Annales de l’Empire/Édition Garnier/Frédéric d’Autriche

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FRÉDÉRIC D’AUTRICHE,
TROISIÈME DU NOM,
trente-neuvième empereur.

1440. On s’assemble à Francfort, selon la coutume, pour le choix d’un roi des Romains. Les états de Bohême, qui étaient sans souverain, jouissent avec les autres électeurs du droit de suffrage, privilége qui n’a jamais été donné qu’à la Bohême.

Louis, landgrave de Hesse, refuse la couronne impériale. On en voit plusieurs exemples dans l’histoire. L’empire passait depuis longtemps pour une épouse sans dot, qui avait besoin d’un mari très-riche.

Frédéric d’Autriche, duc de Stirie, fils d’Ernest, qui était bien moins puissant que le landgrave de Hesse, n’est pas si difficile.

Dans la même année, Albert, duc de Bavière, refuse la couronne de Bohême, qu’on lui offre ; mais ce nouveau refus vient d’un motif qui doit servir d’exemple aux princes. La veuve de l’empereur, roi de Bohême et de Hongrie, duc d’Autriche, venait d’accoucher d’un posthume nommé Ladislas. Albert de Bavière crut qu’on devait avoir égard au sang de ce pupille, il regarda la Bohême comme l’héritage de cet enfant. Il ne voulut pas le dépouiller. L’intérêt ne gouverne pas toujours les souverains. Il y a aussi de l’honneur parmi eux, et ils devraient songer que cet honneur, quand il est assuré, vaut mieux qu’une province incertaine[1].

À l’exemple du Bavarois, l’empereur Frédéric III refuse aussi la couronne de Bohême. Voilà ce que fait l’exemple de la vertu. Frédéric III ne veut pas être moins généreux que le duc de Bavière. Il se charge de la tutelle de l’enfant Ladislas, qui devait, par le droit de naissance, posséder la basse Autriche, où est Vienne, et qui était appelé au trône de la Bohême et de la Hongrie par le choix des peuples, qui respectaient en lui le sang dont il sortait.

Concile de Freisingen, dans lequel on prive de la sépulture tous ceux qui seront morts en combattant dans un tournoi, ou qui ne se seront point confessés dans l’année. Ces décrets grossiers et ridicules n’ont jamais de force.

1441. Grande diète à Mayence. L’anti-pape, Amédée de Savoie, Félix, créé par le concile de Bâle, envoie un légat a latere à cette diète ; on lui fait quitter sa croix et la pourpre qu’Amédée lui a donnée. Cet Amédée était un homme bizarre, qui, ayant renoncé à son duché de Savoie pour la vie molle d’ermite, quittait sa retraite de Ripaille[2] pour être pape. Les Pères du concile de Bâle l’avaient élu, quoiqu’il fût séculier. Ils avaient en cela violé tous les usages : aussi ces Pères n’étaient regardés à Rome que comme des séditieux. La diète de Mayence tient la balance entre les deux papes.

L’ordre teutonique gouverne si durement la Prusse que les peuples se donnent à la Pologne.

L’empereur élève à sa cour le jeune Ladislas, roi de Bohême, et le royaume est administré au nom de ce jeune prince, mais au milieu des contradictions et des troubles. Tous les électeurs et beaucoup de princes viennent assister au couronnement de l’empereur à Aix-la-Chapelle, Chacun avait à sa suite une petite armée. Ils mettaient alors leur gloire à paraître avec éclat dans ces jours de cérémonie ; ils la mettent aujourd’hui à n’y plus paraître.

Grand exemple de la liberté des peuples du Nord, Éric, roi de Danemark et de Suède, désigne son neveu successeur de son royaume. Les états s’y opposent, en disant que, par les lois fondamentales, la couronne ne doit point être héréditaire. Leur loi fondamentale est bien différente aujourd’hui. Ils déposèrent leur vieux roi Éric[3], qui voulait être trop absolu, et ils appelèrent à la couronne, ou plutôt à la première magistrature du royaume, Christophe de Bavière.

1443-1444. La politique, les lois, les usages, n’avaient rien alors de ce qu’ils ont de nos jours. On voit, dans ces années, la France unie avec la maison d’Autriche contre les Suisses. Le dauphin, depuis Louis XI, marche contre les Suisses, dont la France devait défendre la liberté. Les auteurs parlent d’une grande victoire que le dauphin remporta près de Bâle ; mais s’il avait gagné une si grande bataille, comment put-il n’obtenir qu’à peine la permission d’entrer dans Bâle avec ses domestiques ? Ce qui est certain, c’est que les Suisses ne perdirent point la liberté, pour laquelle ils combattaient, et que cette liberté se fortifia de jour en jour, malgré leurs dissensions.

Ce n’était pas contre les Suisses qu’il fallait marcher alors : c’était contre les Turcs. Amurat II, après avoir abdiqué l’empire, l’avait repris à la prière des janissaires. Ce Turc, qu’on peut compter parmi les philosophes, était compté parmi les héros. Il poussait ses conquêtes en Hongrie. Le roi de Pologne Vladislas, le second des Jagellons, venait d’être élu par les Hongrois, au mépris du jeune Ladislas d’Autriche, élevé toujours chez l’empereur. Il venait de conclure avec Amurat la paix la plus solennelle que jamais les chrétiens eussent faite avec les musulmans.

Amurat et Vladislas la jurèrent tous deux solennellement, l’un sur l’Alcoran, l’autre sur l’Évangile.

[4]Le cardinal Julien Césarini, légat du pape en Allemagne, homme fameux par ses poursuites contre les partisans de Jean Hus, par le concile de Bâle, auquel il avait d’abord présidé, par la croisade qu’il prêchait contre les Turcs, crut que c’était une action sainte de violer un serment fait à des Turcs. Cette piété lui parut d’autant plus convenable que le sultan était alors occupé à réprimer des séditions en Asie. Il était du devoir des catholiques de ne pas tenir la foi aux hérétiques ; donc c’était une plus grande vertu d’être perfide envers les musulmans, qui ne croient qu’en Dieu. Le pape Eugène IV, pressé par le légat, ordonna au roi de Hongrie Vladislas d’être chrétiennement parjure.

Tous les chefs se laissèrent entraîner au torrent, et surtout Jean Corvin Huniade, ce fameux général des armées hongroises, qui combattit si souvent Amurat et Mahomet II, Vladislas, séduit par de fausses espérances et par une morale encore plus fausse, surprit les terres du sultan. Il le rencontra bientôt vers le Pont-Euxin, dans ce pays qu’on nomme aujourd’hui la Bulgarie, et qui était autrefois la Mœsie. La bataille se donna près de la ville de Varne.

Amurat portait dans son sein le traité de paix qu’on venait de conclure. Il le tira au milieu de la mêlée, dans un moment où ses troupes pliaient, et pria Dieu, qui punit les parjures, de venger cet outrage fait aux lois des nations. Le roi Vladislas fut percé de coups. Sa tête, coupée par un janissaire, fut portée en triomphe de rang en rang dans l’armée turque, et ce spectacle acheva la déroute.

Quelques-uns disent que le cardinal Julien, qui avait assisté à la bataille, voulant, dans sa fuite, passer une rivière, y fut abîmé par le poids de l’or qu’il portait ; d’autres disent que les Hongrois mêmes le tuèrent. Il est certain qu’il périt dans cette journée.

1445. L’Allemagne devait s’opposer aux progrès des Ottomans ; mais alors même Frédéric III, qui avait appelé les Français à son secours contre les Suisses, voyant que ses défenseurs inondent l’Alsace et le pays Messin, veut chasser ces alliés dangereux.

Charles VII réclamait le droit de protection dans la ville de Toul, quoique cette ville fût impériale. Il exige au même titre des présents de Metz et de Verdun. Ce droit de protection sur ces villes dans leurs besoins est l’origine de la souveraineté qu’enfin les rois de France en ont obtenue.

On fait sur ces frontières une courte guerre aux Français, au lieu d’en faire aux Turcs une longue, vive, et bien conduite.

La guerre ecclésiastique entre le concile de Bâle et le pape Eugène IV dure toujours. Eugène s’avise de déposer les archevêques de Cologne et de Trêves, parce qu’ils étaient partisans du concile de Bâle. Il n’avait nul droit de les déposer comme archevêques, encore moins comme électeurs. Mais que fait-il ? il nomme à Cologne un neveu du duc de Bourgogne, il nomme à Trêves un frère naturel de ce prince : car jamais pape ne put disposer des États qu’en armant un prince contre un autre.

1446. Les autres électeurs, les princes, prennent le parti des deux évêques vainement déposés. Le pape l’avait prévu : il propose un tempérament, rétablit les deux évêques ; il flatte les Allemands, et enfin l’Allemagne, qui se tenait neutre entre l’antipape et lui, reconnaît Eugène pour seul pape légitime. Alors le concile de Bâle tombe dans le mépris, et bientôt après il se dissout[5] insensiblement de lui-même.

1447. Concordat germanique. Ce concile avait du moins établi des règlements utiles, que le corps germanique adopta dès lors, et qu’il soutient encore aujourd’hui. Les élections dans les églises cathédrales et abbatiales sont rétablies.

Le pape ne nomme aux petits bénéfices que pendant six mois de l’année.

On ne paye rien à la chambre apostolique pour les petits bénéfices ; plusieurs autres lois pareilles sont confirmées par le pape Nicolas V, qui par là rend hommage à ce concile de Bâle, regardé à Rome comme un conciliabule.

1448. Le sultan Amurat II défait encore les Hongrois commandés par le fameux Huniade ; et l’Allemagne, à ces funestes nouvelles, ne s’arme point encore.

1449. L’Allemagne n’est occupée que de petites guerres. Albert l’Achille, électeur de Brandebourg, en a une contre la ville de Nuremberg, qu’il voulait subjuguer : presque toutes les villes impériales prennent la défense de Nuremberg, et l’empereur reste spectateur tranquille de ces querelles. Il ne veut point donner le jeune Ladislas à la Bohême, qui le redemande, et laisse soupçonner qu’il veut garder le bien de son pupille.

Ce jeune Ladislas devait être à la fois roi de Bohême, duc d’une partie de l’Autriche, de la Moravie, de la Silésie. Ces biens auraient pu tenter enfin la vertu.

Amédée de Savoie cède enfin son pontificat, et redevient ermite à Ripaille.

1450-1451-1452. La Bohême, la Hongrie, la haute Autriche, demandent à la fois le jeune Ladislas pour souverain.

Un gentilhomme, nommé Eisinger, fait soulever l’Autriche en faveur de Ladislas. Frédéric s’excuse toujours sur ce que Ladislas n’est point majeur. Il envoie Frédéric[6] d’Autriche, son frère, contre les séditieux, et prend ce temps-là pour se faire couronner en Italie.

Alfonse d’Aragon régnait alors à Naples, et prenait les intérêts de l’empereur, parce qu’il craignait les Vénitiens trop puissants. Ils étaient maîtres de Ravenne, de Bergame, de Brescia, de Crême. Milan était au fils d’un paysan, devenu l’homme le plus considérable de l’Italie. C’était François Sforce, successeur des Viscontis. Florence était liguée avec le pape contre Sforce ; le saint-siége avait recouvré Bologne. Tous les autres États appartenaient à divers seigneurs qui s’en étaient rendus maîtres. Les choses demeurent en cet état pendant le voyage de Frédéric III en Italie. Ce voyage fut un des plus inutiles et des plus humiliants qu’aucun empereur eût fait encore. Il fut attaqué par des voleurs sur le chemin de Rome. On lui prit une partie de son bagage ; il y courut risque de la vie. Quelle manière de venir être couronné césar et chef du monde chrétien !

Il se fait à Rome une innovation unique jusqu’à ce jour. Frédéric III n’osait aller à Milan proposer qu’on lui donnât la couronne de Lombardie. Nicolas V la lui donne lui-même à Rome ; et cela seul pouvait servir de titre aux papes pour créer des rois lombards, comme ils créaient des rois de Naples.

Le pape confirme à Frédéric III cette tutelle du jeune Ladislas, roi de Bohême, de Hongrie, duc d’Autriche, tutelle qu’on voulait lui enlever, et excommunie ceux qui la lui disputent.

Cette bulle est tout ce que l’empereur remporte de Rome ; et avec cette bulle il est assiégé à Neustadt en Autriche par ceux qu’il appelle rebelles, c’est-à-dire par ceux qui lui redemandent son pupille Ladislas.

Enfin il rend le jeune Ladislas à ses peuples. On l’a beaucoup loué d’avoir été un tuteur fidèle, quoiqu’il n’eût rendu ce dépôt que forcé par les armes. Lui aurait-on fait une vertu de ne pas attenter à la vie de son pupille ?

1453. Cette année est la mémorable époque de la prise de Constantinople par Mahomet II. Certes c’était alors qu’il eût fallu des croisades. Mais il n’est pas étonnant que les puissances chrétiennes qui, dans ces anciennes croisades même, avaient ravi Constantinople à ses maîtres légitimes[7], la laissassent prendre enfin par les Ottomans. Les Vénitiens s’étaient dès longtemps emparés d’une partie de la Grèce. Les Turcs avaient tout le reste. Il ne restait de l’ancien empire que la seule ville impériale, assiégée par plus de deux cent mille hommes ; et dans cette ville on disputait encore sur la religion. On agitait s’il était permis de prier en latin ; si la lumière du Thabor était créée ou éternelle ; si l’on pouvait se servir de pain azyme.

Le dernier empereur Constantin avait auprès de lui le cardinal Isidore, dont la seule présence irritait et décourageait les Grecs. « Nous aimons mieux, disaient-ils, voir ici le turban qu’un chapeau de cardinal. »

Tous les historiens, et même les plus modernes, répètent les anciens contes que firent alors les moines. Mahomet, selon eux, n’est qu’un barbare, qui met tout Constantinople à feu et à sang, et qui, amoureux d’une Irène sa captive, lui coupe la tête pour complaire à ses janissaires. Tout cela est également faux. Mahomet II était mieux élevé, plus instruit, et savait plus de langues[8] qu’aucun prince de la chrétienté. Il n’y eut qu’une partie de la ville prise d’assaut par les janissaires. Le vainqueur accorda généreusement une capitulation à l’autre partie, et l’observa fidèlement ; et quant au meurtre de sa maîtresse, il faut être bien ignorant des usages des Turcs pour croire que les soldats se mêlent de ce qui se passe dans le lit d’un sultan.

On assemble une diète à Ratisbonne pour tâcher de s’opposer aux armées ottomanes. Philippe, duc de Bourgogne, vient à cette diète, et offre de marcher contre les Turcs si on le seconde. Frédéric ne se trouva pas seulement à Ratisbonne. C’est cette année 1453 que l’Autriche est érigée en archiduché : le diplôme en fait foi.

1454. Le cardinal Æneas Silvius, qui fut depuis le pape Pie II, légat alors en Allemagne, sollicite tous les princes à défendre la chrétienté ; il s’adresse aux chevaliers teutoniques, et les fait souvenir de leurs vœux ; mais ils ne sont occupés qu’à combattre leurs sujets de la Poméranie et de la Prusse, qui secouent leur joug, et qui se donnent à la Pologne[9].

1455. Personne ne s’oppose donc aux conquêtes de Mahomet II ; et par une fatalité cruelle, presque tous les princes de l’empire s’épuisaient alors dans de petites guerres les uns contre les autres.

Le duché de Luxembourg était envahi par le duc de Saxe, et défendu par le duc de Bourgogne au sujet de vingt-deux mille florins.

Le jeune Ladislas, roi de Hongrie et de Bohême, réclame ce duché. Il ne paraît pas que l’empereur prenne part à aucune de ces querelles. Le duché de Luxembourg resta enfin à la maison de Bourgogne.

1456-1457. Ce Ladislas, qui pouvait être un très-grand prince, meurt haï et méprisé. Il s’était enfui à Vienne quand les Turcs assiégeaient Belgrade, Il avait laissé au célèbre Huniade et au cordelier Jean Capistran la gloire de faire lever le siége.

L’empereur prend pour lui Vienne et la basse Autriche ; le duc Albert, son frère, la haute ; et Sigismond, leur cousin, la Carinthie.

1458. Frédéric III veut en vain avoir la Hongrie ; elle se donne à Mathias, fils du grand Huniade son défenseur. Il tente aussi de régner en Bohême, et les états élisent Georges Podibrade, qui avait combattu pour eux.

1559. Frédéric III n’oppose au fils de Huniade et au vaillant Podibrade que des artifices. Ces artifices font voir sa faiblesse, et cette faiblesse enhardit le duc de Bavière, le comte palatin, l’électeur de Mayence, plusieurs princes, et jusqu’à son propre frère, à lui déclarer la guerre en faveur du roi de Bohême.

Il est battu à Fins par Albert son frère ; il ne se tire d’affaire qu’en cédant quelques places de l’Autriche. Il était traité par toute l’Allemagne plutôt comme membre que comme chef de l’empire.

1460. Le nouveau pape Æneas Silvius, Pie II, avait convoqué à Mantoue une assemblée de princes chrétiens pour former une croisade contre Mahomet II ; mais les malheurs de ces anciens armements, lorsqu’ils avaient été faits sans raison, empêchèrent toujours qu’on n’en fît de nouveaux lorsqu’ils étaient raisonnables.

L’Allemagne est toujours désunie. Un duc d’une partie de la Bavière, dont Landshut est la capitale, songe plutôt, par exemple, à soutenir d’anciens droits sur Donavert qu’au bien général de l’Europe. Et au contraire, dans l’enthousiasme des anciennes croisades, on eût vendu Donavert pour aller à Jérusalem.

Ce duc de Bavière, Louis, ligué contre tous les princes de sa maison avec Ulric, comte de Virtemberg, a une armée de vingt mille hommes.

L’empereur soutient les droits de Donavert, ville dès longtemps impériale, contre les prétentions du duc. Il se sert du fameux Albert l’Achille, électeur de Brandebourg, pour réprimer le duc de Bavière et sa ligue.

Autres troubles pour le comté de Holstein. Le roi de Danemark, Christiern, s’en empare par droit de succession aussi bien que de Slesvick, en donnant quelque argent aux autres héritiers, et fait hommage du Holstein à l’empereur.

1461-1462-1463. Autres troubles beaucoup plus grands par la querelle de la Bavière, qui déchire l’Allemagne ; autres encore, par la discorde qui règne entre l’empereur et son frère Albert, duc de la haute Autriche. Il faut que l’empereur plie, et qu’il cède par accommodement le gouvernement de son propre pays, de l’Autriche viennoise ou Basse Autriche. Mais, sur le délai d’un payement de quatorze mille ducats, la guerre recommence entre les deux frères. Ils en viennent à une bataille, et l’empereur est battu.

Son ami Albert l’Achille, de Brandebourg, est aussi, malgré son surnom, battu par le duc de Bavière. Tous ces troubles intestins anéantissent la majesté de l’empire, et rendent l’Allemagne très-malheureuse.

1464. Autre avilissement encore. Il régnait toujours dans les nations un préjugé, que celui qui était possesseur d’un certain gage, d’un certain signe, avait de grands droits à un royaume. Dans le malheureux empire grec, un habit et des souliers d’écarlate suffisaient quelquefois pour faire un empereur. La couronne de fer de Monza[10] donnait des droits sur la Lombardie ; la lance et l’épée de Charlemagne, quand des rivaux se disputaient l’empire, attiraient un grand parti à celui qui s’était saisi de ces vieilles armes. En Hongrie, il fallait avoir une certaine couronne d’or. Cet ornement était dans le trésor de l’empereur Frédéric, qui ne l’avait jamais voulu rendre, en rendant aux Hongrois Ladislas son pupille.

Mathias Hunias redemande sa couronne d’or à l’empereur, et lui déclare la guerre.

Frédéric III rend enfin ce palladium de la Hongrie. On fait un traité qui ne ressemble à aucun traité. Mathias reconnaît Frédéric pour père, et Frédéric appelle Mathias son fils ; et il est dit que, si ce prétendu fils meurt sans enfants et sans neveux, lui prétendu père sera roi de Hongrie. Enfin le fils donne au père soixante mille écus.

1465-1466. C’était alors le temps des petitesses parmi les puissances chrétiennes. Il y avait toujours deux partis en Bohême, les catholiques et les hussites. Le roi George Podibrade, au lieu d’imiter les Scanderbeg et les Huniade, favorise les hussites contre les catholiques en Silésie, et le pape Paul II autorise la révolte des Silésiens par une bulle. Ensuite il excommunie Podibrade, il le prive du royaume. Ces indignes querelles privent la chrétienté d’un puissant secours. Mahomet II n’avait point de muphti qui l’excommuniât.

1467. Les catholiques de Bohême offrent la couronne de Bohême à l’empereur ; mais dans une diète à Nuremberg, la plupart des princes prennent le parti de Podibrade en présence du légat du pape ; et le duc Louis de Bavière-Landshut dit qu’au lieu de donner la Bohême à Frédéric, il faut donner à Podibrade la couronne de l’empire. La diète ordonne qu’on entretiendra un corps de vingt mille hommes pour défendre l’Allemagne contre les Turcs. L’Allemagne, bien gouvernée, eût pu en opposer trois cent mille.

Les chevaliers teutoniques, qui pouvaient imiter l’exemple de Scanderbeg, ne font la guerre que pour la Prusse ; et enfin, par un traité solennel, ils se rendent feudataires de la Pologne. Le traité fut fait à Thorn l’année précédente, et exécuté en 1467.

1468. Le pape donne la Bohême à Mathias Huniade, ou Corvin, roi de Hongrie : c’est-à-dire que le pape, dont le grand intérêt était d’opposer une digue aux progrès des Turcs, surtout après la mort du grand Scanderbeg, excite une guerre civile entre des chrétiens, et outrage l’empereur et l’empire en osant déposer un roi électeur : car le pape n’avait pas plus de droit de déposer un roi de Bohême que ce prince n’en avait de donner le siége de Rome.

Mathias Huniade perd du temps, des troupes, et des négociations pour s’emparer de la Bohême.

L’empereur fait avec mollesse le rôle de médiateur. Plusieurs princes d’Allemagne se font la guerre ; d’autres font des trêves. La ville de Constance s’allie avec les cantons suisses.

Un abbé de Saint-Gall unit le Tockembourg à sa riche abbaye, et il ne lui en coûte que quatorze mille florins. Les Liégeois ont une guerre malheureuse avec le duc de Bourgogne, Chaque prince est en crainte de ses voisins ; il n’y a plus de centre : l’empereur ne fait rien.

1469-1470-1471-1472. Mathias Huniade et Podibrade se disputent toujours la Bohême. La mort subite de Podibrade n’éteint. point la guerre civile. Le parti hussite élit Ladislas, roi de Pologne. Les catholiques tiennent pour Mathias Huniade.

La maison d’Autriche, qui devait être puissante sous Frédéric III, perd longtemps beaucoup plus qu’elle ne gagne. Sigismond d’Autriche, dernier prince de la branche du Tyrol, vend au duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, le Brisgau, le Sundgau, le comté de Ferrète, qui lui appartenaient, pour quatre-vingt mille écus d’or. Rien n’est plus commun dans les xive et xve siècles que des États vendus à vil prix. C’était démembrer l’empire, c’était augmenter la puissance d’un prince de France, qui alors possédait tous les Pays-Bas. On ne pouvait prévoir qu’un jour l’héritage de la maison de Bourgogne reviendrait à la maison d’Autriche. Les lois de l’empire défendent ces aliénations, il y faut au moins le consentement de l’empereur ; et on néglige même de le demander.

Dans le même temps le duc Charles de Bourgogne achète environ pour le même prix le duché de Gueldre et le comté de Zutphen.

Ce duc de Bourgogne était le plus puissant de tous les princes qui n’étaient pas rois, et peu de rois étaient aussi puissants que lui ; il se trouvait à la fois vassal de l’empereur et du roi de France, mais très-redoutable à l’un et à l’autre.

1473-1474. Ce duc de Bourgogne, aussi entreprenant que l’empereur l’était peu, inquiète tous ses voisins, et presque tous à la fois. On ne pouvait mieux mériter le nom de Téméraire.

Il veut envahir le Palatinat[11]. Il attaque la Lorraine et les Suisses. C’est alors que les rois de France traitent avec les Suisses pour la première fois. Il n’y avait encore que huit cantons d’unis : Schvitz, Uri, Undervald, Lucerne, Zurich, Claris, Zug, et Berne.

Louis XI leur donne vingt mille francs par an, et quatre florins et demi par soldat tous les mois.

1475. C’est toujours la destinée des Turcs que les chrétiens se déchirent entre eux, comme pour faciliter les conquêtes de l’empire ottoman. Mahomet, maître de l’Épire, du Péloponèse, du Négrepont, fait tout trembler. Louis XI ne songe qu’à saper la grandeur du duc de Bourgogne dont il est jaloux ; les provinces d’Italie, qu’à se maintenir les unes contre les autres ; Mathias Huniade, qu’à disputer la Bohême au roi de Pologne, et Frédéric III, qu’à amasser quelque argent dont il puisse un jour faire usage pour mieux établir sa puissance.

Mathias Huniade, après une bataille gagnée, se contente de la Silésie et de la Moravie ; il laisse la Bohême et la Lusace au roi de Pologne.

Charles le Téméraire envahit la Lorraine ; il se trouve, par cette usurpation, maître d’un des plus beaux États de l’Europe, des portes de Lyon jusqu’à la mer de Hollande.

1476. Sa puissance ne le satisfait pas ; il veut renouveler l’ancien royaume de Bourgogne, et y enclaver les Suisses. Ces peuples se défendent contre lui aussi bien qu’ils ont fait contre les Autrichiens ; ils le défont d’abord à la bataille de Grandson, et ensuite entièrement à celle de Morat[12]. Leurs piques et leurs espadons triomphent de la grosse artillerie et de la brillante gendarmerie de Bourgogne. Les Suisses étaient alors les seuls dans l’Europe qui combattissent pour la liberté. Les princes, les républiques même, comme Venise, Florence, Gênes, n’avaient presque été en guerre que pour leur agrandissement. Jamais peuple ne défendit mieux cette liberté précieuse que les Suisses. Il ne leur a manqué que des historiens.

C’est à cette bataille de Grandson que Charles le Téméraire perdit ce beau diamant qui passa depuis au duc de Florence. Un Suisse, qui le trouva parmi les dépouilles, le vendit pour un écu[13].

1477. Charles le Téméraire périt enfin devant Nancy, trahi par le Napolitain Campo-Basso, et tué, en fuyant après la bataille, par Bausemont, gentilhomme lorrain.

Par sa mort le duché de Bourgogne, l’Artois, le Charolais, Mâcon, Bar-sur-Seine, Lille, Douai, les villes sur la Somme, reviennent à Louis XI, roi de France, comme des fiefs de la couronne ; mais la Flandre qu’on nomme impériale, avec tous les Pays-Bas et la Franche-Comté, appartenaient à la jeune princesse Marie, fille du dernier duc.

Ce que fit certainement de mieux Frédéric III fut de marier son fils Maximilien avec cette riche héritière.

Maximilien épouse Marie, le 17 auguste, dans la ville de Gand, et Louis XI, qui avait pu la donner en mariage à son fils, lui fait la guerre[14].

Ce droit féodal, qui n’est dans son principe que le droit du plus fort, et dans ses conséquences qu’une source éternelle de discordes, allumait cette guerre contre la princesse. Le Hainaut devait-il revenir à la France ? était-ce une province impériale ? la France avait-elle des droits sur Cambrai ? en avait-elle sur l’Artois ? la Franche-Comté devait-elle être encore réputée province de l’empire ? était-elle de la succession de Bourgogne, ou réversible à la couronne de France ? Maximilien aurait bien voulu tout l’héritage. Louis XI voulait tout ce qui était à sa bienséance. C’est donc ce mariage qui est la véritable origine de tant de guerres malheureuses entre les maisons de France et d’Autriche ; c’est parce qu’il n’y avait point de loi reconnue que tant de peuples ont été sacrifiés.

Louis XI s’empare d’abord des deux Bourgognes, et, vers les Pays-Bas, de tout ce qu’il peut prendre dans l’Artois et dans le Hainaut.

1478. Un prince d’Orange, de la maison de Châlons en Franche-Comté, tâche de conserver cette province à Marie. Cette princesse se défend dans les Pays-Bas sans que son mari puisse lui fournir des secours d’Allemagne. Maximilien n’était encore que le mari indigent d’une héroïne souveraine. Il presse les princes allemands d’embrasser sa cause. Chacun songeait à la sienne propre. Un landgrave de Hesse[15] enlevait un électeur de Cologne[16], et le retenait en prison. Les chevaliers teutons prenaient Riga en Livonie. Mathias Huniade était prêt de s’accommoder avec Mahomet II.

1479. Enfin Maximilien, aidé des seuls Liégois, se met à la tête des armées de sa femme ; on les appelle les armées flamandes, quoique la Flandre proprement dite, c’est-à-dire le pays depuis Lille jusqu’à Gand, fût en partie aux Français. La princesse Marie eut une armée plus forte que le roi de France.

Maximilien défait les Français à la journée de Guinegaste au mois d’auguste. Cette bataille n’est pas de celles qui décident du sort de toute une guerre.

1480. On négocie. Le pape Sixte IV envoie un légat en Flandre. On fait une trêve de deux années. Où est, pendant tout ce temps, l’empereur Frédéric III ? Il ne fait rien pour son fils ni pendant la guerre ni pendant les négociations ; mais il lui avait donné Marie de Bourgogne, et c’était beaucoup.

1481. Cependant les Turcs assiégent Rhodes ; le fameux grand-maître d’Aubusson, à la tête de ses chevaliers, fait lever le siége au bout de trois mois.

Mais le bacha Acomat aborde dans le royaume de Naples avec cent cinquante galères. Il prend Otrante d’assaut. Tout le royaume est prêt d’être envahi, Rome tremble. L’indolence des princes chrétiens n’échappe à ce torrent que par la mort imprévue de Mahomet II. Et les Turcs abandonnent Otrante.

Accord bizarre de Jean, roi de Danemark et de Suède, avec son frère Frédéric, duc de Holstein. Le roi et le duc doivent gouverner le Holstein, fief de l’empire, et Slesvick, fief du Danemark, en commun. Tous les accords ont été des sources de guerres ; mais celui-ci surtout.

Les cantons de Fribourg en Suisse et de Soleure se joignent aux huit autres. C’est un très-léger événement par lui-même. Deux petites villes ne sont rien dans l’histoire du monde ; mais devenues membres d’un corps toujours libre, cette liberté les met au-dessus des plus grandes provinces qui servent.

1482. Marie de Bourgogne meurt. Maximilien gouverne ses états au nom du jeune Philippe son fils. Les villes des Pays-Bas ont toutes des priviléges. Ces priviléges causent presque toujours des dissensions entre le peuple qui veut les soutenir, et le souverain qui veut les faire plier à ses volontés. Maximilien réduit la Zélande, Leyde, Utrecht, Nimègue.

1483-1484-1485. Presque toutes les villes se soulèvent l’une après l’autre, mais sans concert, et sont soumises l’une après l’autre. Il reste toujours un levain de mécontentement.

1486. On était si loin de s’unir contre les Turcs que Mathias Huniade, roi de Hongrie, au lieu de profiter de la mort de Mahomet II pour les attaquer, attaque l’empereur. Quelle est la cause de cette guerre du prétendu fils contre le prétendu père ? Il est difficile de la dire. Il veut s’emparer de l’Autriche. Quel droit y avait-il ? Ses troupes battent les Impériaux, il prend Vienne : voilà son seul droit. L’empereur paraît insensible à la perte de la basse Autriche ; il voyage pendant ce temps-là dans les Pays-Bas, et de là il va à Francfort faire élire par tous les électeurs son fils Maximilien roi des Romains. On ne peut avoir moins de gloire personnelle, ni mieux préparer la grandeur de sa maison.

Maximilien est couronné à Aix-la-Chapelle, le 9 avril, par l’archevêque de Cologne ; le pape Innocent VIII y donne son consentement, que les papes veulent toujours qu’on croie nécessaire.

L’empereur, qui a eu dans la diète de Francfort le crédit de faire son fils roi des Romains, n’a pas celui d’obtenir cinquante mille florins par mois pour recouvrer l’Autriche, C’est une de ces contradictions qu’on rencontre souvent dans l’histoire.

Ligue de Souabe pour prévenir les guerres particulières qui déchirent l’Allemagne et qui l’affaiblissent. Ce fut d’abord un règlement de tous les princes à la diète de Francfort, une loi comminatoire qui met au ban de l’empire tous ceux qui attaqueront leurs voisins. Ensuite tous les gentilshommes de Souabe s’associèrent pour venger les torts : ce fut une vraie chevalerie. Ils allaient par troupes démolir des châteaux de brigands ; ils obligèrent même le duc Georges de Bavière à ne plus persécuter ses voisins. C’était la milice du bien public : elle ne dura pas.

1487. L’empereur fait avec Mathias Huniade un traité qu’un vaincu seul peut faire. Il lui laisse la basse Autriche jusqu’à ce qu’il paye au vainqueur tous les frais de la guerre, mais faisant toujours valoir son titre de père, et se réservant le droit de succéder à son fils adoptif dans le royaume de Hongrie.

1488. Le roi des Romains Maximilien se trouve, dans les Pays-Bas, attaqué à la fois par les Français et par ses sujets. Les habitants de Bruges, sur lesquels il voulait établir quelques impôts contre les lois du pays, s’avisent tout d’un coup de le mettre en prison, et l’y tiennent quatre mois ; ils ne lui rendirent sa liberté qu’à condition qu’il ferait sortir le peu de troupes allemandes qu’il avait avec lui, et qu’il ferait la paix avec la France.

Comment se peut-il faire que le ministère du jeune Charles VIII, roi de France, ne profitât pas d’une si heureuse conjoncture ? Ce ministère alors était faible.

1489. Maximilien épouse secrètement en secondes noces, par procureur, la duchesse Anne de Bretagne. S’il l’eût épousée en effet, et qu’il en eût eu des enfants, la maison d’Autriche pressait la France par les deux bouts. Elle l’entourait à la fois par la Franche-Comté, l’Alsace, la Bretagne, et les Pays-Bas.

1490. Mathias Corvin Huniade étant mort, il faut voir si l’empereur Frédéric, son père adoptif, lui succédera en vertu des traités. Frédéric donne son droit à Maximilien son fils.

Mais Béatrix, veuve du dernier roi, fait jurer aux états qu’ils reconnaîtront celui qu’elle épousera ; elle se remarie aussitôt à Ladislas Jagellon, roi de Bohême ; et les Hongrois le couronnent.

Maximilien reprend du moins sa basse Autriche, et porte la guerre en Hongrie.

1491. On renouvelle entre Ladislas Jagellon et Maximilien ce même traité que Frédéric III avait fait avec Mathias. Maximilien est reconnu héritier présomptif de Ladislas Jagellon en Hongrie et en Bohême.

La destinée préparait ainsi de loin la Hongrie à obéir à la maison d’Autriche.

L’empereur, dans ce temps de prospérité, fait un acte de vigueur ; il met au ban de l’empire Albert de Bavière, duc de Munich, son gendre. C’est une chose étonnante que le nombre des princes de cette maison auxquels on a fait ce traitement[17]. De quoi s’agissait-il ? d’une donation du Tyrol faite solennellement à ce duc de Bavière par Sigismond d’Autriche ; et cette donation ou vente secrète était regardée comme la dot de sa femme Cunégonde, propre fille de l’empereur Frédéric III.

L’empereur prétendait que le Tyrol ne pouvait pas s’aliéner : tout l’empire était partagé sur cette question, preuve indubitable qu’il n’y avait point de lois claires ; et c’est en effet ce qui manque le plus aux hommes.

Le ban de l’empire, dans un tel cas, n’est qu’une déclaration de guerre ; mais on s’accommoda bientôt. Le Tyrol resta à la maison d’Autriche : on donne quelques compensations à la Bavière, et le duc de Bavière rend Ratisbonne, dont il s’était emparé depuis peu.

Ratisbonne était une ville impériale. Le duc de Bavière, fondé sur ses anciens droits, l’avait mise au rang de ses États ; elle est de nouveau déclarée ville impériale : il resta seulement aux ducs de Bavière la moitié des droits de péage.

1492. Le roi des Romains, Maximilien, qui comptait établir paisiblement la grandeur de sa maison en mariant sa fille Marguerite d’Autriche à Charles VIII, roi de France, chez qui elle était élevée, et en épousant bientôt Anne de Bretagne, épousée déjà en son nom par procureur, apprend que sa femme est mariée en effet à Charles VIII, le 6 décembre 1491, et qu’on va lui renvoyer sa fille Marguerite. Les femmes ne sont plus des sujets de guerre entre les princes, mais les provinces le sont.

L’héritage de Marie de Bourgogne fomentait une discorde éternelle, comme l’héritage de Mathilde avait si longtemps troublé l’Italie.

Maximilien surprend Arras ; il conclut ensuite une paix avantageuse par laquelle le roi de France lui cède la Franche-Comté en pure souveraineté, et l’Artois, le Charolais, et Nogent, à condition d’hommage.

Ce n’est pas à Maximilien proprement qu’on cède ce pays, c’est à Philippe son fils, comme représentant Marie de Bourgogne sa mère.

Il faut avouer que nul roi des Romains ne commença sa carrière plus glorieusement que Maximilien. La victoire de Guinegaste sur les Français, l’Autriche reconquise, Arras prise, et l’Artois gagné d’un coup de plume, le couvraient de gloire.

1493. Frédéric III meurt, le 19 auguste, âgé de soixante-dix-huit ans ; il en régna cinquante-trois. Nul règne d’empereur ne fut plus long ; mais ce ne fut pas le plus glorieux.


  1. M. Clogenson pense que les dernières phrases de cet alinéa sont une allusion aux efforts inutiles du roi de Prusse, en 1744, pour dépouiller Marie-Thérèse et son fils, encore au berceau, du royaume de Bohême. Ces phrases se trouvent dans la première édition des Annales, qui parut dans l’année même de l’aventure de Francfort : ce qui explique ce trait contre ce monarque. (B.)
  2. Voyez, tome X, page 362, l’épître intitulée L’auteur arrivant dans sa terre près du lac de Genève, mars 1755.
  3. Éric VII, en Danemark, et XIII, en Suède, fut remplacé par Christophe en 1439, et mourut vingt ans après. (Cl.)
  4. Les premières éditions contiennent, ici et ailleurs, des variantes d’autant plus inutiles à relever aujourd’hui que le passage qu’on lisait ici a été transporté par l’auteur dans l’Essai sur les Mœurs. (B.) — Voyez tome XII, pages 95-96.
  5. Les pères du concile de Bâle, en se séparant, au mois de mai 1443, déclarèrent que ce concile n’était pas dissous, et qu’ils le continueraient : ce qui eut lieu à Lausanne, en 1449. (Cl.)
  6. Frédéric III, fils d’Ernest, dit de Fer, n’avait pas de frère qui portât le même nom que lui. Cet Ernest eut dix enfants : un seul fut nommé Frédéric (et c’est Frédéric III) ; l’autre, qui est le seul dont l’histoire s’occupe après Frédéric, est Albert ; d’où j’infère qu’il faut substituer le nom d’Albert à celui de Frédéric. C’est ce même Albert d’Autriche qui battit son frère Frédéric III, à Eins, en 1459. (Cl.)
  7. Voyez année 1202.
  8. Il savait le grec, l’arabe, le persan ; il entendait le latin ; voyez tome XII, page 99.
  9. Voyez page 448.
  10. Voyez page 231.
  11. Voltaire oublie de mentionner l’entrevue de Charles et de l’empereur à Trêves. Charles voulait se faire nommer roi par Frédéric III. (G. A.)
  12. Les Français détruisirent, en 1798, la chapelle où avaient été entassés les ossements des Bourguignons tués à la journée du 22 juin 1476. Cet ossuaire a été remplacé par une pyramide. La bataille de Grandson avait été livrée peu de temps avant celle de Morat, le 3 mars. (Cl.)
  13. Le Sancy, depuis à la couronne de France.
  14. M. de Voltaire suit ici l’opinion commune ; mais il faut observer que la princesse était beaucoup plus âgée que le dauphin, et que les Flamands étaient si opposés à ce mariage qu’ils condamnèrent à mort deux des principaux ministres de leur souveraine, soupçonnés de pencher pour la France, et les exécutèrent sous les yeux de la princesse, qui demandait leur grâce. (K.) — Voyez tome XII, page 126.
  15. Herman. Voyez le catalogue des électeurs de Cologne.
  16. Robert de Bavière. Voyez page 210, ibid.
  17. Voyez années 1054, 1070, 1138, 1275.