Astronomie populaire (Arago)/IX/23

GIDE et J. BAUDRY (Tome 1p. 402-404).

CHAPITRE XXIII

explication des changements d’intensité dans les étoiles variables


La première, la plus ancienne des explications relatives aux changements d’intensité remarqués dans les étoiles variables, celle de Boulliaud, consiste à supposer que les étoiles changeantes ne sont pas également lumineuses dans toute l’étendue de leur surface, et qu’elles tournent sur elles-mêmes de manière à présenter successivement à la terre, des hémisphères entièrement lumineux et des hémisphères plus ou moins parsemés de taches obscures. Dans un mémoire de dix-neuf pages, publié en 1667, Boulliaud fait de ο de la Baleine un globe doué d’un mouvement de rotation régulier et continuel autour d’un de ses diamètres. En ajoutant à cette première donnée la supposition que le globe est obscur sur la plus grande partie de sa surface et lumineux dans le reste, l’astronome français croyait pouvoir satisfaire à toutes les conditions des phases.

Suivant une autre explication, l’étoile n’aurait nullement besoin d’être douée d’un mouvement de rotation. Ses éclipses totales ou partielles, ses changements apparents d’intensité, seraient l’effet de l’interposition plus ou moins complète, entre l’astre périodique et la terre, de quelque corps opaque circulant autour de cet astre comme les planètes de notre système circulent autour du soleil.

Enfin, d’après une conjecture de Maupertuis, dans le nombre infini des étoiles il s’en trouve de très-aplaties ou de semblables à des meules ; elles se présentent à nous, tantôt par la tranche et tantôt par la large surface, ce qui suffit amplement, suivant le littérateur astronome, à l’explication de leur changement d’éclat.

Les trois suppositions peuvent également satisfaire à l’ensemble des phénomènes observés. En est-il de même des détails ? Or les détails sont la pierre de touche des théories. C’est aux détails qu’il faut aujourd’hui s’élever dans la question des étoiles changeantes, c’est par des observations d’intensité faites chaque jour, à de courts intervalles, qu’on reconnaîtra s’il ne serait pas indispensable, suivant les cas, de varier l’explication, de choisir tantôt celle-ci, tantôt celle-là, tantôt leur combinaison ; si les phénomènes n’impliquent point des changements considérables et rapides, soit dans la position des pôles de rotation des étoiles, soit dans la situation des plans contenant les orbites des planètes opaques qui circulent autour d’elles, etc. C’est surtout en vue des changements périodiques que M. Argelander a reconnus dans les durées des périodes, que ces diverses suppositions devront être examinées.

M. Hind a appelé l’attention des astronomes sur ce fait, que les étoiles variables, surtout les plus faibles, ont généralement une couleur rouge. N’y aurait-il pas quelque liaison entre cette remarque et l’observation faite par le même astronome, que les étoiles variables, au moment de leur minimum d’éclat, paraissent entourées d’une espèce de brouillard ? En supposant l’existence de ce brouillard bien constatée, on serait sur la voie de l’explication de ces singuliers phénomènes. Peut-être arriverait-on à la conséquence que les variations d’intensité d’une étoile sont dues non plus à une planète complétement opaque circulant autour de l’étoile, mais à des nuages cosmiques qui par un semblable mouvement de révolution viendraient successivement s’interposer entre ces astres et la terre.