Bladé - Contes populaires de la Gascogne, t. 3, 1886.djvu/La Dame corrigée

VII

la dame corrigée



Il y avait, une fois, une dame si méchante, si méchante, qu’elle avait, en trois ans, fait mourir trois maris de chagrin.


Cette dame se remaria encore une fois. Après la messe, les mariés montèrent à cheval, et partirent pour leur château.

Le mari, qui avait entendu parler de la méchanceté de sa femme, profita du voyage pour lui donner une leçon.

Il avait amené un petit chien ; mais cet animal ne voulait pas suivre son maître. Que fait alors celui-ci ? Il arme un pistolet, et casse la tête au petit chien.

— « Tenez, Madame. Portez en croupe la charogne de ce petit chien, qui n’a pas voulu m’obéir. »

La dame, épouvantée, prit en croupe la charogne du petit chien, et ils se remirent en chemin.

Au bout de trois lieues, ils arrivèrent au bord de la rivière du Gers, qu’il leur fallait traverser à gué. Mais le cheval de la dame ne voulait pas. Il ruait, et hennissait de tout son pouvoir. Que fait alors le mari ? Il arme un autre pistolet, et casse la tête au cheval.

— « Tenez, Madame. Prenez sur votre dos, la selle de ce cheval, qui n’a pas voulu m’obéir. »

La dame, épouvantée, prit la selle sur son dos ; et ils se remirent en chemin. À l’entrée de la nuit, ils étaient dans leur château.

— « Valet, dit le mari, apporte-moi un bassin d’eau chaude. »

Le valet obéit.

— « Madame, ôtez-moi mes bottes, et lavez-moi les pieds. »

La dame, épouvantée, ôta les bottes et lava les pieds de son mari.

— « Maintenant, Madame, c’est à mon tour de vous servir. N’oubliez jamais que je serai pour vous ce que vous serez pour moi. »

La dame comprit la leçon ; et, depuis, elle fut toujours soumise à son mari[1].

  1. Dicté par Élie Rizon, du Pergain-Taillac (Gers).