Astronomie populaire (Arago)/XIV/22

GIDE et J. BAUDRY (Tome 2p. 163-165).

CHAPITRE XXII

nature de la surface incandescente des étoiles


En observant attentivement la surface du Soleil, nous y avons aperçu des changements rapides et très-considérables, qui paraissaient entraîner la conséquence que dans cet astre tous les phénomènes d’incandescence se passent dans une substance gazeuse ; nous sommes arrivés à ce résultat d’une manière plus évidente encore par des phénomènes de polarisation. Mais ces deux moyens d’investigation nous manquent totalement à l’égard de la généralité des étoiles. Le premier n’est applicable que là où le disque est sensible, et l’on sait que les étoiles n’ont pas de diamètres appréciables, que dans les meilleures lunettes elles se présentent sous la forme d’un amas très resserré et plus ou moins confus de lumière. La seconde méthode offre des impossibilités résultant aussi de la superposition apparente des rayons partis des différents points des disques des étoiles.

Rappelons-nous que si la surface incandescente dû Soleil était liquide, nous aurions vu avec la lunette polariscope des couleurs sur les bords des deux images. Si le point le plus élevé sur l’une des images était rouge, le point diamétralement opposé sur cette même image serait rouge aussi. Mais les deux extrémités du diamètre horizontal offriraient l’une et l’autre une teinte verte ou complémentaire du rouge. Si donc l’on parvenait à réunir en un point unique les rayons émanés de toutes les parties du limbe du Soleil, après leur décomposition dans la lunette polariscope, le mélange formerait du blanc, même en admettant que la lumière émanerait d’un liquide incandescent.

Il paraît donc qu’il faut renoncer à appliquer à des astres sans dimensions sensibles le procédé qui nous a si bien conduits au but quand il s’agissait du Soleil ; il est cependant quelques-uns de ces astres qui se prêtent à ces moyens de recherches : je veux parler des étoiles changeantes. Examinons d’abord ceux de ces astres qui, à certaines époques, disparaissent totalement ; les seules explications qu’on ait pu donner de leurs variations d’intensité consistent à faire deux hypothèses. Dans la première, l’astre n’est pas lumineux sur tous les points de sa surface, et il éprouve un mouvement de rotation sur lui-même. Cela étant admis, l’étoile est brillante quand sa partie lumineuse est tournée du côté de la Terre, et disparaît lorsque la partie obscure arrive à la même position.

Dans l’autre hypothèse, un satellite opaque et non lumineux par lui-même, circulant autour de l’étoile, l’éclipserait périodiquement.

En raisonnant suivant l’une ou l’autre de ces deux suppositions, la lumière qui nous éclaire quelque temps avant la disparition totale de l’astre, n’est pas partie de tous les points du contour ; il ne peut donc plus être question de la neutralisation complète des teintes dont nous parlions tout à l’heure.

Si une étoile changeante, examinée avec la lunette polariscope, reste parfaitement blanche dans toutes ses phases, on peut donc assurer que sa partie extérieure ou incandescente n’est pas liquide, et que la lumière émane d’une substance analogue à nos nuages ou à nos gaz enflammés.

Or, tel est le résultat du petit nombre d’observations qu’on a pu faire jusqu’ici et qu’il sera très-utile de compléter. Ce même moyen d’investigation exige plus de soin, mais réussit également lorsqu’on l’applique aux étoiles qui n’éprouvent qu’une variation partielle dans leur éclat.

La conséquence à laquelle les observations des étoiles variables nous conduisent et que nous pouvons, je crois, généraliser sans scrupule, peut être énoncée en ces termes : La constitution physique des photosphères des millions d’étoiles dont le firmament est parsemé, est identique, à la constitution physique de la photosphère solaire.