Biographie nationale de Belgique/Tome 2/BEECKMAN, Élie
BEECKMAN (Élie), naquit à Dixmude et mourut dans la même ville, le 21 juin 1677. Il entra au service de la Hollande. En 1672, étant enseigne dans le régiment de Gaspard de Mauregnault, il fut chargé de la défense de la petite ville d’Ardenbourg contre les Français qui étaient entrés dans le pays et se trouvaient déjà campés à Deynze. Le commandant hollandais Jean Cau, qui, avec la plus grande partie de ses troupes, avait dû se rendre à L’Ecluse, abandonna Beeckman à Ardenbourg avec trente-huit soldats et cent soixante-iiuinze bourgeois, la plus grande partie de la population ayant quitté la ville en présence du danger qui la menaçait. Le 24 juin Beeckman reçut l’avis que les Français avaient quitté Deynze. Les magistrats s’assemblèrent et demandèrent au jeune commandant ce qu’il y avait à faire. Beeckman les encouragea à la résistance ; il confia aux bourgeois la garde des postes et les exhorta à se conduire bravement ; tous répondirent à son appel patriotique. Lorsque tout fut disposé et que l’assemblée était sur le point de se séparer, on reçut un avis envoyé de Gand par Jean de Kuip, que huit à neuf mille Français étaient partis le matin de Deynze même entre neuf et dix heures et se dirigeaient vers Ardenbourg.
Les magistrats, Beeckman et quelques notables bourgeois tinrent conseil pour délibérer sur ce qu’il y avait à faire dans un si grand danger. Le bourgmestre eût préféré rendre la ville moyennant des conditions avantageuses que de la voir ruinée, mais Beeckman ne partagea pas cet avis ; il répondit à cette proposition par ces énergiques paroles : « Je préfère être enterré avec mes soldats sous les décombres que de manquer à mon devoir, à mon serment et à mon honneur, car devant combattre pour mon pays, je ne suis pas maître de mon propre sang. » Ces paroles furent bien accueillies par tous les assistants ; un d’entre eux s’écria : « Oui !…. plutôt mourir que de laisser l’ennemi devenir maître de notre ville. » Personne alors n’osa plus parler de redditio, ou promit de rester fidèle, de se défendre jusqu’à la dernière extrémité, et l’on signa solennellement ce serment. Vers minuit les Français approchèrent de la ville et envoyèrent un trompette pour la sommer de se rendre ; un coup de canon répondit à cette sommation. L’attaque de la ville commença à la pointe du jour, mais l’ennemi fut énergiquement repoussé et dut se retirer. Le jour suivant, qui était un dimanche, il pilla et brûla tout ce qu’il put trouver dans les environs. Ce même jour, la garnison d’ Ardenbourg fut renforcée de quarante hommes. Une nouvelle attaque eut bientôt lieu. Dans leur précipitation les assaillants se jetèrent dans la demi-lune qui, à défaut de troupes suffisantes, n’avait pu être défendue et était restée complètement désarmée. Néanmoins, l’ennemi y reçut un terrible choc, car non-seulement les soldats et les bourgeois, mais aussi les femmes et les enfants défendirent la ville avec courage et acquirent dans ce siége une grande gloire. Comme on manquait de munitions et surtout de balles de fusil, on y suppléa à l’aide de débris de pierres que les femmes et les enfants préparaient et portaient aux combattants sur les remparts. A minuit, les assiégés, renforcés par cent dix soldats, venus de L’Ecluse, se jetèrent dans la demi-lune, que les Français avaient prise, y tuèrent tous ceux qui résistèrent et ne firent quartier qu’à ceux qui avaient mis bas les armes. Le restant de rarmce française prit la fuite vers Maldegem. Ainsi, après avoir éprouvé des pertes considérables, les Français se retirèrent honteusement devant les vaillants combattants de Beeckman. Ce brave officier, ayant excité la jalousie d’un de ses camarades, fut tué traîtreusement par lui. Son épée fut conservée comme une relique à l’hôtel de ville d’Ardenbourg.
Piron, Algemeene levensbeschryving der mannen, etc.