Berceuse (Valère Gille)

Parnasse de la Jeune BelgiqueLéon Vanier, éditeur (p. 101).


Berceuse


Tout ce criard, ce va-et-vient, ces clairs éclairs
De soleil aveuglant, ce flamboi de cuirasse
Sur les toits, et ces cris assourdis d’une race
Sourde aux mystiques chants que ses voix ont couverts,

Ce n’est plus que lointains murmures à travers
La ville ! un fleuve d’or très lentement embrasse
L’azur assoupi du soir qui tombe : Sera-ce
Pour nous la paix du cœur dans ce monde pervers ?

Va, sommeille ! Plus rien ne bouge dans la vieille
Capitale, et moi seul, penché vers toi, je veille
Ton corps chaste parmi la blancheur des rideaux.

Ferme tes yeux divins, fleurs que la nuit fait clore
Plus doucement que les calices sur les eaux.
Mais dis, dort-elle aussi cette âme que j’implore ?