pas vrai étant cabot je restais seul, je m’isolais un peu de mon escouade pour penser, maintenant je suis forcé de vivre toujours avec les autres sergents et quelle souffrance, un surtout très prétentieux et malheureusement pour lui très bête, et je souffre rééllement des raisonnements imbéciles qu’ils tiennent, Grand Dieu, vais-je trouver un ami ?


4.5.6. Le 4 et 5 rien de nouveau nous sommes toujours assez tranquilles, les Bulgares ont la politesse de nous tirer autour et non dessus.

Je m’embête ici, il fait chaud et chaque jour je supporte la sottise de mes camarades.

Aujourd’hui c’est vendredi-Saint, les Bulgares ont un peu bombardé, en ce 12/2-17 Germaine.

moment c’est tranquille. Il fait toujours très chaud, le vent se lève, et… la poussière aussi.

Nous n’avons pas de lettres xxxxxxx depuis six jours c’est bougrement long ! Va-t-on en avoir ce soir ? J’ose l’espérer.

D’ici quelques jours je crois que l’on va quitter ce coin, ça n'est pas du luxe ! car les obus tombent tout de même un peu près ! Mais où va-t-on mystère ! Est-ce un autre secteur comme celui-là près des lignes, où l’arrière ?

Je trouve une excuse aux Bulgares lorsqu’ils tirent sur Monastir.

Mais hier ces saligauds là ont lancés des 88 sur les civils qui travaillent dans les champs, et il y en avait énormément groupés au même endroit surtout des femmes, quels cris tous ce monde-là poussait lorsque ça leur a tombé dessus ! il y a eu des gens touchés. — ça c’est dégoûtant car ils se sont bien rendu compte que ça n’étaient pas des soldats.


7 avril. Hier soir deux lettres seulement, de Papa Maman et Marcelle. J’espère ce soir en avoir davantage, et au moins une de Mademoiselle Germaine.

Cette nuit encore, on a annoncé trois morts dans l’Eglise ; tant mieux que l’on parte car ça n’est guère amusant (quoique l’on n’y fasse guère attention) de coucher avec les morts et depuis que nous sommes ici, chaque nuit il n’y en a un. Hier soir pendant que nous dinions les Boches ont bombardé la route et leurs premiers obus ont tapé très près (des 150) à une 30ne de mètres du Monastère, on voyait bien la flamme, quels chahut ils font ces 150 !… heureusement qu’au bout de 5 à 8 coups ils ont rallongé leur tir !…


8-9 Avril… Aujourd’hui c’est Pâques nous avons invité notre vaguemestre à déjeuner, et préparé d’abord un bon déjeuner, la table d’abord a été bien dressée, et chiquement décorée par le tampon de l’adjudant, c’est un fleuriste qui a l’air de s’y connaître, il a mis des fleurs de pêcher et de prunier ainsi que des pâquerettes, au centre était une jardinière (boîte à conserve) très bien arrangée. Le menu était épatant : Ton. Jambonneau. Cuisses de grenouilles sauce Poulette. Escargots à la Bisteck (Bistek c’est le surnom donné au cuisinier) xxxxxxx Epinards aux œufs durs. Chapon rôti. Salade. Soufflé « Wilson ». Ananas au rhum. Confitures. Amandes. Petits Beurre. Le tout hélas arrosé de vin très mauvais. café. Fine Martel ***.

Le matin 9 Avril rien de nouveau, nous partons cette nuit, je ne m’en ressens guère pour porter mon sac le soir, quelle scie les déménagements. Passage en bleu illisible


Nigorami
10 Avril. Nous sommes partis de Ja Nidila à 4 heures, arrivés ici à Nigorani à 8h½ pour repartir demain soir.

J’ai fatigué cependant je ne portais pas mon sac. Nous sommes très bien installés malheureusement pour seulement une nuit.

Il va y avoir grand changement au sujet des « popotes » nous quittons le Lt Tavernier qui mange avec les autres officiers, nous mangerons avec les autres sergents, nous serons certainement moins bien, mais cela va-t-il durer longtemps, peut-être-serons nous encore séparés ?


Crenjeaun ?[illisible]
11-12-13-14.— Nous sommes arrivés avant-hier à Nigokani, ici c’est Crenjeaun nous ne sommes pas trop mal cantonnés au milieu d’une ruine, nous avons trouvé une fondation toute faite sur laquelle nous avons monté la toile de tente. il fait une chaleur épouvantable !

On est au repos, mais il faut faire exercice le matin et théorie le soir, c’est un drôle de repos.

Je reçois pas de lettres ça fait le 5e jour c’est très ennuyeux.


15.16. Hier rien de nouveau, un avion boche est venu survolé le patelin.

Aujourd’hui nous comme chaque jour chaleur épouvantable. Ce matin exercice ce soir revue d’armes, il s’est passé quelque chose que je ne voudrais pas noter pour pas avoir de mauvais souvenir de Tavernier, mais tant pis !… Sous prétexte que la revue n’était pas prête à 14h, le Lt  nous a fait faire l’exercice pendant une heure sous le soleil et les hommes ont été vaccinés à trois heures — tandis qu’ils doivent avoir un repos d’une demie-journée avant le vaccin.—

Nous avons vu Tavernier après qui certainement regrette ce qu’il a fait, mais le mal y est, c’est fini, il y perdra plus qu’il n’y gagnera pour le travail.—


Equilis
17-18 avril 1917. hie Avant hier au soir Pinon et moi sommes allés nous promener dans les montagnes en face, loin de nous douter qu’en arrivant nous allons apprendre que nous changeons de résidence ( ! )

Hier matin réveil à 4h ! pour partir à 6h en Camions automobiles, où va-t-on ? mystère !

Les camions nous laissent à Slivica où nous mangeons. il y a encore une dizaine de km à faire. On ne sait encore où allon nous allons. Là une demie compagnie en muletiers et une Cie de prisonniers nous accompagnent, c’est donc que l’on va faire des routes.

Que nous avons soufferts, la route, là nous sommes en pleine montagne toujours ça monte un vent épouvantable et comme le sol est formé par du sable quelle poussière, c’est épouvantable, des nuages se levaient, on ne se voyait plus les uns les autres, ce que j’ai souffert des yeux !… Nous sommes arrivés à destination à 4h. immédiatement on a monté la tente, nous sommes dans la montagne un plaisir plus de poussière, mais il ne pousse que de la petite herbe et… des rochers.

En arrivant je vais dans une gorge splendide me laver dans le petit ruisseau qui court au fond. Nous sommes à 1050 m d’altitude.

Le matin on commence à faire la route. le vent se lève encore.

Des bruits de départ courent encore est ce le 1er ou le 2e Peloton qui va partir ?

Nous sommes par ici avec les Italiens. Pas de lettres pas de colis. quel ennui !


19-20 Avril 1917.— hier Avant-hier 19 — j’étais de jour ce qui fait que je suis resté toute la journée tranquille au cantonnement.

Hier je suis allé au travail, nous faisons une route sur une crête, avec les Bulgares ce serait du bon travail, quoique en plein rocher, si le vent ne soufflait pas si fort, oh ! quel froid, le tantôt la neige s’est mise à tomber, ça n’est pas drôle ! cela a cependant adouci le temps, dans notre « maison » la nuit, nous n’avons pas trop chaud. nous sommes obligé de manger dedans, dehors il fait trop froid. Encore ni lettres, ni colis.—


20/Avril 1917.— Le matin la neige recouvre le sol, c’est pas rigolo. je me lève pour le rassemblement. Cette nuit on n’a pas eu trop froid, j’ai bien dormi. Comme mes chaussures de marche sont à la réparation, j’ai demandé au lieutenant à rester ici, ce qu’il m’a accordé.

Le matin j’écris à Mademoiselle Germaine et ce soir à Petite Sœur.


22 au 27. Ces 5 derniers jours rien de bien extra-ordi- naire, que le temps. ah, mais cela alors c’est curieux ! On en a eu du très très beau temps pendant deux jours et depuis hier l’eau tombe et la neige sans arrêt. Toutes les « cugnas » sont inondées sauf heureusement la nôtre. Un malgache a eu la [illisible] gelés, ça peut sembler extraordinaire au mois d’Avril en Orient. Heureusement qu’il y a 3 jours on a touché le casque colonial en Liège et les costumes kakis ! le 1 er Peloton nous a quitté pour aller sur une autre route un peu plus loin. Nous restons ici avec tous les services de la Cie. Nous faisons popote avec [illisible] c’est moi qui serai chef de popote, mais je n’ai pas encore eu le temps de m’en occuper car Avant-hier, j’ai eu un peu de fièvre. 38°7 hier matin encore 38.3. Le major m’a donné de l’Epica cela m’a fait beaucoup de bien. Je ne me sens plus [illisible] faiblesse.— Je vais écrire tantôt à mes Parents et à Mademoiselle Germaine il y a huit jours que je remet cela et chaque jour je m’[illisible] de n’avoir pu le faire.

28.29.31 Avril. 1er Mai. Rien de nouveau.

Le temps est splendide cela irait bien si le soleil n’était pas si chaud.

J’ai reçu des lettres et un colis je suis bien content.

Avant-hier le soir je suis allé avec Tinon me prommener dans la montagne nous avons vue sur une vue avec [illisible] de rochers, le cadavre d’un Bulgare tombé là pour son pays pauvre diable, il n’y a pas plus que le squelette recouvert des habits. Quels rudes combats il y a dû avoir dans ce coin là, des douilles de balles entourent le cadavre en témoignent éloquemment.

Le matin les avions ennemis vont bombarder heureusement plus loin qu’où nous sommes, ce matin encore 13 sont passés au-dessus de nous mais ce soir les notres aussi nombreux ont été leur rendre la monnaie de leur pièce.

Hier soir Duverney m’a rapporté un appareil photographique, je suis bien content.

J’embrasse bien fort tout ceux que j’aime.

1.2.3 Avril. Passage bleu illisible

Toujours pas de lettres, quel ennui !

Ces trois jours-ci rien de nouveau


4.5.6.7 Avril.— Le temps toujours très chaud ces quelques jours.

Rien de bien nouveau.— En marge reçu colis/2 Passage bleu illisible

Il y a eu un instant d’émotion l’ordre était donné de nous déplacer pour aller en ligne. nous [illisible] fautes hier soir puis à midi contre-ordre nous rentrons à la disposition de l’Armée. pour faire des routes, c’est très chic !

Depuis 3 jours le bombardement de notre part est intense. L’Attaque a dû commencer ce matin.

Je suis de jour, je vais écrire à Tous.


Col de Vatras
8 Mai 1917.— Aujourd’hui, je ne suis plus au même endroit qui lui encore un nouvel ordre.

Hier à midi un cavalier arrive avec un ordre nous enjoignant de nous mettre immédiatement à la disposition de la division, nous devons partir en ligne le soir même, à 19 heures départ.

La Cote où nous sommes est 1442 exactement nous allons monter encore plus haut. Quelle route pénible je suis reellement fatigué « et encore » je n’ai pas de sac !. — Le « Bougre » ! marche très bien. pauvre petite bête.— nous arrivons à minuit, heureusement il fait un beau clair de lune qui nous permet de nous installer à peu près bien.—

Le matin je me lève pour manger à 10 heures. Nous sommes sur le versant d’une montagne, on entend bien le canon, on voit Monastir et la plaine.

On devrait attaquer ce matin (pas nous, la division est en réserve) mais hier soir nous avons rencontré les Russes de la vague d’assaut qui montèrent en 1ère ligne, il avaient leurs fusées et les carrés de toile blancs portés par les signaleurs ils étaient gais tous ces pauvres diables. J’ai eu les mêmes impressions que le 1er Juillet dans la Somme. L’attaque est remise. je viens de trouver une petite pensée je l’enverrai à Mademoiselle Germaine.

Que va t-on faire ici ? nous l’ignorons totalement.


9 Mai 1917.— Le matin le bombardement m’a réveillé, après une accalmie il reprend de plus belle, quel chant en ce moment cela continue mais beaucoup moins fort.

L’Attaque a commencé ce matin, quelle furie dans la plaine sur les lignes.

Pendant que nous déjeunions il a passé une soixantaine de prisonniers, rammenés par des Russes. Ce ne sont rien que des Boches, tous jeunes l’air bien (…), ces saligauds là, ne laissent pas les Bulgares aux points importants.—

Nous ne savons rien ou presque sur les résultats, on a avancé je crois ! —

Quelle chaleur il a fait toute la journée.

Hier soir j’ai une reçu des lettres ou plutôt une lettre de Papa. Je trouve extraordinaire qu’il y ait 21 jours qu’ils sont sans nouvelles, quel sale service. Ce soir j’espère en avoir d’autres.

Nous sommes au milieu des Rochers, quels combats il a dû y avoir par ici, les douilles de cartouches Françaises et Bulgares éparses à terre en témoignent.


10 Mai 1917.— Ce matin au petit jour le bruit de la cannonade m’a réveillé : quel bombardement, puis la mitrailleuse se fait entendre sans arrêt que doit-il se passer ?

Cet après-midi a été très calme. Les avions sont venus comme chaque jour nous visiter, les avions par eux-même ne sont pas très dangereux, puisque ce ne sont pas des appareils de bombardement.— mais le hic c’est que nos [illisible] tirent dessus et que selon notre expression les éclats « nous indiquent… la guerre ? » ce qui n’a rien de très réjouissant ! —

A dix heures chanvois le Vaguemestre est venu nous apporter des colis, j’en avais un de Madame Baronnet, d’excellents chocolats, comme elle est gentille ! Puis chanvois nous a dit que ce soir nous aurions des lettres, aussi j’attends avec impatience le ravitaillement.—


11 Mai 1917.— Le matin grand chahut, l’artillerie remet cela ! — encore attaque, on ne sait encore rien sur ce qui c’est passé — Des blessés passent pauvres diables doivent-ils souffrir dans les caquolets portés par les mulets.—

Les Serbes auraient attaqués ? Le bruit court sérieusement que la 14e et la 15e division vont pour partir en Palestine.

Le temps aujourd’hui a été très mauvais, il a tombé de la grêle, et de la grosse !

En ce moment passent des blessés depuis avant-hier.

13— Rien de nouveau hier, si ce n’est qu’hier soir les Boches ont lancé quelques fusants pas très loin de nous, sans doute vont-ils recommencer ce soir.

J’ai l’impression que nous n’allons pas rester ici bien longtemps maintenant, voilà notre 6e jour de repos — et notre division est en ligne. —

Avant-hier j’ai reçu des lettres de Papa, Marcelle et Madame Baronnet qui est trop gentille, elle m’a abonné aux Annales ! Et puis j’ai reçu aussi la Gazette de l’Atlelier—

J’écris au crayon car mon stylo est cassé, cela m’ennuie bien !


14 Mai 1917 — J’ai réparé comme j’ai pu mon stylo, c’est pas riche, mais l’essentiel c’est qu’il marche !

Aujourd’hui temps splendide.

Calme complet, mais si j’en crois ce que l’on a dit ça va encore chauffer, et cette fois c’est notre division qui va s’appuyer cela !

Le bruit se confirme de notre départ en Palestine. 15 mai 1917.— Aujourd’hui comme chaque jour rien de sensationnel. Huitième jour que nous sommes ici à ne rien faire.

En face de nous se trouve une montagne au sommet duquel est une passe une route, qui est vue de l’ennemi, là passent tous les mulets de ravitaillement des Bulgares tirent à chaque fois que passe un convoi, hier soir ils ont tapé en plein sur cette route pendant que passaient des chevaux portant des obus. ils ont tué un artilleur, blessé un second un autre est paraît-il sourd mnt, quatre chevaux sont crevés.

Pas trop d’avions au dessus de nous aujourd’hui. Toute l’après-midi, j’ai pensé à bien des choses, ce soir, je suis allé faire un tour avec Devernnoy, heureusement que je l’ai ici comme ami, car je m’emmnuyerai sans lui.

Demain j’écrirai — si seulement ce soir on nous apportait des lettres ! —

Je vous embrasse tous.


16 Mai 1917.— Il est 11h40’ ce matin activité de l’aviation, c’est tout.

Le col en face nous à 400 m environ est le col de Vrata.— cote 1442 nous ici sommes en dessous à environ 1200 m d’altitude.

Pas de lettres hier soir, peut-être en aurons-nous ce soir ?

Espèrons-le ! Cégel
17 Mars 1917 — Hier à 17h je tenais le service de jour — j’étais avec Devernoy lorsque le Lt  m’appelle pour me dire que le lendemain (aujourd’hui) il y ? n’? [illisible] aurait [illisible] de grd équipements [illisible] de [illisible]. Je retourne trouver Devernoy, aussitôt le Lt  me rappelle, un ordre arrive, nous devons partir de suite, à 21h nous sommes prêts départ par section. nous retournons en arrière, près d’où nous sommes partis il y a 10 jours. C’est pas ordinaire !…

Aujourd’hui nous nous sommes installés encore une fois cela va durer combien de temps ? Que va-t-on faire ?

Ça m’a tout l’air d’un rassemblement des 11e et 16e divisions. est-ce que le « percho[1] » de Palestine serait vrai ? Tant mieux, pendant que nous y sommes !…

Il tombe deux ? [illisible] bombes ici, xxxxxxx [illisible] un avion en a lancé 3 ça ne m’étonne pas, [illisible] le cantonnement est très important.

Hier soir pas de lettres, je crois qu’il en arrivera ce soir… je le souhaite fort !…

Ici cela s’appelle Cegel

17.18.19.20.— Ces derniers jours rien de nouveau, toujours à Cegel à ne rien faire ou presque.

Très beau temps.

Aujourd’hui, nous avons travaillé à faire une fosse pour enterrer un cheval, le terrain étant très dur, j’ai pétardé, c’est la 1ere fois que je faisais des amorçages, ça a très bien réussi.

Il court beaucoup de « percos[1] » la Palestine on n’en parle presque plus, puis c’était la 18e div. partant Virillegria puis ce soir que les classes 12-14-15-16 vont être renvoyées en France —

Par les journaux j’ai appris avec étonnement le changement du Gal Nivelles pour le Gal Pétain.

J’ai reçu avant hier des lettres il m’en manque, mais parait-il y a un courrier demain soir.

Nous avons réattaqué par ici, Fiasco complet, c’est honteux ! Après les leçons de France pourtant — xxxxxxx L’impression ici c’est un peu l’Armée de Bohémiens.

Dans la journée c’est très chic ? [illisible] et [illisible] aussi, il y a ici trois régiments. le 4 et le 37 colonial et le 157 d'afrique, avec chacun leur musique qui font concert.

Le soir après la soupe je suis allé écouter la musique avec Devernoy.

Je me demande ce que l’on attend ici ? Enfin nous sommes très bien. Les avions boches ne sont pas revenus depuis la veille du jour où nous sommes arrivés.

Demain j’écrirai à mes Parents. Je vous embrasse tous très très fort.

29 Mai 1917 — Toujours rien de neuf. Ce matin j’ai cherché une tortue toute petite je n’en ai pas trouvé. C’est Mothir de ma section qui m’en a donné une que je vais envoyer à Ma Petite Sœur — Elle est encore plus petite que celle que je vais envoyer à Mlle Baronnet.

Il y a quelques jours, la femme de S. est venue par ici en « train spécial » et il y en a pas assez pour le ravitaillement. Quel abus !…


22-23 Mai 1917.— Le bruit court depuis hier que S. serait relevé, — d’autres se sont peut-être aperçu que cela était nécessaire.

On dit que nous allons partir ce soir ou cette nuit, on parlait bien de la Sicile Grèce, mais ce sera parait-il pour l’ancien secteur à R… ? [illisible]. Quelle vie de déménager comme cela tous les huit jours !…

Avant-hier il y avait des lettres. J’espère en avoir encore ce soir.


Slivica et Bukri
24-25-26-27-28-29-30. Hier soir à 20h20 l’ordre de départ arrive, à 21h30 rassemblement départ. Nous allons bivouaquer à Slivica ; nous y arrivons à 2h le 29 route pas trop fatiguante.

Le xxxxxxx29 après-midi, ordre à la 4e section (la mienne) de se rendre à Bukri pour faire l’entourage d’un parc, on ne prend pas le [illisible], car le soir le reste de la Cie doit venir nous rejoindre, en route on apprend que la Cie ne viendra pas, mais retourne près de [illisible] à 3 km d’où nous sommes parti le 24 au soir (cétait pas la peine) donc le 29 à 14 heures nous partons en plein soleil il fait chaud, mais qu’importe ! je suis tellement heureux d’être enfin dans la plaine, là il y a de l’herbe, des champs, ça me parait beau, c’est agréable toujours !… Nous arrivons à 5h à Buki il n'y a que des ruines pas une maison debout mais l’herbe a poussé sur tout cela. elle a plus d’un mètre de haut quels beaux champs de coquelicots, de bleuets !

Il n’y a personne dans ce pays, nous sommes absolument seuls ! c’est près de la Cerra. On s’installe au bord de l’eau.

Nous restons là trois jours (il aurait fallu davantage !)Pêche, chasse ! — tout le monde s’y livrant j’ai mangé une bonne friture, des petits pois, du hérisson.

Nous devions revenir le 28 le soir mais une pluie torrentielle nous ne sommes partis qu’à 2h.

le 29 route très pénible, enfin nous arrivons à 6h au cantonnement de la compagnie encore la montagne ! En arrivant j’ai des lettres, depuis que je suis arrivé j’en ai 4 de mes Parents et 4 de Germaine. je n’ai pas encore écrit, car je travaille, j’ai reçu un programme de concours du Ministère des Beaux Arts, j’écrirais ce soir.

En ce moment je profite d’une averse qui nous a fait rentrer sous la tente (il est 16h nous étions sur la route) Ici on travaille à une route la Cie étant à la disposition de l’armée.


Guilès
31 Mai-1-2-3-4-5 Juin. Très occupé à tout pendant tous mes instants de repos par mon esquisse : c’est pourquoi voilà 6 jours que je n’ai écrit sur ce livre, même il y a quelques jours que je n’ai ni écrit à mes Parents et à la Famille Baronnet. Rien de nouveau pendant ces 6 jours si ce n’est que nous avons adressé des réclamations au Ct de Cie qui platement ? [illisible] est venu nous renvoyer dans notre popote et nous a accordé une partie de ce que nous demandions justement. C’est la [illisible] Cie. — Le Capt à besoin de revenir.

Ce matin le 1er peloton part à la disposition de la Division — j’ai à faire la popote.


6-7-8-9-10 — Après le 1er Peloton, la 2e section est partie. Nous voilà donc seul ici avec le Lt Tavernier nous sommes très bien et très tranquilles. —

Il fait depuis quelques jours une chaleur épouvantable. —

Le courrier ne vient plus régulièrement rapport à toutes ces séparations, c’est cela le plus ennuyeux —

J’ai pleuré, sitôt couché de revoir en songe, mes Parents et Germaine, je l’aime bien ma petite Amie. — 11 à 19 Juin 1917— Pendant cette période de 9 jours rien d’intéressant, du 11 au 14 il a fait moins chaud le ciel était couvert, mais cela n’a que repris de plus belle ! si bien que j’ai ete malade, samedi soir je n’y tenais plus dans la nuit j’ai souffert le martyre et j’ai parait-il débloquer pas beaucoup heureusement ! La journée du dimanche fut meilleure, aujourd’hui mercredi cela va mieux quoique je souffre toujours un peu dans la tête ! Enfin ! ce sont des inconvénients de pays chauds !…

Les avions reviennent de temps en temps le matin sur les 8h½ ou 9h, et bien entendu nos « as » sont rentrés eux on s’empressent de le faire sitôt que le Boche est visible à l’horizon s’il en reste un ou deux ils mitraillent l’ennemi à 5 km sans doute pour être comme lui hors de portée des balles ! il arrive que parfois (rarement hélàs !) qu’un des nôtres se montre un peu à la hauteur mais il ne s’y fient pas, où sont donc nos as de France ?

J’ai appris avec joie l’abdiquation de Konstantin, très bien notre gouvernement bravo Mr Jonnard[1], mais pourquoi mêle-t-on a toutes ces belles phrases le nom de S… ah ! n.d.D. c’est pas sa place ! on a encore le culot de parler de son Œuvre, quelle Œuvre ? au fait c’est peut-être son mariage avec une jeune infirmière de 50 ans de moins que lui !

Ne pourrait-on contrôler un peu la fameuse A.O.[2] ? — 20-21-22. Je suis complètement rétabli — ce soir j’irai au travail —

A 4h½ la batterie contre-avions qui est près d’ici nous a sonné le réveil, en effet une escadrille Boche est venue bombardé dans les alentours, bien entendu on ne s’est pas levé voir, il fait bon couché le matin ! —

J’ai oublié de dire il y a quelques jours que j’avais mangé de la tortue, c’est pas mauvais, c’est même bon. —

Avant hier soir on s’est aperçu de la disparition du Bougna, on n’a pu le retrouver. —


26 23-24-25-26. — 27.28.— Ces derniers jours rien de nouveau deux fois à 4 heures du matin les avions boches sont venus nous réveiller ils devaient bombarder Ligel. ils sont venus se promener au dessus de nous, et les [illisible] contre avions tiraient à qui mieux mieux le malheur c’est que les obus n’éclatant pas toujours nous tombent dessus ; tout près de nous il en est tombé deux. —

Il courre beaucoup de bruits sur des troubles en France, mais je n’y crois pas trop — Le Grand S… — comme les journaux ont le culot de l’appeler se ballade toujours —

Ces derniers jours j’ai pas mal lu. Hier enfin on a eu quelques lettres j’en avais deux de mes Parents, deux de Mad Germaine et une de Mme Pichart —

J’espère en avoir encore ce soir ou demain. — (29 ?)-30 Juin.1.2 Juillet 1917.— Le 29 xxxxxxx rien de nouveau. mais le 30 au soir l’ordre de départ nous arrive ; nous devons partir xxxxxxx le 1er juillet à 6 heures du matin, en camions automobiles, on ne sait où l’on va, le lieutenant a envoyé au central téléphonique pour faire demander à l’Armée où nous allons : pas de réponse car un orage vient d’éclater et cela gêne la transmission. —

Donc hier matin, la route ! maintenant nous savons où nous allons : à Porodin rejoindre la Cie nous passons par Séferino — Crimjcani, Névollani. Voilà la plaine la verdure c’est chic : en route j’ai passé sous le « voilage » une exclamation qui peut sembler ridicule « oh des arbres » c’est si bon de voir [illisible] à arbres.

Nous voilà à Porodin. Nous apprenons les emplacements de notre [illisible] et escouade après que les avions boches ? [illisible] venaient bombarder les ? [illisible] cantonnements, [illisible] dernière fois une bombe à tomber à quatre vingt mètres de nous ? [illisible] et a tué deux artilleurs et huit [illisible] depuis des tranchées de bombardement car [illisible] presque chaque jour paraît-il qu’ils viennent.

Je monte la tente avec Pinon, nous sommes tristes — Qu’est-on peut faire ? on n’en sais rien nous [illisible] en profite tous trois.-

Il y a deux jours deux avions Français ont été abattus par les boches. —

Le bruit court que nous allons être relevés. est-ce vrai ? nous allons voir. —

Le matin (il est 8 heures) [illisible] les avions ne sont pas venus, mais je sais qu’il y en a sur la routes !…

3 Juillet — Porodin — Hier 24 de nos avions ont été bombarder — Les Boches ne sont pas venus… Hier soir nous avons reçu une xxxxxxx piqûre contre le choléra. — Aujourd’hui je suis allé au travail, nous faisons une route. départ à 4h45. —

Mon avion boche est venu lancer des bombes à 1 ou 2 km d’ici. Nous revenons du travail à 10 h. — Pendant le repas un ordre du colonel arrive d’envoyer une escouade avec un s/off. à Obstrina, c’est moi qui y vais avec mon ancienne escouade = la 14ème

Je suis allé demander des détails au Lt . Riury, cet idiot-là faisait un tric-trac il m'a à peine répondu je n’ai pas de détails : quel malheur de voir cela à [illisible].

l'heure ?[illisible] j'irai le retrouver je vais moi xxxxxxx monter la grosse dent. il commande ou il ne commande pas !


Obstrina.-
4-5 Juillet. — Avant-hier soir je suis venu ici en voiture, pour arriver avant la nuit. Le Lt  ?[illisible] Valdenaire est très gentil c’est surtout jeune officier.

Nous sommes très bien installés.

[Dessin]

J’ai monté ma guitoune seul car j’ai la toile — en voilà le plan nous sommes sous les arbres quel coin charmant ! l’eau de tous les côtés. — C’est frais et vert. le tantôt en pleine chaleur on est abasourdis par le chant des cigales. —

je suis très tranquille — je vais sur le chantier sup. y rester pour roupiller seulement puisque j’ai un caporal

c’est une route à rendre praticable beaucoup de pétardements à faire aujourd’hui enfin nous avons un des lettres, mais il en manque beaucoup. —


6.7.8.9.10 juillet.1917.— Depuis ces 5 jours rien de nouveau, sinon qu’avant-hier nous avons fait venir des œufs de Fluvina, ce qui fait que nous avons mangé une ommelette maous-poil-poil : ça fait plaisir cela.

Voilà le 5e jour sans lettre. peut-être en aurons-nous demain, je l’espère bien fort.

Ici nous sommes toujours très très bien, si cela pouvait durer seulement quelques semaines !

Je me suis très bien installé, j’ai monté une table dans ma tente, tout le confort moderne quoi !…

Ces deux dernières journées, il a fait très chaud, mais ce soir il fait beaucoup de vent, le temps s’est rafraîchi, il a dû faire de l’orage quelque part. —

Je vous embrasse tous très très fort. —

11.12.13. Obstrilla. — Toujours même travail, chercher toujours de mieux en mieux installé : j’ai monté ma table dans ma tente, quel luxe !

Le malheur c’est que je sais bien que le 17 la 4e Section (celle à laquelle j’appartiens) remonte 13/2/17 à Monastir, c’est la fin de la tranquillité. —

J’ai reçu une lettre de Mademoiselle Germaine qui me dit beaucoup s’ennuyer, — cela me chagrinne !

Il y a eu une au moins avant hier et hier.

Il manque quelque lettres,…

Je suis bien heureux que ma petite sœur soit reçue au Certificat d’Etudes. — c’est très bien. — Depuis bien longtemps je veux xxxxxxx écrire mes pensées bien intimes au sujet de Mademoiselle Baronnet, il va falloir qu’un de ces jours je le fasse, quand je serai réinstallé. — car le carnet plein je l’enverrai peut-être en France et il faut que mes Parents comprennent pourquoi je parle ainsi de Mademoiselle Germaine…

Tous je vous embrasse de tout mon cœur.

xxxxxxx Il y avait traversant la route un dallo xxxxxxx complètement bouché l’eau ne coulait plus, nous l’avons refait très proprement, ces fainéants de Macédoniens ont trouvé moyen de ne le pas trouvé bien, « trop petit » disent-ils oh ! les saligauds ce qu’ils me dégoûtent, avant ça ne marchait pas ils le laissaient tranquille, maintenant que ça va très bien, ils trouvent a redire. Hier deux fois je les ai chassé et pendant notre absence, ils ont creusé en [illisible] sous les [illisible] pour agrandir, sans s’apercevoir ces imbéciles que tout allait crouler, et en effet cela s’est produit — J’ai ordre de ramasser les premiers sauvages que je verrai toucher au dallo, pour les confier aux gendarmes qui les coffreront quelques jours — Et cela je le ferai de grands cœur ces gens-là me dégoûtent !


probablement Émile Chollet

14 Juillet 1917 — Au moment de partir au travail on nous

apprend qu’il y a infos —+

Ce matin un cabot et un homme de la 13e Esc restés avec la Cie à Porodin, sont venus nous voir, d’après ce qu’ils disent le 17 on monte à Monastir nous ni ne ne seront certainement pas exemptés, c’est dommage ! les deux bougres là nous ont causé de pas mal de choses. J’écrirai maintenant des pensées personnelles en alphabet chiffré, c’est bien plus rigolo !

…long passage chiffré…[illisible]

xxxxxxx pendant le repas au 10e xxxxxxx le brigadier [illisible] nous apprend qu’il y a 1/2 litre de vin supplémentaire — Les hommes s’empressent d’aller le chercher.

En ce moment — il est 9 ? [illisible] heure j’entends les marsouins pousser de grands cris de joie ils ont organisé des jeux pour à l’occasion de la fête nationale. Ce soir ils font un concert. — Plus ça va plus certaines choses me dégoûtent ! Le Lt D… mot chiffré — probablement le nom du lieutenant[illisible] dont j’ai déjà je crois parlé comme d’un parfait abruti devient le COMt 2 mots chiffrés[illisible] il passe Lieutenant à deux galons, çà c’est normal il passe à l’ancienneté, mais ce que je ne comprend pas c’est qu’on lui f…te la Croix de guerre, qu’a-t-il fait ? Rien. Toujours toujours il a été à l’arrière, il ne sait certainement pas ce que c’est qu’une tranchée, non seulement cela, mais il a tout fait pour ne pas aller en ligne, puisqu’il devait pour passer Lt. faire un stage avec la section de chez nous qui est en 1re ligne, mais il s’est débrouillé pour ne pas y aller — N’est-ce pas honteux ! et tout cela (mots cryptés)

15-16 Juillet.— Avant hier soir 14, je suis allé à un concert en plein air, organisé le le 5°. bataillon du 42° colonial C’était très gentil. beaucoup de chansons et monologues très drôles ; puis des patriotiques qui ont eu un grand mais à l’un des deux il y en a un ou deux coups de sifflets, l’auteur revient en scène et comme s’il racontait autre chose « je savais que l’on trouvait des perles dans les huîtres, mais j’ignorais…. je ne savais pas que l’on pouvait trouver un sifflet dans la bouche d’une moule ! — Bonne réplique. Hier 10 lettres, quel bonheur ! 4 de mes Parents — 4 de Mademoiselle Germaine et deux de Madame Baronnet, puis la gazette : Bonne journée.

Toujours rien de nouveau j’attends d’un moment à l’autre l’ordre de rejoindre la section : il y a pourtant encore beaucoup de travail.-

Je suis toujours très bien — Le temps qui s’était rafraîchit se réchauffe. — Beaucoup trop d’ailleurs — ces [illisible] ici toujours les mêmes, [illisible]. Hommes et femmes habillés pareil même formes, même couleur de vêtements ; les femmes pieds nus, les hommes chaussés de vieilles godasses, plusieurs femmes conduites aux champs sous la surveillance d’un homme, les femmes sont à pied et portent les outils agraires, l’homme est souvent — pour ne pas dire toujours — en amazone sur un bourricot. — l’homme a les bras ballants les femmes sont toujours chargées !

Quels feignants ces mâles là !… ils me dégoûtent profondément.-

17-18-19 Juillet.1917 — Nous sommes encore à Obstrina, cela m’étonne fort — Rien de nouveau si ce n’est que chaque jour ils font pendre 2 comprimés de quinine, il y a un service de santé spécial pour venir dans chaque unité faire des analyses pour se rendre compte si tout le monde en prend.— Hier soir, bonne nouvelle ! xxxxxxx le courrier passe ? [illisible] par l’Italie, nous aurons à partir du 20 des lettres 3 fois par semaine ça c’est chic !  !.-


du 20 au 26 Juillet. — les derniers jours rien ! J’ai eu des lettres qui n’ont mis que 10 jours pour venir, même une de P… n’en a mis que 8. — on commence à être mieux mais j’ai été un peu fatigué pendant 2 jours.

La S. Projete s’enfuit d’ici après demain — Enfin hier j’ai été averti de quelques changements — A partir de demain matin j’aurai 100 marsouins, oh ! ironie ! Des 9 travailleurs que j’avais avant, quel changement — J’ai reçu ce soir l’ordre du colonel me disant de rester ici à m’occuper des réparations — il y a un officier comme « conseiller technique » seulement — je n’ai pas de détails réparez la route m’a-t-on dit vous avez la direction générale à moi un pauvre sous/off !!! de s’en débrouiller avec les — C’est plus de travail qu’on ne pense —

Enfin je pense m'en tirer à bien — avec tous les 3 ou 4 jours, les conseils du conseiller technique ! comme au gouvernement quoi.

Ça n’a l’air de rien mais on me [illisible] tout sur le dos ! et bien entendu ce que peut faire un sergent n’est forcément pas toujours bien que voulez-vous que je réponde à ceux qui ont des ficelles sur les manches ?

27 Juillet. 1917. — Plus cela va plus cela me dégoûte, et hélas il y a de quoi : le matin à 6h je vois le s/Lt xxxxxxx marsouin qui m’amène ses 100 hommes mais les outils ne sont pas arrivés, enfin à 9h½ les voilà ! xxxxxxx Quand la division a donné l’ordre de réparer la route on ne s’est pas occupé si il y avait des outils ; on nous envoie donc 40 pelles 40 pioches et c’est tout ! Pour [illisible] c’est maigre ; pas de [illisible], pas de brouettes, pas de [illisible], pas de pistolet à mines[illisible], pas grand chose quoi !

Moi qui xxxxxxx avais fait tout un programme pour avoir les équipes avec le nombre des outils xxxxxxx nécessaires. C’était pas la peine.-

Enfin tantôt je les occuperai quand même — Quel administration !!! C’est malheureux de travailler dans ces conditions là ! 30 Juillet 1917 — Ah ! Un poilu [illisible] encore un coup ! Quel sale climat, on est ici toujours malade et point trop mieux ! Hier matin j’ai pris une purge ça m’a fait du bien. Cette fois je ne me suis pas trop « décollé » comme l’on dit nous autres, c’est.à.dire que je n’ai pas trop maigri mais les autres fois j’avais changé !… on ne se figure pas que ça se voit sur le visage. —

Hier matin pas de fantassins le soir ils sont venus de 16 à 18h aujourd’hui point ; et à partir de demain ils travaillent deux heures le matin et 2h le soir.

Quel scie d’être obligé de travailler dans ces conditions là ! et encore ils n’en font pas lourds ! Ça n’est pas aux marsouins que j’en fais griefs pauvres diables, ils sont ici au repos ce n’est pas pour travailler tout de même — L’autre jour un de leur s/off disait « on sait que notre métier c’est de nous faire casser la g… mais au moi qu’au repos on ne nous fasse pas c. !.» Et c’est bien la vérité. —

Nous ne sommes plus en subsistance aux projecteurs, ces derniers étant partis, nous sommes à la 16/26 c’est la [illisible], parce ce que l’on est mal ravitaillés ! Heureusement qu’il y a par ici des jardins avec des haricots, concombre, potirons !…


31 Juillet. 1e.2.3 Août 1917..
Je suis heureux de recevoir souvent des lettres de Germaine, mais étonné de n’en pas recevoir de mes Parents. Il fait une chaleur épouvantable, 69° c’est quelque chose !. 67

Décidément à la Cie il ne se passe que des choses honteuses, en voici encore une.

J’ai déjà parlé du maître-ouvrier de mon ancienne escouade, qui à nom de ville ? [illisible] avait volé un camarade, et ça n’est pas son coup d’essai, de l’active il a déjà été pris a voler à l’infirmerie : ce type mérite une grave punition, le Lt Tavernier à porté contre lui une plainte en Conseil de guerre ; et cela c’est mérité.— Mais le Rémy lui ne répond pas à Tavernier, cela ne m’étonne pas. à une des lettres de ce dernier Rémy encore se tait, — vous voyez d’ici la bonne éducation du Monsieur, si ce n’est pas honteux donc le voleur est là-bas à Porodin très tranquille pendant un mois. Rémy a arrêté la plainte en conseil de guerre et le voleur ne monte pas en ligne avec sa section, il reste à l’arrière, il a tous les avantages ! mais cela encore ça n’est rien, on l’a cassé [illisible] avec 60 de prison c’est réellement peu mais sans doute est-ce encore trop puisque pour compenser on l’a changé de Cie pour le mettre dans la Cie [illisible] qui reste toujours à l’arrière, il est donc sur maintenant de ne jamais aller en ligne, il est employé comme mécanicien à mon service ici à Obstrina, où il n’y a que des vieux réservistes et des territoriaux lui qui a 22 ans, oh — mais attendez ceci n’est pas tout, il y a 6 jours on lui a remis L’Ordre Serbes « pour la bravoure » !!!…

Il vole ; on l’embusque ; on le décore.

Si ça n’est pas dégoûtant ! — 4.5 Août.— Je reçois des lettres de Mademoiselle Germaine et point de mes Parents ; je n’y comprends rien, j’espère en avoir ce soir.

Aujourd’hui il fait du vent ce qui fait que l’on a moins chaud.— Mais ces derniers jours ça n’était pas tenable.— Les objets que l’on laissait dehors au soleil étaient brûlants à ne pas toucher.-

A la Cie de [illisible] — c’est aussi l’anarchie. quel malheur, on ne va pas avoir les outils demandés ; et que l’on est mal ravitaillés — quelle différence avec les projecteurs. —

J’ai écrit à Paris pour avoir le catalogue de Photo-Plait — je vais me décider à faire venir un appareil de France. Le mien acheté à Salonique étant irréparable.-

Toujours même travail. — Ma section qui était en ligne va être relevé dans la nuit du 6 au 7. —

Tout à l’heure Ferni est venu nous payer le fût ? [illisible]. il apporte en même temps quelques tuyaux : Le Capitaine reviendrait au mois de Septembre — après s’être marié — La Cie prendra les lignes de cette façon — 21 jours en 1re ligne — 21 jours de tranchées de soutien — 21 jours de réserves — 21 jours de repos — Lui est paraît-il en [illisible] peut-être maintenant est-ce décidé.


6. au 16 Août (21h) 10 jours sans écrire quel fainéant je fais ! et pourtant !….. il fait tellement chaud que c’est presque une [illisible]. et puis j’ai écrit pas mal et surtout je relis bien souvent mes lettres ; Il y a 3 jours j’ai enfin reçu la photo de Mademoiselle Germaine, Quelle joie elle est très bien, je suis très très heureux. Comme je le disais tout à l’heure il fait une chaleur extraordinaire et un fléau s’est abattu sur nous= les puces, c’est phénoménal ce qu’il y en a oh-là là ! J’en ai tué hier une 10n aujourd’hui autant, et j’en suis encore couvert la nuit impossible de dormir, ça n’est pas drôle !

Je refais un pont en ce moment c’est assez intéressant — je suis absolument seul pour m’occuper du travail, le lieutenant Delibez vient tous les 4 ou 5 jours et le pôvre n’a pas l’air d’y entendre grand chose — c’est triste !!!

Je ne sais si nous allons finir cet ouvrage car la section remonte en ligne le 20 courant avec le nouvel emploi du temps, pour 9 semaines en ligne ! C’est un peu trop ! J’espère guère rester ici, ou cela m’étonnerais fort. —

Je ne suis pas très en forme… ces derniers temps ; je suis tout patraque ; ici c’est toujours pareil on est souvent malade ; quel climat dur pour nous ! —


22 Août 1917— Décidément je deviens très très paresseux pour écrire sur ce livre, il est vrai que je n’ai pas grand chose à dire.— J’ai eu pas mal de lettres. Je suis content. —

Je suis allé à Poradin dimanche dernier j’ai été très bien reçu par mes camarades — je suis rentré le soir… à pied (7km) le chemin ne m’a pas semblé trop long. —

Les Boches ont mis le feu dans Monastir..

On apprend ces jours-ci de bons communiqués.ici hier il y a eu trois avions boches abattus 2 par batterie contre-avion, un par un aviateur.-

Ma section est montée en ligne hier et pour 67 jours.. moi j’ai honte de mon embusquage !

Les hivernations? pour maladie continuent ici à l’escouade j’ai deux malades. —

J’ai envoyé un mandat de 115fr à Photo-Plait, je leur ai commandé un excellent appareil, pourvu qu’il ne soit pas coulé !…


26/8-17.— 3 pensées.-— L’homme Raisonnable, est ce qu’il peut être.-

— Justice et liberté, au fond de la signification des mots, sont deux ennemis

— L’homme ne peut être entièrement libre de ses actes car il n’est pas juste. —

— Pour l’homme, sont injustices tous les avantages dont d’autres profitent, et cela parce- qu’il les envies — Ils deviennent justes sitôt qu’il est appelé à en profiter.


27/8.17.— Supplique à St Médard.-

Quoique tu ne sois pas mon Patron
Je viens te trouver St Médard
— Car je sais que tu es fort bon —
Pour te supplier sans retard,
de faire sur nous, tomber ton eau
Il fait ici vraiment trop chaud !
Voilà certainement trois mois
Que ne fut mouillé notre toit ;
Nous semons à ne rien faire,
Et partout ça n’est que poussière !

<poem>Tu vois donc sur notre pelure

ce que dois faire cette peinture Allons voyons tu nous oublies ! Vois à genoux chacun supplie. Que faut-il donc faire pour ton plaisir ? Ouvre, du ciel ses cataractes ! Ouvres du ciel ses cataractes Et chacun bénira ton acte. Vieux Saint-Médard lointain [illisible] fuir ?


Voilà la chaleur revenue, çà n’est pas plus rigolo que cela ! Enfin !…

Oh ! et puis avec la nourriture on peut tenir ! depuis bientôt deux mois on a chaque jour à chaque repas des lentilles, puis au moins 1 fois du singe, et c’est tout — C’est très varié !… Il parait qu’il y a des compagnies mieux nourries, ils ont de la veine !…


28.29.30-31 Août — 1er septembre 1917.-
Ces jours-ci nous avons encore eu de grosses chaleurs.

Je suis toujours tout mal fichu, quel triste climat. — Enfin avec septembre j’irai peut-être mieux. —

Mon pont est bientôt fini, je pense donc bientôt rejoindre ma section —

J’ai vu ici Le Lt Tavernier évacué depuis quelques temps pour dysentrie il est bien décollé. —

Le Chef est évacué également en moyenne il faut un homme par jour de la Cie

Je m’amuse à écrire des pensées — que des petites pièces de gosses ? [illisible] pas très bien je le sais mais je les fais telles qu’elles viennent dans les [illisible].


26 Aout.- I Les dirigeants d’un pays soutiennent souvent leurs idées jusqu’au bout, même si elles sont fausses, pour qu’il ne soit pas dit qu’ils se sont trompés, et cela sans s’occuper des souffrances du peuple qui ne tirera pas les avantages proportionnels aux sacrifices nouveaux ! —

II Est-il juste que des Gouvernants partant en croisade pour xxxxxxx La Justice et la Liberté xxxxxxx entraînent avec eux des hommes qui ne partiraient pas s’il n’y étaient forcés ?


28 Aout 1917.— Que d’hommes voient les événements comme ils croient qu’ils se sont passés et vous les racontentent comme s’ils étaient arrivés ainsi !—

Les Puces. —

Dans ce beau pays d’Orient
Tout xxxxxxx est vraiment très épatant !
Surtout depuis qu’il y fait chaud
On sent courir sur sa peau
De charmantes petites bestioles
Qui vous piquent, font des boufioles
Grosses comme des pièces de cent sous !
C’est très agréable pour nous !
Le jour nous les chassons en douce
Quand on en prend c’est vraiment chic

On les écrase entre ses pouces !
Mais la nuit quand elles vous piquent
On tourne xxxxxxx retourne sans cesse
Quand on en serre une sur sa fesse
xxxxxxx Non ! je blague, mais c’est martyr
De ne pas pouvoir dormir !
Et savez-vous d’où cela vient ?
Eh ! Des habitants du patelin !
Les maisons que ces gens habitent
sont de vrais nids à parasites :
L’autre jour près de la rivière
Où les femmes lavent sur les pierres,
m’y asseyant j’ai attrapé
Quatorze puces sans compter précisément ? [illisible]
Je suis sûr d’avoir bien compté
Ne trouvez-vous pas ça charmant ?


2.9.4 Septembre 1917. — Toujours pareil ici, même vie, il me plairait assez de changer enfin de résidence !

L’officier s’en fout… toujours royalement. Je conduis le travail absolument seul. xxxxxxx Ainsi le Ltn m’a dit : « vous employerez les ancienness poutrelles de l’ancien pont » sans s’occuper de ce qu’elles valent, or elles sont inutilisables sauf une. Hier soir je lui ai envoyé une note assez brève croyez-vous qu’il est venu se rendre compte ! Pas du tout ce matin il m’a envoyé un télégramme me laissant libre de prendre des bois de 4m à la scierie = Le pauvre il ne sait même pas les dimensions du pont ! 4m.00 c’est la mesure entre les culées alors les poutres passeront entre. Il me les faut au moins de 5m.25 — Je vais m’arranger. Et alors si moi aussi je m’en fous… ? Dire que l’on en voit que par cet officier à la division !… Quel malheur !…

Depuis quelques jours il fait moins chaud cependant les évacuations continuent —

Va-t’on avoir du courrier ? je sais que non probablement puisqu’il y en a eu avant-hier mais ça ne fais rien j’espère quand même —

Ce que c’est monotone ici !…

Je voudrais bien avoir mon appareil photo — il est sans doute en route pourvu qu’il m’arrive ici ! Cela me distrairait un peu.

Est-ce que le régime lentille peut faire place au régime haricots ? Hier soir on a touché des [illisible]. —

Pensées. — Il n’est pas déshonorant pour un peuple d’Etre vaincu par un autre lorsqu’il s’est loyalement défendu. Le déshonneur existe lorsque pour vaincre son ennemi un peuple emploie des moyens déloyaux et barbares. —


du 5 au 8 Septembre. — Rien de neuf. Tout est vieux, le travail, le temps et malheureusement le fusil !…

Il commence à faire très frais la nuit et malgré cela les jours sont insupportables ; cette nuit je n’avais jamais été si ennuyé ! oh ! mais c’est effrayant — le matin aussi je leur ait fait la chasse et c’était une contre-attaque en règle. Tout a été à l’eau, du caleçon aux couvertures, et j’en ai tué d’autre façon 14 qui revenaient à la surface ! Cette nuit à environ minuit, je me comptais 50 et quelques piqûres grosses comme des pièces de 40 sous, quel martyre je me suis changé et rechangé en linge plusieurs fois, mais c’est comme si j’avais chanté — ou plutôt non car si j’avais chanté elles se seraient peut-être sauvées c’est mon idée car il faudra que j’essaye, tans pis pour les voisins !… —

Je suis arrivé à m’endormir, bien entendu pas tranquillement car ces sales parasites continuaient à se nourrir. —

Avant-hier je suis allé à Rakovo, c’est gentil par là ? —

Il parait que les Russes foutent le camp ils plaquent la Roumanie, quels saligauds ces gens-là ! Les lâches !…

Le Lt Tavernier est venu me voir hier soir il ne va toujours pas mieux, il se plaint de l’ambulance, des soins qu’on lui donne, ou plutôt que l’on ne donne pas — Et dire que le [illisible].Secrétaire-d’État au service sanitaire, a adressé une lettre de félicitations à ces services ! Quelle honte !… Combien de pauvres gens ont besoin de soins et n’en ont pas c’est affreux — C’est joli cette Armée — Où? faut faire des félicitations aux chefs ! —

Il court des bruits que je crois mal fondés sur la relève de la division en Novembre, après notre passage en Albanie. —


9 au 12 Septembre. — Dimanche je suis allé à Porodin ; j’ai eu une réception charmante — Le soir je suis revenu en voiture avec l'adjudant car il est venu a Obstrina avec une amie, Justine, et 50 civils. Ils se sont installés à Obstrina et nous avons été cantonnés avec eux, puis hier nous avons déménagé pour la seconde fois pour venir ici entre RaRovvo et Obstrina, où nous sommes très très bien. J’ai fait creuser ma guitoune par des civils c’est épatant — Et puis maintenant je fais popote avec l’adjudant xxxxxxx je mangerai donc beaucoup mieux. —

Le coin est charmant, ça forme un [illisible]. xxxxxxx xxxxxxx la rivière coule près de nous avec un petit bruit de source, et à partir de 10h du matin, nous sommes à l’ombre, voyez si nous sommes bien !… Je ne souhaite qu’une chose, rester ici xxxxxxx longtemps


13-14 Septembre 1917 — La pluie s’est mise à tomber — eh ! bien c’est très ennuyeux, et que c’est triste et on a tort de la réclamer — je mouille dans ma guitoune — Quel malheur. Voila la saison des pluies. Et si encore c’étaient des petites pluies ! Avant-hier soir nous avons fait danser et chanter les civils c’est très [illisible]

D’abord ils jouent un jeu ressemblant assez au « furet » de chez nous.

Ils se sont mis en rond les jeunes comme les vieux et sans les filles au centre où se trouve un homme, ils font passer sous les genoux, un [illisible] ou un mouchoir auxquels ils ont fait des nœuds, celui du milieu part avec ses mains chercher où se trouve le mouchoir s’il le trouve, celui qui le possède prend sa place au centre. — mais le temps qu’il cherche d’un côté, xxxxxxx et que le possesseur sort de l’autre, celui-ci lui tape un grand coup de mouchoir dans le dos. — et ce que tous xxxxxxx ces gens sont heureux ! Ensuite ils ont dansé au son d'une flûte qui jouait un air très accentué, dans lequel se répète toujours le même motif- Ils se tiennent 5 par les épaules et tournent en cadence, le 1er de temps en temps fait une volte face et reprend son voisin par l'épaule.

Mais le plus amusant fut une espèce de jeu en musique (si j'ose dire musique) toujours le même air ou du moins le même mouvement - ils se tiennent une dizaine en file les mains à la ceinture - le premier a une baguette qui simule un fusil et à la queue se trouve également un homme avec une baguette pareillement aussi

La flûte joue; la colonne xxxxxxx fait un grand cercle - Puis xxxxxxx le premier simule un chasseur, il se met à genoux, et tire des coups de fusil à gauche et à droite et le dernier l'imite en tous points, puis ils se remettent en marche - Le jeu consiste pour le 1er xxxxxxx à s'approcher suffisamment du dernier pour lui donner un coup de baguette. Le dernier [illisible].

Voici ce que cela représente. le 1° est gardien du troupeau qui le suit et le dernier est un voleur de moutons.-

Ce qui est drôle c'est lorsque le gardien court très vite en faisant des zig-zag, le dernier étant obligé de [illisible], le 1er se rapproche suffisamment de lui pour lui donner un grand coup de badine sur les mains.

Puis ensuite ils ont chanté… des chansons qui sont de vraies complaintes

Ce sont les touts petits qui patientent ? [illisible] — ils ont chanté à trois voix des airs très tristes — puis d’autres très enlevés.

Pour finir ils disaient « chanson Francesco » ! Ils voulaient dire nous allons chanter des chansons Françaises — et savez-vous ce qu’ils ont dit ?

Sur le pont d’Avignon, j’ai perdu le do de ma clarinette et cela avec un entrain du diable ! c’était très drôle.


20 Septembre 1917. Aujourd’hui je me sens moins fatigué, mais ces jours derniers cela n’allait pas du tout du tout. — La chaleur est redevenue épouvantable.

C’est curieux ici très peu d’hommes sont bien portants. Tous ceux que je n’avais pas vu depuis longtemps et que j’ai revu ces derniers jours sont maigris, le visage tout blanc les yeux cernés — On s’esquinte ici.

J’apprends à l’instant que mon camarade de Creuzot, sergt. à la même section que moi est évacué pour la jaunisse. Je ne serais pas étonné d’aller le remplacer ce soir en ligne.

J’ai reçu hier soir mon appareil photo ; j’en suis très content, si je ne monte pas ce soir je développerais quelques épreuves…


22 Septembre 1917. Hier je suis allé hier matin à la visite, le major voulait m’évacuer, mais ma foi ici je ne suis pas mal alors il m’a mis exempt de service 8 jours, avec des pilules, une poudre et des comprimés à prendre.

J’ai mal de tête continuellement depuis plusieurs jours. xxxxxxx Hier soir j’ai eu une grosse fièvre, ce que j’ai sué ! Et ce soir j’ai encore de la fièvre ; demain je retournerai à la visite car la nuit j’ai froid. Oh ! ça n’est pas grave de la faiblesse générale, j’ai mal partout.


2 Octobre 1917. J’ai été évacué le 24 Septembre. J’ai l’ictère de jaunisse, j’ai été à la diète lactée jusqu’à ce matin, aujourd’hui j’ai commencé à manger du bouillon de légumes et du riz au lait.

Je n’ai pas été très très jaune, mais je suis faible encore. Le Major est très gentil. Je suis xxxxxxx l’ambulance colonne mobile dessous une grande baraque Adrian.

Il y a des séparations faites avec des nattes pour deux lits des S/officiers. Il n’y a rien de nouveau, ce soir j’attend des lettres.


11 Octobre 1917. Je vais mieux, quoique j’ai encore les yeux jaunes. Je suis au régime dysentérique depuis hier j’ai un morceau de pain sans croûtes de la purée de pommes de terre, un bâton de chocolat et du quinquina 1 fois par jour.

J’ai reçu quelques lettres mais j’espère ce soir en avoir d’autres avec des journaux et la gazette Lalaux.

Ici on ne se croirait pas dans une ambulance, le soir jusqu’à 22h il y en a qui causent et çà recommence à 6h1/2, le lendemain matin ; c’est la scie !…

Mais connaissez-vous la seule, l’unique question ? Les permissions ! — ce que tout le monde les désire !


18 Octobre. Depuis 5 jours je suis au « Petit régime » — Çà va beaucoup mieux. L’avant dernière nuit j’ai été sérieusement indisposé, mais il n’y paraît plus du tout du tout !

Çà fait quelques jours le temps n’est pas très beau, il a plu et l’eau gouttait du toit !…

Tantôt le soleil a reparu. Tavernier et Rémy sont revenus me voir avant-hier.

Mes affaires ont été portées sortantes, je n’ai plus rien, que mon linge et mes effets kaki — On fait des recherches — Et l’on me donnera d’autres affaires si les miennes ne sont pas retrouvées.

J’ai reçu quelque lettres et des colis. J’espère en avoir ce soir encore.




30 Octobre 1917. Dire que depuis le 18 je n’ai pas écrit dans ce livre, c’est honteux de paresse ! et pourtant j’ai travaillé pas mal c’est plutôt que je n’avais pas grand chose à dire.

Depuis 5 jours au grand régime, je mange comme un ogre et même… d’avantage.

Avant-hier je suis descendu de la baraque Adrian ici dans une tente Américaine au village nous sommes très très bien ! — Ce qui m’ennuie c’est que depuis quelques jours j’ai une assez forte diarrhée et que les forces ne reviennent pas vite !

Et pour comble de malheur pas de lettres depuis au moins 8 jours même 10 et il paraît que l’on n’en aura pas avant 5 jours, xxxxxxx ce serait une cause du vent Italien, c’est gai !

À l’instant je viens de faire deux photos d’un enterrement de Macédonien.

Tout à l’heure un camarade m’annonce l’enterrement d’un Macédonien, il vient d’entrer à l’église. Le temps de prendre mon appareil, ma canne et je pars ; à la porte de l’Église nous attendons un peu car la cérémonie n’est pas encore finie ; on entend le Pope chanter sa messe d’une façon pas triste du tout. — après deux fausses alertes les voici par la porte de côté — pas de charme s’il n’y a pas de soleil.

Trois enfants portent les croix puis viennent deux popes l’un derrière l’autre couverts de chasubles éclatantes — mais bien usagée ! — ça est sûrement xxxxxxx un enterrement riche. — après, la bière comme toujours faite de planches quelconques ramassées n’importe où — quatre hommes la porte — bien entendu elle est découverte et on voit la morte habillée de ses plus beaux effets et sur la bouche, selon la coutume une bande d’étoffe rouge — derrière la bière des femmes pleurant très fort en chantant, ainsi que les hommes ils font énormément de bruit ! Une femme porte un sac contenant des ossements et une autre une tête de mort — ce sont les ossements de la mère de la défunte — car j’ai omis de le dire on a exhumé cette femme morte il y a trois ans pour mettre sa fille à sa place — drôle de coutume ! — c’est xxxxxxx xxxxxxx sans doute pour ne pas prendre trop de place, car le cimetière est petit ! — Les voilà à la fosse les Popes et les enfants (que j’appellerai le chœur) se rangent d’un côté — le sac d’ossements est là à terre avec la tête — Les femmes et les hommes hurlent plutôt qu’ils ne pleurent, et ils chantent toujours ! — quel chahut ! — puis ? on descend la bière et alors une femme s’agenouille et plusieurs chantent encore plus fort, le Pope Lui (ça c’est pas ordinaire) après avoir sourit, rit de toutes ses dents (quelles mœurs !), puis comme les gens se pressent autour du trou, un des hommes se met en colère et avec le manche de sa pelle les éloigne. on met la Le vieux pope verse du vin sur la tête de la morte on couvre le visage d’un voile puis le fossoyeur descend dans la fosse et met le couvercle — la terre commence à tomber, on met les ossements et avec une bâche les vieux effets pourris de la morte d’il y a trois ans ; puis chaque invité prend des poignées de terre fait le simulacre de cracher dedans (sans doute il y met son cœur) et la jette.

Puis ils vont tous se laver dans le ruisseau ils se jettent quelques gouttes d’eau sur la tête pour venir ensuite au repas qui a lieu dans le cimetière et auquel je n’ai pas assisté.


2 janvier 1918. — Depuis bien trop longtemps je n’ai écrit dans ce cahier. je dis trop longtemps car j’aurai eu des choses très intéressantes à y noter : Je ne l’ai pas ? fait car j’ai été très très occupé, et j’employais mon temps libre à écrire, ce que je n’ai pu faire très souvent.

C’est le 30 octobre que j’ai écrit ici je suis rentré à la compagnie le 1er Novembre je tâcherai de me rappeler un peu depuis cette

date ! –

Donc le 1 novembre je quitte l’Ambulance à Obstrina. Voilà comment cela s’est fait : le 30 oct. au soir l’infirmier ne me donne pas les pilules que m’avait ordonnées le major qui me soignait, ces pilules xxxxxxx devaient me redonner des forces, et j’en avais besoin hélas ! Je vais réclamer on me répond que le Major les avait supprimées, le major était nouveau l’autre étant parti en permission.

Je n’étais pas très content, j’ai dit ce que je pensais au point de vue des soins que l’on nous donnait dans notre ambulance, le Médecin a donc dit qu’il me ferait partir au dépôt de convalescents à Rhadirov ? [illisible] mais le lendemain matin à la visite j’ai demandé à rejoindre ma Cie le plus tôt possible, et le soir même je partais avec une exemption de service de 8 jours.

Je vois le Lieutenant Tavernier qui montait en ligne. Tout le monde me trouvait bien « décollé » pour employer le terme poilu.

Je fais la connaissance du Lieutenant Bocri, nouvellement arrivé à la Cie. C’est un Corse que l’on faisait passer pour terrible !

Je demande au major de me faire des piqûres de cacodylate. – cela me remontera j’espère.

Au bout de 6 jours je m’ennuie, il n’y a pas de Sergent ici, je demande à reprendre mon service.

C’est assez dur car je le répète je suis seul pour tous les chantiers des routes et il y a eu jusqu’à 110 civ travailleurs civils.

10 Mars 1918. — Le 2 janvier je n’ai pas continué à écrire ; décidément ça ne veut plus ! Il faut pourtant que je reprenne ce journal trop longtemps abandonné. Je vais tâcher de me rappeler ce qui c’est passé depuis.

Donc je reprend mon service, je vais visiter des chantiers éloignés les uns des autres aussi j’y vais à cheval ou a mulet, pendant les premiers jours ; après je fais la route à pied, c’est meilleur, et puis je ne suis pas un cavalier bien fameux.

Je reste donc à Porodin jusqu’au pendant un mois. Je suis content car le Lieutenant Bori me laisse faire et le nouveau Capitaine qui s’appelle Vannière au bout de quelques jours fait de même ; il m’a fallu remuer tout le monde pour finir une route dans un certain délai, j’y suis arrivé, mes officiers ont été très contents et… moi de même.

Le 29 novembre je crois ; je remonte à Monastir ; là encore seul avec pour faire un Poste d’Observation xxxxxxx à quelques mètres de celui que nous avions fait il y a au mois de février en mars ou en avril, lorsque nous étions à San-Nidilah. — Mes officiers ont confiance en moi ; je suis chef de détachement chargé donc de pas mal de choses en plus de la conduite de mon chantier.

À Monastir au début je n’ai qu’une dizaine d’hommes et ensuite j’en ai une 40aine — Nous sommes bien logés pas du tout bombardés sauf quelques fusants pendant sur la fin de mon séjour dans la ville.

Le travail a très bien marché jusqu’au pétardements ; je m’étonne que les Boches ne nous aient pas déclenché un beau tir de bombardement ; la 1ère nuit ça a tapé très très près mais ils n’ont jamais recommencé ; c’est heureux ! — Mon Lieutenant m’a demandé pourquoi je n’avais jamais été aux cours d’Élèves-officiers du Génie — je n’y avais pas droit à ce moment, n’ayant pas un an de grade.

Il y a… plutôt… un poste d’observation, avec quatre abris souterrains… c’est moi qui avec ma section vais être chargé du travail ; je n’en suis pas mécontent.


29 avril 1918. — Quel paresseux je suis ! et pourtant !… j’ai été très occupé ; maintenant que j’ai un peu de temps je vais continuer ce journal (si toutefois on peut appeler ceci un journal) —

Mon séjour à Monastir s’est très bien passé, j’y suis resté jusqu’au 28 décembre — Mes officiers ont été très contents de mon travail ; c’est une satisfaction personnelle. — Pendant mon séjour travail j’ai constaté pas mal de petites choses drôles, par exemple : il y avait quatre deux jours que j’étais arrivé ? [illisible] je reçois l’ordre de cesser immédiatement l’…agrandissement des boyaux ? [illisible] pour attaquer leur entrée de l’abri ; il faut au général un abri pour dans 6 jours. — Vu la densité du terrain (c’est du rocher) je suis persuadé qu’il est impossible dans un laps de temps si court de faire quelque chose, enfin je commence ! Le surlendemain le Capitaine vient, de suite il se fâche ; ne trouvant pas la fouille assez avancée ; je lui exprime ce que je pensais de ce délai de 6 jours. Il n’a pas voulu m’écouter n’ayant qu’une chose à xxxxxxx dire «  à vous comprenez, j’ai un papier ! Le général veut un abri dans 6 jours, il le faut : tans pis si c’est dur ! » Quoi répondre à de tels arguments ? Il faut dire que le Capitaine est un homme du métier, et qui est certainement très très capable de le faire ; mais voilà, du moment qu’il a un papier !… et il en revient toujours là, il aime beaucoup la paperasse — et il a une drôle de manière de prononcer papier il dit « pâpier » c’est rigolo, et cela lui revient toujours à la bouche. Enfin le lendemain le Lieutenant Bocri, je lui raconte le mécontentement du Capitaine, — Lui pense comme moi au sujet du travail ; il me dit qu’il fera ce qu’il pourra pour me défendre ; justement en descendant à Monastir on rencontre le Capitaine Vanière ; Bocri lui cause du P. O. si bien que tous les deux se sont attrapés ! Mais trois jours après vient le Colonel ; il s’est très bien rendu compte du travail fourni et a blagué au sujet du délai donné ; alors le Capitaine voyant cela a changé du tout au tout il a été très aimable et a trouvé tout très bien — depuis ce jour il était enchanté de l’avancement et ne se gênait pas pour me le dire ; xxxxxxx Tout est bien qui finit bien !… et le général n’est pas venu !


Vers la fin du mois de décembre le Lieutenant m’a dit qu’il y avait de gros travaux d’abris-caverne a faire en ligne, il m’a dit qu’il tenait à ce que ce soit Pinau ou moi qui le fassions comme l’abri du Signal Blanc était xxxxxxx bien organisé ; toutes les directions données, qu’il n’y a plus qu’à suivre ; un autre sergent prend ma suite et je pars au Ravin Austerlitz le 28 Décembre au soir. —


Je prends un détachement de renfort à son passage à Monastir ils sont une trentaine, rien que des nouveaux — En route ! —

Nous voici arrivés après une heure de chemin sans encombre. — je place les hommes dans leur trous, moi j’en ai un de préparé, je n’ai plus qu’à le couvrir ; car ici adieu les beaux cantonnements la côte nord du Ravin Austerlitz est formée d’un haut talus de 10 mètres environ, dans ce talus il y a des trous on couvre avec sa toile de tente et voilà un abri ? — tout au moins contre la pluie. —

Mais je parle du talus et cela me fait penser que je n’ai pas encore parlé de mon petit chien.

Ce petit animal m’a été donné à Porodin il est ici au xxxxxxx P. O. I 12 et tout petit qu’il est a déjà été en lignes ; il est mignon tout plein après Porodin je l’ai avec moi, lorsque je l’ai eu il avait environ trois semaines, je l’appelle « Viro » du nom d’un ruisseau passant au moulin de Porodin. —

Il est venu ici cela a été pour son malheur car tombant du haut du talus en jouant ; il s’est démis une épaule pauvre petit je l’ai soigné comme j’ai pu, mais il boîtera toujours. —

Mais je reviens au travail ; je suis ici avec une section ; le Lieutenant Bocri qui commande le Peloton est cantonné près de moi.

Le travail à faire est important enfin cela va bien ; quelques jours les Boches envoient des fusantes au dessus de nous, des éclats ont traversé des toiles de tentes, mais il n’y a rien de grave. — xxxxxxx Ici nous touchons l’indemnité de combat et à partir du 1er Janvier on la touche également à Monastir. —

Je suis avec la 2e Section toujours seul mais le travail va bien et mes officiers sont contents — même le Colonel du Génie est venu nous visiter et il m’a félicité pour le travail qui a été fait ; et c’est la vérité il y a eu de la terre enlevée ; Bocri a amené tous les officiers des Marsouins voir l’ouvrage. —

Notre Capitaine, Vannière est nommé Commandant dans une autre division, il sera remplacé par un viel officier d’administration venant de l’amincir ; et qui certainement ne doit pas connaître grand chose à notre métier.—

J’ai oublié de dire que quatre jours après mon arrivée le Ln Bocri est remplacé par le SLn Idrac qui est un très gentil garçon mais au bout de trois jours il est malade ; justement il y a des mutations entre sapeurs,on forme une nouvelle deuxième section ; rien que des nouveaux arrivés me viennent et pas des meilleures têtes enfin je m’en suis tiré quand même et tout va bien maintenant. Le lieutenant Idrac est évacué si bien que pendant 4 jours je suis Commandt du Génie du s/Secteur de gauche — Le lieutenant Bocri revient. Il est comme je l’ai dit déjà enchanté des travaux — je vais faire avec lui une promenade en première ligne — Le 31 la section est relevée par la 1ère — le Ln Bocri forme un Adjudant venu provisoirement remplacer le S/Ln Idrac moi je vais rester pour tout mettre en chantier et donner les directions d’un nouvel abri — Le 4 février je suis relevé — je pars à pied et j’arrive à Porodin à 18h — 70 jours que je n’étais venu à la Compagnie !

Je trouve là 4 nouveaux sergents arrivés en renfort. Je vais le soir aux ordres du Capitaine (ou plutôt de l’off. d’administration de 1ère classe faisant fonction de Capitaine) Il me dit qu’xxxxxxx il a tenu à me faire relever car il y avait longtemps que j’étais en ligne et me donne 1 jour de repos — Cette fois cela va aller nous sommes quatre pour nous occuper des mêmes chantiers de route pour lesquels j’étais seul avant de monter à Monastir.— Au bout de quelques jours je suis obligé de croire à ce que l’on m’a raconté au sujet du Capitaine, il n’y connait rien et se figure que c’est lui qui fait tout marcher — il est en plus de ça loufoque !

Mon viro m’a suivi il est toujours bien mignon — Je prends mon service et en effet suis très très tranquille.

Pour donner une preuve de la loufoquerie du Capitaine Desmarquez ; un jour le chef lui faisant une demande des propositions pour des médailles anglaises, il répond néant ; le lendemain il arrive tout bouleversé — le Colonel lui a fait une observation à ce sujet et il a répondu qu’il n’avait pas vu la demande — il fait remarquer au Chef qui lui remontre la note du Colonel, et lui tout effaré dit « mais ce ne sont pas des médailles : ce sont des jeux ! » parce qu’il y avait écrit Military Cross — Distingued Services — Il faut être fait complètement !… et l’état parti « néant » n’est pas revenu. —

Et combien d’autre loufoqueries de sapeur ; les conter serait trop long. —

Enfin il est relevé et sa demande pour passer Capitaine du Génie a été refusée — il se lamente et prétend qu’on ne sait pas récompenser les services qu’il a rendus ; car il a pris la Compagnie complètement dissipée et dit l’avoir reformée ; à mon avis ça va encore plus mal.

Et dire qu’un homme comme cela a commandé trois mois à près de 300 hommes si cela n’est pas honteux !

Trois camarades s’en vont si bien que me voilà encore seul — notre nouveau Capitaine s’appelle Duriot, il a 27 ans et est capitaine depuis déjà 1 ans ½ c’est un ancien Polytechnicien. Il est très bien peut-être enfin va-t’on enfin avoir un chef, voilà le 5e Cdt depuis notre arrivée en Orient, je mets en lui mes espérances de revoir la Cie à ce qu’elle était avant en France…

Salonique 10/11/17


Mon Cher Vieux


Par ce courrier je t’envoie la boîte

de papier à lettre 3, 50
et 10m de soutache à 2f 20,00
______
23, 50
Le port 1,00
______
24, 50

il n’y a pas de change —

Pour la soutache, je l’ai prise quand même à 2f d’autant plus que c’était au bazar de Lyon et qu’il n’y a pas

Paris le 30 Octobre 1917

Cher cousin

Bien reçu votre lettre du 9 courant et espérons que votre santé va s’améliorer et que cette maladie vous procurera peut-être une petite convalescence. Elle serait sans doute la bienvenue et ferait également j’en suis sur grand plaisir à vos parents. Les événements d’Italie qui viennent de se produite ne sont pas faits pour hâter la fin de cette guerre et on ne peut plus faire de prévisions. Nous sommes toujours en bonne santé : ici peu de changements, c’est toujours le même train train et Isabelle se joint à moi pour vous envoyer nos |meilleures amitiés

L. Martinet

L. Martinet 79 rue de Bagnolet Paris.



Correspondance militaire


Monsieur Émile Chollet
Sergent au 1er  Génie
Campagne 22/4

Secteur postal 514
La 1re chose dont il s’occupe s’est la tenue des hommes puis il fait faire une maison à part pour les S. Off puis la nourriture aux hommes — Enfin il reforme la Cie suivant le nouveau règlement, 4 sections de trois escouadades avec à chaque escouade un sergent : — Mais toujours ma chance ! Me voilà ici seul à la 4e Section, sans officier, c’est à moi qu’incombe encore le mal de tous ces changements.

Enfin ça y est, je continu xxxxxxx les travaux de route pendant une semaine ; mais la 2e 7/2 T nous remplace en ligne nous voici donc au repos, alors chaque section à son tour fera une semaine d’instruction militaire et technique ; pour cela enfin on m’adjoint un sergent nouvellement nommé — le matin exercice pendant 1/2 heure puis 1 heure de théorie sur les fortifs ?[illisible], les artificiers etc… le tantôt 1 heure de théorie, çà n’est donc pas fatigant. xxxxxxx Une fois nous avons été faire des tirs dans la montagne ; et une fois du lancement de grenade. — j’ai [illisible] un xxxxxxx des grenadiers au pied ; il paraît que c’est réglementaire. —

Un arabe a manqué de nous faire sauter la figure au Lieutenant et à moi je lui ai fiché ma calotte sur la figure, et cela de toutes mes forces — quel froussard et dire que c’est celui-là qui une fois avait sorti sa baïonnette pour tuer un maître ouvrier ; le lâche !…

La semaine d’instruction est finie, nous retournons aux chantiers de la route — mais pas pour longtemps ! Le repos aura duré trois semai quinze jours ; c’est pas beaucoup. — la 76e division va au grand repos la 11e D. J. C. avec les Bataillons Sénégalais étendra son front et prendra son secteur, nous remplacerons la 27/6 du IIe génie. —

Étant chef de Section je pars en reconnaissance avec le L Bocri ; je pars le soir et reviendrai le lendemain. Notre nouveau [illisible] sera la ?[illisible] fameuse côte 1248 qui nous a coûté si cher xxxxxxx. Je pars de Porodin à pied ; un mulet transporte mes affaires — j’arrive à Monastir vers 16 heures je passe une bonne nuit et à 9h30 le lendemain, départ avec le Lt Bocri et le Gd commandt la 27/6 — le secteur est pénible car on monte et descend sans cesse — nous rentrons à 11 heures 30, je suis assez fatigué le soir même à 16 heures je repars à pied pour Porodin j’y arrive à 18 heures, j’ai bien marché ! —

Deux jours après le 19 au soir je suis encore seul avec la section : 53 hommes. Gestheim le sergt qui était avec moi ne vient pas ; décidément je n’ai pas de chance ; çà va encore être du travail et du tourment pour moi. — Nous partons à 18 heures ; 30 des voitures nous suivent portant nos paquetages que prendront des mulets arrivés à Monastir. Nous y passons à xxxxxxx 21h — Là il y faut former deux groupes, l’un pour aller à Lacroix ; la 11e Escouade, la mienne nous travaillerons à l’observatoire d’artillerie du point de 1248. Les deux autres 10 et 12 iront à chevusson ? [illisible] travailler à un abri et à une piste. C’est le Sgt Plantier qui ira avec eux quand il rentrera. —

Enfin après une route très pénible parce que très accidentée, et que la nuit est très noire nous arrivons il est 0h30. Ce qu’il y a de bien ce sont les abris…

Je m’installe donc ; j’ai un cuistot très aimable qui s’occupe de toutes mes affaires il fera la cuisine pour moi. — Je dors bien. — Et le lendemain je pars reconnaître les chantiers pour les caporaux et maître-ouvriers ça me fait pas mal de chemin !

Le soir la première équipe de 1248 monte à 20h On travaillera là-haut par 3 équipes de 8h et période de 32 heures — c’est une bonne méthode. —

L’autre équipe de Chevusson travaillera 6h de nuit. Mais tout cela me fait bien du travail ; je voudrais bien qu’il arrive un chef de section et mon Camarade Plantier — xxxxxxx

Enfin le 23 avril — au matin arrive un Aspirant pour commander la Section. Plantier est arrivé hier soir je pousse un soupir de soulagement ! N’empêche que tout est en route maintenant et que ça c’est pas l’Aspirant qui a eu la peine de le mettre ! C’est un nouvel arrivé à la Cie ; il a l’air assez bien ; nous verrons cela ! —

Nous voyons tous les chantiers. Le 25 vient le Capitaine il trouve que ça va — Mon travail à 1248 est très dur, nous sommes dans du terrain rocheux ; nous avançons en galerie il y a encore 20 mètres à faire et ensuite on sortira en puit au point culminant de la montagne — Nous sommes xxxxxxx en 1re ligne. —

En avant de 1248 sur l’autre versant sont quelques petits postes xxxxxxx Français, et c’est tout la ligne repart à gauche sur la « Brosse à dents » — Le secteur est assez tranquille cependant le 29 ils nous ont lancé pas mal d’obus dont un en plein sur l’entrée, brisant un chassis et les planches du [illisible], mais le mal n’a pas été très grand ; j’ai fait réparer le soir et déblayer le boyau. —

Je ne suis bien entendu pas continuellement au chantier, je viens deux fois par jour faire une tournée et mesurer l’avancement. En montant à 1248, il y a un boyau à ?[illisible], dans lequel, tous les 10 mètres il y a un masque mais cela n’empêche pas que l’on est vus en entier par les Bulgares se trouvant sur l’autrela crête en face. —

J’ai reçu des lettres de mes parents et de Mademoiselle Germaine, je suis bien content. —

Enfin voilà ces souvenirs « à jour » je tâcherai de ne plus les abandonner. —


4 Mai 1918. — Le 1er Mai il y a eu un assez fort bombardement du boyau C43 conduisant à 1248. — c’était justement l’heure où je montais j’ai attendu un peu ; et cela c’est très bien passé, le boyau n’a pas trop souffert, quelques éboulissements seulement, les Buls n’ont pas trop tapé dedans ; par exemple beaucoup de petits éclats — les Buls n’ont pas recommencé après : par contre ils ont bien marmités les batteries situées dans le ravin des Italiens, celui qui est devant nous. —

Au P. O. nous sommes dans la roche ; c’est joliment dur, aucun outil ne peut entammer cette paroie ; seul le burin pour faire des trous de mines et encore souvent la tranche se brise ! — Hier soir un espion est venu nous visiter et assez bas le caffard, il avait de l’audace ! Et nos pièces tiraient bien mal si mal que cela a amené une réflexion très drôle, surtout prononcée par notre cuistot qui est un gars de ch’Nord ! Il se tourne du côté l’on entend les départs des fusantes et crie : « arrête un peu on va avancer les batteries ! » J’ai bien ri ! Et puis celle-ci « çà peut rien y doivent râler les ravitailleurs qui xxxxxxx en ch… pour amener les obus là-haut, et de voir qu’y sont dispersés comme çà ! »

Aujourd’hui rien de neuf — avant hier xxxxxxx le Capitaine a envoyé ici un pli pour demander xxxxxxx s’il y avait des S. off. désirant aller au Cours de Versailles ; il y a l’Aspirant et moi, mais il ne faut pas trop compter là-dessus, que sur une chance ; l’Aspirant passant forcément avant moi. —

Je me depêche, j’ai trois lettres qui m’attendent dont une de Mademoiselle Germaine et une de Petite Sœur. —


Mai 1918. Névolani

Le 10 je suis descendu des lignes pour être le 11 dirigé vers le Centre d’Instruction du génie. Je passe par Monastir où j’apprends que je ne suis pas proposé pour suivre les Cours de Versailles car il faut être au moins de la Classe 13 — je déjeûne avec mes camarades et le tantôt je passe par Porodin où je coucherai — j’y retrouve mon petit Viro ce qui me fait grand grand plaisir quand je repars le 11 au matin il voulait me suivre et il pleurait de me voir partir. — Ma voiture porte nos sacs, nous partons à pied il y a 22 km à faire. —

Nous arrivons à 11 heures à Florina, où je mange au Foyer du Soldat. —

À 2 heures j’arrive à Névolani ; un camarade m’indique les l’emplacement logera mon caporal et [illisible] avec moi. — Je loge dans une habitation dans une chambre propre mais dont le plancher en terre battue a pas mal de trous ; des lits sont là faits avec des planches, c’est très bien une excellente popote. —

La première semaine j’ai fait de la fortification de campagne ; je ne sais pas pourquoi on appelle cela de l’Instruction, cela consiste à creuser des tranchées, ce que tout le monde sait ; pas d’instructeurs ! Alors ce n’est pas intéressant et les hommes ne font pour ainsi dire rien !

Cette semaine c’est mieux je suis au pontage ; et un adjudant s’occupe de faire faire des choses intéressantes. —

Ces derniers jours il a fait un temps splendide ; mais depuis trois jours c’est moins drôle, beau la xxxxxxx matinée puis vers les 16 heures orage cela n’est pas sain du tout. —

C’est dommage ce temps car le pays est tout à fait charmant tout est vert et des des ruisseaux partout.

Dimanche j’ai vu dans un théâtre de Verdure à Florina au pied d’une montagne, jouer l’Arlésienne ; bon orchestre, mais tous les rôles joués par des hommes ce qui dans le courant était parfois ennuyeux. —

Je reçois couramment mes lettres encore aujourd’hui une de P…[illisible] une de Madame Baronnet et même de Mademoiselle Germaine. —

J’avais entendu parler de permissions mais ce sont des départs de rapatriés. — Je voudrais bien pourtant aller faire un tour en France !…


7 juin 1918. — J’ai quitté Névolani le 1er du mois. Je suis arrivé le même jour à Porodin où j’ai couché, le 2e je suis arrivé ici entre Obstrina et Rakovo, au cantonnement que j’occupais l’an dernier lorsque j’ai été évacué — Je loge avec Ghestein sous la tente nous sommes très bien, chacun un lit. —

Il y a ici deux escouades qui font de la réparation de route. — nous sommes tranquilles — Ghestein et moi visitons les chantiers chacun notre tour, ce qui nous arrive tous les 2 jours çà n’est donc pas fatigant ! —

Il n’y a rien d’intéressant. Oh mais rien de rien. —

Chaque jour il tombe de l’eau et cela est très très ennuyeux, voilà longtemps que cela dure, je commence à en avoir assez. —

J’ai ramené avec moi mon Viro, très content de me retrouver — mais il est part trop vagabond cet animal ! —

Maintenant que me voilà installé je tâcherai d’écrire chaque jour mais pour quoi dire grand Dieu ?


16 heures. — Toute la journée, je suis resté dans la tente quel ennui ! Oh, le sale temps. J’attendais le ravitaillement, peut-être demain m’apportera-t-il des lettres me disais-je mais bast ! Rien de rien. — j’ai lu quelques pages de « pêcheurs d’Islande », puis le journal, puis… je ne sais plus quoi faire quelle scie cette pluie ; on est si bien lorsqu’il fait beau temps. Écrire je voudrais bien mais xxxxxxx quoi dire ? et puis à qui à Mes Parents à Mademoiselle Germaine ? Je viens de le faire —

J’attends le diner avec impatience puis la nuit, je vais développer les quelques photos que j’ai prises depuis deux mois. Et ensuite je me coucherai c’est ennuyant !…

On me dit que notre Capitaine a quitté la Compagnie, est-ce vrai ? Si oui et qu’il en vienne un autre, ce sera le 7eme [illisible] : Cdt Védimelle — Lt Rémy — Lt Bocri — Cne Vannière — O. A 1e charge Desmarquez — Cne Duriot c’est le Lt Bocri qui a repris le Commandt de la Cie. —

Le refrain de la Cie est « 22/4 Lt ….. ? [illisible] » on doit s’appliquer à ce que ce soit notre [illisible] !…

Bons baisers à tous. —


9 juin 1918. — Dimanche ! Qu’ai-je fait aujourd’hui ? Rien, ma foi, oh ! mais rien de rien ! Pour ne pas trop m’ennuyer j’ai lu oh ! des babioles, malheureusement je n’ai rien d’autre, tantôt je suis allé xxxxxxx faire avec tour avec mes deux Camarades un tour à Obstrina, puis au retour un Camarade qui est à Porodin est venu nous voir cela a fait passer l’heure d’attente avant dîner. Notre Capitaine part demain pour Florina. Le matin, les avions bulgares sont venus bombarder les cantonnements de Porodin à Kanina une bombe est tombée au beau milieu du cantonnement de la compagnie. Total huit blessés, mais très légèrement, un seul a été paraît-il évacué — Le Lieutenant [illisible] du 42e Colonial, s’est rendu paraît-il il y a 6 jours et cela dans la journée ! ça se passe de commentaires un tel acte ! — xxxxxxx Les partants pour la France ne sont pas forcément rapatriés, ils ont la faculté de rester en France ou de revenir en Orient. Voilà toutes les nouvelles ! —

Ce soir après dîner je suis allé faire un tour de promenade tout seul, j’aime beaucoup cela — je suis allé sur un petit chemin à flanc de montagne, tout est très vert, c’est très très joli, j’avais avec moi mon petit chien — c’est une vraie promenade de propriétaire !

Quand je suis seul comme cela je pense beaucoup beaucoup, à mes parents aux bons amis que j’ai à Blagerade, à l’avenir et je bâti des rêves de permissionnaire. Sera-ce bientôt la réalité — je l’espère ! — 21 heures, je me couche, demain je ne serais pas obligé de me lever à 5 heures, c’est Ghestein qui est de jour. —

Bonne nuit à tous ceux que j’aime. —


10 juin 1918. — J’étais aujourd’hui encore de repos, et ma foi je me serais ennuyé tant il a fait très chaud et que cela m’enlevait tout courage, heureusement notre journée a eu un but, ce soir devaient venir dîner avec nous Changois le vaguemestre et Marennat le Sgt d’approvisionnement quelques heures à passer le temps ensemble. Mais crac le beau temps ne pouvait tenir, trois jours complets c’est trop, ainsi en ce moment (15h) il tombe de l’eau, de cette façon sûrement nos camarades ne viendront pas, c’est partie manquée, dommage.

Je reçois à l’instant deux lettres de Papa et une de Petite Sœur, tout le monde est toujours en bonne santé je suis content !

J’ai vu sur le journal que tous les sergents seront à solde mensuelle, c’est une injustice réparée. —

Un tuyau ! Il y aura un départ de permissionnaires le 2 Juillet et un autre le 20, je serai sans doute de ce dernier, hip ! hip hourra !…


13 Juin. — Rien de nouveau ; de plus en plus je pense à ma permission, et de plus en plus on cause de départs prochains. —

J’ai reçu ensemble avant-hier une lettre de Marreler et deux de Mademoiselle Baronnet.

Le beau temps est revenu ; en faisant ma promenade quotidienne avec mon chien j’ai trouvé sur mon chemin une grosse vipère, je l’ai tuée avec mon bâton. —

En ce moment je souffre des dents, cela va jusqu’à m’empêcher de dormir. —

Je suis au repos demain je tâcherai d’écrire longuement.


14 juin 1918. — Pas de lettres aujourd’hui, ce sera sûrement pour demain. Belle journée. —

Mon chien n’a pas encore été sage il a mangé du chocolat dans la tente, alors à coté je lui ai construit une niche, il est attaché depuis hier soir ça n’a pas l’air de lui plaire après-dîner pour faire mon tour je le détacherai. —

Le Lt Bocri viens demain matin. Que va-t-il nous dire ? —

Journ En définitive, journée calme très calme même ! —


15 Juin 1918. — 2 lettres de Maman et de Marrener, une de Madame Baronnet, une de Mademoiselle Germaine, et une d’un camarade et puis les journaux, c’est un beau courrier ! —

Nous avons attendu inutilement le Lt Bocri, il n’est pas venu. — L’Aspirant doit rentrer demain dimanche.

Voilà tout le nouveau.


16 Juin 1918. — Hier Dimanche, calme complet. L’Aspirant est revenu du C. I. G. il nous a appris que voilà 6 jours le Général Guillaumat commandt les A. A. est parti en France, et est remplacé par le Général Franchet d’Esperey. —

Les Buls canonnent à quelques cent mètres du cantonnement de Porodin, çà c’est nouveau. —

J’ai reçu aujourd’hui 1 lettre de Papa, et comme dans celle de Madame Baronnet, j’y trouve sinon un peu de pessimisme du moins du découragement ; et cela m’ennuie bien de voir mes Parents et mes Amis penser ainsi, cela rend malheureux. —

J’ai fait faire ici un barrage dans le ruisseau, pour pouvoir avoir une espèce de piscine, ce soir on a déjà pu avoir 0,40 d’eau, je me suis baigné, cela fait du bien. —

Le temps est toujours très très chaud, les cigales chantent toute la journée, voici le plein été. —


21 Juin 1918. — Plus cela va plus on cause de permission, et je crois à mon départ prochain, comme je n’y ai encore jamais cru ! Je me suis fixé une date de départ — le 20 Juillet, et il m’étonnerait fort que je me trompe de beaucoup. —

Les évènements d’Italie ont retardé le courrier ces deux jours xxxxxxx je n’ai eu des lettres que ce soir.


Il fait toujours très chaud, cependant, il souffle un vent relativement frais. —

Rien de nouveau, toujours même vie assez tranquille. —


24 Juin 1918. — Mes pressentiments étaient exacts — Samedi soir une bonne nouvelle je suis sur la liste des permissionnaires du prochain départ, qui aura lieu sauf avis contraire le 28, c’est à dire vendredi prochain.

D’où ma grande joie ! Je ne le veux, mais elle est d’autant plus grande que je ne comptais guère partir que le 20 Juillet, cela tient à ce que l’on ne part pas par ancienneté depuis la dernière permission mais depuis l’embarquement, si bien que cela avance forcément mon tour !

Bientôt j’aurai le bonheur de revoir mes Parents et mes Amis — je commence à ranger mes affaires !…


26 Juin. — je ne me suis donc pas trompé ou plutôt j’étais large en croyant partir le 20 Juillet, car en effet nous ne partirons pas avant le 15 ou 20 du mois prochain — le départ du 28 n’est pas pour nous ; j’ai mieux que cela, je serai avec mes parents pour mon anniversaire.

Le beau temps est revenu, chaque jour nous avons un très beau soleil, il fait chaud ! —

Le courrier nous arrive très régulièrement cela me fait grand plaisir —.


Dimanche 30 juin 1918 — Aujourd’hui il pleut fortement, ce n’est pas de chance, rien hier nous faisait prévoir ce vilain temps. —

Toujours même vie ici. —

J’ai eu une carte de Douy ? [illisible] le Sergent Major il me dit qu’il croit que nous partirons du 15 au 20 Juillet. — L’Aspirant est parti ou en fugue à Salonique le départ des permissionnaires du 28 dernier il n’y en avait que 4 de la 22/4 c’est sans doute un départ de la 7/2 T.

Nous comptions aujourd’hui avoir la visite de Chauvois et de Marainnet ? Maraimont ? [illisible] mais une carte Tantôt nous a dit de ne pas compter sur eux, car le nouveau Capitaine, Husson ? [illisible], est arrivé hier soir et il leur faut se présenter ce soir, au fond il vaut mieux cela, puisqu’il pleut.

Reviendrai-je en Orient ? “ That is the question ” il parait que l’on peut choisir, je verrai cela à Marseille. —

Tantôt mon petit Viro est venu me voir sur mon lit pendant la sieste il s’est endormi dans mes bras. il est très mignon et cela m’ennuie bien de le laisser.

Avant hier soir j’ai reçu une lettre de Mademoiselle Germaine qui ma dit qu’Elle s’est faite photographier je suis bien content.

Bons baisers à tous. — 3 Juillet 1918.— Le courrier arrive bien, donc le moral est bon.

Les derniers jours le temps a été beau sauf avant-hier il a plu un peu.—

Aujourd’hui un major de l’ambulance est venu nous voir, il avait des tuyaux sur la relève de la division ; ça ne tardera pas paraît-il.—

Nous avons parlé de mille choses, entre autre de l’état sanitaire de l’A.0. il est paraît-il excellent cette année.—

Mais on emploie quelques petits artifices, les majors ont reçu les ordres de ne pas diagnostiquer de fièvre paludéenne, ils ne diagnostiquent que des embarras gastriques tandis que l’an dernier c’était le contraire, bientôt tout devait s’appeler paludisme ! Résultat : l’état sanitaire est devenu excellent. La quinine absorbée a conjuré le fléau d’Orient, le pays n’est plus du tout malsain, ou si peu ! —

À trois heures des lettres j’en ai une de Papa qui m’a fait bien de la peine, ce que je la trouve ignoble cette guerre ! Heureusement une lettre de Mademoiselle Germaine a empêché mon envahissement par le cafard.

Le soir le ravitaillement apporte un ordre de mouvement. — nous irons d’abord à Klestina à 6 km d’ici, c’est là que se rassemblera la compagnie.

Mais la note n’est pas claire, l’Aspirant ira demain à Porodin.—


4 juillet 1918.— le matin il n’y a pas de travail à [illisible] j’ai rassemblé les 11e et 12e Esc pour leur faire aller chercher les outils laissés sur le chantier, faire ranger le tout et voir ceux qui ont absolument besoin de chaussures ; car pour marcher il en faut ; pauvres gens qui allaient un ou deux nu-pieds et xxxxxxx 5 ou 6 en chaussures sans semelles[1] si seulement on en recevait ce soir ; depuis le temps qu’on en demande des chaussures et qu’on en reçoit pas, pour tous les effets il en est de même mais surtout pour les pantalons, quelle honte ; je me demande d’où cela provient ? Je suppose qu’en France on fait plus attention à cela, il faut sauver la parade tout au moins, mais ici ? Bah ! personne ne nous voit !…

Je n’ai plus mon pauvre Viro, ce matin je lui ai fait faire un trou et un sapeur l’a tiré d’une balle dans la tête, il a encore xxxxxxx poussé un ou deux cris, mais de suite le sapeur l’achevé — Bien entendu je m’étais en allé du coté d’Obstrina, je n’ai même pas voulu entendre le coup de fusil ; pauvre petite bête quand je suis revenu on ne voyait plus que de la terre remuée, les deux sapeurs lui avaient fait une petite tombe avec des branches dessus, j’avouerai, je j’ai eu le cœur gros, un si gentil petit compagnon. Le [illisible] m’a donné son collier, je le garde.

Je ne pouvais pas l’emmener avec moi, puis, je n’avais personne à qui le donner, puis il redevenait courreur, hier il est allé courrir du coté de l’ambulance attiré par je ne sais pas quoi, et trois fois dans cette journée il est revenu avec une boîte de conserves à la queue, — il aurait souffert, j’ai mieux aimé le faire disparaître ; cela m’a fait de la peine car avec moi il était très mignon.
À Porodin, Viro Nov. 17
À Porodin

Viro Nov. 17


Porodin, 17 Nov-17, « Viro »

Porodin

17/11-17

«Viro» nous partons demain matin, ce soir donc je vais ranger mes affaires, nous allons à Klestina à 6 km d’ici, là les autres sections de la compagnie viendront nous rejoindre. Après nous irons à Cotoni, c’est à 6 km de Névolani, où je suis allé [illisible] au? cours du Centre d’Instruction du Génie.

Je pense que nous aurons beau temps.— Mille bruits courent en ce moment, toutes les divisions d’Orient seraient relevées, sauf deux divisions coloniales, lesquelles ? Mais xxxxxxx de toute manière je ne vais paraît-il pas revenir.— Tableau II
Lettres
Madame et Monsieur Baronnet
Reçues Envoyées
1 Octob. 11 Oct.
17 — 28 —
19 — 7 Nov
21 — 2 Décemb
26 — 24 Xbre 17.
01 Nov 17 16 Janv.
19 — 24 —
23 — 17 Fév.
3 Xbre 17. xxxxxxx 2 Mars 17
xxxxxxx 24 Mars.
25 Xbre 17. 19 Avril
16 Juil xxxxxxx
17 Mai
 ? Janv 11 juin
12 Janv 3 Juillet [illisible]
xxxxxxx
xxxxxxx
14 Mars 18
xxxxxxx
18 Avril
xxxxxxx
6 Mai
29 Mai
17 Juin
Tableau II
Lettres
Mademoiselle Germaine
Reçues Envoyées
54 30Sept 90 22 Juil 60 17 Oct 83 14/4
  1. a, b, c et d N.D.R « perco » dans l'argot des tranchées, désigne un bon renseignement Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : le nom « t1 » est défini plusieurs fois avec des contenus différents.
  2. N.D.R. Armée d’Orient