Alphonse Lemerre, éditeur (p. 33-34).

LES CONDAMNÉS


À Métivet.


Ils s’en vont deux à deux, les maigres poitrinaires,
Sur le chemin jauni qui dévale là-bas,
Ayant cette pâleur froide des rais lunaires,
Tristes, horriblement tristes, parlant tout bas.

Des amantes avec des amants, les yeux vides
Et battus, la peau moite et les cheveux défaits ;
Tout tièdes de leur nuit de joie, encore avides,
Avec les traces des baisers qu’ils se sont faits !


Et l’atmosphère sent comme des fleurs fanées.
Par des torrents séchés et de grands arbres nus,
Les longues routes sont entièrement cernées.

Dans un de ces pays baroques, inconnus,
Qui défilent dedans mes rêves artistiques,
Marchent ces gens malsains, osseux et fantastiques.