Biographie nationale de Belgique/Tome 2/BOUTTATS
BOUTTATS, BOUTATS ou BOTTATS. Sous ce nom patronymique sont mentionnés dans les biographies d’artistes plusieurs graveurs belges, la plupart Anversois de naissance. Bouttats (Frédéric), le premier en date, dessinateur, graveur à la pointe et au burin, est fils d’un peintre des mêmes nom et prénom, qui fut reçu franc-maître dans la gilde anversoise de Saint-Luc vers la fin de 1612, sous le doyenné de Sébastien Vrancx. Il naquit à Anvers en 1620, selon Immerzeel junior et Chrétien Kramm, vers 1630 d’après Huber et Rost, ainsi que d’après Charles Le Blanc: ce qui est évidemment erroné, puisqu’on a de Frédéric Bouttats le portrait d’Hermannus Tegularius, ecclesiæ Delphinensis pastor, au millésime de 1641. On ignore l’année de la mort de ce graveur, qui fut le chef d’une nombreuse lignée d’artistes, presque tous appartenant à la Belgique par leur origine ou par leurs œuvres, nommément Gaspard et Gérard Bouttats, ses deux frères; Philibert et Jean-Baptiste Bouttats, ses fils; Pierre-Balthazar Bouttats, fils de Gaspard.
Il paraîtrait que Frédéric Bouttats procréa quatre filles et vingt fils, dont douze se livrèrent à la gravure. Cette dernière assertion est difficile à contrôler, vu que les biographes ne font connaître ni les particularités de l’existence, ni les productions de la majeure partie d’entre eux. Ils ajoutent seulement les noms de Auguste et Pierre-François Bouttats aux susnommés, sans établir le degré de parenté, et même en indiquant très-vaguement leur origine. Frédéric Bouttats grava d’après divers artistes contemporains: J.-B. van Heil, portraitiste bruxellois; David Ryckaert, peintre de genre, et aussi d’après ses propres dessins. Charles Le Blanc, résumant les données biographiques précédemment publiées, mentionne vingt-huit de ses gravures, parmi lesquelles se distinguent trois estampes épisodiques, l’une représentant la Vierge-Mère avec l’Enfant Jésus et le petit saint Jean; l’autre des Cavaliers et des Dames jouant aux cartes, in-4o, sig. F. Boutats fecit; la troisième, une Scène des Métamorphoses d’Ovide, pour l’édition Banier. Les vingt-cinq autres pièces citées par Le Blanc sont des portraits; on y remarque ceux de Jean-Baptiste, de Daniel et de Léon van Heil, de Charles Emmanuel de Savoie, de Charles Gaspard, électeur de Trèves, de la reine Christine de Suède, du protecteur Olivier Cromwell, de Frédéric-Guillaume, électeur de Brandebourg, de Jean-Georges, électeur de Saxe, de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, David Ryckaert, peintre, toutes planches in-4o; de Charles le Téméraire, du pape Alexandre VII, d’Anne-Françoise de Bruges, de l’évèque d’Anvers Marie-Ambroise Capelle, du roi de France Louis XIII, de format in-8o.
bouttats (Gérard), dessinateur et graveur au burin, né à Anvers en 1634, selon Huber et Rost, en 1630 d’après Immerzeel. Frère puîné de Frédéric, il travailla d’abord dans sa ville natale, siége de l’école de gravure belge, passa ensuite en Autriche et s’établit à Vienne, où il obtint le titre de dessinateur et graveur de l’Université. Outre les sujets de Thèses et de dévotion qu’il exécuta, Gérard Bouttats produisit beaucoup de portraits, et ses œuvres sont en majeure partie dessinées et gravées par lui-même. Parmi ses portraits on cite avec éloge : Adamus Munds, medicinæ doctor, 1657; Antoine d’Aumont, l’archiduc Charles-Joseph d’Autriche, Don Pedro, roi de Portugal, in-4o. Vera effigies.... Comitis Nicolaï-Perpetui à Zrinio, Iohannes Thomas, 1665, in-folio. — Puis la Résurrection, sig. Gerhaert Boutats sculpsit Viennæ,in-folio; le Nom de Jésus, in-4o et l’Iconographia arcus triumphalis... Leopoldo... regi... Francofurti in Roman. Imp. electo, coronato Viennam reduci à collegio mercatorum extraneorum... positi die prima octob. 1658, in-folio en hauteur.
bouttats (Gaspard), dessinateur, graveur à l’eau-forte et au burin, né à Anvers en 1625, selon Immerzeel, en 1640 d’après Huber et Rost, Bruillot, Charles Le Blanc et Chrétien Kramm; ce dernier n’ose toutefois se prononcer entre les deux dates. Mort à Anvers en 1703. Il était le frère cadet de Frédéric et de Gérard. Il grava d’après les productions de différents peintres et d’après ses propres dessins, mais travailla spécialement pour les libraires-éditeurs. Entre autres publications dont on lui doit les planches, se présente en première ligne le Théâtre des villes et forteresses des Provinces-Unies des Pays-Bas (Tooneel der steden ende sterckten van ’t Vereenight Nederlandt), quatre-vingt dix planches avec le titre frontispice, in-folio oblongo. Ces représentations topographiques furent dessinées par le peintre Jean Peeters, et gravées à l’eau-forte par G. Bouttats, demeurant près de la Bourse, à l’enseigne de Sainte Marie-Madeleine de Pazzi, à Anvers. Il exécuta aussi des planches pour un ouvrage in-folio renfermant des Vues de Jérusalem et de ses environs, dessinées également par J. Peeters, puis, pour la Description des villes, havres et isles du golfe de Venise, des villes et forteresses de la Morée... mises en lumière par J. Peeters, « en Anvers » , in-4o, onze sujets en largeur. On cite encore de Gaspard Bouttats un frontispice composé pour l’Explication des Psaumes par saint Augustin, eau-forte in-folio, sig. Gaspard. Bouttats delineavit et fecit; le Massacre des Huguenots à Paris (la Saint- Barthélemy) et l’Assassinat d’Henri IV par Ravaillac (la deuxième édition est avec une inscription espagnole), grandes pièces en travers; la Décollation du comte Nadasti, du comte Cerini et du marquis Francipani, avec leurs portraitures, grand in-folio; la Tente du Vivandier, de Ph. Wouwermans; la Bataille de Nieuburg, en 1569; la Bataille de Nivelles, en 1674, et l’Entrée du comte de Monterey dans Envers par le pont des Vaisseaux, en 1674, quatre pièces en travers. Mentionnons aussi la Mort des frères De Wit, à la Haye, en 1672; la représentation de la grande cavalcade anversoise: Verbeeldinghe van den triomphanten jaerlyckschen ommeganck van Antwerpen; la Pourtraiture au vif comment le R. P. Marcus de Aviano a donné la bénédiction sur la plaine du chasteau d’Anvers, 22 juin 1681; la Procession votive à la Vierge, à Anvers (peste de 1688), enfin quelques bons portraits : Ignatius de Loyola, d’après Verbrugghen; S. Ogier, d’après Tys, 1682; Francisco Pizarro, Isabella Lusitana imperatrix, 1681; Fernando Mazellanes, Cornelis de Wit, 1672. — Gaspard Bouttats signait quelquefois ses gravures de ses initiales S. B. et de son adresse : Rue dicte de Lombarde-Veste, à Anvers. Sa marque se trouve sur plusieurs vues des villes de la Hollande.
On a de lui, ou d’un autre Gaspard Bouttats, dit Kramm, une planche représentant le patron de l’évêché d’Utrecht.
La matricule d’inscription de la Gilde anversoise de Saint-Luc (les Liggeren) nous manquant à partir de 1616, il est impossible de préciser les dates d’admission au delà de cette époque pour les artistes qui y reçurent la maîtrise. Mais quelques renseignements sont fournis par les comptes et d’autres documents contemporains. Le 14 octobre 1689, Gaspard Bouttats intervint dans l’exemption de service décanal accordée au peintre Pierre Ykens, moyennant le payement de soixante pattacons et le don d’un tableau de sa main pour la chambre des réunions de la Gilde. En 1690, notre artiste était Prince de la Chambre de rhétorique d’Anvers : la Violette, et, par conséquent, rhétoricien de mérite. La même année il fut élu doyen de la Gilde artistique de Saint-Luc, pour 1690-1691, et c’est sous son décanat qu’on décida que les doyens entrant en fonctions pourraient se rédimer, par un don de trois cents florins, de leurs obligations à l’égard des banquets usités. Il fut le premier dignitaire qui se soumit à cette résolution. En 1693, il faisait encore partie du serment de la Corporation comme ancien doyen, et remplissait la charge de trésorier (busmeester) de la Confrérie de secours mutuels, établie dans la Gilde. En cette qualité il fut l’un des cinq signataires de la requête présentée à Maximilien-Emmanuel, gouverneur général des Pays-Bas, en faveur de l’Académie des beaux-arts d’Anvers. Cette supplique, qui obtint le meilleur résultat, fut remise à Son Altesse Sérénissime après une représentation théâtrale des rhétoriciens anversois. La pièce, toute de circonstance : Les arts réunis (De vereenigde kunsten), était composée par Barbe Ogier, femme du sculpteur Guillaume Kerricx, alors prince et doyen fonctionnant de la Compagnie dramatique.
bouttats (Philibert), dessinateur et graveur au burin, né à Anvers vers 1650, d’après Huber et Rost, ainsi qu’Immerzeel, mais en 1656 selon Kramm; mort en cette ville, à l’âge de soixante-douze ans, au dire du dernier biographe. Ce fils de Frédéric Bouttats a gravé avec beaucoup de netteté un grand nombre de portraits. Huber et Rost croyent qu’il ne reproduisit que ses propres conceptions, puisqu’on ne trouve sous ses planches que son nom seul : Philibert-Bouttats sculpsit, sans indication de dessinateur ni de peintre. On cite de son œuvre vingt-trois pièces, dont les portraits du Pape Innocent XI, gr. in-folio; du Dauphin de France, fils de Louis XIV, et de la Dauphine Marie-Anne-Victoire de Bavière, pendants en ovale; d’Élisabeth-Charlotte, duchesse d’Orléans; de Guillaume-Henri, prince d’Orange; de Christian V, roi de Danemark; d’Herman Werner, évêque de Paderborn; d’ Éléonore-Madeleine-Thérèse, impératrice des Romains; de Charles II, roi d’Angleterre, de Marie-Stuart, reine d’Ecosse; de Louis XIV, de Godefroid Henschenius, de la princesse Thérèse de Pologne, tous portraits de dimension in-folio; d’Alexandre Sidney, ambassadeur, in-8o, et de Jean Sobieski, roi de Pologne, gravure qui a pour titre Janus III. Il y a encore de cet artiste une Thèse, avec le portrait de l’évêque de Munster, planche de format in-folio maximo. Charles Le Blanc donne les titres de deux estampes satiriques, qui eurent beaucoup de vogue : Vacarme au Trianon, ou le nouvel hôtel des filles et fils naturels de Louis le Soleiller, pour le consoler à l’égard de son Mars infortuné en Europe, in-folio en hauteur ; — Advis des médecins pour la grande maladie du grand Sultan et les remèdes de le guérir bientôt, in-folio en largeur. Ce Philibert Bouttats, que Chrétien Kramm nomme Philibert Bouttats le Vieux, et auquel il attribue un portrait de Charles II, roi d’Angleterre, d’après le chev. Lely (bien gravé), et le pendant : Léopold Ier, signé : Phil. Bouttats sculp. est le meilleur buriniste des Bouttats, bien que ses productions soient d’inégal mérite. Le biographe néerlandais émet l’opinion que le Philippe Bouttats, dont parlent certains auteurs artistiques, entre autres Charles Le Blanc, qui le fait travailler en Hollande, de 1683 à 1736, mais sans signaler aucune de ses œuvres, est Philibert Bouttats Junior, de qui il y a à citer une gravure in-8o, représentant Maximilien Willebald, agenouillé devant l’image de la Vierge-Mère, marquée par l’artiste lui-même : Ph. Bouttats Junior, Antv.
bouttats (Pierre-Balthazar), dessinateur et graveur au burin, né à Anvers en ou vers 1681, mort en cette ville le 7 février 1756 (selon Kramm 1666 et 1731, deux erreurs). Il se maria avec Marguerite-Françoise Laventurier, décédee le 4 octobre 1756. Les époux furent enterrés dans l’église de Saint-Jacques, leur paroisse. Pierre-Balthazar était fils de Gaspard Bouttats, son seul maître connu. De 1741 à 1755 il remplit gratuitement les fonctions d’un des directeurs-professeurs à l’Académie des beaux-arts d’Anvers. Son grand âge lui ayant fait prendre sa retraite, il fut remplacé le 1er octobre 1755 dans la direction académique et dans son professorat par le peintre Balthazar Beschey. Bouttats fut doyen fonctionnant de la Gilde de Saint-Luc en 1745 et 1746 ; trois ans après, en 1749, lorsque l’Académie fut disjointe de la corporation artistique, il était au nombre des membres, doyens anciens et doyens exerçant, qui acquiescèrent à la séparation et en stipulèrent les conditions. On connaît de lui plusieurs portraits : P. Franciscus Bartius, P. Conradus Janningus, 1723 ; P. Joannes-Baptista Sollerius, 1740 ; P. Joannes Pinius, 1749 ; Elisabeth-Christine, impératrice d’Allemagne, Marie-Élisabeth, archiduchesse d’Autriche, 1729 ; Marie-Anne, archiduchesse d’Autriche, 1731 ; toutes pièces de dimension in-folio. Il a gravé une planche ascétique : L’image du corps non corrompu de vén. mère Marie-Marguerite des Anges, religieuse du couvent des Carmélites à Anvers, décédée le 21 juin 1678, comme il a été retrouvé le 13e d’août 1716, in-4o. Sa production capitale, dit Piron, est Judas Machabée. Ni Kramm, ni Le Blanc n’en parlent. Il a signé quelques planches de ses initiales P. B. B. Les autres portent son nom en entier. Il travailla pour les libraires ou imprimeurs-éditeurs et leur fournit bon nombre de petits sujets religieux.
bouttats (Jean-Baptiste), dessinateur, graveur à l’eau-forte et au burin, travailla en Hollande vers la fin du dix-septième siècle. Il est cité par Fuessli, Zani et Brulliot ; c’était un des fils de Frédéric Bouttats. Sa naissance et son décès ne peuvent être précisés. On a de lui des gravures emblématiques, de format in-folio, et deux portraits : Charles III, roi d’Espagne, et le cardinal André-Hercule de Fleury.
bouttats (Pierre-François), peintre et graveur, se livrait à l’exercice de sa double profession en 1694, au dire de Charles Le Blanc, qui a puisé cette donnée dans Fuessli et Zani, mais qui ne désigne de l’artiste aucune production, soit de peinture, soit de gravure. Il l’appelle Peter-Franz Bouttats, ce qui laisse entrevoir qu’il séjourna ou s’établit en Allemagne. Était-ce un des fils de Frédéric Bouttats ? Il y a lieu de le croire.
bouttats (Auguste), dessinateur et graveur au burin, pratiquait son art à Cologne, vers 1670. On ne rappelle de cet artiste que les huit planches in-8o d’un ouvrage espagnol à l’usage des sourds-muets : Abecedario demonstrativo para ablar par la mano, catalogué dans la collection Van Hulthem, et deux estampes religieuses, sur lesquelles les biographies et les manuels ne donnent aucun renseignement technique ; ils n’en mentionnent pas même les sujets ou les titres.
bouttats (Frédéric), batteur d’or, né à Anvers, fut immatriculé en avril 1690 dans la corporation artistique de Gand. Les registres aux résolutions échevinales constatent, qu’à la date du 24 mai de cette année, fut admise une requête de Frédéric Boutthats, jadis habitant d’Anvers, sollicitant l’autorisation de s’établir à Gand, sous la protection spéciale du magistrat, et de s’y livrer au métier de batteur d’or. L’autorisation lui fut accordée, avec octroi d’exemption, pendant trois années, du service et de la contribution de la garde bourgeoise. Il y avait alors pénurie de batteurs d’or en cette ville ; de 1664 à 1690, trois seulement avaient pris la maîtrise : deux en 1665, un en 1686. Les artistes gantois s’approvisionnaient de feuilles d’or à Tournai.
Huber et Rost, Manuel des curieux et des amateurs de l’art, t. VI. — Brulliot, Dict. des monogrammes, chiffres et marques des peintres et des graveurs. — Charles Le Blanc, Manuel de l’amateur d’estampes. — Chrét. Kramm, Levens en werken der hollandsche en vlaamsche schilders, graveurs, etc. — Piron, Levensbeschryving, etc. — J.-B. Vander Straelen, Jaerboek der vermaerde en kunstryke gilde van Sint-Lucas, in Antwerpen. — Archives communales de Gand, Registres aux résolutions échevinales, 1688-1693.