Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 01/Géométrie analitique, article 3

GÉOMÉTRIE ANALITIQUE.

Recherche de l’aire d’un polygone, en fonction des coordonnées
de ses sommets ;
Par M. de Stainville[1], répétiteur à l’école impériale polytechnique.
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Soient, …, les côtés successifs d’un polygone ; , …, les coordonnées de ses sommets. Si d’un point pris dans l’intérieur du polygone, et dont les coordonnées sont x' et y’, on abaisse des perpendiculaires sur les directions de ses côtés, leurs expressions seront respectivement :

, …

, …, désignant respectivement les tangentes trignométriques des angles que font les côtés , …, avec l’axe des abscisses, et , …, les ordonnées de ces côtés qui répondent à l’origine[2] . Si l’on multiplie la première par la seconde par la troisième par et ainsi de suite, on aura évidemment le double de l’aire du polygone ; de sorte qu’en désignant ce polygone par , il viendra ;

 ;

mais, l’aire du polygone est indépendante des coordonnées de et  ; ainsi, et  ; c’est-à-dire :

 ;

or : ,

et :  ;

donc :  ;

et par conséquent :

,

formule élégante et à laquelle on peut arriver facilement, par la géométrie ordinaire. En effet un polygone, dont toutes les parties sont situées dans l’un des angles que forment les axes auxquels on rapporte les coordonnées des sommets, peut être considéré comme étant la différence de deux polygones qui auraient pour base commune la partie de l’axe des abscisses comprise entre celles des perpendiculaires abaissées des sommets sur cet axe, qui sont les plus distantes, et pour côtés adjacens ces mêmes perpendiculaires ; or, si on évalue les trapèzes dans lesquels se décomposent les polygones, lorsque de chacun de leurs angles on abaisse des perpendiculaires sur la base, il est évident que l’excès du double du polygone convexe sur le double du polygone concave, c’est-à-dire, le double du polygone dont il s’agit, aura pour expression :

or, le dernier terme de chaque produit est détruit par le premier terme du produit suivant, à l’exception de celui du dernier produit qui est détruit par le premier terme du premier produit, il ne reste donc de chaque produit que les termes dans lesquels les deux facteurs n’ont pas les mêmes accens ; on a donc, comme précédemment :

,

C’est encore ce qu’on peut obtenir autrement, en remarquant que le double de l’aire du polygone peut être mis également sous ces deux formes :

ce qui donne, en prenant la demi-somme des deux expressions, le même résultat que ci-dessus.

On peut remarquer, en passant, que la quantité A=0 ayant pour expression :

,

il en résulte que la somme des produits des côtés d’un polygone, soit par les sinus, soit par les cosinus des angles qu’ils font respectivement avec une droite tracée d’une manière quelconque sur un plan, est égale à zéro ; ce qu’on peut d’ailleurs démontrer directement d’une manière fort simple[3].

On pourrait aussi trouver, pour les polyèdres, des formules analogues aux précédentes et démontrer, par des considérations pareilles à celles dont nous venons de faire usage, que la somme des produits des aires des faces d’un polyèdre par les sinus ou cosinus des angles qu’elles font respectivement avec un plan quelconque est zéro ; et qu’il en est de même de la somme des produits des côtés d’un polygone rectiligne, plan ou gauche, par les sinus ou cosinus des angles qu’il forment avec une droite située d’une manière quelconque dans l’espace.

  1. M. de Stainville a adressé aux rédacteurs une solution du problème 1.er de la page 17 de ce volume, semblable en tout à celle qui a été donnée par M. Encontre. Ils regrettent de ne l’avoir pas reçue assez tôt pour la mentionner en son lieu. Ils croient devoir indiquer, parmi les ouvrages où se trouve résolu le problème auquel celui-là se réduit, celui qui a pour titre : Recueil de problèmes résolus par des considérations purement géométriques ; à Paris, chez Courtier.
    (Note des éditeurs.)
  2. Soient et les coordonnées du point ( fig. 14 ) ; de ce point on abaisse deux perpendiculaires et , l’une à la droite , dont l’équation est , et l’autre à l’axe des abscisses, on aura un triangle , rectangle en , qui donnera  ; or est égal à l’ordonnée du point , diminuée de l’ordonnée de la droite qui correspond à l’abscisse  ; ainsi, cette ordonnée  ; donc  ; si donc on désigne par la perpendiculaire , on aura or

    donc enfin .

  3. Voyez l’ouvrage déjà cité.