Biographie nationale de Belgique/Tome 3/BUISSERET, François

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BUISSERET (François), archevêque, né à Mons au mois de septembre 1549, mort à Valenciennes, le 2 mai 1615, fut un homme remarquable pour son époque et dut à son mérite seul la position élevée qu’il occupa. Une énumération rapide des principales circonstances de sa vie montrera les travaux auxquels il s’est livré et qui l’amenèrent au siége archiépiscopal de Cambrai. Tout jeune encore il perdit son père; sa mère, restée seule chargée de son éducation, l’envoya aux écoles du chapitre de Saint-Germain, appelées aussi grandes écoles ou écoles au surplis, puis il étudia au collége de Houdain et entra au collége du Lys à Louvain, à l’âge de seize ans; deux ans après il obtint le second prix au concours général des diverses pédagogies; ses succès furent si rapides qu’à l’âge de dix-huit ans il professait la philosophie au collége dont il venait de quitter les bancs. Il commença aussi ses études de droit, qu’il délaissa pour approfondir la philosophie sous Bellarmin, et qu’il reprit ensuite. Nommé par le pape Sixte IV, chanoine de la cathédrale de Cambrai, il obtint un congé de deux ans qu’il employa à voyager en Italie; il alla à Rome et à Bologne où il reçut l’ordre de la prêtrise et le diplôme de docteur en droit. Fixé à Cambrai, il fut forcé de fuir lorsque les Français s’emparèrent de cette ville et en chassèrent l’archevêque Berlaymont qui transporta, avec l’autorisation de Grégoire XIII, le siége archiépiscopal à Mons. Après avoir passé quelque temps à Paris, où il enseigna le droit canonique, Buisseret revint, en 1580, rejoindre son supérieur à Mons, et fut nommé successivement official, archidiacre, doyen du chapitre et vicaire général. Il fonda à Mons une école dominicale d’après le plan donné par Pie V dans une bulle du 6 octobre 1567 et écrivit pour cette école un catéchisme dont l’usage s’est maintenu jusqu’à nous.

En 1586, Berlaymont ayant réuni à Mons un synode provincial, Buisseret fut chargé de compulser les saints Canons, de rassembler les lois ecclésiastiques et de les adapter aux circonstances où se trouvait la religion ; il s’acquitta de cette tâche avec grand talent, se fit remarquer par son savoir, par l’ordre et la clarté de ses idées et sa place fut marquée parmi les dignitaires de l’Église. Aussi, lorsque quelque temps après, en 1602, le siége épiscopal de Namur devint vacant, Buisseret fut désigné pour l’occuper. Il fut sacré à Sainte-Waudru. Dans l’intervalle, il avait été chargé de diverses négociations ayant pour but le siége de la ville de Cambrai qui fut reprise aux Français.

Buisseret dirigea l’administration de son évêché avec zèle. Profondément orthodoxe, et conséquent avec ses principes, il chercha par tous les moyens possibles à combattre l’influence des idées nouvelles ; il fonda à Namur une école dominicale, appela les jésuites, établit des couvents, convoqua deux synodes provinciaux en 1604 et 1605 ; et enfin, le 24 mars 1614, il fut élu archevêque de Cambrai, à la mort de Jean Richardot. Buisseret se rendit à son poste après avoir fait une retraite au monastère de Saint-Gérard. Il entreprit alors, quoique souffrant, la visite de son diocèse ; arrivé à Valenciennes, il y mourut, presque subitement, le 2 mai 1615, à l’âge de soixante-six ans et fut inhumé dans le chœur de la cathédrale de Cambrai.

Buisseret a écrit différents ouvrages. Nous connaissons de lui : 1° Déclaration de la doctrine chrétienne. A Mons, chez Charles Michel, 1587, in-8o. C’est la première édition imprimée à la demande et aux frais du magistrat de Mons. Ce catéchisme est connu sous le nom de Catéchisme du diocèse de Cambrai. — 2° Oraison funèbre sur le trespas et inhumation de très-illustre et excellent seigneur messire Emmanuel de Lalaing, marquis de Renty…… grand-bailli de Hainaut…… prononcée en l’église collégiale de N.-D. de Condet…… Mons, Charles Michel, 1591, in-12, 67 pages, gros caractères. — 3° Decreta synodi diœcesanæ Namurcensis anno Domini M.DC.IIII, in ecclesia cathedrali celebrata… præsidente R. D. Francisco Buisseret, episcopo Namurcensi. Lovanii, 1605. Réimprimé dans le recueil Decreta synodi Diœc. Namurc….. die 7 junii an. 1639. Namurci, Van Milst, 1630, in-4o. — 4° Decreta facta per R. D. Fr. Buisseret, in capitulari congregatione Concilii Geldoniensi, eodem R. D. præsente….. — 5° Histoire de la vie, miracles, et translation de Sainte-Marie d’Oingnies. Louvain, Rivius, 1609, pet. in-8o. Ouvrage devenu introuvable aujourd’hui.

Buisseret avait certes de grandes qualités ; il était fort instruit et s’occupait de ses fonctions avec un zèle remarquable ; mais il n’était pas exempt d’un travers qui contraste avec la rectitude de jugement que ses contemporains se sont plu à reconnaître en lui ; ce travers lui fut, du reste, commun avec d’autres célébrités de cette époque et c’est là une circonstance atténuante : Buisseret croyait aux sorciers, aux démons incubes, succubes et à toute cette famille diabolique si nombreuse. Il se flattait même d’avoir un pouvoir spécial pour les combattre. On trouve dans les Archives du Nord de la France publiées par Dinaux, deux anecdotes dans lesquelles Delmotte a signalé cette crédulité naïve de l’archevêque de Cambrai. Buisseret nous en a donné lui-même un exemple curieux dans le livre qu’il a publié sous le titre de : Discours admirable et véritable des choses advenues en la ville de Mois en Hainaut, à l’endroit d’une religieuse possédée et depuis délivrée, mis en lumière par ordonnance de Monseigneur Ill. et Rév. archevêque de Cambrai (Berlaymont)}}. Douai, 1586, de l’imprimerie de Jean Bogaert, in-8o. Ce livre, devenu rare, fit beaucoup de bruit à la fin du XVIe siècle. Il fut réimprimé à Mons, chez Varret, en 1745, in-8o ; des traductions en langue flamande et allemande furent publiées à Louvain en 1587 et à Munich, en 1589. Il existe de Buisseret un portrait sur bois, imprimé à Paris par Desrocher, en 1748, et un portrait sur toile qui se trouve au Musée de Mons ; ce dernier a été reproduit dans l’Iconographie montoise.

J. Delecourt.

Ad. Mathieu, Biographie montoise.