Bladé - Contes populaires de la Gascogne, t. 2, 1886.djvu/Le Curé au Sabbat

IV

le curé au sabbat



Il y avait, une fois, une servante de curé que les gens accusaient d’être sorcière.

Son maître finit par le savoir.

— « Mie, lui dit-il un samedi soir, les gens t’accusent d’être sorcière.

— Monsieur le curé, ils en ont menti.

— Voyons, mie, dis-moi la vérité.

— Monsieur le curé, ils en ont menti.

— Mie, si tu es sorcière, tu peux te fier à moi. Je veux t’accompagner au sabbat. Dis-moi comment il faut m’y prendre.

— Eh bien, Monsieur le curé, je vais tout vous dire. Mettez le pied sur ce balai en criant :

« Hardi, balai,
Jusqu’à l’heure et demie[1]. »

Le curé prit son eau bénite et son goupillon, mit le pied sur le balai, et cria :

— « Hardi, balai,
Jusqu’à l’heure et demie. »

Le balai partit, à travers les nuages, cent fois plus vite que le vent. En cinq minutes, le curé et sa servante étaient rendus au lieu du sabbat. C’était un beau château, comme le roi n’en a pas de pareil. Sorciers et sorcières, dansaient au son des violons. Quand ils étaient las, ils allaient s’asseoir à de grandes tables, chargées de plats et de vins de toute espèce.

Le curé, à moitié mort de peur, secoua l’eau bénite avec son goupillon.

Tout disparut aussitôt. Le curé se trouva porté, sans savoir comment, dans un nid de pie, à la cime d’un peuplier, entre les rivières du Tarn et de l’Aveyron[2].

  1. En gascon cela forme deux vers.

    Hardit, barejo,
    Diuqu’a l’ouro e mièjo.

  2. Dicté par Antoinette Sant, née Cousturian, de Sarrant (Gers).