Biographie nationale de Belgique/Tome 1/BACKHUYSEN, Tilman-Guillaume

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BACKHUYSEN, Tilman-Guillaume



BACKHUYSEN (Tilman-Guillaume), connu sous le nom de Backhusius, écrivain polémiste, né à Ostende le 16 juin 1687, et mort à Bruges le 27 avril 1779. Il appartenait, par son père et par sa mère Barbe Bauwens, à une des familles les plus honorables de sa ville natale. Destiné à la carrière des belles-lettres, il fut envoyé, jeune encore, à Boulogne-sur-Mer, pour y faire ses humanités et acquérir, en même temps, la connaissance et l’usage de la langue française. Il se rendit ensuite à l’Université de Louvain, et y suivit les leçons de la faculté des Arts, au collège du Porc, avec l’intention de s’appliquer ensuite à l’étude du droit. Mais se croyant appelé à la vie religieuse, il quitta l’Université avant d’avoir achevé son cours de philosophie, et entra, comme novice, à l’abbaye d’Orval (Luxembourg), où l’on suivait la règle sévère de l’ordre de Citeaux. Les austérités continuelles qui s’y pratiquaient ébranlèrent en peu de temps la santé du jeune novice, et l’obligèrent à renoncer à la vocation religieuse. Il quitta Orval après un séjour d’une année, et voulut d’abord entrer dans la congrégation de l’Oratoire, puis retourna à Louvain, où il étudia la théologie, au collège de Sainte-Pulchérie ou de Hollande. Après quelque temps, Backhusius abandonna de nouveau les études, et se retira à l’abbaye cistercienne de Beaupré, en Lorraine, sans cependant y prendre l’habit religieux. Pendant qu’il résidait à Beaupré, il fut reçu à la cour de Nancy. Son séjour n’y fut pas long. Il revint de nouveau à Louvain, vers l’année 1710 ; puis un voyage en Hollande le mit en rapport avec le père Quesnel, qui se trouvait à Amsterdam pour se soustraire aux poursuites dirigées contre sa personne. Une étroite amitié s’établit entre eux, et Backhusius prit rang parmi le clergé schismatique de l’Église d’Utrecht. Passionné et d’un caractère ardent, il devint bientôt un des partisans les plus fougueux de la faction quesnelliste. Aussi tout fut-il mis en œuvre pour le faire entrer, le plus tôt possible, dans les ordres sacrés. En 1719, il se trouvait au nombre de ceux qui furent ordonnés prêtres, en France, par l’évêque de Senez, en vertu de lettres dimissoriales délivrées par les prétendus vicaires généraux d’Utrecht. De retour en Hollande, il fut d’abord nommé chapelain ou vicaire au Helder, petit village situé à l’extrémité nord de la Hollande, vis-àvis de l’île de Texel. Dix-neuf mois après, il passa, en la même qualité, à l’île de Nordstrand, dépendance du Danemark, et qui, pendant environ un demi-siècle, avait servi de lieu de refuge aux jansénistes les plus exaltés. Il y exerça les fonctions de vicaire jusqu’en l’année 1723, lorsqu’il fut nommé curé à Vianen, en Gueldre. Ce fut vers cette époque qu’il commença à avoir des doutes sur la légitimité du chapitre et de la hiérarchie ecclésiastique de la prétendue Église d’Utrecht. Un débat sur cette question, qui eut lieu entre quelques adeptes, et auquel Backhusius assista chez Erkelius, au béguinage de Delft, éveilla en lui le désir d’examiner de quel côté se trouvaient la vérité et le droit. Il ne tarda pas, grâce à la droiture de son caractère, à reconnaître qu’il s’était fourvoyé en s’attachant au parti janséniste ; et, dès l’année 1725, il abandonna le schisme pour rentrer dans le giron de l’Église catholique. Cette conversion inattendue déconcerta vivement ses anciens amis, et remplit leurs cœurs de dépit et de haine. Ils lancèrent aussitôt contre lui de nombreux pamphlets, dans lesquels ils le dénigraient de toutes les manières, mais surtout en lui reprochant sa trahison et son inconstance. Backhusius riposta vigoureusement à toutes ces attaques, et fit paraître, presque immédiatement, pour sa défense, trois ouvrages. L’année même de son abjuration (1725), il publia, sous le titre de : Plenaria Sedis Apostolicæ in Missionem Batavam asserta jurisdictio, un écrit ayant pour but de prouver que le chapitre d’Utrecht n’avait aucune existence légale ou canonique. L’année suivante parut la Responsio Apologetica, mémoire dans lequel il justifie péremptoirement la conduite qu’il a tenue, et expose les motifs qui ont déterminé son retour à l’Église. Le troisième écrit apologétique de Backhusius, portant le titre de : Bewysschrift, et imprimé à Utrecht, en trois volumes, de 1726 à 1732, traite le même sujet que le premier, mais d’une manière beaucoup plus étendue.

Après sa conversion, Backhusius se fixa d’abord à Malines, où il trouva deux protecteurs : le cardinal Thomas-Philippe, et son secrétaire Hoynck van Papendrecht, qui lui firent un accueil des plus bienveillants. Pendant les premières années de son séjour en Belgique, Backhusius fut chargé par ses bienfaiteurs de plusieurs missions relatives aux affaires des jansénistes de Hollande. Personne mieux que lui n’était en état de fournir sur ces affaires des renseignements exacts ; il connaissait parfaitement les intrigues de ses anciens amis, et, par cette raison, parvenait facilement à découvrir leurs nouveaux projets. Attaché, plus tard, en qualité de chapelain, à la maison du comte Frédéric de Harrach, premier ministre de Marie-Élisabeth, gouvernante des Pays-Bas autrichiens, il résida pendant quelques années à Bruxelles, jusqu’en 1739, époque où il fut nommé, par le souverain pontife Clément XII, chanoine à la cathédrale de St-Donat à Bruges. Il mourut dans cette ville, à l’âge de quatre-vingt-douze ans.

Tous les ouvrages qu’il a publiés traitent de l’histoire du jansénisme en Hollande, au commencement du xviiie siècle. En voici les titres :

Plenaria Sedis Apostolica in Missionem Batavam asserta jurisdictio ac prætensi Trajectensis capituli inanitas. Sans lieu d’impression, ni nom d’imprimeur, MDCCXXV ; vol. in-16 de 237 pp. — 2° Responsio apologetica Tilmanni W. Backhusii, e schismate Janseniano in pacem catholicam reversi, adversus turbulentos secessionis suæ criminatores. Amstelodami, J. van Septeren, 1726 ; vol. in-16 de 119 pp. Dans cet ouvrage, divisé en trois parties, l’auteur fait l’histoire de sa vie jusqu’au moment où il abandonna le schisme. — 3° Bewysschrift, aantoonende dat den Apostolische Stoel het volle geestelyk Regtsgebied over de Hollantsche Zendinge altyd gehad en wettig geoeffent heeft. Mitzgaders de Nietigheid en meenigvuldige Buitenspoorigheden van het onlangs verzonne Utregtsche Kapittel in drie deelen verdeelt. Tot Utregt, by Harmanus Beszeling, 1726-1732 ; 3 vol. in-16 : vol. I (1726) de xvi-133 pp., vol. II, de 254 pp., vol. III, de iv-viii-226 pp. Des exemplaires de cet ouvrage portant le même millésime et le nom du même imprimeur au titre, appartiennent cependant parfois à des éditions différentes. A la fin de la troisième partie, l’auteur en promet une quatrième, qui n’a pas été publiée. — 4° De Zegero Bernardo Van Espen, in Academia Lovaniensi J. U. Doctore, et SS. Canonum Professore, qui, ad evertendam potestatem ecclesiasticam natus, pessimis suis consiliis scriptisque perniciosissimis, Paschasio Quenello ac Erkelio collaborantibus, florentissimam Missionen Batavicam perturbavit ac diro Schismate dilaceravit, et Serenissima Maria Elizabetha, Archiduce Austriæ, catholicæ religionis clarissima vindice, Belgium Austriacum æterna cum laude moderante, a legitimo judice damnatus Lovanio in Hollandiam profugus, Amersfordiæ inter Schismaticos, quos quâ voce quâ scriptis Censuras Ecclesiasticas spernere docuerat, anno 1728, Schismati immortuus est. Authore W.(ilhelmo) B.(ackhusio) S. (acræ) R. (omanæ) C.(atholicæ), E.(cclesiæ), P.(presbytero) et E. (cclesiæ) C. (athedralis), B.(rugensis) F. ( ?) C. (anonico) ; vol. in-8o de 92 pp., sans date, nom d’imprimeur ni lieu d’impression. Ce petit volume, d’une rareté excessive, a été composé et publié par Backhusius vers l’année 1770. En parlant, dans une note, de l’évêque intrus d’Utrecht, Pierre-Jean Meindaerts, il le dit modo defunctus. Or ce prélat est mort en 1768. En 1827, cet ouvrage fut réédité à Malines par les soins de Mgr de Ram, sous le titre de : Acta Zegeri Bernardi Van Espen, in Universitate Lovaniensi J. U. doctoris et SS. Canon. olim professoris, Paschasii item Quesnellii et Christiani Erkelii circa Missionem Hollandicam, etc. Mechliniæ, P.-J. Hanicq, 1827. Deux éditions en furent faites en une seule année. Mgr Van Vree, évêque de Haerlem, lorsqu’il était encore vicaire à Amersfoort, publia une traduction hollandaise de l’opuscule de Backhusius.

E. H. J. Reusens.