Bulletin de la société géologique de France/1re série/Tome IV/Séance du 16 juin 1834



Séance du 16 juin 1834.


présidence de m. constant prévost.

M. Delafosse tient la plume comme secrétaire et donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.

M. le président proclame ensuite membres de la Société :

MM.

Paul-Emile Gittard, docteur médecin, à Paris ; présenté par MM. Virlet et Chaubard ;

William Crook, docteur en droit ; présenté par MM. les docteurs Roberton et Boué.


dons faits à la société.

La Société reçoit :

1° De la part de M. J. Fournet :

Son Mémoire sur la décomposition des minerais d’origine ignée, et leur conversion en kaolin. In 8°, 33 p.

2° De la part de M. Nerée Boubée :

A. Son Bulletin d’histoire naturelle de France, 2e section (Animaux invertébrés articulés), 4e section (Botanique}. In-8° de 20 p.

B. Les portraits de MM. Lecoq, Tournal fils, Bouillet et comte de Montlosier.

3° De la part de M. Daubeny :

Une notice sur un Mémoire du docteur John Davy, intitulé : Notice sur les restes du volcan récent dans la Méditerranée (Note on a paper, etc.) In-4°, 14 p. Londres, 1833.

4° De la part de M. Demonville :

Son ouvrage intitulé : Vrai système du monde, précédé de la question de longitude sur mer, soumise aux académies savantes de l’Europe, suivi d’un Mémoire explicatif des phénomènes de l’aiguille aimantée ; et solution de la question de longitude sur mer au moyen d’une sphère pendule. In-8°, 92 p. Paris, 1833.

Mémoire de l’Académie impériale des sciences de Saint-Pétersbourg, 6e série (sciences mathématiques, physiques et naturelles). Tome II, livraisons 1, 2, 3, 4. In-4°, avec pl. Saint-Pétersbourg, 1832, 1833.

Recueil des actes de la séance publique de l’Académie Impériale des sciences de Saint-Pétersbourg, tenue le 29 décembre 1832. In-4°, 107 p. Saint-Pétersbourg, 1833.

Journal des Mines Russes. Les n° 7, 8, 9, 10, 11 et 12. 6 cahiers in-8o, pour l’année 1833.

8° Progrès des sciences, des lettres et des arts (Il progresse delle seienze, lettere ed arti). 3e année, 13 cahiers, In-8°, 164 p. Naples, 1834.

9° La 36e livraison de la Description des coquilles fossiles des environs de Paris, par M. Deshayes.

10° De la part de M. Anker, professeur à Gratz :

Sa Carte géologique générale de la Styrie.

11° De la part de M. Boué :

Cinq volumes manuscrits de feu M. Lill de Lilienbach.

M. Dugas communique à la Société un échantillon de minerai d’or natif, de la Géorgie.

M. le docteur Roberton fait aussi hommage à la Société de 18 espèces de fossiles de l’oolithe ferrugineuse de Saint-Vigor et de Sully, près Bayeux (Calvados).

Enfin, M. C. Prévost offre plusieurs échantillons des matières rejetées par le volcan sous-marin qui a donné naissance à l’île Julia. Ces matières recueillies par lui, consistent en scories, fragmens de lave poreuse et cendres. S’il reste quelques momens à la fin de la séance, après la lecture des Mémoires inscrits, il se propose de donner une analyse des observations qu’il a recueillies jusqu’à ce jour, relativement à l’apparition et à l’existence de cette île ; il met sous les yeux de la société plusieurs dessins, faits par lui, qui représentent cette île, ainsi qu’une carte générale de la Méditerranée et des coupes du fond de cette mer, pour faire voir la position du volcan sous-marin par rapport au grand banc de l’Adventure et à celui de Nerita, dont elle est distincte ; la position de ce dernier étant 57° 35′ 0″ latit. N. et 10° 20′ long. E. et celle du volcan de Julia 37° 10′ 50″ latit. et 70° 22′ 8″ long.


correspondance et communications.

M. le président communique une note de M. Robison, par laquelle ce savant lui annonce qu’en creusant un puits dans un bassin houiller, près d’Édimbourg, on a cru apercevoir, en s’approchant des lits de houille, que l’on dépassait une couche qui avait formé le fond d’un ancien lac. Elle est terminée (en descendant) par un autre lit de shale bitumineuse, dans laquelle on a trouvé plusieurs dents et ossemens fossiles analogues à ceux de Burdie-House. Ces fossiles se trouvent dans une couche très mince près de la houille, et quelquefois adhérens à ce minerai, ou même partiellement enveloppés dedans.

Ce bassin est celui connu sous le nom de Craighale, situé près de la ville de Musselburgh.

M.le président annonce avoir reçu une lettre de M. Mulot, relative à un puits artésien creusé dans la ville d’Elbeuf, Seine-Inférieure. À 460 pieds de profondeur, après avoir percé entièrement la craie chloritée, on est entré dans les grès et les argiles qui sont au-dessous, et ensuite on a rencontré une veine de sable fluide dans laquelle se trouve de l’eau jaillissante ; celle-ci s’élève dans des tubes provisoires à 4 pieds au-dessus du sol, et elle donne déjà à cette hauteur 200,000 litres d’eau de très bonne qualité en 24 heures ; il est certain qu’elle montera beaucoup plus haut.

M. Arago, secrétaire perpétuel de l’Académie royale des sciences, adresse à la Société une lettre de remercîmens pour l’envoi qui a été fait à l’Académie du 4e volume du Bulletin.

Le secrétaire communique une lettre de M. Ricciardi, directeur du nouveau journal publié à Naples sous le titre de : « Il Progresso delle Science, delle Lettere ed Arti. » Ce savant adresse à la Société le 1er numéro de ce journal, en échange du Bulletin, dont il a déjà reçu plusieurs livraisons.

Le directeur du Journal des Sciences, Lettres et Arts de la Sicile, écrit de Palerme : qu’il accepte pareillement l’échange qui lui a été proposé de son journal contre le Bulletin de la Société.

M. de Teploff communique la traduction de la Table des matières du Journal des Mines Russes, du no 7 au no 12 de l’année 1833.

Voici les titres des Mémoires originaux qui peuvent intéresser la Société :

Dans le 1er numéro ; 1o Recherches géologiques dans les environs d’Ekatherinbourg, par M. Tchaikovsky. (Continuation). Avec la carte géologique.

2o Aperçu sur les mines de cuivre du district de Locteff, en Sibérie.

Dans le numéro 8 ; ─ 1o Description géologique des environs des usines de Goroblagodat, au nord de l’Oural ; par une expédition envoyée pour des recherches géologiques.

2o Description géologique des environs de Perm (chef-lieu du département de Perm), près de l’Oural, avec une carte géologique ; par Schumann.

Dans le numéro 9 ; — 1o Description du gite de marbre, prés du village de Balandine, dans le gouvernement d’Orenbourg.

2o Rapport fait par les ingénieurs des mines, MM. Voscoboinikoff et Gourieff, sur les recherches géologiques de la côte orientale de la mer Noire.

3o Phénacite, nouveau minéral.

4o Extrait d’une lettre de Freiberg, du mois de novembre 1832. (Extrait des Annales des Mines.)

5o Table des accidens qui ont eu lieu dans les mines de Sasse, depuis 1825 jusqu’en 1831. (Extraite des Calendriers des mines de Freiberg.)

Dans le numéro 10 ; — 1o De la formation houillère en Russie, et des couches de houille qu’elle contient ; par M. Lubimoff.

2o Description géologique des environs de Marioupoul, dans le gouvernement de Ekatherinoslav ; avec une carte géologique ; par M. Ivanitsky.

3o Tables de la production des mines, des usines et des salines en Europe ; par Carl Schmidt. Eisleben, 1832 In-folio.

Dans le numéro 11 ; — 1o Description géologique (avec carte) des montagnes qui bornent la vallée de Kourlitchine, dans la partie orientale de Sibérie ; par M. du Toskin.

2o Description géognostique de la partie occidentale des gouvernemens d’Omsk, en Sibérie. (Avec carte et coupe).

3o Quelques mots sur l’exploitation régulière des mines ; par Bouteneff.

4o Notions sur quelques minerais russes nouvellement découverts ; extrait d’une lettre de M. Breithaupt, à Freiberg.

5o Extrait d’une lettre de M Breithaupt à M. Jossa. Dans le numéro 12, — 1o Description du nord de l’Oural, au-delà de la colonisation, faite par une expédition de 1832. Protossoff.

2o Description des montagnes qui bornent la vallée de Kourhidschr. (Fin).

5o Description de la partie orientale du gouvernement d’Omsk. (Fin).

4o Exploitation des pompes employées dans les mines.

5o De l’importance de l’exploitation ; par M. Bouteneff.

En adressant à la Société sa Carte géologique générale de la Styrie, M. Anker, professeur à Gratz, annonce 1o qu’il la fera suivre d’une carte plus détaillée dès qu’il sera pourvu d’une bonne carte géographique 2o que les chiffres placés sur sa carte y indiquent les hauteurs en toises de Vienne ; 3o qu’il a découvert des débris de Trionix dans le lignite de la molasse de Schonegg, et d’autres ossemens dans celui d’Eibiswald ; il offre d’en envoyer des échantillons à la Société.

On communique l’extrait suivant d’une lettre adressée à M. Boué par M. Glocker :

1o Un enduit de poix minérale a été observé sur un échantillon de lave scoriacée à surface vitrifiée, qui provenait de l’ile Ferdinandea ou Cenerentola (île Julia).

2o On a ouvert en 1833 l’ancienne mine d’or des environs de Zuckmantel en Silésie, et on y a trouvé des particules d’or accompagnées de pyrite au milieu d’un talc schiste quartzeux.

3° On a découvert de la véritable craie tachante près de Neudorf, à un quart de mille d’Oppeln, en Silésie. Elle est recouverte d’argile à cristaux de sélénite. La craie compacte et dure qui avoisine la craie tachante a offert de belles pétrifications, savoir : des Échinites, des Astroïtes, des Rétéporites, des Mytiloïdes, des Térébratules, des Ammonites, etc., dont M. Glocker se réserve de parler en détail dans un Mémoire particulier.

4° Près de Dembin, à 1 mille et demi d’Oppeln, il y a une petite butte basaltique qui offre de la mésotype, de la chabasie, de la stéatite, et un minéral siliceux verdâtre, qui se fond avec le basalte.

5° Près de Reichenstein, où il y a des serpentines et du calcaire grenu, on a trouvé dernièrement de beaux échantillons de picrolithe, et la dolomie de Weisswasser a offert de la grammatiste asbestoïde.

M. Hermann de Meyer annonce devoir publier en septembre prochain une description des ossemens fossiles des environs de Georgensmund en Bavière, et de leur gisement. (Die fossilen knochen der gegend von Georgensgmund, etc. Francfort, sur le Mein. In-4°, avec 14 pl.). Il y traitera surtout des genres Palœomeryx, Palœotherium, Dinotherium et Mastodon, ainsi que d’autres animaux vertébrés voisins des Rhinocéros et des Cochons.

M. Virlet communique la note suivante, extraite d’un journal périodique :

« Une chute d’aérolithes eut lieu, à la fin de novembre dernier, à Kandanhor, ville de l’Inde. Ces pierres tombèrent en si grande abondance, et étaient d’une telle grosseur, qu’un grand nombre de toits furent percés, et que plusieurs s’écroulèrent. Un enfant de douze ans, étant allé dans la cour de sa maison, fut frappé avec une telle violence par un de ces météores enflammés, qu’il tomba mort sur le carreau. Le phénomène fut suivi d’un brouillard si épais, que, chose inouïe dans ces contrées, les rayons du soleil ne purent le percer pendant trois jours de suite. »

M. Dufrénoy commence la lecture d’un Mémoire sur les terrains tertiaires du bassin du midi de la France, dans lequel il se propose de prouver, par des raisons tirées de la superposition des couches, que les trois étages reconnus dans le sol tertiaire par M. Deshayes, à l’aide de la comparaison des fossiles, existent réellement dans plusieurs des localités qu’il a explorées.

Cette lecture donne lieu à quelques observations.

M. Boué demande si M. Dufrénoy rapporte au calcaire grossier parisien le calcaire de Lormon, près de Bordeaux. M. Dufrénoy pense qu’il n’y a pas de calcaire grossier à Lormon, mais que la molasse coquillière y est superposée au calcaire d’eau douce.

M. Constant Prévost (après avoir cédé le fauteuil à N. Michelin) fait observer qu’il n’est peut-être pas rigoureusement exact de dire, ainsi que M. Dufrénoy vient de l’avancer, que jusqu’en 1828 tous les géologues avaient identifié les terrains tertiaires du Midi avec ceux du bassin parisien, et que personne n’avait admis jusqu’alors de formations marines plus récentes que celles des environs de Paris ; il rappelle que, dans son Mémoire sur la géologie des environs de Vienne en Autriche, publié en 1821, après avoir fait ressortir les caractères généraux communs aux dépôts tertiaires viennois, à ceux des collines sub-apennines, et à plusieurs des côtes méditerranéennes et du midi de la France, il a été porté à regarder l’ensemble de ces dépôts, comme plus récens que le calcaire grossier de Paris, et qu’il ne l’avait cependant pas alors rapproché avec certitude de la formation des grès marins, supérieurs au gypse à ossemens, puisqu’il s’était borné à dire que, s’il fallait absolument rapporter ces dépôts à l’une des deux grandes formations marines des terrains parisiens, ce serait de préférence à la dernière.

Dans un second Mémoire, lu à la Société Philomatique, et dont l’extrait a été inséré dans son Bulletin (mai et juin 1825), il a émis une opinion beaucoup plus positive, en annonçant que dans les bassins du Midi on devait trouver des dépôts marins, formés après que le bassin de la Seine n’était plus occupé que par des eaux douces, c’est-à-dire postérieurement à la deuxième formation marine de Paris.

M. Constant Prévost ajoute que, depuis son voyage en Sicile et en Italie, il est de plus en plus porté à croire que, non seulement il faut diviser les terrains tertiaires en trois étages distincts, comme l’ont fait MM. Desnoyers, Deshayes et Dufrénoy, mais qu’entre ces trois étages on doit reconnaître des intermédiaires qui serviront à les lier ; il cite Malte et la Sicile, où l’on voit bien distinctement au-dessus des terrains sub-apennins, des dépôts calcaires très puissans qui reposent sur les premiers d’une manière contrastante. Ce sont ces dépôts que, dans la coupe générale de la Sicile, il a désignés sous le nom de terrain tertiaire moderne.

M. Dufrénoy répond à M. Constant Prévost que son travail n’a pas eu d autre but que de résoudre une question de fait, en établissant par les superpositions la preuve que la distinction des trois étages tertiaires existe réellement dans les points qu’il a observés, et que, par cette raison, il a cru, devoir ne remonter qu’aux recherches de M. Desnoyers, dont le travail avait, d’une manière positive, démontré la superposition des terrains méditerranéens sur les meulières des environs de Paris.

La question soulevée par M. Constant Prévost donne lieu à une discussion à laquelle prennent part MM. Deshayes, de Boissy, Boubée, des Genevez, et Élie de Beaumont.

M. Fournet remet une note dans laquelle il annonce l’existence d’un nouvel hydrate de fer naturel, analogue à celui qu’on obtient dans les précipitations chimiques des sels de fer, c’est-à-dire plus hydraté que l’hydrate anciennement connu. Ce dernier ne renferme que 12 p. 100 de fer, tandis que le nouveau en contient 25 p. 100.

Séance levée à dix heures et demie.