Biographie nationale de Belgique/Tome 1/ALBÉRON II

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ALBÉRON II, cinquante-neuvième évêque de Liége, mort en 1145. La déposition d’Alexandre II avait imprimé à l’évêché de Liége une tache déshonorante. Pour l’effacer, on choisit comme évêque un membre d’une famille princière. Albéron, de la maison des comtes de Namur, primicier de l’Église de Metz, fut appelé au siége épiscopal par la voix unanime du clergé et du peuple (1136). Préoccupé de ses droits de souverain temporel, il s’appliqua à récupérer les lambeaux arrachés du territoire liégeois par la rapacité des princes voisins. Son acte le plus important fut la reprise du château de Bouillon, dont Renaud, comte de Bar, s’était emparé la nuit, grâce à la trahison d’une partie de la garnison (1134). Après avoir vainement désigné le spoliateur aux foudres de Rome, après trois appels infructueux à la justice du suzerain, l’évêque, exaspéré par le ravage et l’incendie de Fosses, recourut à des armes moins trompeuses. Aidé par le comte de Namur, Henri l’Aveugle, il assiégea l’inaccessible forteresse. Les fils du comte de Bar, qui la défendaient, repoussèrent aisément plusieurs assauts, grâce aux obstacles naturels qu’offrait l’escarpement des rochers. Il fallut se résigner à un assez long blocus. La châsse de saint Lambert fut même apportée de Liége pour animer les troupes de l’évêque. La chronique assure à ce sujet qu’un des fils de Renaud, en regardant le saint reliquaire du haut des remparts, tomba frappé d’un soudain éblouissement, prodige qui hâta la capitulation (1141). Albéron eut moins de bonheur dans son gouvernement spirituel. Un incendie dévora la plus grande et la plus belle partie de Liége, d’affreuses tempêtes dévastèrent la contrée, et ces désastres furent, aux yeux des contemporains, d’irrécusables témoignages de la colère divine, allumée par la corruption des mœurs. Une grande dissolution régnait en effet parmi une partie des gens d’Église, et pour ne pas avoir su mettre un frein à ces déréglements, Albéron se vit assigné, par des membres de son propre clergé, à comparaître devant le pape. On l’accusait de ventes de bénéfices ; on lui imputait la perte de la discipline ecclésiastique, arrivée à ce point que des femmes habitaient in domibus claustri et que les prêtres disaient deux messes par jour. Albéron, en reprenant le chemin de sa patrie, mourut à Ostie près de Rome.

F. Hennebert.

Dewez, Histoire du pays de Liége. — Ægidius Auœrvallensis apud Chapeauville, t. II.