Biographie nationale de Belgique/Tome 1/BAUDOUIN IV (comte de Flandre)

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BAUDOUIN IV, comte de Flandre, connu par le surnom de Barbu ou de Belle Barbe, qu’il prend quelquefois lui-même dans ses chartes, était issu du mariage d’Arnoul le Jeune avec Suzanne, fille de Bérenger, roi des Lombards. Il était encore en bas âge, quand il succéda à son père, et sa minorité fut troublée par la révolte d’Elbodon, châtelain de Courtrai, noble astucieux, qui parvint à soumettre à son autorité toute la châtellenie, à l’exception d’Harlebeke, par les libertés qu’il accorda aux habitants. A sa mort, tout rentra dans l’ordre, et, quand le comte se vit en état de gouverner par lui-même, toutes les forces du marquisat étaient réunies dans ses mains. Il fallut bientôt y recourir. Othon, duc de Lorraine, étant mort sans enfants, le roi de Germanie, Henri le Boiteux[1], avait conféré le duché à Godefroid d’Eenham, au préjudice des comtes de Louvain et de Namur, beaux-frères du défunt. Plusieurs barons influents refusèrent de reconnaître le nouveau duc et attirèrent à leur parti les comtes de Hollande, de Hainaut et de Flandre. Le jeune Baudouin se montra le plus entreprenant. Traversant l’Escaut, il se porta rapidement sur Valenciennes, ville impériale, à cette époque, s’en empara en un coup de main et y mit une forte garnison. Revenu ensuite sur ses pas, il enleva la forteresse d’Eenham, résidence de Godefroid, et peu après le château impérial de Gand, toujours menaçant pour cette ville, qui était déjà une des plus importantes du comté. Vivement irrité de ces exploits, Henri somma vainement, à plusieurs reprises, Baudouin de s’en justifier devant les grands vassaux de l’empire ; le comte, qui se souciait peu d’obéir à ses ordres, répondit, ce qui était vrai, qu’il n’était pas vassal de l’empire, mais uniquement de la couronne de France. Il oubliait toutefois que le suzerain qu’il reconnaissait était l’allié du roi de Germanie. On en appela aux armes : Baudouin fut assiégé dans Valenciennes par les troupes réunies de l’empire, de la France et de la Normandie ; mais il se défendit si vaillamment que les coalisés furent contraints à se retirer avec perte, et leur chef ne fut pas plus heureux l’année suivante (1007), devant le château de Gand. Loin d’être enivré de ses victoires, le comte était douloureusement affecté à la vue des maux que cette guerre avait entraînés pour son pays. Il alla trouver lui-même le roi de Germanie à Aix-la-Chapelle et remit spontanément Valenciennes entre ses mains, ne demandant en retour que d’être admis dans son alliance. Charmé d’une démarche aussi généreuse, Henri accepta de grand cœur l’offre d’un prince dont il venait d’éprouver tant de fois l’habileté et la bravoure. Il lui rendit d’abord Valenciennes et y ajouta plus tard le pays de Waes, les Quatre-Métiers et quelques îles de Zélande, à tenir en fiefs de l’empire. Ces beaux domaines formèrent depuis avec le pays d’Alost, la Flandre impériale. En paix avec tous ses voisins, Baudouin put dès lors donner tous ses soins à rétablir l’ordre et la tranquillité du pays. Il espérait mourir en paix, quand son fils aîné, qu’il avait marié avec une fille de Robert, roi de France, se souleva contre lui, probablement à l’instigation de son beau-père, pour forcer le vieillard à abdiquer en sa faveur. Mais la rébellion fut réprimée assez tôt et le jeune prince s’estima heureux d’obtenir son pardon dans une assemblée de barons et de prélats, tenue à Audenarde. Baudouin IV mourut le 30 mai 1036.

J.-J. De Smet.


  1. Plus tard l’empereur saint Henri.