Biographie universelle ancienne et moderne/2e éd., 1843/SCALA (Barthélemy)

Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843
Tome 38 page 193 à 194

SCALA (Barthélemy)


SCALA (Barthélemy), homme d’Etat et homme de lettres, né en 1430 à Colle de Valdelsa, en Toscane, vint à Florence pour y étudier le droit et prendre le degré de docteur. Fils d’un pauvre meunier, sans relations et sans appui, il sut, par son propre mérite, s’élever aux premières charges de la république, dont il mania longtemps les affaires. Côme et Pierre de Médicis, frappés de ses progrès, le prirent à leur service, et en encourageant son talent, lui ouvrirent le chemin des honneurs. Revêtu de la dignité de chancelier et du caractère d’ambassadeur, Scala parut, en 1484, à la cour d’innocent VIII, pour le féliciter sur son exaltation au pontificat. Cette mission lui valut le diplôme de secrétaire apostolique, et, peu après son retour de Rome, le rang de gonfalonier de la république à Florence. Aspirant à la réputation d’écrivain, après avoir franchi tous les degrés de l’ambition, il se montra jaloux du mérite de Politien, auquel il enviait peut-être la faveur des Médicis ! Ils eurent des disputes très-vives sur la langue latine, et dissertèrent gravement sur le mot culex pour savoir s’il fallait plutôt l’employer au masculin qu’au féminin. Ils se reprochèrent aussi l’inégalité et l’affectation de leur style d’un ton qui doit paraître très-choquant aujourd’hui, mais qui était moins extraordinaire de leur temps, où l’on était habitué à voir les gens de lettres se déchirer mutuellement pour les questions les plus futiles, et démentir, par leur exemple, les leçons de modération et de prudence qu’ils ne manquaient jamais de donner dans leurs ouvrages. Scala avait composé, à ce que l’on prétend, un poème philosophique dans le genre de celui de Lucrèce, et quelques apologues maintenant ignorés, mais qui, par la gravité des préceptes et par la bizarrerie de l’invention, obtinrent alors un succès universel. Il entreprit aussi d’écrire l’histoire de la ville de Florence, et s’était proposé de la diviser en vingt livres, dont il n’a laissé que les quatre premiers avec le commencement du cinquième ; sa mort, arrivée en 1495, l’empêcha de la continuer. Ses ouvrages sont : 1° Ad Innocentium VIII, summum pontificem, oratio, Florence ; 2° Pro imperatoriis militaribus insigniis dandis Constantino Sfortioe imperatori, ibid., 1481, dis cours prononcé dans la place du Peuple, à Florence, en remettant à Constant Sforza, seigneur de Pesaro, les insignes de chef militaire de la république ; 3° Apologia contra vituperatores civitatis Florentina, ibid., 1496, in-fol. ; 4° De historia Florentina, Rome, 1677, in-4o, imprimé par les soins de Magliabechi, insérée par Burmann dans le tome 8 de son Recueil des histoires d’Italie. Cet ouvrage s’arrête aux apprêts de la bataille de Tagliacozzo entre Charles Ier d’Anjou et Conradin de Souabe. 5° Vita Vitaliani Borrhomoei, ad Petrum Mediceum, ibid., 1677, in-4o. Quelques-unes de ses lettres sont imprimées parmi celles de Politien, et d’autres dans un recueil publié par Bandini sous le titre de Collectio veterem monum. On trouvera d’autres renseignements sur Scala (connu aussi sous le nom de Vopiscus, qu’il avait pris, étant né jumeau), dans Zeno, Dissert. Voss., t. 2, page 253, et dans Manni, qui en a donné la vie, Florence, 1768. Voyez aussi Elogi degli uomini illustri Toscani, t. 3. page 70.

― Sa fille, Alessandra SCALA, non moins remarquable pour sa beauté que pour son instruction, épousa Michel Tarcagnota Marulli, poète byzantin, qui comptait parmi ses rivaux le célèbre Politien. Alessandra fut assistée dans ses études par Jean Lascaris et Démétrius Chalcondyle, qui lui apprirent le latin et le grec. Telle était la facilité avec laquelle elle parlait et écrivait ces deux langues, qu’elle put se charger du rôle d’Electre dans la tragédie de ce nom, de Sophocle, et répondre aux épigrammes grecques que lui adressait Politien avec lequel elle ne craignait pas de se mesurer. Plusieurs de ces pièces ait été imprimées avec les opuscules de Politien, recueillis et publiés par Acciajuoli. Alessandra mourut à Florence en 1506.

A-G. s.