Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première Série, Tome VIII/14 mai 1789

Archives parlementaires de 1787 à 1860, Texte établi par MM. Mavidal, Laurent, Claveau, Pionnier, Lataste et Barbier, Paul DupontTome VIII : Du 5 mai 1789 au 15 septembre 1789 (p. 37).


ÉTATS GÉNÉRAUX. modifier

Séance du jeudi 14 mai 1789.


CLERGÉ.


M. l’archevêque de Vienne et M. l’évêque de Langres, qui ont été nommés commissaires conciliateurs, demandant leur remplacement, il est procédé à un nouveau scrutin pour le choix de deux autres membres.

MM. Thibaut, curé de Sainte-Croix de Metz, et Gouttes, curé d’Argeliers, réunissent la majorité. Mais sur la déclaration qu’ils font qu’ils renoncent à leur nomination, et qu’ils désirent que MM. les évêques qui ont le plus de voix après eux soient nommés, MM. l’archevêque d’Arles et l’évêque de Clermont le sont.

Ensuite M. le président propose d’envoyer au Roi une nombreuse députation pour lui présenter le respect et les hommages du clergé, et d’inviter les autres ordres à s’y réunir. Cette proposition est reçue avec acclamation.

NOBLESSE.


M. de Batz, grand sénéchal d’Albret, dit qu’il est chargé, par la sénéchaussée de Tartas, de lire à la Chambre le procès-verbal d’élection de M. le comte d’Artois. Après cette lecture, il ajoute que M. le comte d’Artois a appris cette élection avec reconnaissance et sensibilité, mais qu’il lui a dit que les ordres du Roi l’empêchent d’accepter. Le même propose d’envoyer une députation à M. le comte d’Artois pour lui témoigner le désir que la noblesse a qu’il accepte sa nomination.

Sur cette proposition, un autre membre demande à M. le sénéchal d’Albret si M. le comte d’Artois l’a chargé de faire le rapport à la Chambre. Il répond que non, mais que la sénéchaussée d’Albret l’en a chargé. Après cette réponse, il est arrêté que la Chambre ne connaissant pas officiellement le refus de M. le comte d’Artois ni les ordres prétendus du Roi, il n’y a pas lieu de délibérer.

On reprend l’examen des pouvoirs contestés et l’on continue d’entendre les réclamations et des défenses opposées de part et d’autre.

La séance est levée.

COMMUNES.


M. Malouet. Je viens vous présenter un troisième avis que j’ai rédigé en projet de déclaration dans les termes suivants :

« Les députés des communes apprenant par les arrêtés des députés de la noblesse qu’ils se sont constitués en ordre, et qu’ils ont cependant nommé des commissaires conciliateurs ; présumant que l’intention de MM. de la noblesse est de consentir à une vérification commune des pouvoirs respectifs, ou que leurs commissaires conciliateurs ont une autre mission inconnue aux députés des communes ; dans tous les cas l’Assemblée non constituée desdits députés ne pouvant arrêter qu’en conférence un vœu commun, a résolu de le manifester, et d’en rendre compte au Roi et à la nation, ainsi qu’il suit :

« Nous députés des communes, profondément pénétrés des obligations que nous avons contractées envers la nation, et désirant avec ardeur les remplir religieusement, déclarons que notre mission est de concourir de toutes nos forces à asseoir, sur des fondements inébranlables, la constitution et la puissance de l’empire français, de telle sorte que les droits de la nation et ceux du trône, l’autorité stable du gouvernement, la propriété légale et la liberté de chaque individu, soient assurés de toute la protection des lois et de la force publique.

« Pour parvenir à cette fin, nous devons et nous désirons vivement nous réunir à nos codéputés, MM. du clergé et de la noblesse, et soumettre aux États généraux la vérification de nos pouvoirs respectifs. Assemblés chaque jour, depuis le 5 mai, nous avons invité avec instance et nous réitérons nos invitations à MM. du clergé et de la noblesse, de procéder à cette vérification, nous espérons de leur patriotisme et de toutes les obligations qui leur sont communes avec nous, qu’il ne différeront pas plus longtemps de mettre en activité l’Assemblée nationale ; nous demandons en conséquence, et nous acceptons toute conférence qui aurait pour but cet objet : nous sommes d’autant plus impatients d’en accélérer le moment, qu’indépendamment des travaux importants qui doivent nous occuper, nous sommes affligés de n’avoir pu rendre encore au Roi, par une députation des États généraux, les remerciements respectueux, les vœux et les hommages de la nation.

« Nous déclarons formellement être dans l’intention de respecter et n’avoir aucun droit d’attaquer les propriétés et prérogatives légitimes du clergé et de la noblesse ; nous sommes également convaincus que les distinctions d’ordre ne mettront aucune entrave à l’union et à l’activité nécessaires aux États généraux. Nous ne nous croyons pas permis d’avoir aucune disposition irritante, aucun principe exclusif d’une parfaite conciliation entre les différents membres des États ; et notre intention est d’adopter tous les moyens qui conduiront sûrement à une constitution qui rendrait à la nation l’exercice de ses droits, l’assurance d’une liberté légale et de la paix publique : car tel est notre devoir et notre serment. »

La motion de M. Malouet n’a pas de succès, quoique quelques membres cherchent à la soutenir.

Les débats sur les deux autres motions sont prolongés.