Biographie nationale de Belgique/Tome 1/ANSELMO, Antoine
ANSELMO (Antoine), jurisconsulte et magistrat, naquit accidentellement à Hambourg[1] en 1589, d’une famille originaire du Limbourg et mourut le 16 novembre 1668. Il s’appliqua de bonne heure à l’étude du droit et se fixa comme avocat à Anvers, où il obtint, en 1616, le droit de bourgeoisie. En 1645, il fut nommé échevin de cette ville et resta jusqu’à sa mort investi de fonctions importantes que, d’après les coutumes d’Anvers, on ne pouvait exercer qu’en qualité d’ancien échevin. Revêtu plusieurs fois de cette fonction, il fut aussi chef de section, chef de police, juge de paix et membre de la chambre des pupilles, institution que nous ne connaissons plus aujourd’hui.
Anselmo épousa, le 22 mars 1617, Adrienne Voets, dont il eut trois fils et quatre filles. Il est enterré à Hoboken. Ses descendants par les femmes existent encore et appartiennent aux familles bien connues à Anvers, des Dellafaille, Van Havre et Vanderhaegen d’Eesbeke.
De tous nos anciens jurisconsultes, Anselmo est incontestablement le plus fécond ; il a laissé des travaux considérables auxquels il a dû consacrer sa vie tout entière. Au siècle dernier, il fut l’objet de critiques amères, surtout de la part de Christyn ; mais pour juger la valeur scientifique d’un homme, il faut avoir soin de ne pas l’isoler du temps où il vivait. Ainsi, au commencement du xviie siècle, nos provinces jouissaient bien d’un peu de repos après l’effroyable cataclysme qui avait marqué la seconde moitié du siècle précédent ; mais un grand désordre régnait encore dans la législation ; nos praticiens connaissaient peu le droit édictal de leur pays et empruntaient le plus souvent au droit étranger les motifs de leurs décisions. Anselmo entreprit de rassembler les placards, édits et ordonnances, de les expliquer et de les commenter. C’était certes une vaste entreprise qui exigeait beaucoup de science et de persévérance. Ces travaux ne sont pas parfaits, sans doute ; ils laissent même à désirer sous plusieurs rapports, mais leur utilité à l’époque de leur publication n’en est pas moins incontestable, et la meilleure preuve que l’on puisse en rapporter, c’est que le commentaire sur l’Édit Perpétuel, le plus important de tous, a eu trois éditions, et le Tribonianus belgicus en a eu deux.
Anselmo est d’ailleurs cité très-fréquemment comme autorité par les jurisconsultes qui, après lui, ont entrepris de commenter notre droit édictal.
D’après le cadre qu’il s’était tracé, Anselmo commença par la publication d’un recueil de placards sous le titre :
1o Placcaeten, ordonnantien, landtchartres, blyde-Incomsten, privilegien, ende instructien by de princen van dese Nederlanden, aen de inghesetenen van Brabant, Vlaenderen ende andere provincien, t’sedert ’t jaer MCCXX tot den jaere MDCXL, wtghegeven, gheaccordeert ende verleent, etc., etc. Vergadert ende onder bequamen titulen in order ghestelt door Antonium Anselmo. Antwerpen, Henri Aertssens, 1648 ; 2 vol. in-fo.
Ce recueil comprend les années 1220 à 1640. Il fut plus tard continué par Christyn et Wouters.
2o Codex Belgicus, seu jus edictale a principibus Belgarum sancitum, ofte de nederlandtsche, nieuwe soo gheestelycke als wereltlycke rechten, ghetrocken uyt de vier placcaet-boecken tot Gendt ende Antwerpen uytghegeven. Den tweede druck. T’Antwerpen, by Petrus Bellerus, MDCLXI ; in-fo 287 pages et 4 feuillets de table.
À la suite se trouvent :
Placcaeten, edicten, ende ordonnantien, daer van in desen Codex mentie wordt ghemaekt ende in de voorgaende vier placeaetboecken tot Gendt ende Antwerpen uytghegeven niet bekent en zyn ; in-fo de 349 pages.
Ce codex, écrit tout entier en flamand, est un répertoire de la législation belge à cette époque, fait par ordre alphabétique des matières, avec renvoi aux articles des édits.
3o Commentaria ad Perpetuum Edictum serenissimorum Belgii principum Alberti et Isabellœ evulgatum. — 12 julii MDCXI, etc., etc.. editio secunda. — Dimidia plus parte, plurimis in locis auctior et indice copiosiore, locupletior, tersior et castigatior opus, uti hodiernis utriusque fori praticis gratum, ita posteris futurum gratissimum et acceptissimum. Antverpiæ, apud Petrum Bellerum, MDCLI ; in-folio, avec une vignette représentant Albert et Isabelle dans un médaillon.
La troisième édition porte le même titre, mais apud Henricum et Cornelium Verdussen, anno MDCCI ; in-fo de 332 pages sans la table.
La première édition est sans doute assez rare, car nous n’avons pu parvenir à en retrouver un exemplaire. D’après la date de la censure, elle doit être de 1652.
À la suite, mais avec une pagination différente, se trouvent les articles des placards, joyeuses-entrées, édits, ordonnances, traités, etc., cités dans le commentaire ; 216 pp. in-fo.
C’est cet ouvrage d’Anselmo qui a été tout spécialement attaqué par Christyn ; mais il eut aussi ses panégyristes, notamment Raparlier et De Ghewiet. Ce dernier conseille même aux avocats de l’apprendre presque par cœur.
Ce commentaire, écrit en latin, est excessivement détaillé.
4o Tribonianus Belgicus, sive dissertationes forenses, ad Belgarum principum edicta, quæ potissimum in utroque foro, tam ecclesiastico, quam sœculari, allegantur et usitantur…. additœ sunt res judicatœ in supremis et provincialibus belgicis conciliis, nec non aliarum curiarum sententiœ. Bruxellis, typis Balthasaris Vivien, MDCLXIII ; in-fo.
La seconde édition porte après le titre : Editio nova, cui in fine additur Joannis Rommelii Dissertatio ad art. XIX Edicti Perpetui. Antverpiæ, apud Henricum et Cornelium Verdussen, MDCXCII ; in-fo de 424 pages.
La dissertation de Jean Rommelius, jurisconsulte brugeois, réimprimée à cause de sa rareté, existe également à la suite de la première édition du Tribonianus Belgicus, mais elle n’est pas mentionnée sur le titre ; elle comprend trente-six pages.
C’est un commentaire en latin du droit édictal.
5o Consultissimi domini Antonii Anselmo, consultationes seu resolutiones et advisamenta diurna….. Quibus addita sunt varia documenta concernentia curiam ecclesiasticam per eumdum congesta. Antverpiæ, apud Petrum Bellerum, MDCLXXI ; in-fo de 606 pages et 14 feuillets non cotés de table.
Ce recueil, qui a paru après la mort de l’auteur, contient cent quatre-vingt-deux consultations, les unes en latin, les autres en flamand, sur le droit coutumier, le droit public et le droit ecclésiastique. Ces consultations résument la carrière d’Anselmo comme avocat et couronnent dignement la série de ses publications.
6o Dans l’édition du Corpus Juris civilis, donnée par Simon Van Leeuwen, Amsterdam, 1663, 2 vol. in-fo, se trouve : Ad Universum Corpus Juris civilis Antonii Anselmo A. F. A. N. observationes singulares, remissiones, et notœ, juris civilis, canonici et novissimi ac in praxi recepti differentiam continentes.
Nous croyons que ces observations n’ont pas été publiées séparément, car malgré toutes nos recherches, nous n’avons pu parvenir à en découvrir un exemplaire.
7o Dans l’épître dédicatoire du Tribonianus Belgicus, 1662, Anselmo annonça la publication des ouvrages suivants :
a. Observationes ad consuetudines Antverpienses[2].
b. Commentaria ad jucundum eventum Philippi III, anni 1623.
c. Quœstiones practicœ quotlibeticœ congestœ.
d. Annotamenta ad concordata Brabantiœ.
Mais ces travaux n’ont jamais vu le jour et les manuscrits n’en ont pas même été retrouvés ; il est très-probable qu’ils n’ont existé qu’à l’état de projet.
- ↑ Jusqu’à présent tous les biographes avaient indiqué Anvers comme le lieu de naissance d’Anselmo. C’est une erreur.
En effet, d’une part, les registres de l’état civil d’Anvers ne mentionnent pas cette naissance, et, d’autre part, le livre consistorial de l’église de Stade, à Hambourg, mentionne, en 1589, la naissance d’un Antoine Anselmo, et, d’après les renseignements fournis par l’archiviste de cette ville, on ne voit plus de traces de cet Anselmo dans les années immédiatement précédentes et suivantes.
Enfin, le 8 avril 1616, Antoine Anselmo obtint le droit de bourgeoisie à Anvers ; son acte d’admission est conçu dans les termes suivants : « 1616, 8 april. Meester Anthoni Anselmo, advocat deser stadt, gheboren tot Hamborch. »
Cette mention du lieu de naissance qui se faisait sur la production de pièces authentiques, nous paraît de nature à faire disparaître toutes les incertitudes. Quant à la famille d’Anselmo, elle était originaire du Limbourg. Il nous l’apprend lui-même, dans son commentaire de l’Édit Perpétuel (Introduction, p. 10, § 2, deuxième édition), pour prouver que l’on faisait pour les Limbourgeois exception à la règle que les Brabançons seuls pouvaient remplir en Brabant des fonctions municipales. Il cite, comme exemple, son père, son aïeul paternel et son aïeul maternel qui, bien que Limbourgeois, ont été tous trois échevins d’Anvers. De tous ces faits nous croyons pouvoir conclure qu’Anselmo est né accidentellement à Hambourg. - ↑ M. Britz, dans son Mémoire sur l’ancien droit Belgique, t. I, croit que le manuscrit 13569 de la Bibliothèque de Bourgogne est le commentaire d’Anselmo sur les coutumes d’Anvers ; c’est évidemment une erreur, car l’auteur anonyme de ce travail cite souvent les décisions de Stockmans, qui n’ont paru qu’en 1670 ; il cite même Anselmo.