Tendresses et solitudesLibrairie A. Lemerre (p. 116-117).


Aux Jeunes Gens


Riez ! il nous est cher de vous sentir contents ;
La divine gaîté, cette sœur du courage,
Vous convie à braver l’horizon gros d’orage,
Sous l’immense arc-en-ciel qu’elle dresse à vingt ans.

Vous pouvez rire, vous ! Le rire n’a qu’un temps,
Et l’oubli des douleurs n’appartient qu’à votre âge
Même sur le bâillon mis au Droit qu’on outrage,
Vous jetez pour un jour des voiles éclatants.


Riez, car à vous seuls est permise la joie.
Le blé naissant n’a point, quand son épi verdoie,
À répondre du sol dont les tourments le font.

Riez donc ! Vos aînés se réservent les larmes.
C’est chez vous seuls qu’ils voient dans l’avenir profond
Ensemble triompher la justice et les armes.