Babet l’empoisonneuse… ou l’empoisonnée/5

V

LA NUIT DU 1er AVRIL

Satisfait de ce résultat et docile à la consigne donnée par son astucieuse et tyrannique marâtre, Normont se révèle mari aussi tendre que charmant. Le 24 août il établit définitivement Babet à Choisy et, par comble de prévenance, il invite Leverd et sa femme à s’y installer également pour tenir compagnie à leur fille pendant qu’il va séjourner dans le Nord. Il pousse trop loin la sollicitude et, avant son départ, il conduit sa femme chez M. Duchef de la Ville, maire de Choisy, afin de la placer en son absence sous la protection de ce magistrat ; même il le prie de faire surveiller par la gendarmerie la maison qu’habite sa chère épouse. Que craint-il donc pour elle, puisqu’elle va vivre avec ses parents ? Ne doit-on point voir, dans cette ostentation de prévoyance, l’une de ces maladresses coutumières aux criminels trop prudents ?

Du reste, il soutient bien son rôle de mari empressé et généreux ; il commande chez un spécialiste en renom une bague faite de ses cheveux et figurant un chien, symbole de la fidélité ; ce précieux bijou est destiné à Babet. Normont part enfin, après mille recommandations amicales, la promesse formelle de ne pas rester dans ses terres plus de six semaines et des protestations réitérées sur l’irrévocabilité de sa résolution d’habiter désormais loin de madame de Mellertz et de ses domestiques.

Les premières lettres qu’on reçut de lui étaient du ton le plus tendre. Babet n’en revenait pas ; pauvre Cendrillon accoutumée aux dédains et aux affronts, elle osait à peine croire à un revirement si subit. Leverd, pourtant si méfiant, était dupe de cette métamorphose. Normont s’amendait ; on n’en pouvait douter et, sans rien contester des trop justes griefs de sa femme contre madame de Mellertz, il prêchait l’indulgence et l’oubli des injures. Le 6 septembre, il écrivait :


Je vois avec plaisir, mon amie, que vous vous amusez dans votre habitation et que, par conséquent, vous vous y trouvez heureuse… Vous rendez justice à votre tante en la croyant incapable de tenir aucun mauvais propos sur votre compte. D’après tout ce qui s’est passé, elle ne vous aime pas, mais voilà tout, et elle sait très bien se taire. Ce serait jeter une pierre qui retomberait sur elle. Ne lui envoyez pas de fruits puisqu’elle les refuse… Portez-vous bien, mon amie ; continuez à me faire part de vos aménagements et de vos projets. Je vous embrasse et vous réitère tout mon attachement.


Vers la même date, il pressait Leverd de le rejoindre dans le Nord. Le père de Babet se mit aussitôt en route et ne fut pas peu étonné, en arrivant à Avesnes, d’apprendre que madame de Mellertz, Julie et Véronique venaient d’y passer, se rendant à Dourlers où Normont faisait sa résidence. L’effet de cette réunion bien évidemment concertée, ne se fit pas attendre. Le 19 septembre, madame de Normont recevait de son mari une nouvelle lettre, combien différente de la précédente… Il signifiait à sa femme sa décision, — encore irrévocable, — de rompre leur union ; elle ne le reverra plus ; elle ne devra pas quitter Choisy qu’il lui abandonne et où il lui servira une rente convenable. — « Tous les jours, dans le monde, écrit-il, on fait de pareils arrangements. Il me faudrait, pour vous plaire, que je vous fasse l’hommage de toutes mes volontés ; à mon âge, cela ne se peut et ma condescendance ne me préserverait pas de nouvelles scènes. » Conclusion : séparation de corps et rupture absolue.

En recevant ce coup de massue inopiné, Babet, comme on doit s’y attendre, tomba en convulsions. Le lendemain seulement elle eut la force de prendre la plume et de répondre à son versatile époux une lettre dont il est indispensable de reproduire, malgré la longueur de la citation, les principaux passages, car elle est le premier rayon de lumière projeté dans l’ombre opaque de ce drame ténébreux ; Babet s’y débonde, sans restrictions, de tous les dégoûts accumulés depuis dix ans de contrainte ; en traçant le récit de sa vie misérable, elle se garderait bien d’un mensonge ou d’une exagération qui ôteraient toute valeur à ses doléances, puisqu’elle s’adresse à un homme parfaitement instruit des incidents auxquels elle fait allusion ; on peut donc ajouter foi à ce lamentable exposé, écrit manifestement à l’une de ces heures où l’âme se montre à nu et se soulage en un flux incoercible d’épanchements.


{{t|Ah ! mon ami, un poignard enfoncé dans mon sein m’aurait été moins douloureux que la lettre que je reçois de vous. Est-ce bien vous qui l’avez écrite ? Oui, je n’en peux douter… mais elle est de cette infâme Mellertz. Depuis trente ans qu’elle ne vous a pas quitté et que, en esclave soumis, vous n’avez pas d’autre volonté que la sienne, renoncez-vous aussi à l’honneur en rompant vos serments ? Serez-vous toujours tremblant devant cette femme déhontée ? Non, je ne puis le croire : vous abandonneriez votre infortunée épouse, et pour qui ?… pour la maîtresse de votre père, pour celle qui, dans ma maison et par moi, prise sur le fait, doit à ma modération le respect qu’on lui a porté depuis dix ans ! Je t’aimais, ingrat ! J’avais vingt ans, elle soixante ; j’étais ta légitime épouse. Je croyais qu’à force de soins et de tendresses, je posséderais seule toutes tes affections ; c’est à ta prière que j’ai consenti à tout pardonner… Quelle en a été ma récompense ? Des scènes continuelles entre cette Mellertz et moi. Tu as permis qu’elle dise en ta présence avoir du regret de ne t’avoir pas épousé comme tu le lui avais proposé en émigration ; tu m’as laissé victimer par cette femme ; tu as permis que l’on me plaçât toujours au bout de la table lorsque nous avions du monde ; que l’on me manquât à chaque instant ; qu’elle te dise continuellement, devant des étrangers, que je n’étais rien chez elle ; que c’était elle qui avait été, qui était et qui serait toujours la maîtresse. Quelle a été ma conduite ? Jamais je ne t’ai fait aucun reproche. Je croyais qu’une extrême douceur était le seul moyen dont une femme devait se servir, et que tous mes tourments finiraient. J’ai eu des malheurs peu communs ; ils ont contribué en partie à ta fortune. Eh bien ! De quelle manière m’a-t-on traitée ?… Cette Mellertz me refusait tout ce qui m’était nécessaire et ne cessait de me tourmenter dans l’espoir, je ne puis en douter, que les chagrins achèveraient ce que la frayeur n’avait pu opérer… Elle a exigé que je ne quitte pas la chambre où, ayant manqué d’être assassinée, j’avais des frayeurs affreuses. Et l’événement de la rue du Ponceau ! Ah ! mon ami, quelles sont donc les personnes acharnées à ma perte ? Cette Julie s’est permis de te dire que si, comme toi, elle avait une femme toujours malade, elle la prendrait par les cheveux et la jetterait par la fenêtre. Après un tel propos, que devais-tu faire ? Tu voyais mes larmes couler ; je tremblais pour l’enfant qui était dans mon sein. Par des mots sans suite, tu répondais à mes craintes ; et lorsque cette même Julie est venue, en ta présence, pour me frapper, sans mon père, peut-être m’aurait-elle assommée ; tu n’as bougé que lorsqu’il s’est agi de la défendre !… Par un peu de prudence tu aurais pu me préserver de grands malheurs. Et cette soupe qui a mis ma pauvre Caroline à la mort ! Ma tasse de café dont la suite a été de me priver d’un autre enfant ! Et cette autre soupe que j’ai mangée, à six heures du soir, les convulsions qui l’ont suivie et qui n’ont cessé qu’à onze heures ! Eh bien ! quelle protection m’as-tu accordée lorsque M. Asselin a ordonné que le bouillon pour mon usage soit fait dans ma chambre ? Tu lui as répondu que cela ne pouvait être, que ce serait manquer aux servantes de madame de Mellertz ; sur ce qu’il ajouta, tu as gardé le silence ; lorsqu’il est parti je t’ai prié de laisser préparer mon dîner sous mes yeux ; tu m’as dit que tu ne le voulais pas, que M. Asselin dirait ce qu’il voudrait, mais que le bouillon ne serait fait qu’à la cuisine. Je te l’avoue ici, dès cet instant, effrayée des vomissements de sang que j’avais dès que je mangeais ma soupe, je pris le parti de jeter le bouillon que l’on m’envoyait, qui était toujours si mauvais que l’odeur seule me levait le cœur. J’ai donc vécu pendant trois semaines d’eau sucrée ; encore fallait-il aller la nuit la chercher, car, dans le jour, on ne voulait donner à Sophie que de l’eau de puits, malgré que je payais celle de fontaine. De ce moment les vomissements ont cessé et malgré que je n’eusse que de l’eau pour nourriture, je me suis un peu remise… Toi qui m’adorais ! Toi qui préférais la mort que de me quitter ! Eh bien ! Aujourd’hui, tu penses donc différemment ? Jamais je ne pourrai le croire, moi qui ne t’ai connu que malheureux par l’empire que toutes ces créatures exerçaient sur toi ; tu n’avais que moi de véritable amie ; ce n’est pas pour ta fortune que je t’avais épousé puisque tu n’avais que 6.000 francs de rente sur lesquels tu avais donné, huit jours avant notre mariage, 4.000 francs à cette Mellertz. C’est donc toi que j’aimais ; j’ai tout fait et enduré pour que tu sois heureux. Et toi, veux-tu renoncer à toute estime et considération publique, et vivre aux yeux de tout le monde avec trois femmes perdues de réputation ? Ce même monde vous jugera sévèrement ; le cœur seul de ton épouse sera indulgent. Reviens, mon ami, près de celle qui voudrait, aux dépens d’une partie de son bonheur, faire le tien ; qu’on ne puisse pas dire que tu n’as de noble que le nom, que tu en abuses pour tenir une conduite indigne de lui. Rends-moi ce qui m’est dû : le bonheur. Depuis dix ans je l’aurais acheté assez cher et ne croirais pas encore l’avoir trop payé si je te voyais heureux par mes soins et séparé de viles créatures avec lesquelles je rougis d’avoir habité. Mais ce que je ne puis concevoir, ce sont vos prières pour que j’écrive, avant de partir, à cette Mellertz et la tournure que vous m’avez priée de donner à ma lettre. Vous me dîtes à cette époque que cela vous était nécessaire pour ne pas perdre sa succession. J’ai eu pour toi cette condescendance ; tu sais combien il m’en a coûté pour écrire ce que mon cœur désapprouvait… Je m’arrête ; jamais ce reproche ne sortira de ma bouche. Voici le premier que je t’adresse et j’espère que ce sera le dernier. Toute à toi et pour toujours ton amie et ton épouse.|90}}

É. Normont.

Il semble bien que si ce navrant tableau eût été chargé, Normont n’aurait pas manqué d’y répondre pour en relever les erreurs et remettre les choses au point. Il n’en fit rien. Sa femme lui adressa une seconde lettre, aussi longue, aussi déchirante que la première, puis une troisième, d’autres encore ; au total, dix. Il ne donna pas signe de vie. Septembre s’acheva, octobre s’écoula sans qu’elle reçût un mot de lui. Le 13 novembre, elle apprit que son mari, la Mellertz, Julie et Véronique étaient rentrés à Paris l’avant-veille. Elle écrivit rue Meslay, sans plus de succès. Enfin, dans les derniers jours du mois se présenta chez elle, à Choisy, un agent d’affaires, le sieur Granger, chargé par Normont d’instructions décisives. Ce n’était plus la séparation que le gentilhomme exigeait, c’était le divorce par consentement mutuel. En cas de refus, madame de Normont serait claquemurée dans une lointaine maison de retraite « où elle ne verrait personne et ne recevrait pas de lettres, même de ses parents ».

On passe ici sur les tergiversations, les atermoiements, les discussions, les pourparlers, marchandages, retardements de tout genre et autres complications juridiques, habituelles en ces sortes d’affaires. En dépit de sa répugnance et de ses principes religieux, l’infortunée Babet, terrassée et vaincue, dut consentir au divorce. Normont lui laissait la maison de Choisy et s’engageait à lui servir une rente viagère de 8.000 francs, sous condition qu’elle renoncerait à tous les avantages matrimoniaux résultant, soit du contrat de mariage, soit de tous autres actes quelconques ; elle perdait ainsi la nue-propriété des terres dont son mari lui avait fait naguère donation. Elle souscrivit à tout, sans une plainte, sans une récrimination. Et quand les notaires eurent dressé, — au début de mars 1813, — l’acte définitif concluant à la dissolution de l’union civile, Normont refusa de le signer.

Sa femme reprit espoir. Il regrettait donc sa détermination ? Le 16 mars, pensant encore le ramener, elle lui envoya une lettre suppliante, — la dernière :


{{t|Il y aura vendredi un an que j’ai perdu ta Caroline. Ah ! mon ami, tu me restais ! Combien mes peines étaient légères auprès de tout ce que j’éprouve aujourd’hui ! Si j’avais conservé notre fille, jamais on n’eût pensé à nous désunir. L’espérance soutient encore mon courage. Si tu suivais les mouvements de ton cœur, tu serais, j’en suis sûre, près de ton Élisabeth, par toi heureuse pendant dix ans. Combien je vais payer cher des moments aussi doux ! C’est par le reste d’une vie passée dans la douleur et le désespoir, que ton épouse abandonnée ne cessera qu’à son dernier soupir d’aimer celui qui lui avait juré, au pied des autels, de l’aimer toujours. Pourquoi même me refuser de tes nouvelles ? Crains-tu donc que j’éprouve quelque consolation ? Hélas, si je ne t’inspire plus de sentiments tendres, ne me refuse pas la pitié. Adieu, cher époux ; toute à toi et pour toujours. Ton Élisabeth.|90}}


À ce pathétique cri de douleur, Normont répondit :


Vous eussiez pu et dû, madame, vous dispenser de m’écrire. Je vous renvoie votre lettre.


Non, il ne la regrettait pas ; mais il regrettait les conditions, trop avantageuses au dire de madame de Mellertz, qu’il avait lui-même proposées pour prix de sa délivrance. La vieille tante supputait que 8.000 francs de rente viagère pouvaient être servis bien longtemps à une femme qui ne comptait pas vingt-neuf ans. En outre, madame de Mellertz ne se voyait pas sans dépit dépossédée de la maison de Choisy où elle avait coutume de passer la belle saison. Il fallait donc, ou renoncer au divorce, ou recommencer à marchander. On offrit à Babet, en échange de sa rente viagère, la nue-propriété d’un immeuble de la rue du Petit-Carreau dont l’usufruit appartenait à sa tante. Babet refusa et déclara se renfermer dans les conventions arrêtées.

Le 23 mars, appelée à Paris par son notaire, elle passait sur le boulevard de la Grange-Batelière, quand elle aperçut son mari. Il était accompagné d’un ami et avait une dame à son bras. Babet ne put résister à courir vers lui, l’arrêta par son habit et l’aborda avec vivacité. — « Madame, fit la dame, je suis avec monsieur de Normont. — Madame, riposta Babet, c’est mon mari. » La dame s’écarta aussitôt et Babet, très émue, profita de sa discrétion pour supplier Normont de mettre un terme à ses cruautés : — « Par pitié ! Pas de divorce ! » Très embarrassé de sa contenance, il répondit par « quelques mots insignifiants » et la quitta brusquement. Le lendemain, elle recevait chez ses parents, où elle avait passé la nuit, un mot de ce veule époux devenu subitement autoritaire. Il lui ordonnait de se rendre à Choisy et de n’en plus sortir. Il ajoutait :


Vous m’avez dit qu’actuellement vous ne vouliez plus de divorce. Je n’en veux pas davantage. Soyez persuadée, madame, que votre tante, ni qui que ce soit au monde, n’a contribué au parti que j’ai pris… Les domestiques de votre tante n’ont rien de commun avec vous ni avec moi. Personne n’a le droit de faire la loi à votre tante. C’est donc en pure perte que vous débitez des horreurs sur leur compte.


Le billet était signé Normont ; il aurait dû être signé Mellertz et Julie : il est évident que, la veille, rentrant de sa promenade et racontant aux deux femmes la rencontre qu’il venait de faire, elles lui avaient dicté cet étonnant ukase où elles se déclaraient préventivement étrangères à la solution qu’elles méditaient. Pourtant Babet, ayant à voir Me Chodron, le notaire des deux parties, restait à Paris, chez ses parents, qui habitaient à quelques pas de la maison Normont. Le 24, madame de Mellertz l’aperçut de sa fenêtre ; elle informa sans tarder son pupille que « cette fille » transgressait insolemment ses ordres et elle lui fit écrire une seconde lettre, plus impérative encore que la première :


J’ai été singulièrement étonné, madame, d’apprendre que vous êtes toujours à Paris. Je vous ai dit que vous ne pouviez et ne deviez rester qu’à Choisy. Je suis fâché que vous m’obligiez à vous ordonner de vous y rendre.


Madame de Normont pris l’avis du notaire : celui-ci lui conseilla d’obéir, se fondant sur « les obligations d’une épouse envers son mari ». De fait, le divorce étant en suspens, le seul domicile légal des époux Normont restait leur maison de campagne, puisque le bail de la rue Meslay avait été passé au nom de madame de Mellertz. Mais pourquoi celle-ci et Julie, — car Normont n’est en tout ceci qu’un figurant, — pourquoi la Mellertz et Julie tiennent-elles tant à ce que Babet retourne à Choisy et n’en bouge plus ? Voici :


*
* *

Son père étant retenu à Paris par une indisposition de madame Leverd, madame de Normont revint seule à la campagne, le lundi 29 mars, au soir. Elle n’y avait, pour la servir, que sa dévouée Sophie ; mais le nouveau jardinier, Toutin, ainsi que sa femme et une nièce de celle-ci, habitaient le rez-de-chaussée de la maison.

Le 30, Babet fit quelques visites dans Choisy. Le lendemain, elle se rendit, avec Sophie, à Thiais, village voisin, pour y voir madame Robillard, et rentra vers six heures et demie. Son amie, madame de Récourt, vint passer la soirée avec elle ; Soph ie leur servit des gaufres de sa façon, dans le salon du premier étage. Madame de Normont paraissait gaie et fort calme. Tandis que les deux dames collationnaient tranquillement, madame de Récourt leva la tête d’un air étonné : il lui semblait que quelqu’un circulait dans le grenier, au-dessus du salon ; le jardinier Toutin qu’on appela, croyait bien avoir déjà dans la journée, « entendu quelque chose » et il proposa « d’aller voir ». Madame de Normont s’y opposa ; la maison était vide ; mais il faisait grand vent et, sans aucun doute, dit-elle, le bruit provenait du choc de quelque volet de lucarne secoué par la tempête. Toutefois elle vérifia si les persiennes de son appartement étaient bien fermées.

Madame de Récourt se retira vers onze heures du soir ; le jardinier la reconduisit et rentra au bout de quelques instants. Il ferma soigneusement la grande porte à clef et aux verrous, comme d’habitude. Sophie l’aida ensuite à clore toutes les portes de la maison donnant sur la cour : celle de la cuisine, garnie, outre sa serrure, d’un crochet et d’un verrou à ressort ; celle du vestibule, de la salle à manger et toutes les fenêtres. Ces précautions prises, Sophie regagna sa chambre au premier étage, tandis que Toutin se retirait dans la pièce du rez-de-chaussée où il couchait d’ordinaire, ainsi que sa femme et sa nièce. Dans un cabinet voisin on laissait le chien qui y passait la nuit.

Toutin était déjà déshabillé quand il entendit marcher dans le vestibule et dans la cuisine ; sans ouvrir sa porte, il cria Qui va là ? La voix de Sophie répondit : — « C’est moi ! » C’était Sophie, en effet, qui, ayant oublié quelque chose en bas, venait de descendre du premier où elle remonta presque aussitôt. Au salon, elle trouva sa maîtresse profondément endormie dans un fauteuil. La promenade à Thiais avait fatigué Babet ; Sophie la réveilla pour l’avertir qu’il était près de minuit ; madame de Normont passa dans sa chambre, voisine du salon, se mit au lit et se rendormit sans tarder. Sophie éteignit les lumières et se coucha à son tour : une mince cloison séparait sa chambre de celle de la comtesse ; la porte de communication entre ces deux pièces n’était jamais fermée à clef, non plus que deux autres portes qui, de la chambre de Sophie, donnaient, l’une sur la salle de bains, l’autre sur le palier de l’escalier.

La nuit s’écoula silencieuse. Au petit jour, c’est-à-dire vers cinq heures et demie, le jardinier Toutin se leva, et, comme chaque matin, son premier soin fut de délivrer le chien qu’il avait ordre de promener avant de se mettre au travail. En traversant le vestibule, il fut surpris de voir ouverte la porte de la cuisine que Sophie avait fermée devant lui, la veille. Dans la cuisine, rien ne paraissait dérangé ; mais la porte donnant sur le hangar et à laquelle il avait lui-même donné un tour de clef n’était plus fermée qu’au pêne. Sauf ces menus détails, tout se trouvait dans l’ordre accoutumé et Toutin fut tout à fait rassuré en constatant que la grande porte de la rue, étant fermée à clef et aux verrous, personne n’avait pu entrer dans la maison ni en sortir. Il alla donc promener le chien, revint au bout d’une demi-heure et se mit à bêcher ses plates-bandes. Sa femme était aux provisions ; sa nièce, — une enfant de douze ans, — dormait encore.

Vers huit heures du matin, madame Toutin rentra du marché. Elle entendit Sophie qui, par la fenêtre de sa chambre, appelait à l’aide. En se levant après une nuit très tranquille, la femme de chambre de madame de Normont s’apercevait qu’elle était prisonnière ; les trois portes de sa chambre, simplement fermées au loquet la veille au soir, étaient maintenant fermées à clef, du dehors. La jardinière monta, délivra Sophie, et les deux femmes descendirent ensemble en commentant ce singulier incident. Était-ce « un tour » de madame la comtesse, un « poisson », — car on était au premier avril ? — Mais non, madame la comtesse n’est pas levée, ou, du moins, n’a point sonné ; ce qu’entendant, Sophie s’évanouit.

Quand elle a repris connaissance, ce qui, d’ailleurs, ne tarde pas, madame Toutin remonte, frappe à la porte de madame de Normont : point de réponse ; aucun bruit. La jardinière se permet d’entrer : — personne. La chambre est vide ; bien plus, le lit est débarrassé de tous ses couchages : draps, couvertures, oreillers, traversin, ont disparu. Inquiète à son tour, la jardinière appelle son mari ; il pénètre dans le salon ; les persiennes en sont fermées et il y fait très sombre ; pas assez cependant pour que Toutin n’aperçoive point, sur un grand lit d’acajou qui tient le fond de la vaste pièce, la comtesse étendue sans vie, la figure toute noire, une raie rouge au travers du cou… Madame de Normont a été égorgée pendant la nuit !

Le jardinier descend quatre à quatre, se lance dans la rue, court chez M. Bacoffe, — un ancien pharmacien de Paris, établi médecin à Choisy en remplacement du docteur Azémar, mort récemment, — puis à la mairie d’où il ramène l’adjoint, M. Gourdault. Déjà le médecin est au chevet de la victime : Madame de Normont n’est pas morte, mais seulement évanouie. Ce que, dans la pénombre, Toutin a pris pour une affreuse blessure n’était que la bordure rouge du couvre-pied dans lequel elle est roulée. Sur cette couverture, autour de la bouche, sur le cou de Babet, a coulé un liquide noir et visqueux dégageant une forte odeur de térébenthine. À quelque distance du lit, sur un guéridon, sont encore une fiole qui a contenu le nauséabond breuvage et une tasse qui a servi au criminel pour le faire absorber à la jeune femme.

Elle est là, inerte, les yeux clos, livide sous les maculatures du poison ; son évanouissement persiste malgré les réactifs les plus violents ; elle respire cependant ; son pouls est faible mais régulier. Enfin un grand hoquet la réveille ; elle entr’ouvre les yeux ; elle voit les gens qui l’entourent, penchés sur elle, guettant son retour à la vie. Un sursaut d’effroi la secoue : — les brigands !… Non ; elle reconnaît des figures qui lui sont familières ; elle semble sortir d’un affreux cauchemar ; elle balbutie quelques mots. Qu’a-t-elle dit ? On n’a pas bien compris ; les uns ont distingué : — « Je vois encore l’affreuse tasse… », d’autres croient avoir entendu : — « Je vois encore l’affreuse tante… » Pour tous ceux qui sont là et qui savent l’histoire lamentable de la malheureuse, il n’y a déjà plus de doute : c’est la tante, la vieille Mellertz, qui a fait ou ordonné le coup.

Aidée par le médecin, Babet s’était redressée sur ses oreillers ; elle promenait ses regards sur les personnes pressées autour d’elle ; outre M. Bacoffe et M. Gourdault, il y avait là Victoire, la cuisinière de M. Du Chef, maire de la commune ; Dubois, le jardinier d’une maison voisine ; madame de Récourt ; Dret, le juge de paix ; d’autres encore. Ils l’assistaient avec empressement. Déjà, pendant sa faiblesse, on lui avait fait prendre de l’émétique ; on l’invita à en absorber encore un grain qu’on lui donna dans de l’eau de savon, ce qui provoqua un vomissement dont elle fut soulagée. Mais elle éprouvait de vives brûlures à l’intérieur de la bouche et se tordait de douleurs d’entrailles. On la déshabilla pour la changer de linge, car une partie du breuvage avait inondé sa robe de nuit ; son corps apparut peu meurtri ; seulement une tache très rouge se remarquait « à la fourchette de l’estomac où elle ressentait un feu plus violent », et, sans cesse, elle réclamait à boire, afin d’éteindre ce brasier intérieur qui la torturait.

Cependant le juge de paix commençait son enquête ; dans la crainte que Babet mourût avant d’avoir parlé, il l’interrogea, en dépit de son épuisement. Et voici comment, d’une voix coupée de hoquets et de gémissements, elle conta l’affreux drame : — Elle s’était endormie à peine au lit ; — après un temps dont elle ne peut évaluer la durée, elle eut un cauchemar ; — il lui sembla qu’elle tombait dans un gouffre malgré ses efforts pour se cramponner aux couchages ; — et, tout à coup, elle se réveille, terrifiée ; elle est roulée dans ses draps comme dans un linceul ; — ainsi immobilisée, on l’emporte hors de sa chambre ; on la jette brutalement sur le lit du salon ; elle sent une main dont les doigts très froids la tiennent au cou ; — elle se débat, essaie d’échapper à cette étreinte ; mais ses bras, ses jambes, tout son corps sont emmaillotés et elle ne peut remuer que la tête. — Il y a une chandelle allumée au coin de la cheminée ; un homme noir, coiffé d’un chapeau rond, découvrant le front qui paraît très blanc, tient à la main une tasse qu’il approche des lèvres de sa victime ; elle serre les dents ; mais l’homme les lui écarte au moyen d’un morceau de bois, et lui verse dans la bouche un liquide d’une saveur si âcre, que, se sentant mourir, elle perd connaissance. — Une violente nausée la réveilla ; aucune lumière n’éclairait plus le salon ; l’homme noir avait disparu ; elle parvint à sortir l’avant-bras droit des linges qui l’encerclaient et à ôter de sa bouche l’entonnoir de bois que l’inconnu y avait laissé ; — aussitôt elle vomit ; d’atroces douleurs lui déchiraient l’estomac ; — elle fit effort pour crier ; elle était sans voix ; un froid glacial pénétrait tout son corps ; elle s’évanouit de nouveau et ne se souvient de rien d’autre.

Le juge de paix, sans insister, visita le premier étage, sous la conduite de la fidèle Sophie éplorée et chancelante : aucun indice du passage de l’assassin ; dans le salon même, il découvrit, sous les oreillers du lit, le grossier bâillon de bois dont l’homme noir avait fait usage ; il mit sous scellés la tasse et la fiole contenant encore, l’une et l’autre, un reste du liquide noirâtre : la tasse fut reconnue pour être l’une de celles dont on se servait habituellement dans la maison, mais le récipient du poison n’y avait jamais été vu. Tous les bijoux placés dans le secrétaire étaient volés : boucles d’oreilles en brillants, bague garnie d’une rose, bracelets en semence de perles et de topazes brûlées, un médaillon encadré de perles, etc. Le brigand avait pris encore 450 francs, composant toutes les ressources de madame de Normont, et le petit coffret où elle déposait les lettres de son mari et autres papiers intimes. Obéissant à quelque secret pressentiment, elle en avait retiré, peu de jours auparavant, pour les remettre à son père, l’acte de naissance de l’enfant de Julie et la lettre anonyme, grosse de menaces, qui l’avait accueillie lors de son arrivée à Choisy.

Tandis que le juge de paix procédait à ces investigations, le gendarme, posté depuis le matin en surveillance à la porte de la maison, l’avisa qu’un homme du pays demandait à être entendu. C’était un certain Perrault, compagnon charpentier. En se rendant, ce matin-là, vers cinq heures et demie, à son travail, il avait aperçu, « sur un petit tas d’ordures, dans le ruisseau, sous la fenêtre de la chambre où couchait Toutin », une enveloppe à demi déchirée contenant deux papiers : une lettre grossièrement écrite, et une seconde enveloppe cachetée à l’adresse de M. le préfet de police. Perrault, persuadé que c’était là un « poisson d’avril » déposé par quelque farceur, avait mis le tout dans sa poche dans l’intention « de donner ça à son gamin ». Mais ayant entendu parler dans le village de l’assassinat de la comtesse de Normont, il croyait utile de déposer ces papiers entre les mains de M. le juge de paix. Le premier billet était ainsi conçu :


Ne crains rien, tout le monde accusera la tante ; on l’arrêtera ; la révolution la fera mourir ; c’est notre seule ressource ; car si madame de Normont avait voulu, la tante était pour elle et tous les jours je tremble que le mari ne ramène sa femme ; tu vois donc bien qu’il faut sa mort. Plus de femme, plus d’enfant, plus de tante, plus de contrainte… et pour lors nous recevrons le prix de (ici une déchirure ; on lisait au verso :) … que c’est elle qui est coupable ; la méchanceté qu’elle montre contre sa nièce nous sauve de tout soupçon ; elle sera notre seconde victime. La seule crainte qui me tourmente un peu est que tu tardes trop à t’introduire, que le mari la rencontre encore, qu’ils se raccommodent, qu’elle devienne mère. Ô rage ! Si cela arrive, j’ai juré ta mort et celle de ton enfant. La femme Normont ne sera pas oubliée. Je quitte la plume pour déjeuner. Amour, courage, mon cœur pour récompense. {{brn| 1}} La lettre adressée au Préfet de police portait comme date :


Choisy, matin du jour après la mort de madame de Normont.


On y lisait ceci :


{{t|Il faut que la police soit bien mal faite pour que vous n’ayez pas fait arrêter madame de Normont d’après la lettre que vous avez reçue le 2 août, qui est la vérité. Vous n’avez qu’à parler à madame de Montgomery qui demeure rue des Mathurins, Chaussée-d’Antin, maison de M. Picard, — à Julie, à Véronique, pour preuve. Faites chercher M. Asselin ; comme il est coupable, pour paraître innocent, il ne manquera pas d’attaquer cette pauvre Julie, Véronique et même la tante. Madame de Normont est une méchante femme qui est jalouse de cette bonne Julie sans avoir de raisons… Le père veut venger la mort de sa fille sur des innocents. Ne voyez-vous pas qu’elle s’est empoisonnée elle-même parce que les remords la tourmentaient. Ce que M. Leverd et M. de Récourt disent, n’est pas vraisemblable : si on s’était introduit dans la maison, où se serait-on caché ? D’ailleurs, où est la preuve qu’on a volé ? Qui sait si elle avait de l’argent ? Et ses bijoux, ne peut-elle les avoir donnés ou vendus ? Vous voyez bien que tout cela est une comédie : d’ailleurs son mari ne se divorce pas sans de grandes raisons. Méfiez-vous de Sophie, de M. Asselin… car, à les entendre, c’est elle qui a été empoisonnée tandis que c’est elle qui est l’empoisonneuse ; c’est M. Asselin qui lui fournit toutes les drogues. Je ne suis ni ami, ni parent de Julie, mais je suis l’ami de l’innocent quand il est victime, et madame de Normont, si elle n’était pas morte, mériterait d’être guillotinée. Mais, Dieu merci, tôt ou tard l’innocent triomphe.|90}}


Le juge de paix transmit ces deux écrits au Procureur impérial, en même temps que le procès-verbal de sa perquisition ; dans sa lettre d’envoi, il indiquait l’adresse de la dame Mellertz et de la fille Jacquemin ; sans les désigner formellement comme les coupables, il les signalait comme les seules ennemies que l’on connût à madame de Normont. De son côté, Leverd, accouru de Paris à la nouvelle de l’empoisonnement de Babet, transmettait aux magistrats le billet par lequel Normont avait ordonné à sa femme de retourner sans délai à Choisy, pièce capitale, disait-il, et qui, à ses yeux, établissait sans conteste la préméditation. Normont, lui, ne se montrait pas, quoiqu’ on l’eût avisé dès le jour même de l’état alarmant de la comtesse. La Mellertz ne parut pas davantage ; mais on apprit que, déjà, tous deux, sentant peser sur eux les soupçons de la justice, préparaient une belle défense. Ils s’assuraient le concours de plusieurs avocats en renom, au nombre desquels Bellart, le plus célèbre de tous, et se mettaient dès lors à la disposition du Procureur impérial, prêts à fournir tous les renseignements de nature à aider dans leur tâche les juges d’instruction. D’ailleurs, nul souci de la malheureuse qui agonisait à Choisy ; pendant plus de vingt jours, elle allait être entre la vie et la mort, si faible, si tordue de douleurs, que les médecins désespéraient de lui procurer un soulagement ; et le mari ne se manifesta que pour lui fermer sa bourse en la privant, avant tout jugement, du maigre revenu des fermes dont il lui avait fait donation.

Le 6 avril, le juge d’instruction Dufour débarquait inopinément à Choisy. Normont, convoqué, dut s’y rendre ; mais il affecta de ne point voir Babet et de ne pas s’informer d’elle : comme le magistrat le questionnait, il se contenta de sourire d’un air entendu, affirmant « qu’il était bien tranquille sur le sort de l’empoisonnée », et prophétisant avec ironie « qu’elle ne mourrait pas », entendant par là que le drame n’était qu’un simulacre, une réédition des comédies similaires dont la prétendue victime était toujours sortie indemne. Sur les instances du juge, et quoique très dolente encore, madame de Normont consentit à fournir quelques précisions : l’homme noir était « de petite taille, vêtu d’un habit bleu » ; il avait « les genoux en dedans ». — Une femme travestie, peut-être ? — car « les genoux en dedans » sont un attribut assez particulier aux femmes qui revêtent des habits d’homme. Mais voyant que ce signalement pouvait compromettre soit Julie, soit sa tante de Mellertz, Babet se hâta de protester « qu’elle n’imputait la tentative criminelle à qui que ce fût de la maison de Normont ». Comme pour la contredire, le lendemain, 7 avril, parvenait à la Préfecture de police cette indication anonyme :


L’opinion publique désigne comme auteurs des attentats commis à deux reprises différentes sur la personne de madame de Normont, sa tante, sœur de son père… son mari lui-même ; on les soupçonne même d’avoir fait périr la petite fille par le poison.


Il est manifeste cependant que ni madame de Mellertz, ni Normont, ne se sont risqués à venir nuitamment à Choisy, pour mettre le crime à exécution. Celui qu’il faut découvrir, c’est l’inconnu qui a transporté la victime d’un lit à l’autre, l’a bâillonnée et a versé le poison dans la bouche de la malheureuse. Or, celui-là, nul autre que Babet ne l’a vu. Un garçon du village déposa bien que, au matin du 1er avril, vers cinq heures, c’est-à-dire avant le lever du jour , « un particulier vêtu d’un habit et d’un pantalon bleu foncé, ayant les genoux un peu en dedans, fuyait à toutes jambes par les rues de Choisy, se dirigeant du côté de Paris… » mais le renseignement parut être, à la fois, trop précis et trop vague pour qu’on le prît au sérieux. Il semblait bien probable que le malfaiteur, quel qu’il fût, était un habile homme, l’un de ceux, sans nul doute, qui, cinq ans auparavant, avaient pénétré, une nuit, dans la chambre de madame de Normont et qui, malgré les ordres réitérés de l’Empereur, échappaient depuis lors aux plus actives recherches de la police. On prévoyait donc que l’enquête serait difficile : l’opinion publique incriminait des personnes de haut rang auxquelles l’Empereur s’était intéressé ; il y fallait donc procéder avec prudence, discrétion, et ne frapper qu’à coup sûr. Cependant comme Dominique, valet de chambre de madame de Mellertz, possédait « un habit bleu » et marchait « les genoux un peu en dedans », il fut mandé à la police ; mais il prouva facilement que, dans la nuit du 31 mars au 1er avril, il n’avait pas quitté la maison de la rue Meslay. On interrogea la concierge : elle affirma très nettement, — et l’on contrôla ses dires, — que sa porte avait été fermée vers neuf heures du soir et que personne de chez les Normont, — ni les maîtres, ni Dominique, ni Julie, ni Véronique, — n’était sorti avant le lendemain à huit heures du matin.

On devait donc chercher ailleurs ; mais où ? Rébus en apparence indéchiffrable et dont la solution allait exiger de longues études et d’ingénieuses déductions.