Autant en emporte le vent (Moréas)/Je suis le guerrier qui taille

Autant en Emporte le Vent (1886-1887)Léon Vanier, libraire-éditeur (p. 27-28).




XII




Je suis le guerrier qui taille
À grands coups d’épée dans la bataille :
Son œil est clair et son bras prompt à férir.
Hélas, il va mourir :
Car sous la dure maille
Par un trou hideux goutte à goutte
Fuit tout son sang et sa vie toute.

Je suis le pauvre chevalier qui vendit son âme
Au diable — honte et diffame —
Pour de l’or pipé sitôt.

Vous qui semblable à la Vierge Marie
M’êtes apparue, ô Dame au cœur haut,
Dame à l’âme fleurie,
Du toucher de votre main pure
Guérissez ma blessure.
Et que vos doux yeux
Me rachètent les cieux.