Au fait, au fait !!! Interprétation de l’idée démocratique/7

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VII.


Les Représentants à l’Assemblée nationale ont été élus, ne l’oublions pas, pour faire une constitution démocratique, c’est-à-dire pour simplifier l’administration jusqu’à la réduction de l’impôt et jusqu’au respect des individus ; ils ont été élus pour constituer le pays.

Qu’ont-ils fait, cependant ?

Au lieu de constituer le pays, ils se sont empressés de se constituer eux-mêmes en gouvernement ; ils ont déduit la conséquence avant d’avoir posé le principe ; après quoi, et sans pouvoir échapper au précédent funeste qu’ils venaient d’établir, ils n’ont été occupés, comme ils ne pouvaient être occupés, que du salut et de la conservation de ce gouvernement.

Ils ont agi ainsi et ils ont été conséquents ! Le pays n’a-t-il pas, en effet, cessé d’exister le jour où les Représentants ont été réunis dans le palais législatif ? L’assemblée ne s’est-elle pas déclarée souveraine, souveraine absolue, prenons-y garde ! et tellement absolue qu’elle peut plus que nous, car elle peut contre nous.

Elle peut rester à son poste indéfiniment.

Elle peut, par un décret, nous faire incarcérer ou nous proscrire, un à un ou tous ensemble.

Elle peut vendre la France en partie ou tout entière à l’étranger !

On m’objecte qu’elle ne le fera pas ; certes, c’est bien là ce qui nous reste d’espoir, car je réponds qu’elle le peut ; et j’ajoute que je ne comprends pas qu’un peuple libre puisse être régulièrement à la discrétion d’une simple représentation nationale qui jouit d’un modeste instrument d’action, composé de cinq cent cinquante mille baïonnettes.

L’Assemblée nationale n’a que l’intelligence des rois ; le génie démocratique lui est étranger.

L’Assemblée est un gouvernement ; elle ne devait être qu’un notaire.

Nous avons élu des représentants pour rédiger un contrat qui déterminât, par des clauses précises, la ligne suprême où finit le peuple et où commence l’administration, elle a décidé, sans l’écrire, que le peuple finissait partout et que le Gouvernement commençait partout aussi.

Si l’Assemblée était l’expression fidèle de la souveraineté nationale, les lois ou décrets qu’elle rend s’appliqueraient immédiatement à la sauvegarde du droit des citoyens, au lieu de ne s’appliquer qu’à sa sécurité propre. L’essence de la loi est d’exprimer la volonté et de protéger les intérêts de tout le monde ; car, la loi, tout le monde est censé la faire ; eh bien ! examinons tous les décrets rendus par l’Assemblée et nous n’en trouverons pas un seul qui ne soit conçu en vue de sauver l’inviolabilité administrative, en paralysant les libertés publiques ; nous n’en trouverons pas un seul qui ne consacre l’enchaînement du pays social au profit de la sécurité du pays officiel.