Biographie nationale de Belgique/Tome 2/BOURGOGNE, Baudouin DE

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BOURGOGNE (Baudouin DE), diplomate et homme de guerre, baron de Bagnuola, seigneur de Marilly, de Bredam, de Falais et de Sommersdyk, né en 1445, à Lille. Il était fils de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, et de Catherine de la Tufferie, l’une de ses maîtresses. C’était le bon vieux temps, où la considération publique s’attachait aux enfants illégitimes des maisons princières, et où ceux-ci, se croyant des demi-dieux, se paraient à tout propos de l’irrégularité de leur naissance. Philippe le Bon, qui n’avait pas moins de douze, d’autres disent dix-huit enfants naturels, les combla de faveurs. Notre Baudouin en eut sa part. On l’appelait le bâtard de Bourgogne pour le distinguer d’un frère aîné, Antoine comte de la Roche en Ardenne, qui était le grand bâtard par héritage de Corneille, tué à Ruppelmonde en 1453. Homme de cour avant tout, il n’en était pas moins bon soldat. Il fit la campagne de 1466-67 contre les Dinantais et les Liégeois, et s’y distingua de manière à être cité dans toutes les chroniques de l’époque. En 1468, il se trouva au nombre des gentilshommes des Pays-Bas qui allèrent prendre, en Angleterre, la princesse Marguerite, fiancée à Charles le Téméraire, et plus qu’aucun d’entre eux il se distingua aux fêtes de Bruges, données à l’occasion du mariage de ce souverain, sous le nom et le personnage d’un chevalier de l’Arbre d’Or. Nul ne se serait douté alors que, deux ans plus tard, ce courtisan accompli conspirerait, à l’instigation du cauteleux Louis XI, contre la vie de son frère et maître, Charles le Téméraire.

Un Français, le sire de Crussol, ayant entendu parler de son mécontentement, vint le trouver, lui vanta la générosité de son roi et finit par lui inspirer l’idée d’entrer à son service. Louis XI résolut aussitôt, avec sa finesse habituelle, d’exploiter les intentions de notre personnage. Il lui fit faire sous main les propositions les plus brillantes, dans le cas où il l’aiderait à se débarrasser du duc de Bourgogne, son plus cruel ennemi. D’autres que Baudouin avaient à se plaindre; il n’aurait donc point manqué de complices et encore moins d’occasions de donner à un meurtre les apparences honnêtes d’un fatal accident; mais il n’y avait point en lui l’étoffe d’un grand criminel : aux premiers soupçons, il se sauva en France (décembre 1470). Charles le Téméraire demanda son extradition; non-seulement le roi de France la lui refusa, mais il fit don à Baudouin de la vicomte d’Orbec. Au bout de quelques années, le grand bâtard de Bourgogne ayant intercédé en faveur de son frère, Baudouin rentra dans les bonnes grâces du duc, ce qui nous paraît d’autant plus extraordinaire que le manifeste bourguignon de 1472 marque encore une vive irritation et que, d’ailleurs, la clémence de Charles le Téméraire n’apparaît nulle part dans l’histoire. Baudouin fut désormais un fidèle sujet : il se battit comme tel à Granson, à Morat et sous les murs de Nancy. À cette dernière affaire, il fut fait prisonnier en même temps que son frère, le grand bâtard, et conduit en France. « Dans la suite, » nous dit M. E. Galesloot, « il fut envoyé comme ambassadeur en Espagne pour traiter du mariage de Philippe le Beau avec Jeanne de Castille. Il déploya un grand luxe dans cette ambassade et se montra aussi noble que généreux. Bref, il se fit admirer des Espagnols et prouva qu’il était le digne époux de dona Maria de Manuel de la Cerda, qui elle-même était du sang royal de Castille. Il mourut en 1508, comblé d’honneurs et de richesses, et fut enterré à Falais, seigneurie importante, située près de Huy, qu’il avait acquise et non reçue en don de Philippe le Beau, comme le croit le baron de Reiffenberg et d’autres historiens. Il laissa quatre enfants légitimes et trois bâtards. »

C. A. Rahlenbeck.

Barante, Histoire des ducs de Bourgogne, édit. Marchal, Bruxelles, 1839, t. VII, p. 129. t. VIII, pp. 17-19, 68. — Le Petit, Grande chronique de Hollande, édit. de 1602, t. I, pp. 156-484. — E Galesloot, Jacques de Bourgogne, seigneur de Falais, et sa famille, dans la Revue trimestrielle, t. XXXIV, Bruxelles, 1862. — Mémoires de Philippe de Commines, liv. III, ch. i et ii.