Biographies des principaux astronomes/Régiomontanus

Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciencesGide3 (p. 171-172).


RÉGIOMONTANUS


Jean Régiomontanus, dont le véritable nom était Muller, naquit le 6 juin 1436, dans le village d’Unfind, près de Kœnigsberg, duché de Saxe-Hilburghausen, dépendant de la Franconie. Il mourut à Rome, le 6 juillet 1476, les uns disent de la peste ; suivant les autres, et cette opinion est la plus accréditée, il tomba victime d’un guet-apens que lui tendirent les enfants de Georges de Trébisonde pour avoir relevé les fautes que leur père avait faites dans sa traduction de Ptolémée.

L’histoire littéraire a enregistré les nombreuses critiques acerbes qui se sont élevées en divers temps entre des érudits ; le trait que l’on vient de citer est peut-être l’unique exemple d’un assassinat ayant pour cause des barbarismes ou des solécismes signalés dans une traduction.

On doit à Régiomontanus un grand nombre d’ouvrages et d’opuscules dans lesquels il s’occupe des problèmes les plus variés de l’astronomie. L’indication des méthodes qu’il a mises en pratique n’aurait aujourd’hui aucun intérêt. Ses observations sont peu nombreuses et ne conduisent à aucune découverte. Si, comme on l’a prétendu, Régiomontanus fut le plus célèbre astronome de son temps, cela ne fait pas l’éloge de ses contemporains.

Régiomontanus, non-seulement croyait à l’astrologie, mais il déclara sa croyance publiquement à Bologne dans un de ses ouvrages, et il n’hésitait pas à dire qu’il travaillait pour les « amateurs de son art ». Dans ses Éphémérides de 1499, on le voit rechercher quels sont les aspects de la Lune les plus favorables à la saignée, et sur quelles parties du corps humain les divers signes du zodiaque influent plus spécialement. Ces traits de crédulité sont un nouvel exemple de la lenteur avec laquelle l’esprit humain se débarrasse des plus absurdes préjugés.

En astronomie proprement dite, on doit à Régiomontanus la remarque très-fondée que, si le système de Ptolémée sur les parallaxes de la Lune était exact, le diamètre de cet astre serait quelquefois double de celui qu’on observe.

Régiomontanus avait été appelé à Rome par Sixte IV, qui désirait déjà le consulter sur la réforme du calendrier. Il disait, dans un ouvrage qui n’a été publié qu’après sa mort : « Il est temps de nous mettre à l’abri des reproches et des plaisanteries des Juifs à l’occasion de l’anticipation des équinoxes et des désordres qui en résultent dans la célébration de la Pâque. » Ainsi la puissance des plaisanteries était déjà reconnue vers la fin du xve siècle par les plus graves personnages.