Bibliographie — L’irrigation en Égypte


BIBLIOGRAPHIE



L’irrigation en Égypte, par M. J. Barois, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, secrétaire général du Ministère des Travaux publics en Égypte. — Paris, Imprimerie nationale.

L’auteur a bien voulu offrir à la Société des Ingénieurs Civils cet ouvrage qui présente un très grand intérêt et que nous croyons devoir signaler à l’attention de nos collègues.

On a appelé l’Égypte la terre classique de l’irrigation ; or, un fait bien remarquable est que les traces si nombreuses qu’on trouve de l’histoire de ce pays dès les temps les plus reculés n’indiquent rien ou à peu près rien relativement à l’utilisation et à la distribution des eaux du Nil. Ce serait donc qu’à une époque relativement récente qu’on aurait commencé à substituer à l’inondation naturelle effectuée par le Nil des modes artificiels d’irrigation destinés à compléter celle-ci.

L’Égypte a, en général, la forme d’une vallée étroite, et à fond plat, de sorte que l’iodation peut s’étendre sur des distances considérables. Mais l’inondation ne suffit pas pour les besoins de la culture ; aussi avait-on cherché depuis longtemps à la compléter par la création de bassins d’inondation, sorte de réservoirs destinés à recevoir les eaux et formés d’abord d’une digue parallèle au Nil et assez élevée pour protéger le bassin contre l’inondation directe, puis de deux digues traversables allant de la première aux collines qui bordent la vallée. Il y a de plus un canal d’amenée d’eau et un canal de fuite. Certains de ces bassins ont des dimensions énormes, plusieurs milliers d’hectares de superficie. L’eau séjourne dans ces bassins plusieurs mois, de sorte qu’elle a le temps d’y déposer la plus grande partie de son limon. Il se produit ensuite un phénomène d’une autre nature et non moins important pour le résultat agricole. La terre se dessèche et se fendille, de manière à permettre une aération du sol et une pénétration profonde de l’air et de l’azote qui, à l’état très divisé, se trouve plus apte à être dissous facilement et transformé en produits qui seront ensuite assimilés par les racines des plantes.

Mais, depuis Mahemet-Ali, on tend substituer l’irrigation à la submersion et le système des bassins a été remplacé, d’abord dans la Basse-Égypte, puis dans une partie de la Haute, par des canaux d’irrigation qui permettent de cultiver le sol toute l’année et d’en retirer pendant l’été des récoltes riches, telles que la canne à sucre et le coton, tandis que les bassins ne permettent au sol de produire qu’une récolte d’hiver après la crue, après quoi il doit se reposer, faute d’eau.

M. Barois énumère comme suit les principaux résultats que l’on doit chercher à obtenir par l’exécution des travaux neufs relatifs à irrigation :

1o Améliorer les régions d’irrigation en rendant le débit des canaux, pendant l’étiage, aussi indépendant que possible du niveau des basses eaux, en diminuant les frais d’entretien, en relevant le niveau des eaux pour le rapprocher de la surface du sol, en régularisant l’écoulement du surplus des eaux d’arrosage ;

2o Substituer le régime des irrigations au système des bassins d’inondation dans la partie où ceux-ci subsistent encore ;

3o Régulariser le débit du Nil de façon à diminuer les crues trop fortes et à augmenter les étiages trop faibles.

On a commencé à réaliser ce programme depuis les conventions internationales de 1884, par des travaux répartis dans la Basse-Égypte, dans le Faynoum et dans la partie de la Haute-Égypte arrosée par le canal Ibrahimieh.

Ces travaux comprennent notamment la consolidation du grand barrage du Nil dû à Mougel-Bey et qui n’a jamais pu être que partiellement utilisé par suite de l’insuffisance de ses fondations.

La seconde partie du programme ne pourra être abordé de longtemps à cause des ressources financières trop limitées du pays. La réalisation de la troisième partie est naturellement encore plus éloignée, bien que des projets soigneusement étudiés et facilement réalisables aient été présentés par la Société des études du Nil. Rappelons à ce sujet que notre collègue, M. Cotard, a développé, cette intéressante question devant notre Société, dans la séance du 13 février 1884.

L’ouvrage de M. Barois donne la description des principaux ouvrages d’irrigation établis en Égypte, avec des détails sur la construction et l’entretien des canaux, des digues et des ouvrages d’art.

Nous signalerons parmi ces ouvrages, les usines élévatoires d’Atfeh et du Katatbeh : c’est dans cette dernière que sont établis les machines Farcot, dont notre président actuel, M. Brüll, nous a donné la description dans la séance du 5 novembre 1886.

L’auteur s’étend considérablement sur les procédés d’élévation, dont quelques-uns des plus primitifs tels que le nattal, le chadouf et le sakié, se sont transmis à travers les siècles avec le caractère de tradition et d’invariabilité que conservent la nature et les choses d’Orient, et sur l’emploi des eaux d’arrosage. La question agricole proprement dite, les cultures pratiquées en Égypte et les avantages résultant à ce point de vue de l’irrigation, sont étudiés très en détail et cette étude est complétée par l’examen des lois et règlements concernant la matière et du régime de la propriété foncière en Égypte.

L’ouvrage est accompagné d’un atlas de 22 planches donnant les cartes nécessaires pour l’étude du régime hydraulique du pays, les principaux ouvrages d’art avec les détails utiles, plus quelques photographies représentant les moyens classiques et primitifs d’élévation des eaux dont nous avons parlé plus haut.

Le Rédacteur de la Chronique,
A. Mallet.

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