Biographie nationale de Belgique/Tome 2/BÉCAN, Martin

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BÉCAN (Martin) ou BECANUS, dont le nom flamand était probablement Verbeeck ou Vander Beeck, théologien et controversiste catholique, naquit à Hilverenbeck[1] (Brabant septentrional) vers l’an 1561, et mourut à Vienne, le 24 janvier 1624. Becanus avait étudié à Cologne chez les Jésuites, et entra dans leur ordre après avoir terminé son cours de philosophie. Ce fut de leurs mains qu’il reçut, en 1583, le diplôme de maître ès-arts, et, vers 1594, le bonnet de docteur en théologie. Ses supérieurs, appréciant ses talents, le chargèrent ensuite de l’enseignement de la théologie, et il occupa, avec distinction, pendant vingt-deux ans cette chaire, d’abord à Mayence, puis à Wurtzbourg et, enfin, à Vienne. Comme théologien, on a de lui de nombreux traités qui, publiés d’abord séparément, furent ensuite réunis sous le titre de Summa theologiæ scholasticæ ; Mayence, 1630, et Francfort, 1649, ou sous celui de Theologia scholastica universa. Ses œuvres théologiques eurent, sous ce dernier titre, un nombre considérable d’éditions. Becanus suit la méthode de saint Thomas, et quoique ses ouvrages soient parfaitement orthodoxes et pleins d’érudition, ils ne sont plus guère consultés aujourd’hui, la méthode scholastique n’étant plus employée dans les écoles modernes.

Mais c’est surtout comme controversiste instruit, ardent, infatigable, que Becanus fut remarquable et qu’il occupe une place dans l’histoire des luttes religieuses du xviie siècle. Pendant son séjour à Mayence, à Wurtzbourg et à Vienne, nous le voyons continuellement aux prises avec une nombreuse phalange d’écrivains et de théologiens protestants de presque tous les pays de l’Europe, tels que Philippe de Mornay, David Paraeus, de Heidelberg, Frédéric de Wolwarth, de Spire, Frédéric Baudouin, de Wittenberg, Lancelot Andrews, conseiller de Jacques Ier, Guillaume Toker, chanoine de Salisbury, Kobert Burhill, Conrad Graser, de Thorn, Guillaume de Pratis, Richard Harris, de Londres, Jean Sartorius, Helvich Garthius, de Prague, Jean Crocius, de Berlin, etc. ; et comme résultat de ces luttes, il publie trente-sept opuscules ou dissertations différentes sur les points les plus divers de la doctrine catholique. Il serait trop long de les énumérer ici, on en trouvera la liste dans Paquot, ou dans la Bibliothèque des écrivains de la Société de Jésus, par les frères De Backer, sér. I et VII. La plupart de ces ouvrages furent publiés primitivement à Mayence, l’auteur les réunit plus tard sous le nom d’Opuscula theologica, et plusieurs éditions en parurent à Mayence, Paris, Douai, Francfort et Rouen.

Parmi les ouvrages de polémique religieuse de notre auteur, il faut citer encore : De Republica Ecclesiastica libri quatuor, contra Marcum Autonium de Dominis, Archiepiscopum Spalatensem, nunc desertorem et apostatam. Mayence, 1618 ; et surtout son Manuale controversiarum hujus temporis, in quinque libros distributum. Ce manuel est peut-être le meilleur ouvrage de Becanus, et, sans contredit, celui qui rendit le plus de services à l’Église. Il s’en fit plus de vingt éditions qui se répandirent dans tous les pays de l’Europe. La meilleure est celle de Cologne, 1696, imprimée chez F. Metternich. Il a paru un abrégé de cet ouvrage : Compendium Manualis Controversiarum hujus temporis, qui fut également réimprimé un nombre considérable de fois. Outre la théologie dogmatique et morale, Becanus s’occupa aussi d’études scripturistiques, et il nous a laissé l’Analogia veteris et novi Testamenti. La réputation de cet opuscule se soutient depuis trois siècles, et il est encore aujourd’hui classique dans un grand nombre de séminaires de France et de Belgique. L’édition la plus correcte et la plus complète est celle de Malines, 1831. Tous ces ouvrages reçurent l’approbation des docteurs catholiques, il n’y eut que son traité De Controversia Anglicana de potestate regis et pontificis, Mayence, 1612, qui fut condamné, à Rome, sous Paul V ; mais l’auteur se soumit et corrigea son travail dans l’édition de 1613.

Les biographes de Becanus nous le montrent simple, pieux, affable, éloquent, tout dévoué à ses élèves, préférant la science et le bien de l’Église à la gloire et au pouvoir de son ordre ; aussi mourut-il regretté de tous, même de beaucoup de protestants, en laissant un beau nom parmi ceux des théologiens les plus célèbres du xviie siècle.

Eugène Coemans.

Moréri, Dict. hist., t. II, p. 165. — De Feller, Biogr. univ., Paris, 1844, t. II, p. 171. (La date de sa naissance y est fausse). — Alegambe, Bibl. script. Soc. J., p. 325. — Paquot, Mémoires, t. VIII, pp. 343-369. — Aug. et Al. De Backer, Biblioth. des écrivains de la Comp. de Jésus, sér. I, pp. 56-60 ; sér. VII, pp. 74-78.


  1. Peut ètre bien tirait-il son nom de cette localité.