Biographie nationale de Belgique/Tome 1/ANSIAUX, Nicolas-Gabriel-Antoine-Joseph

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ANSIAUX, Nicolas-Gabriel-Antoine-Joseph



ANSIAUX (Nicolas-Gabriel-Antoine-Joseph), chirurgien et professeur, né à Ciney, le 6 juin 1780, mort à Liége le 26 décembre 1834. Il était fils du précédent ; il accompagna, en Allemagne, son père, qui quittait Liége, à l’approche des armées françaises, avec le prince-évêque, dont il était le médecin, son titre devant l’exposer, à ce que craignait le prince, aux rigueurs qui atteignaient alors ceux qui avaient occupé des emplois auprès des cours.

De retour à Liége en 1795, il aborda l’étude de l’anatomie et de la chirurgie. Après avoir suivi le cours d’un médecin français et la pratique de son père pour la médecine, ainsi que de l’hôpital de Bavière pour la chirurgie et de Ramoux pour les accouchements, il prit, à 18 ans, le titre de chirurgien : l’exercice de la profession était libre alors. Mais bientôt il se rendit à l’École de médecine de Paris et y séjourna jusqu’en 1801, qu’il revint à Liége. La loi du 19 ventôse an XI (1803) étant venue mettre un terme aux abus, en rétablissant les grades académiques, Ansiaux se rendit de nouveau à Paris pour y recevoir le diplôme de docteur : il subit ses examens de la manière la plus distinguée. Sa thèse, Dissertation sur l’opération césarienne et la section de la symphyse des pubis (Thèses de Paris, an XII, no 119), fut remarquée et obtint plus tard une seconde édition ; il y précise les indications des deux opérations et les cas où la première seule est praticable. Vers le même temps, il publia, dans le Journal de médecine de Corvisart, t. II, des Réflexions sur la rupture du plantaire grêle, qu’il considéra le premier comme le déchirement de quelques fibres des jumeaux ou du soléaire.

De retour dans son pays, Ansiaux songea à relever la chirurgie de l’abaissement et de l’anarchie incroyable où elle était tombée. On sait que cette partie de l’art de guérir, longtemps confiée aux barbiers, n’a pris son rang dans les sciences que depuis la fin du siècle dernier ; sous ce rapport, notre pays était même bien inférieur à la France, à cause de l’abandon où la chirurgie était laissée à l’ancienne université de Louvain. Au pays de Liége, il n’y eut jamais d’enseignement régulier de l’art de guérir : quelques chirurgiens avaient pris leurs grades dans des universités étrangères, surtout à Montpellier ; la plupart, après avoir suivi six ans la pratique d’un maître en chirurgie, avaient subi quelques examens bornés à l’anatomie et à la clinique des tumeurs, des plaies, des fractures et des luxations. L’émigration qui suivit la révolution nous enleva encore une partie des hommes les plus capables ; puis le désordre et l’anarchie qui résultèrent de notre réunion à la France nous dotèrent, en l’absence d’examens, d’une foule de praticiens à peu près dépourvus d’instruction scientifique. Ansiaux aspira donc à fonder une école de chirurgie ; bientôt son condisciple Comhaire, de retour de Paris, s’associa à ses efforts comme il devait partager ses succès. En 1806, ils obtinrent de la ville un local pour l’enseignement public et gratuit de l’anatomie et de la physiologie. La même année, Ansiaux fut nommé chirurgien en chef de l’hôpital de Bavière ; il en profita pour introduire d’importantes améliorations dans cet établissement et pour instituer un cours de clinique chirurgicale. Aussi l’école de chirurgie de Liége prospéra rapidement et subsista jusqu’à la création des universités du royaume des Pays-Bas, en 1816. Outre l’honneur d’avoir fourni au pays une foule de praticiens instruits, admis, sur ses certificats, à l’examen de docteur à Paris, on lui doit d’avoir contribué puissamment à fixer le choix du gouvernement d’alors et à doter la ville de Liége de son université. À l’organisation de celle-ci, Ansiaux fut nommé professeur ordinaire et chargé d’enseigner la pathologie et la clinique chirurgicales, ainsi que la médecine légale. Cette dernière branche, abandonnée avant lui, devint l’objet de ses études favorites. En 1821, il publia, avec son collègue Destriveaux : Question de médecine légale ; précis des mémoires du docteur Pfeffer[1], écrits pour la défense de deux individus accusés d’avoir commis un homicide volontaire par étranglement et suspension, suivi d’un plan de cours de médecine légale ; Liége. L’année suivante, en déposant les insignes du rectorat, il prononça un discours latin, Oratio de medicinœ forensis historia ejusque dignitate (Annales de l’Université de Liége), qu’il reproduisit à l’ouverture de son cours de 1824 sous ce titre : Discours sur la médecine légale ; Liége, 1825. L’attente d’un nouveau code, la révolution de 1830, puis la maladie du foie qui le conduisit au tombeau, ne lui permirent pas de publier le traité dont il avait réuni les matériaux.

On doit encore à Ansiaux une Clinique chirurgicale ; Liége, 1816, qui eut une 2e édition, augmentée en 1829, et fut traduite en Allemand ; ouvrage clair, concis et instructif, riche des faits de sa grande pratique ; il y a reproduit ses travaux antérieurs, entre autres le Mémoire sur le traitement de la blennorrhagie (Bibliothèque médicale, t. XXXIX) par la potion de Chopart à haute dose dès le début ; et les Réflexions et observations sur la tumeur lacrymale adressées à la Société de médecine de Toulouse, en l’an XII : il y fait connaître un procédé opératoire qui ne diffère guère que par le traitement consécutif de celui que Dupuytren adopta plus tard. Il commença aussi la publication d’une édition de Callisen : Systema chirurgiœ hodiernœ Henrici Callisen, editio quinta innumeris correcta mendis notisque aucta. Leodii, 1821. On regrette que le second volume n’ait pas paru. Il a laissé en outre différents rapports et articles dans les Actes de la Société des sciences physiques et médicales de Liége, dont il était secrétaire, ainsi que dans les Procès-Verbaux de la Société d’Émulation de la même ville, dans laquelle se fondit la première société. Ses travaux lui valurent l’honneur de faire partie de beaucoup de sociétés savantes.

Ansiaux avait épousé, en 1801, Catherine-Joséphine Lafontaine, née à Liége en 1785 et y décédée en 1825, dont il eut deux fils : Nicolas-Joseph-Victor, qui le remplaça à l’université dans la chaire de chirurgie, et Émile-Louis, ancien avocat, échevin et bourgmestre de Liége, aujourd’hui retiré de la vie publique. À la mort de N.-G.-A. Ansiaux, ses collègues et ses amis ont fait frapper en souvenir de lui une médaille qui fut gravée par L. Jehotte.

G. Dewalque[2].


  1. Simon-Xavier Pfeffer, né à Huy le 8 février 1729, licencié en médecine de l’Université de Louvain, se dévoua au traitement des pauvres de Liége. Entraîné à prendre la défense de la veuve Debor, accusée d’avoir pendu son mari, de complicité avec son gendre, et deux fois déjà mise à la torture, il eut le bonheur de réussir après vingt mois d’efforts et de dégoûts ; mais ce succès l’obligea à se retirer à Louvain, chez le professeur Jacquelart, où il mourut quatre ans après, le 27 septembre 1772, à la suite d’une méprise qui lui fit administrer de l’arsenic au lieu d’un purgatif.
  2. ERRATA ET RECTIFICATIONS DU Ier VOLUME : ajoutez au bas de l’article de M. Dewalque : Dr Habets, Notice sur M. N.-G.-A.-J. Ansiaux. Liége, 1842.