Anthologie de la littérature ukrainienne jusqu’au milieu du XIXe siècle/Trois filles prisonnières
Trois filles prisonnières.
Quand les Turcs faisaient la guerre,
Ils s’emparaient des femmes et des filles,
Et aussi dans notre presbytère
Ils y prirent trois demoiselles.
Ils attachèrent la première près d’un cheval,
Près d’un cheval avec des courroies,
Ils attachèrent la seconde près d’une voiture,
Près d’une voiture avec des cordes,
Et la troisième ils la mirent dans un fourgon noir.
Celle qu’ils avaient attachée près du cheval,
Près du cheval avec des courroies,
Pleure et dit : « Hélas ! mon Dieu !
Mes tresses blondes,
Mère ne vous peigne plus,
Le charretier vous éparpille d’un coup de fouet ! »
Celle que l’on avait attachée à la voiture,
Près de la voiture avec des cordes,
Celle-là s’écrie : « Hélas ! mon Dieu !
Hélas ! mon Dieu ! Mes pauvres pieds,
Mes pauvres petits pieds blancs,
Mère ne vous lave plus,
Le sable coupe vos orteils
Et leurs bouts saignent ! »
Celle que l’on avait mise dans le fourgon noir,
Celle-là pleure, celle-là crie :
« Hélas ! mon Dieu ! mes pauvres yeux !
Mes pauvres yeux noirs !
Ils ont seulement erré sur la contrée,
Mais ils n’ont rien vu du monde clair. »