E. Plon, Nourrit et Cie (1p. vii-264).
Tome 1  ►


AVERTISSEMENT


Je n’ai pas à m’étendre ici sur l’utilité des études anatomiques pour les artistes, peintres ou sculpteurs, qui doivent reproduire, dans leurs œuvres le corps humain sous ses aspects les plus variés. Autrefois discutée, la chose aujourd’hui ne fait plus question. « L’anatomie, dit Gerdy, venant au secours des yeux, donne de la transparence à la peau et montre à l’intelligence de l’artiste les formes de la surface du corps par le souvenir des parties cachées sous le voile qui les couvre. L’anatomie est, pour ainsi dire encore, un verre grossissant qui rend ces formes sensibles jusque dans les plus minces détails, en sorte qu’éclairé par elle, l’artiste voit beaucoup mieux, beaucoup plus vite, et rend avec plus de fidélité des formes distinctes à ses yeux parce qu’elles sont claires à son esprit. »

Ce n’est là, en somme, qu’une application de cette grande loi formulée par Montaigne, lorsqu’il dit « C’est l’esprit qui oye et qui veoid », et que nous pouvons traduire ainsi avec Peisse « L’œil ne voit dans les choses que ce qu’il regarde, et il ne regarde que ce qui est déjà en idée dans l’esprit. »

L’anatomie artistique, ou anatomie appliquée aux arts plastiques, est la science des formes extérieures et des rapports qui existent entre elles et les parties profondes. Elle a pour but de renseigner l’artiste sur la cause des formes extérieures du corps humain, soit au repos, soit dans les divers mouvements.

C’est dans l’intention de faciliter aux artistes ces études spéciales, toujours longues et ardues, que j’ai entrepris cet ouvrage, dont l’esprit peut se résumer dans les deux points suivants :

1o Donner aux figures une place prépondérante, remplacer, autant que faire se peut, la description écrite par la description figurée, de telle sorte que l’ouvrage soit tout entier dans les planches, et que le texte n’en devienne pour ainsi dire que l’accompagnement ;

2o Suivre dans la succession des figures, comme dans le développement du texte, la méthode analytique, celle qui procède du simple au composé, du connu à l’inconnu, de la partie à l’ensemble.

Pour faciliter la lecture et les recherches, les figures portent avec elles les indications nécessaires qui se trouvent échelonnées sur les côtés, au lieu d’être groupées en un argument renvoyé au bas de la page. Elles sont ensuite réunies en planches qui ont des titres et des sous-titres, et dont la succession constitue, suivant l’expression de Topffer, une véritable anatomie en « estampes ». « L’on peut écrire des histoires, dit l’écrivain genevois, avec des chapitres, des lignes, des mots ; c’est de la littérature proprement dite. L’on peut écrire des histoires avec des successions de scènes représentées graphiquement, c’est de la littérature en estampes. » Ce que Topffer dit de la littérature, nous avons tenté de le faire pour l’anatomie.

Mais l’anatomie artistique ne saurait consister uniquement dans une succession de dessins anatomiques plus ou moins clairs, ou en un simple résumé plus ou moins littéraire d’anatomie descriptive ; pour être ce qu’elle doit être réellement, c’est-à-dire l’anatomie appliquée aux arts plastiques, il faut que la relation soit établie jusque dans ses moindres détails, entre les portions profondes et la forme extérieure, entre les notions anatomiques et le nu, ce qui, naturellement, ne saurait avoir lieu si le nu, dans une partie spéciale, n’est étudié en lui-même et régulièrement décrit.

C’est pourquoi j’ai pensé qu’à côté des livres d’anatomie que les artistes ont actuellement entre les mains, et dont le plus répandu et le plus apprécié, à juste titre, est le Précis de M. le professeur Mathias Duval, il y avait place pour un ouvrage plus largement illustré et dans lequel, en outre de la description anatomique, la forme extérieure serait l’objet d’une étude à part.

Ce livre se composera donc de deux parties la première, qui sera consacrée aux études anatomiques (partie anatomique) ; la seconde traitera des formes extérieures (partie morphologique).

La partie anatomique comprendra l’ostéologie ou étude des os, l’arthrologie ou étude des articulations qui unissent les différents os entre eux, la myologie ou étude des muscles. Elle se terminera par la description de quelques veines superficielles et par l’étude très importante de la peau et du tissu cellulaire graisseux qui la double.

Dans toute la partie anatomique, l’homme est considéré, immobile, dans la station debout, la tête droite, les deux bras rapprochés du tronc, l’avant-bras en supination et la paume des mains tournée en avant, les pieds rapprochés et se touchant presque du talon au gros orteil. Cette attitude est imposée par la tradition. C’est elle que les anatomistes de tous les temps ont décrite dans leurs livres, et ils y ont puisé les termes d’une nomenclature universellement acceptée aujourd’hui et que nous ne saurions changer.

Les dessins anatomiques représentent donc l’homme dans cette attitude de convention. De plus, ils sont tous exécutés d’après deux points de vue seulement, le point de vue de face et celui de profil. La face est antérieure ou postérieure, le profil est droit ou gauche, interne ou externe ; pour raison de méthode, tout point de vue intermédiaire ou de trois quarts a été évité. Enfin ils réalisent autant que possible ce qu’on appelle en géométrie descriptive une projection orthogonale. Toute perspective en est donc supprimée avec les déformations qui en résultent. Et si le dessin y perd au point de vue artistique, il m’a semblé qu’il y gagne beaucoup en clarté, ce qui est ici notre principal objectif.

Dans les planches d’ostéologie, les os sont d’abord vus, un à un pour ainsi dire, indépendamment des rapports que dans le squelette ils affectent les uns avec les autres ; puis ils sont réunis et groupés pour composer des parties de plus en plus étendues du squelette. Les ligaments ne forment point une partie distincte, ils sont figurés à la suite des os qu’ils servent à maintenir.

Le texte relatif à l’ostéologie suit une marche semblable. D’abord étudiés isolément, les os sont considérés ensuite dans leurs rapports réciproques. La description d’une articulation succède à l’étude du squelette qui la forme ; elle est en outre accompagnée des notions de physiologie nécessaires pour en comprendre le mécanisme. Enfin l’influence de l’ossature sur la morphologie est étudiée dans un paragraphe spécial à propos du squelette de chaque grande région, comme sur les figures d’ensemble commencent à apparaître en silhouette les premiers linéaments de la forme extérieure.

De même que dans les planches d’ostéologie, tous les os sont figurés, de même dans les planches de myologie le sont tous les muscles, aussi bien les muscles profonds que les muscles superficiels, ce qui est en somme assez logique, mais ce qu’on ne trouve généralement pas dans les planches d’anatomie artistique qui se contentent de reproduire ces derniers.

Les premières figures sont consacrées aux muscles les plus profonds, ceux qui reposent directement sur le squelette ; viennent ensuite les couches moyennes, en progressant méthodiquement jusqu’aux muscles de la surface. Le lecteur voit ainsi le squelette s’habiller pour ainsi dire de ses revêtements musculaires successifs, et du centre jusqu’à la périphérie, rien ne lui est plus inconnu de ce qui constitue véritablement la masse du corps, et par suite contribue à lui donner la forme qui lui est propre. Alors l’écorché superficiel ne cache plus de mystères ; préparé par les figures qui ont précédé, il apparaît comme la conclusion naturelle et logique de toute la myologie. J’ajouterai que si les muscles profonds n’ont pas une influence directe sur les accidents de la surface extérieure, ils interviennent au même degré que les muscles superficiels dans les différents mouvements, et que par suite leur rôle physiologique ne saurait être méconnu.

Dans le texte qui accompagne la myologie, chaque muscle, d’après le plan que je viens d’indiquer, est décrit isolément avec ses insertions précises, sa forme, son volume, en même temps que la part qui lui revient dans la conformation extérieure des parties est minutieusement indiquée.

Ainsi comprise, la partie anatomique de cet ouvrage contient déjà de nombreuses indications sur la raison des formes extérieures. Mais, ainsi que je l’ai déjà dit, elle ne constitue que la moitié de la tâche qui nous incombe. Elle est l’analyse de la « forme » dont il est nécessaire dans une seconde partie de reconstituer la synthèse.

Cette seconde partie a été conçue d’après des principes dont je crois utile de dire quelques mots. Je suis de ceux qui pensent que la science n’a rien à apprendre à l’artiste sur la direction d’une ligne, sur l’aspect extérieur d’une surface. L’artiste digne de ce nom est particulièrement doué pour saisir d’emblée et sans intermédiaire la forme elle-même, pour la voir, la juger et ensuite l’interpréter. J’ajouterai même qu’il en est de la forme comme des couleurs ; elle est loin d’être une et la même pour tous. Chaque artiste, selon son tempérament, en a une vision qui lui est propre. Ce n’est donc point dans des productions littéraires, sur les belles surfaces les lignes majestueuses et les contours voluptueux que l’artiste trouvera ce qu’il demande à l’anatomie.

Sans se perdre dans des considérations d’esthétique tout au moins superflues, l’anatomiste qui veut servir l’art ne doit avoir qu’un but : se borner en toute indépendance d’esprit et sans phrases à montrer la nature vivante telle qu’elle est, dans sa forme extérieure et dans les parties profondes en relation de cause à effet avec celle-ci. Il doit chercher non pas tant à décrire qu’à montrer et à expliquer. Deux qualités lui suffisent : la clarté et la précision.

C’est dans ce but que, à l’exemple de Gerdy, j’ai subdivisé la surface du corps humain en un certain nombre de régions et fixé, dans une nomenclature spéciale, le nom de ces diverses régions et des détails morphologiques, plans, saillies ou dépressions qui les remplissent. C’était nécessaire pour faciliter et éclairer toute cette étude, permettre les comparaisons d’une même partie chez différents sujets, ou chez un même sujet dans des mouvements différents. En effet, si l’on s’entend généralement, lorsque l’on parle du pied, de la main, du poignet ou de la jambe, et si à ce propos notre division paraît puérile, on verra combien elle était utile pour définir les limites des régions secondaires du tronc. Sous ce rapport, la morphologie humaine est moins précise et moins connue que la morphologie du cheval.

Les planches consacrées à la représentation du nu forment deux séries. La première série, correspondant aux planches anatomiques, les complète en figurant l’homme dans la même attitude de convention.

Trois d’entre elles, qui représentent le corps tout entier et sous ses diverses faces, constituent une véritable topographie de la forme.

Sur les autres, les grands segments du corps, pris isolément, permettent d’étudier la morphologie de chaque région jusque dans ses moindres détails. On trouvera, en outre, dans le texte, des croquis destinés à établir la comparaison entre la morphologie de l’homme et celle de la femme.

Les dessins de la deuxième série sont destinés à montrer les changements que les différents mouvements du corps produisent dans la forme extérieure. Ils constituent une partie fort importante dans l’ouvrage, et tous ceux qui précèdent n’en sont pour ainsi dire que la préparation.

Comme il était impossible de représenter tous les mouvements du corps dans leur presque infinie variété, il a fallu faire un choix et procéder par analyse. Les mouvements d’ensemble ne se composent que des mouvements partiels des diverses parties. Ces derniers seuls ont donc été pris pour objectif. Enfin les mouvements de chaque partie, quelque variés qu’ils soient, peuvent être ramenés facilement à un petit nombre qui constituent, à proprement parler, les mouvements élémentaires ou fondamentaux dont tous les autres ne sont que des combinaisons.

Il était donc suffisant de représenter les mouvements élémentaires de chacune des parties du corps, puisque c’est toujours en un ou plusieurs de ces mouvements que se résolvent les combinaisons plus ou moins élevées que réalise le corps tout entier en action.

Ainsi, pour les mouvements de la tête et du cou, quatre dessins représentent la flexion, l’extension, la rotation et l’inclinaison latérale.

Pour le tronc, j’ai figuré d’abord les modifications qu’il subit dans les mouvements de l’épaule et dans les mouvements du bras, puis les mouvements du tronc sur lui-même qui se résument en quatre principaux : la flexion, l’extension, la rotation et l’inclinaison latérale.

Au membre supérieur, les mouvements de rotation ont été étudiés particulièrement et représentés à quatre moments différents : en supination, en pronation, en demi-pronation et en pronation forcée.

Ensuite vient la flexion à ses divers degrés.

Enfin les planches consacrées au membre inférieur le représentent en flexion forcée et en flexion modérée, le pied soulevé ou bien portant sur le sol. Chacun des dessins qui précèdent est accompagné d’un croquis anatomique qui en facilite l’analyse.

A toutes ces planches relatives à la forme extérieure, au repos ou dans les principaux mouvements, correspond un texte qui, en outre des descriptions relatives à la morphologie, comprend l’étude du mouvement lui-même, tant au point de vue des déplacements des divers leviers osseux qu’au point de vue des puissances musculaires mises en jeu.

Enfin l’ouvrage se termine par une étude sur les proportions du corps humain.

Je dois en terminant, à propos des dessins morphologiques, quelques mots d’explication au lecteur.

Et d’abord, j’ai à peine besoin de le dire, je n’ai jamais eu la prétention d’offrir aux artistes rien qui ressemblât à un modèle des formes extérieures du corps humain.

La question de la forme elle-même est donc entièrement réservée, et je désire définir nettement le rôle que je me suis imposé, véritable et simple rôle d’informateur.

Les dessins ont été exécutés d’après nature, et après bien des recherches, sur deux modèles[1] qui ont été choisis non d’après une formule d’esthétique quelconque, mais pour raison de clarté et de méthode. A cause de la finesse de la peau, de la puissance de la musculature et de l’absence aussi complète que possible du tissu graisseux, ils offraient des formes non pas simples, mais claires et faites pour ainsi dire pour l’étude et la démonstration. Lorsque l’on aura appris à les voir, on retrouvera ces mêmes formes chez les sujets plus jeunes, plus gras, plus simples en un mot, mais d’une lecture plus difficile.

En résumé, mon but a été de mettre entre les mains des artistes un livre exclusivement technique qu’ils puissent sans effort lire ou consulter, et dans lequel ils trouvent l’aide nécessaire, non pas pour choisir un modèle, mais pour lire et comprendre le modèle qu’ils auront choisi.


Qu’il me soit permis, en second lieu, de dire quelques mots aux médecins auxquels ce livre, bien que plus spécialement destiné aux artistes, s’adresse cependant. Il y a déjà longtemps, en effet, que Gerdy avait compris tous les services que l’anatomie des formes extérieures du corps humain pouvait rendre aux chirurgiens : « Les formes extérieures, dit-il, par leurs relations avec les formes intérieures, montrent, à l’intelligence du chirurgien, ce qui est caché dans la profondeur du corps par ce qui est visible à sa surface. »

Mais il est un autre point de vue que je désire relever et qui n’intéresse pas moins les médecins que les chirurgiens. C’est l’incontestable utilité d’une connaissance exacte et précise des formes extérieures normales pour le diagnostic des déformations que leur font subir les maladies. M. le professeur Charcot, avec la haute autorité qui s’attache à son enseignement, signalait dernièrement à ses auditeurs de la Salpêtrière tout l’intérêt que présente pour le médecin l’étude du nu. « Je ne saurais trop vous engager, Messieurs, disait-il, surtout quand il s’agit de neuro-pathologie, à examiner les malades nus toutes les fois que des circonstances d’ordre moral ne s’y opposeront pas. »

« En réalité, Messieurs, nous autres médecins, nous devrions connaître le nu aussi bien et même mieux que les peintres ne le connaissent. Un défaut de dessin chez le peintre et le sculpteur, c’est grave, sans doute, au point de vue de l’art, mais en somme cela n’a pas, au point de vue pratique, des conséquences majeures. Mais que diriez-vous d’un médecin ou d’un chirurgien qui prendrait, ainsi que cela arrive trop souvent, une saillie, un relief normal pour une déformation ou inversement ? Pardonnez-moi cette digression, qui suffira peut-être pour faire ressortir une fois de plus la nécessité pour le médecin comme pour le chirurgien d’attacher une grande importance à l’étude médico-chirurgicale du nu[2]. »

Pour tirer profit de l’examen du nu pathologique, il est donc de toute nécessité de bien connaître le nu normal. Or c’est là une étude quelque peu négligée par les médecins. Il existe parmi nous, il faut bien le dire, une sorte de préjugé qui nous fait considérer l’anatomie des formes comme une science élémentaire qu’on abandonne volontiers aux artistes et que le médecin connaît toujours assez.

L’anatomiste, en effet, qui a longtemps fréquenté les amphithéâtres, dont le scalpel a fouillé le cadavre dans tous les sens, au dehors comme au dedans, sans négliger le plus mince organe, la plus petite fibre, peut se figurer, avec une apparence de raison, qu’une telle somme de connaissances anatomiques renferme implicitement celle des formes extérieures, et qu’il doit connaître la morphologie humaine sans l’avoir spécialement apprise, comme par surcroît. C’est là cependant une illusion. Nous avons vu des anatomistes fort distingués se trouver très embarrassés en présence du nu vivant et chercher inutilement dans leurs souvenirs la raison anatomique de certaines formes imprévues bien que parfaitement normales.

La chose est en somme facile à comprendre ; l’étude du cadavre ne peut donner ce qu’elle n’a pas. La dissection qui nous montre tous les ressorts cachés de la machine humaine, ne le fait qu’à la condition d’en détruire les formes extérieures. La mort elle-même, dès les premières heures, inaugure la dissolution finale, et, par les modifications intimes qui se produisent alors dans tous les tissus, en altère profondément les apparences extérieures. Enfin, ce n’est pas sur le cadavre inerte qu’on peut saisir les changements incessants que la vie, dans l’infinie variété des mouvements, imprime à toutes les parties du corps humain. Il serait donc à souhaiter que dans nos amphithéâtres d’anatomie l’étude du modèle vivant ait sa place à côte de l’étude du cadavre qu’elle compléterait très heureusement. En effet, l’anatomie des formes ne peut être étudiée que sur le vivant. Elle a pour fondements, il est vrai, les notions que fournit le cadavre, mais elle anime, elle vivifie ces premières connaissances à l’aide desquelles elle reconstitue l’homme plein de vie. Son procédé est la synthèse ; son moyen est l’observation du nu son but est de découvrir les causes multiples de la forme vivante et de la fixer dans une description elle demande donc à être étudiée en elle-même et pour elle-même, et elle fournit des connaissances que l’anatomie pure et simple ne peut donner.


Je ne saurais terminer sans prier mon maître, M. le professeur Charcot, d’agréer ici l’expression de ma bien vive reconnaissance pour les encouragements et les conseils qu’il a bien voulu me prodiguer pendant tout le cours de ces travaux, entièrement exécutés dans son service, au laboratoire de la Salpêtrière.

Je dois également mes bien sincères remerciements à M. Le Bas, directeur de l’hospice de la Salpêtrière, dont j’ai pu apprécier une fois de plus, en cette occasion, l’affectueuse sympathie, ainsi qu’a mon excellent ami le docteur Paul Poirier, agrégé, chef des travaux anatomiques de la Faculté de médecine, qui a mis sans compter à ma disposition sa science de l’anatomie et les précieuses ressources des amphithéâtres qu’il dirige.

Paris, juillet 1889.

PREMIÈRE PARTIE

ANATOMIE

Cette partie comprendra l’étude des os (ostéologie) et de leurs moyens d’union (arthrologie), l’étude des muscles (myologie), quelques notions sur les veines superficielles, enfin l’étude de la peau et du tissu graisseux.


I

OSTÉOLOGIE ET ARTHROLOGIE


GÉNÉRALITÉS


Les os sont, de toutes les parties du corps, celles qui ont le plus de consistance. Cette dureté caractéristique leur permet d’être à l’égard des parties molles des agents de support ou de protection. D’un blanc mat ou tirant sur le jaune lorsqu’ils ont été préparés pour l’étude, ils ont un tout autre aspect chez le vivant, alors qu’ils sont extérieurement recouverts de la membrane périostique ou de cartilage.

Les anatomistes ont l’habitude de diviser les os, d’après leur forme, en trois classes :

1° Les os longs, ceux dont la longueur l’emporte sur les autres dimensions. — On leur distingue un corps ou diaphyse et deux extrémités ou épiphyses, ex. : l’humérus, le fémur, etc. ;

2° Les os larges ou plats, ceux qui ont une étendue considérable relativement à leur épaisseur, tels que l’omoplate, l’os coxal ;

3° Les os courts ou mixtes, c’est-à-dire ceux qui ne sont ni longs ni larges comme les vertèbres, les os du carpe, la rotule, etc.

Pour la facilité de la description, les os sont comparés à des solides géométriques. On leur considère des faces, des angles et des bords. La configuration extérieure se résume dans la forme générale, les saillies et les cavités. Les saillies prennent l’aspect de lignes, de crêtes, de tubérosités, d’épines, etc… Les cavités sont de simples dépressions, des fosses, des gouttières, des anfractuosités, etc… Les saillies comme les cavités, sont articulaires ou non articulaires suivant qu’elles concourent ou non à la formation d’une articulation.

A l’œil nu, la substance[3] des os se présente sous deux formes principales :

1° La substance compacte, dans la masse de laquelle on n’aperçoit pas de trous. Cette substance forme une croûte plus ou moins épaisse à la surface de tous les os ;

2° La substance spongieuse, formée de lamelles réticulées circonscrivant des cellules irrégulières qui communiquent les unes avec les autres. Cette substance s’observe surtout à l’intérieur des os courts et aux extrémités des os longs, pendant que le corps de ces derniers est formé presque complètement de tissu compact, ne laissant au centre qu’une sorte de canal destiné à loger la moelle.

Dans l’intérieur des os, en effet, se trouve cette substance molle qui constitue la moelle, composée surtout de tissu cellulaire et de graisse, au milieu de laquelle circulent des vaisseaux.

A l’extérieur, les os sont recouverts, suivant les régions, d’une membrane composée de fibres tendineuses entrelacées, le périoste, et d’une couche d’un tissu spécial que nous étudierons tout à l’heure, le cartilage. Le cartilage recouvre toutes les parties de l’os qui concourent à former une articulation ; le périoste entoure tout le reste.

Les cartilages sont beaucoup moins durs que les os et doués d’une plus grande élasticité. Frais, ils ont une teinte blanc bleuâtre ; desséchés, ils deviennent jaunâtres, transparents et cassants. Les cartilages libres, comme les cartilages des côtes, par exemple, sont recouverts d’une membrane analogue au périoste et nommée le périchondre. Certains cartilages ont une structure fibreuse par l’adjonction à la substance cartilagineuse d’une quantité plus ou moins considérable de tissu fibreux. Ce sont les fibro-cartilages.

Tous les os sont unis les uns aux autres et forment un ensemble qui est le squelette.

Cette union des os se fait par l’intermédiaire de diverses pièces plus ou moins compliquées qui composent les articulations, dont l’étude a pris le nom d’arthrologie. Mais les os reliés entre eux le sont d’une façon plus ou moins intime, de telle sorte que l’étendue des mouvements qu’ils peuvent exécuter les uns sur les autres est fort variable.

Il y a donc plusieurs sortes d’articulations ; on les classe habituellement en trois catégories, qui sont : les sutures ou synarthroses, les symphyses ou amphyarthroses et les diarthroses.

Dans les sutures les os sont soudés entre eux par une masse intermédiaire fibreuse ou fibro-cartilagineuse toujours très étroite. Le périoste se continue sans interruption d’un os à l’autre, et les mouvements de l’articulation sont réduits à zéro.

Dans les amphyarthroses ou symphyses, les surfaces osseuses sont revêtues de cartilage, et la masse ligamenteuse intermédiaire, beaucoup plus épaisse que dans les sutures, permet une certaine mobilité des os en contact. Tantôt cette masse unissante est pleine, tantôt elle est creusée d’une ou même de deux cavités.

Enfin, les diarthroses constituent le type le plus complexe. Les surfaces osseuses qui concourent à l’articulation sont d’abord couvertes d’une couche mince de cartilage, dit cartilage articulaire, au pourtour duquel s’arrête le périoste. Puis, d’un os à l’autre s’étend, en forme de manchon, une membrane fibreuse renforcée extérieurement de ligaments périphériques plus ou moins épais et tapissée intérieurement d’une couche continue de cellules épithéliales qui constitue la membrane synoviale. Les extrémités osseuses sont en contact intime, de telle sorte que la cavité articulaire est réduite à presque rien. Elle est remplie d’un liquide, sécrété par la synoviale, la synovie, qui facilite le glissement. Lorsque les surfaces osseuses articulaires ne concordent pas, elles sont séparées par un ligament fibro-cartilagineux, adhérent aux ligaments périphériques et dont le rôle est de détruire la discordance en adaptant chacune de ses faces à la partie osseuse avec laquelle elles sont en rapport. La cavité articulaire est ainsi divisée en deux cavités secondaires pourvues chacune d’une synoviale.

Chez le fœtus, le squelette est d’abord entièrement cartilagineux. L’ossification, c’est-à-dire la transformation du tissu cartilagineux en tissu osseux, se fait progressivement et débute à la fois par plusieurs points d’un même os (points d’ossification). Les parties ossifiées accroissent d’étendue jusqu’à ce qu’elles se rencontrent, se confondent, et qu’en conséquence toute trace de l’ancien fonds cartilagineux ait disparu.

Chez le nouveau-né, le squelette est encore en grande partie cartilagineux, et c’est aux dépens de cette substance cartilagineuse que l’accroissement des os se fait. Ce n’est guère que vers vingt-cinq ans que l’accroissement est terminé et l’ossification complète.

L’étude des os est la base et le fondement de toute anatomie. Au point de vue des applications morphologiques qui deviennent ici notre principal objectif, son importance n’est pas moins considérable. Ce sont les os qui, par leur rigidité, donnent au corps ses proportions. Par la fixité de leurs saillies sous-cutanées, ils permettent les mensurations précises. Profondément situés, ils déterminent le plus souvent la forme générale de la région ; superficiellement placés, ils prennent une part directe au modelé de la forme extérieure. La configuration de leurs extrémités articulaires indique le sens et la limite des mouvements dont les articulations sont susceptibles. Enfin leurs rapports avec les muscles, qui tous s’y attachent par leurs extrémités, font de leur connaissance approfondie le prélude nécessaire et obligé de la myologie.

Dans l’étude qui va suivre, nous ne séparerons pas les os de leurs moyens d’union, et les articulations seront décrites à la suite des diverses pièces du squelette qui concourent à leur formation.

CHAPITRE PREMIER

SQUELETTE DE LA TÊTE


Je n’entreprendrai pas de décrire isolément tous les os que les anatomistes considèrent comme autant de pièces distinctes et dont la réunion compose le squelette de la face et du crâne. Ces os, au nombre de huit pour le crâne et de quatorze pour la face, sont les suivants :

Os du crâne : un frontal, deux pariétaux, deux temporaux, un occipital, un sphénoïde, un ethmoïde.

Os de la face : deux maxillaires supérieurs, deux palatins, deux unguis, deux os malaires, deux os nasaux, deux cornets inférieurs, un vomer, un maxillaire inférieur.

D’ailleurs, à l’exception du maxillaire inférieur, toutes ces différentes pièces osseuses sont unies entre elles d’une façon si intime qu’elles ne sauraient exécuter les unes sur les autres le moindre mouvement. — Le squelette de la tête forme ainsi pendant la vie un tout cohérent et indivis, que l’on a pu considérer avec raison comme formé d’un seul et même os subdivisé artificiellement par les anatomistes pour les besoins de la description[4].

Quoi qu’il en soit, l’anatomie des formes n’a pas à pénétrer dans tous les détails si complexes du squelette de la tête, et elle peut, sans aucun inconvénient, le considérer comme formé seulement de deux pièces distinctes d’une part, le crâne et la moitié supérieure de la face, et, d’autre part, le maxillaire inférieur.


§ 1. — Crâne et moitié supérieure de la face.


Le crâne est une sorte de boîte osseuse, irrégulièrement ovoïde, qui surmonte le canal vertébral, avec lequel elle communique et dont elle a été regardée avec raison comme un renflement. Il loge l’encéphale, comme la colonne vertébrale renferme la moelle, qui n’est elle-même qu’un prolongement encéphalique.

Il forme toute la partie supérieure et postérieure de la tête. A sa moitié antérieure sont appendus les os de la face couronnée par le front, dont le squelette, l’os frontal, concourt d’autre part à fermer en avant la cavité crânienne.

C’est en arrière des os de la face que s’ouvre inférieurement le vaste orifice (trou occipital) qui fait communiquer la cavité crânienne avec le canal vertébral, de telle sorte que la partie supérieure de la colonne cervicale monte jusqu’au crâne, en arrière du squelette facial.

Pour faciliter la description, nous considérerons le squelette de la tête sous ses divers points de vue : plan antérieur, plan latéral, plan postérieur, plan inférieur et plan supérieur.


Plan antérieur. (Pl. 1, fig. 1.)


Toute la partie supérieure du squelette de la tête est formée par l’os frontal, dont il importe d’énumérer, à notre point de vue spécial, les caractères suivants.

Chez les très jeunes sujets, il est divisé de haut en bas, sur la ligue médiane, par une suture denticulée qui disparaît généralement, vers l’âge de deux ans, par la fusion complète des deux moitiés de l’os ; mais il n’est pas rare d’en constater encore les traces dans la seconde enfance et parfois même chez les sujets d’un âge plus avancé.

De chaque côté, vers le milieu de l’os, existent deux saillies symétriques (bosses frontales) marquant la place des points d’ossification des deux moitiés. Ces saillies sont plus accusées dans l’enfance ; elles sont exagérées sur les crânes déformés par le rachitisme.

Au-dessus de la racine du nez, on note une petite saillie médiane qui correspond à l’excavation (sinus frontaux) dont est creusé l’os à ce niveau ; c’est la bosse nasale, que les reliefs des muscles voisins transforment sur le vivant en une dépression. — De la bosse nasale partent latéralement et s’élèvent obliquement en haut deux saillies allongées qui supportent les sourcils (arcades sourcilières), au-dessous desquelles deux arêtes curvilignes terminent par en bas cette partie du frontal et sont désignées sous le nom d’arcades orbitaires. Les arcades orbitaires se joignent par leurs deux extrémités aux autres os de la face les extrémités externes, ou apophyses orbitaires externes, avec les angles supérieurs des os jugaux ; les extrémités internes, ou apophyses orbitaires internes avec les apophyses montantes des maxillaires supérieurs. Entre les deux apophyses orbitaires internes se trouve une échancrure (échancrure nasale) qui reçoit les deux os nasaux.

Les os nasaux sont deux petites pièces osseuses qui s’accolent sur la ligne médiane pour former la racine du nez et s’articulent par leur bord inférieur avec les cartilages latéraux de cet organe.

Les maxillaires supérieurs forment toute la partie médiane du squelette de la face. Au nombre de deux, intimement unis sur la ligne médiane, ils sont symétriques. Ils concourent à la formation des cavités orbitaires, de la cavité nasale et de la cavité buccale.

La partie médiane de l’os, ou corps, donne insertion à un grand nombre de muscles de la face ; il est creusé d’une cavité qui communique avec les fosses nasales. De ce point central partent plusieurs prolongements : en haut, les apophyses montantes qui circonscrivent avec les os nasaux l’orifice antérieur des fosses nasales ; en dehors, les apophyses zygomatiques qui s’unissent aux os jugaux ; en bas, le bord alvéolaire, en forme de fer à cheval et creusé d’alvéoles destinés à recevoir les dents ; enfin, en dedans et s’étendant transversalement en arrière (n’apparaissant alors que sur le plan inférieur), les apophyses palatines, qui, en se joignant : sur la ligue médiane, forment la voûte du palais.

Les os jugaux, ou malaires ou de la pommette limitent de chaque côté le plan antérieur du squelette facial. Ils ont la forme d’une étoile à quatre angles et complètent en dehors les orifices orbitaires. L’angle supérieur remonte jusqu’à l’apophyse orbitaire externe du frontal ; l’angle antérieur s’applique sur le rebord orbitaire du maxillaire supérieur ; l’inférieur, peu saillant, s’articule avec l’apophyse zygomatique du maxillaire supérieur, et l’angle ; postérieur supporte l’apophyse zygomatique du temporal, formant ainsi une arcade que nous retrouverons sur le plan latéral.

Le seul os indépendant de la tête, le maxillaire inférieur, termine par en bas le squelette de la face. Je le décrirai plus loin séparément.

Les différents os du squelette de la tête, dont je viens de donner une esquisse sommaire, circonscrivent des cavités destinées à loger des appareils sensoriels. Ce sont les orbites, les fosses nasales et la cavité buccale. Il est utile d’étendre ici notre description.

Les orbites sont des cavités destinées à recevoir les organes de la vue. Séparés par le nez, ils sont situés de chaque côté de la ligne médiane, immédiatement au-dessous de la cavité crânienne. Chacun d’eux a la forme d’un cône ou d’une pyramide quadrangulaire dont la base se dirige en avant et en dehors.

Cette base, circonscrite par les os dont nous avons déjà parlé, affecte la forme d’un carré arrondi aux angles, avec quatre bords : les bords latéraux, à peu près verticaux, l’externe, situé sur un plan postérieur à l’interne, les deux autres bords, le supérieur et l’intérieur, légèrement obliques en bas, en dehors et en arrière. L’angle externe et supérieur abrite la glande lacrymale logée dans une fossette en arrière de lui. A l’angle inférieur et interne, on doit signaler l’orifice supérieur du canal nasal, qui s’ouvre d’autre part dans les fosses nasales.

Les parois de l’orbite, au nombre de quatre et correspondant aux bords, sont formées non seulement par les os que nous avons déjà cités, mais par des portions planes plus ou moins étendues d’autres os plus profondément situés et dont le détail importe peu aux artistes. Il me suffira de dire que la paroi interne de l’orbite est située à peu près dans un plan vertical antéro-postérieur, tandis que la paroi externe est très obliquement inclinée en dehors.

Le sommet, dirigé en haut et en dedans, présente plusieurs ouvertures destinées à faire communiquer l’orbite avec d’autres cavités plus profondes ; c’est d’abord le trou optique, par lequel passe le nerf optique qui vient du cerveau, puis, en dehors de lui, deux fentes, l’une dirigée en haut, la fente sphénoïdale, l’autre, dirigée en bas, la fente sphéno-maxillaire. Au reste, les orbites présentent, au point de vue de la conformation, de grandes différences individuelles.

Les fosses nasales sont situées entre les orbites et ont une étendue beaucoup plus considérable que l’orifice antérieur le laisse supposer. En haut, elles remontent, jusqu’à l’os frontal, à la hauteur de la paroi supérieure des orbites ; en bas, elles descendent jusqu’au contact de la voûte du palais, et en arrière elles s’ouvrent dans l’arrière-gorge. En outre des os déjà nommés, elles sont formées en grande partie par un os profondément situé et que nous nous contenterons de nommer ici, l’ethmoïde. Une cloison verticale médiane sépare les deux fosses nasales ; elle est formée d’un seul os, le vomer.

L’ouverture antérieure des fosses nasales a été comparée pour sa forme à un cœur de carte à jouer renversé. Nous avons déjà nommé les os qui la circonscrivent. Sur la ligne médiane, à la partie inférieure, est la saillie plus ou moins marquée de l’épine nasale antérieure et inférieure.


Plan latéral. (Pl. 1, fig. 2.)


Sur le plan latéral, les parties que nous venons d’examiner de face apparaissent en profil. On voit bien alors la saillie des os nasaux et celle de l’épine nasale inférieure. L’orifice orbitaire se présente sous la forme d’un ovale irrégulier, et l’os de la pommette nous montre de nombreux détails entrevus seulement sur le plan antérieur. Son angle postérieur s’articule avec une longue apophyse venue du temporal pour former une solide arcade osseuse, l’arcade zygomatique.

L’os temporal est situé au centre de la région. Nous commencerons par lui notre description. Vers son milieu se voit le trou auditif, ou orifice du conduit auditif externe, lequel s’enfonce dans la portion massive de l’os désignée sous le nom de rocher ; en avant et en bas, dirigée obliquement, descend l’apophyse styloïde ; en arrière s’étend jusqu’à l’occipital la portion mastoïdienne terminée en bas par une saillie arrondie (apophyse mastoïde), toujours parfaitement appréciable sous la peau en arrière du pavillon de l’oreille. Immédiatement au-dessus et en avant du trou auditif se détache de l’os l’apophyse zygomatique, concourant avec l’os jugal à former l’arcade de même nom. Toute la partie supérieure de l’os est mince, en forme d’écaille (portion écailleuse) ; elle s’unit au pariétal suivant une ligne courbe irrégulière.

Au-dessus de l’écaille du temporal, le pariétal occupe le sommet du crâne ; vers son milieu cet os forme une saillie assez forte (bosse pariétale), et près de son bord inférieur il est marqué d’une ligne courbe qui sert, en haut et en arrière, de limite à la fosse temporale. En avant se voit en profil le frontal, et tout en arrière, à l’occiput, apparaît l’occipital, sur lequel nous reviendrons tout à l’heure.

Vers son milieu, le plan latéral du crâne est creusé d’une excavation légère en haut et en arrière, profonde en bas et en avant. C’est la fosse temporale, limitée en haut par une ligne courbe qui appartient au pariétal, puis au frontal ; elle est bordée, tout à fait en avant, par l’apophyse orbitaire de l’os jugal, et en bas par l’arcade zygomatique, au-dessous de laquelle elle se continue avec la fosse zygomatique qui s’enfonce plus profondément entre l’apophyse ptérygoïde et la tubérosité du maxillaire supérieur. La fosse temporale est parcourue en divers sens par plusieurs sutures qui marquent le point de jonction des os qui concourent à la former et parmi lesquels, en outre de ceux que nous avons déjà nommés, il faut signaler, dans sa partie antérieure, la grande aile du sphénoïde.


Plan postérieur. (Pl. 2, fig. 2.)


Le plan postérieur montre la grosse extrémité de l’ovoïde crânien, dirigée directement en arrière et formée par la jonction de trois os, supérieurement les deux pariétaux, en bas l’occipital, qui se prolonge également sur la face inférieure du crâne.


Plan inférieur. (Pl. 2, fig. 3.)


Toute cette partie inférieure du squelette de la tête, abstraction faite du maxillaire inférieur, a été désignée sous le nom de base du crâne. Bien que cachée profondément sous les parties molles du cou, nous ne pouvons nous dispenser d’en signaler ici, au moins sommairement, les particularités les plus importantes. L’occipital occupe toute la moitié postérieure et médiane ; cet os est creusé d’un vaste orifice qui fait communiquer la cavité cranienne avec le canal rachidien (trou occipital). En avant de ce trou se voit la portion la plus épaisse de l’os (corps ou partie basilaire), qui s’unit en avant aux autres os de la base du crâne ; sur ses côtés et dans sa moitié antérieure on observe deux surfaces oblongues et saillantes destinées à l’articulation avec l’atlas : ce sont les condyles. En arrière se prolonge la partie la plus mince de l’os (portion squammeuse), marquée extérieurement de plusieurs aspérités destinées à l’insertion des muscles de la nuque ; sur la ligne médiane, la protubérance occipitale externe, quelquefois remplacée par une dépression, est reliée au trou occipital par la crête occipitale externe ; puis, sur les côtés deux lignes courbes s’étendent jusqu’aux limites de l’os : la ligne courbe occipitale supérieure, qui sur l’écorché marque la séparation du crâne et du cou, et la ligne courbe occipitale inférieure, cachée sous les insertions musculaires.

L’occipital se trouve enclavé pour ainsi dire entre les deux temporaux, dont la portion pierreuse ou rocher enserre de chaque côté la partie basilaire. Plus en dehors apparaît l’apophyse mastoïde, marquée au dedans et en bas de la rainure digastrique.

La moitié antérieure de la base du crâne n’est pas située sur le même plan que la moitié postérieure que nous venons de décrire. Nous voyons en effet sur la ligne médiane, et dans un plan vertical, l’orifice postérieur des fosses nasales flanqué des apophyses ptérygoïdes, puis, sur un plan de nouveau horizontal, mais surélevé, la voûte du palais, formée par la réunion des os palatins et des maxillaires supérieurs, dont le bord alvéolaire garni de dents décrit en avant et latéralement une courbe en forme de fer à cheval.

Enfin, je signalerai sur les côtés l’arcade zygomatique, qui apparaît complètement détachée à la manière d’une anse et à l’extrémité postérieure de laquelle se trouve creusée l’excavation (cavité glénoïde) qui sert à l’articulation du maxillaire inférieur. La cavité glénoïde est bordée en avant et en dehors par deux prolongements saillants, qui sont les racines de l’apophyse zygomatique. La racine antérieure est transversale, arrondie ; elle se continue insensiblement avec la cavité articulaire et joue un rôle important dans le mécanisme de l’articulation temporo-maxillaire.


Plan supérieur. (Pl. 2, fig. 1.)


Vu d’en haut, le crâne montre manifestement sa forme ovoïde, formée en avant par le frontal, de chaque côté par les pariétaux, et en arrière par l’occipital. Ces divers os se réunissent par leurs bords finement et irrégulièrement dentelés, s’engrenant réciproquement d’une façon très solide. Les points de jonction forment les sutures, parfois visibles au travers du cuir chevelu chez les personnes chauves. Ces sutures, au nombre de trois, sont : en avant, la suture fronto-pariétale ; au milieu, la suture sagittale ou interpariétale ; en arrière, la suture lambdoïde ou occipito-pariétale.


§ 2. — Maxillaire inférieur. (Pl. 1, fig. 1 et 2.)


Os impair, situé sur la ligne médiane, formé de deux moitiés symétriques, le maxillaire inférieur a la forme d’un fer à cheval dont les deux extrémités, appelées branches, figurent un angle droit avec la partie médiane, que l’on désigne sous le nom de corps.

Le corps aplati d’avant en arrière, porte les dents par son bord supérieur ; son bord inférieur, arrondi, proémine au travers des téguments chez les sujets maigres, et sa partie médiane supporte le menton. Sa face antérieure présente la ligne oblique externe, allant rejoindre le bord antérieur de la branche correspondante. Sur la face postérieure, on note sur la ligne médiane quatre petits tubercules (apophyses geni), et sur les côtés une ligne oblique (ligne myloïdienne ou maxillaire interne).

Les branches sont quadrilatères et présentent deux faces et quatre bords. La face interne offre vers son milieu l’orifice du canal dentaire inférieur limité en dedans par une pointe osseuse saillante (épine de Spix). La face externe est couverte de rugosités pour les insertions du masséter. Le bord supérieur est formé par deux apophyses séparées par une échancrure profonde (échancrure sigmoïde). L’apophyse antérieure, mince, triangulaire, donne attache au muscle temporal ; l’apophyse postérieure ou conyle est une saillie oblongue à grand axe perpendiculaire au plan de la branche du maxillaire, supportée par une portion plus étroite (col du condyle) ; elle s’articule avec la cavité glénoïde du temporal à la base du crâne. Le bord antérieur est creusé en gouttière ; le bord postérieur arrondi forme avec l’inférieur un angle obtus (angle du maxillaire inférieur) ; cet angle est fort variable suivant les âges. Chez le fœtus, les branches sont situées dans le prolongement du corps, l’angle n’apparaît que vers le troisième mois de la vie intra-utérine. L’enfant conserve l’angle maxillaire très ouvert, et cet angle est chez l’adulte de 120° en moyenne ; quelquefois il se rapproche de l’angle droit.


§ 3. — Articulation temporo-maxillaire. (Pl. 6, fig. 1 et 2.)


L’articulation temporo-maxillaire est une double articulation condylienne avec ménisque interarticulaire.

Les surfaces articulaires sont, d’un côté, les condyles du maxillaire inférieur, et de l’autre, les cavités glénoïdes du temporal avec la racine transverse de l’apophyse zygomatique, qui fait également partie de l’articulation.

Le ménisque fibro-cartilagineux, épais sur les bords, mince au centre, de forme elliptique, présente sur ses deux faces des courbures différentes. Supérieurement, il est alternativement convexe dans la partie correspondante à la cavité glénoïde et concave dans celle en rapport avec la racine transverse de l’apophyse zygomatique ; inférieurement, il est concave et s’applique sur le condyle du maxillaire inférieur. Il n’est pas horizontal, mais fortement attiré en bas et en avant. Relié au condyle par des trousseaux fibreux, il se déplace avec lui dans certains mouvements de l’articulation.

Les ligaments sont au nombre de trois : a) On décrit sous le nom de ligament latéral externe des faisceaux fibreux qui vont du pourtour externe de la cavité glénoïde au col du condyle et au bord postérieur de la mâchoire.

b) Un ligament latéral interne naît de l’épine du sphénoïde et se divise en deux faisceaux, l’un postérieur, le plus court, allant à la partie interne du col du condyle, l’autre se rendant à l’épine dentaire, ligament sphéno-maxillaire.

c) Enfin, le ligament stylo-maxillaire va de l’apophyse styloïde à l’angle de la mâchoire.

La synoviale est double, la supérieure lâche, l’inférieure plus serrée.

Mécanisme. — Les mouvements de la mâchoire inférieure sont de trois espèces :

Mouvement d’abaissement et d’élévation (ouverture et fermeture de la bouche). — Ce mouvement consiste en une double action combinée se passant au-dessus et au-dessous du ménisque ; dans l’articulation supérieure, le ménisque avec le condyle se trouve déplacé et transporté en avant sous la racine transverse ; d’oblique en bas il peut devenir transversal et même oblique en haut. Dans l’articulation inférieure, le condyle roule dans la cavité du ménisque. La mâchoire se trouve ainsi portée en avant et abaissée dans sa totalité ; les condyles tournent autour d’un axe fictif qui passerait par les orifices supérieurs du canal dentaire inférieur. On voit donc dans ce mouvement le relief formé par le condyle du maxillaire inférieur en avant de l’oreille se déplacer en bas et en avant, laissant à la place qu’il occupait dans l’occlusion de la bouche une forte dépression.

Mouvements de projection en avant. — Ces mouvements, qui consistent : dans le déplacement en totalité du maxillaire en avant, de façon que les dents inférieures viennent se placer en avant des supérieures, ont lieu exclusivement dans l’articulation supérieure et consistent dans le déplacement en avant décrit plus haut.

Mouvement de latéralité. — Dans ce cas, les mouvements diffèrent dans les articulations de droite et de gauche : un condyle roule dans sa cavité, tandis que l’autre décrit un arc de cercle autour du premier et se place sous la racine transverse.

CHAPITRE II

SQUELETTE DU TRONC


Nous étudierons successivement la colonne vertébrale, le thorax, les os de l’épaule et le bassin.


Article premier. — COLONNE VERTÉBRALE.


La colonne vertébrale est formée par la superposition des vertèbres, du sacrum et du coccyx. Les vertèbres, au nombre de vint-quatre, sont appelées vraies vertèbres, par opposition aux fausses vertèbres qui composent le sacrum et le coccyx.


§ 1. — Vraies vertèbres.


Suivant les régions, les vraies vertèbres sont divisées de la façon suivante : sept vertèbres cervicales, douze vertèbres dorsales, cinq vertèbres lombaires. En outre des caractères communs, elles possèdent des caractères distinctifs propres à chaque région. Quelques vertèbres ont en outre des caractères spéciaux.

A) Caractères communs à toutes les vertèbres. — Chaque vertèbre représente un anneau dont la partie antérieure, formée d’un renflement massif (corps de la vertèbre), circonscrit avec la partie postérieure, généralement amincie (arc vertébral), un orifice ou trou vertébral qui livre passage à la moelle épinière.

De l’arc vertébral naissent des prolongements osseux, ou apophyses, dirigés en divers sens : en arrière et au milieu, l’apophyse épineuse ; sur les côtés et dans le sens transversal, les apophyses transverses, une de chaque côté ; sur les côtés également, et en haut comme en bas, les apophyses articulaires supérieures et inférieures au nombre de quatre, deux de chaque côté. Tout près du corps, l’arc vertébral se rétrécit (pédicule), ce qui laisse à la partie supérieure et inférieure une dépression (échancrures supérieures et inférieures), qui forme, avec les échancrures des pédicules des vertèbres situées au-dessous et au-dessus, les trous de conjugaison pour le passage des nerfs qui émanent de la moelle. Les lames vertébrales sont les parties généralement aplaties de l’arc vertébral situées en dehors de l’apophyse épineuse.

B) Caractères distinctifs des vertèbres des diverses régions. — Tous les caractères communs précédemment décrits affectent, suivant les régions, une disposition particulière qu’il nous faut indiquer rapidement. Nous le ferons en suivant pour chaque région le même ordre descriptif, de façon à rendre la comparaison plus facile, et en faisant remarquer que tous ces caractères distinctifs ne se rencontrent pas au même degré dans toutes les vertèbres d’une même région. Les vertèbres qui occupent le centre les possèdent au plus haut degré, pendant qu’ils s’atténuent graduellement dans les vertèbres des extrémités, établissant ainsi entre chaque région une transition graduée.


Vertèbres cervicales. (Pl. 3, fig. 1.)


Le corps est peu volumineux, élargi dans le sens transversal, muni sur les côtes et à sa partie supérieure de petits crochets verticaux et à sa partie inférieure de dépressions correspondantes.

Le trou rachidien est triangulaire ;

L’apophyse épineuse horizontale, creusée inférieurement en gouttière, bifide au sommet.

Les apophyses articulaires, inclinées à 45°, situées en arrière des apophyses transverses, regardent, les supérieures en haut et en arrière, les inférieures en bas et en avant ; les facettes articulaires sont presque planes.

Les apophyses transverses, situées sur les côtés du corps, sont creusées supérieurement en gouttière, bifides au sommet et percées d’un trou à leur base.

Les échancrures supérieures sont plus profondes que les inférieures.


Vertèbres dorsales. (Pl. 3, fig. 2.)


Le corps présente sur les parties latérales deux demi-facettes pour l’articulation des côtes, l’une supérieure, l’autre inférieure.

Le trou rachidien est petit, ovalaire.

Les lames sont hautes, étroites.

L’apophyse épineuse se rapproche de la verticale ; elle est longue, triangulaire, unituberculeuse au sommet.

Les apophyses articulaires sont verticales, aplaties, les facettes articulaires presque planes, dirigées, les supérieures en arrière et en dehors, les inférieures en avant et en dedans.

Les apophyses transverses, volumineuses, sont déjetées en arrière, renflées à leur sommet, qui présente en avant une facette articulaire pour la tubérosité de la côte.

Les échancrures supérieures sont à peine indiquées, pendant que les inférieures sont très profondes.


Vertèbres lombaires. (Pl. 3, fig. 3.)


Le corps est très volumineux ;

Le trou rachidien, triangulaire.

Les lames sont épaisses, étroites.

L’apophyse épineuse est forte, dirigée transversalement, rectangulaire, unituberculeuse au sommet. Les apophyses articulaires sont verticales, les supérieures à facettes concaves dirigées en arrière et en dedans et munies en arrière d’un tubercule saillant (tubercule apophysaire), les inférieures à facettes convexes, regardant en dehors et en avant.

Les apophyses transverses sont costiformes, minces ;

Les échancrures inférieures plus prononcées que les supérieures.

C) Caractères spéciaux de quelques vertèbres. — Dans chaque région, les vertèbres qui se distinguent par leurs caractères particuliers sont celles qui se trouvent situées sur les confins de la région voisine, par exemple, la septième vertèbre cervicale, la première dorsale, les dernières dorsales, la cinquième vertèbre lombaire. Ce sont là en quelque sorte des vertèbres de transition possédant à la fois les caractères des deux régions voisines. Nous n’y insisterons pas ici. Mais il est deux autres vertèbres qui méritent de nous arrêter : ce sont les deux premières vertèbres cervicales, dont la conformation toute spéciale répond au rôle important qu’elles jouent dans la statique et dans les mouvements de la tête.


Première vertèbre cervicale ou atlas. (Pl. 4, fig. 1.)


Le corps est remplacé par un arc transversal (arc antérieur) qui présente en avant un tubercule mousse (tubercule antérieur), et en arrière une facette ovale, concave, articulée avec l’apophyse odontoïde de l’axis.

Le trou est vaste, comblé en avant par l’apophyse odontoïde de l’axis, qui doit être considéré comme le véritable corps de la première vertèbre cervicale soudé à celui de la deuxième.

L’apophyse épineuse manque ; elle est remplacée par un tubercule rudimentaire, tubercule postérieur de l’atlas.

Les apophyses articulaires sont massives ; elles forment ce qu’on appelle les masses latérales de l’atlas. Les supérieures, longues et concaves, s’articulent avec les condyles de l’occipital ; les inférieures, obliques, à peu près planes, s’articulent, avec l’axis.

Les apophyses transverses, unituberculeuses à leur sommet, percées d’un trou à leur base, sont placées en dehors des masses latérales.

L’échancrure supérieure, en arrière de l’apophyse articulaire supérieure, se continue en dehors avec un canal horizontal qui aboutit au trou de la hase de l’apophyse transverse.

Il n’y a pas d’échancrure inférieure.


Deuxième vertèbre cervicale, ou axis. (Pl. 4, fig. 2.)


Le corps de l’axis est surmonté d’une longue apophyse (apophyse odontoïde), étranglée à sa base (col de l’apophyse odontoïde) et offrant deux surfaces articulaires, l’une en avant pour l’arc antérieur de l’atlas, l’autre en arrière pour le ligament transverse.

Le trou rachidien a la forme d’un cœur de carte à jouer.

L’apophyse épineuse, très solide, offre tous les caractères de la région.

Les apophyses articulaires supérieures sont circulaires et regardent en haut et en dehors. `

Les apophyses transverses sont petites, unituberculeuses, creusées en gouttière, il n’existe pas d’échancrures supérieures.


§ 2. — Fausses vertèbres.


Vertèbres sacrées, ou sacrum. (Pl. 4, fig. 3.)


Le sacrum est formé par la soudure de cinq vertèbres dans lesquelles, bien que déformées à un certain degré, il est encore possible de distinguer les parties constituantes signalées précédemment. C’est un os impair, large, aplati, courbé suivant ses faces et de forme triangulaire.

La base, tournée en haut et en avant, offre à peu près l’aspect de la face supérieure d’une vertèbre lombaire. On y trouve, en avant et au milieu, la surface ovalaire supérieure du corps de la première vertèbre sacrée ; immédiatement en arrière, l’ouverture supérieure triangulaire du canal sacré ; sur les côtés, les apophyses articulaires supérieures et les échancrures des trous de conjugaison ; enfin, tout à fait en dehors, deux surfaces lisses triangulaires faisant partie du contour du grand bassin.

Le sommet est tronqué et présente une facette ovalaire articulée avec le coccyx.

La surface antérieure ou pelvienne, concave, regarde en bas. Elle présente, sur la ligue médiane, quatre crêtes transversales dont la longueur diminue progressivement, de haut en bas, traces des soudures des corps des cinq fausses vertèbres dont la fusion forme le sacrum. Latéralement ces crêtes transversales aboutissent à des trous, très larges supérieurement, trous sacrés antérieurs.

La face postérieure, sous-cutanée, est divisée dans la longueur par la crête sacrée, formée par la réunion des apophyses épineuses des vertèbres sacrées et aboutissant en bas à une échancrure (ouverture inférieure du canal sacré) bordée par deux petites apophyses (cornes du sacrum). Sur les parties latérales, on voit les trous sacrés postérieurs au nombre de quatre de chaque côté et limités en dehors par des tubercules rugueux.

Le canal sacré, creusé dans l’épaisseur de l’os, termine le canal rachidien et parcourt le sacrum de la base au sommet. Il est triangulaire, décroissant de haut en bas. Chez la femme, le sacrum est plus large que chez l’homme.


Vertèbre coccygiennes, ou coccyx. (Pl. 4, fig. 3.)


Ce sont des vertèbres rudimentaires, au nombre de quatre, diminuant de volume de haut en bas et toutes réduites à un noyau osseux, à l’exception de la première, qui présente une ébauche d’apophyse transverse et deux petits prolongements verticaux (cornes du coccyx) qui s’articulent avec les cornes du sacrum.


§ 3. — Articulations de la colonne vertébrale. (Pl. 6, fig. 6 et 7, et pl. 7.)


A) Articulations des vraies vertèbres.


Les vertèbres s’articulent par leur corps et par leurs apophyses articulaires ; les apophyses épineuses et les lames sont, en outre, réunies entre elles par des ligaments.

Les corps vertébraux sont séparés les uns des autres par une sorte de coussinet fibreux et élastique auquel ils adhèrent intimement ; c’est le disque intervertébral. En avant et en arrière, cette articulation est en outre renforcée par deux grands ligaments étendus d’un bout à l’autre de la colonne vertébrale (grand ligament vertébral antérieur et grand ligament vertébral postérieur).

Les articulations des apophyses articulaires sont pourvues d’une capsule fibreuse, plus forte en dehors, recouvrant une capsule synoviale très lâche au cou et aux lombes.

L’espace laissé en arrière par les lames de deux vertèbres contiguës est comblé par un ligament : très résistant formé presque exclusivement de tissu élastique dont les fibres s’étendent directement de l’une à l’autre vertèbre. Ces ligaments, nommés ligaments jaunes, à cause de leur coloration, ferment en arrière le canal rachidien.

Les apophyses épineuses sont réunies par une paroi ligamenteuse s’étendant de l’une à l’autre dans le sens antéro-postérieur (ligaments interépineux). Un long cordon fibreux (ligament surépineux) s’étend en outre sur le sommet des apophyses épineuses, dans toute l’étendue de la colonne, à l’exception de la région cervicale. À ce niveau, ce ligament se dirige directement de l’apophyse épineuse de la septième vertèbre cervicale vers la protubérance occipitale externe, en envoyant des expansions fibreuses aux apophyses épineuses. Il prend le nom de ligament de la nuque, ou cervical postérieur.


B) Articulations des fausses vertèbres. (Pl. 7.)


a) Articulations coccygiennes. — Les différentes pièces du coccyx sont réunies par un disque intervertébral et des ligaments antérieurs et postérieurs, le tout à l’état rudimentaire.

b) Articulation du sacrum et du coccyx. — En outre du disque intervertébral, souvent ossifié, cette articulation présente les ligaments suivants :

1° Un ligament antérieur ; 2° un ligament postérieur qui ferme en bas le canal sacré ; 3° des ligaments latéraux qui réunissent les apophyses transverses de la dernière vertèbre sacrée à la première vertèbre coccygienne.


C) Articulations de l’atlas, de l’axis et de l’occipital. (Pl. 6, fig. 3, 4 et 5.)


L’occipital, par l’intermédiaire de ses condyles, s’articule avec les facettes articulaires supérieures des masses latérales de l’atlas.

La courbure des condyles est moins forte dans le sens transversal que dans le sens antéro-postérieur ; ils débordent en avant et en arrière les surfaces correspondantes de l’atlas, ce qui indique le sens principal du mouvement ; le bord externe des facettes de l’atlas est plus relevé que leur bord interne. Les deux surfaces sont encroûtées de cartilage. La membrane synoviale est doublée de tissu connectif, lamelleux, renforcé par les ligaments que nous signalerons dans un instant.

L’atlas et l’axis se trouvent réunis par une double articulation. En effet, pendant que l’atlas tourne autour de l’apophyse odontoïde comme autour d’un pivot (articulation atloïdo-odontoïdienne), il glisse sur les facettes articulaires supérieures de l’axis (articulation atloïdo-axoïdienne). La face antérieure convexe de l’apophyse odontoïde est en contact avec une facette concave de la face postérieure de l’arc antérieur de l’atlas.

Les masses latérales de l’atlas reposent sur les facettes articulaires supérieures de l’axis. Les deux surfaces articulaires contiguës ne concordent pas ; elles sont légèrement taillées en dos d’âne et se touchent par leur crête, qui est transversale.

Ces deux articulations sont pourvues de synoviales, renforcées par les ligaments que nous allons maintenant décrire.

Ligament transverse. — L’apophyse odontoïde de l’axis est reçue dans un véritable anneau ostéo-fibreux formé en avant par l’arc antérieur de l’atlas, et en arrière par un ligament dirigé transversalement qui s’insère, de chaque côté, en dedans des masses latérales de l’atlas. Cet anneau a la forme d’un demi-entonnoir dont le bord inférieur serre étroitement le col de l’apophyse. De ses bords partent, l’un en haut et l’autre en bas, deux ligaments verticaux assez faibles qui lui ont fait donner le nom de ligament croisé ; le ligament supérieur va au bord antérieur du trou occipital, l’inférieur à la face postérieure de l’axis.

Ligaments odontoïdiens. — Ces ligaments sont destinés à maintenir très solidement l’apophyse odontoïde, d’où ils partent pour se fixer à l’occipital. Ce sont d’abord deux faisceaux fibreux très forts qui, des parties latérales et supérieures de la dent, se dirigent un peu obliquement en haut et en dehors, pour aller se fixer à la partie interne des condyles de l’occipital (ligaments odontoïdiens latéraux) ; puis un ligament médian et vertical plus faible, naissant du sommet de la dent pour s’insérer au bord antérieur du trou occipital (ligament odontoïdien moyen ou ligament suspenseur de la dent).

Je signalerai en outre les ligaments en forme de membrane servant à relier les arcs antérieur et postérieur de l’atlas aux bords du trou occipital (ligaments occipito-atloïdiens) ; ceux de même forme qui unissent les deux arcs antérieur et postérieur de l’atlas au corps et à l’arc postérieur de l’axis (ligaments atloïdo-axoïdiens) ; enfin, les ligaments qui vont du bord antérieur du trou occipital à la partie postérieure du corps de l’axis, recouvrant les ligaments transverses et les ligaments odontoïdiens (ligaments occipito-axoïdiens)[5].


§ 4. — De la colonne vertébrale en général. (Pl. 5 et pl. 7.)


Placée verticalement et sur la ligne médiane, la colonne vertébrale, ou rachis, remplit un double rôle. Elle sert, pour ainsi dire, de colonne de soutènement aux autres parties du squelette qui, directement ou indirectement, s’y rattachent toutes ; elle protège le cordon nerveux central ou moelle épinière.

Courbures de la colonne vertébrale. — Vue de profil, la colonne vertébrale présente plusieurs courbures dans le sens antéro-postérieur, alternativement différentes, suivant les régions. La région cervicale, composée de sept vertèbres, offre une courbure à convexité antérieure, la partie la plus saillante répondant au corps de la quatrième vertèbre. La région dorsale (douze vertèbres) est courbe dans l’autre sens, et la convexité postérieure offre son maximum de saillie vers l’apophyse épineuse de la septième vertèbre. La région lombaire (cinq vertèbres) reprend la courbure à convexité antérieure, dont le maximum de saillie répond au corps de la troisième vertèbre de la région. Ces diverses courbures se succèdent sans brusquerie, sauf au niveau de la jonction de la colonne vertébrale au sacrum, où une inflexion brusque donne naissance à un coude assez saillant que l’on nomme angle sacro-vertébral.

Schéma pour montrer les différences de courbure des corps vertébraux (ligne continue) et des apophyses épineuses (ligne pointillée).

Les courbures de la colonne vertébrale, que nous venons de décrire, sont plus particulièrement formées par sa partie antérieure, c’est-à-dire par la succession des corps vertébraux ; mais la ligne formée en arrière par la série des apophyses épineuses est loin de suivre la même direction. C’est là un point qui n’a pas été relevé comme il convient, surtout en ce qui concerne la région lombaire. Au cou et au dos, les courbures décrites par les apophyses épineuses doublent, en quelque sorte, celles formées par les corps vertébraux. Elles suivent des courbes de même sens, mais appartenant à des circonférences de rayon différent. Ainsi, à la région cervicale, la courbe décrite par les apophyses épineuses est plus fermée que celle des corps vertébraux. C’est l’inverse à la région dorsale, où la courbe postérieure est le plus ouverte ; il en résulte un aplatissement qui contribue, avec l’imbrication des apophyses épineuses, à atténuer leur saillie dans cette région. Mais à la région lombaire la dissemblance est plus accusée. En raison du développement qu’elles acquièrent, les apophyses épineuses ne suivent que très imparfaitement la direction des corps vertébraux. La ligne, tangente à leur sommet, devient une ligne droite qui descend directement des dernières vertèbres dorsales au sacrum. Parfois même elle infléchit en sens inverse, et il existe alors une contre-courbure postérieure. Cette disposition nous paraît en rapport avec le développement des masses musculaires sacro-lombaires ; elle explique facilement les saillies plus ou moins prononcées que l’on observe chez certains sujets au fond du sillon lombaire, même dans la station verticale. Dans la flexion du tronc, ces saillies osseuses prennent un grand développement.

Dans une rapide vue d’ensemble, nous considérerons la colonne vertébrale successivement sous différents points de vue.

Plan antérieur. — La série des corps vertébraux, séparés par des rondelles fibreuses (disques intervertébraux) et augmentant progressivement de volume de haut en bas, assurent la solidité de la colonne vertébrale considérée comme tige de support. En arrière d’eux est creusé le canal rachidien, formé par la succession des trous vertébraux et dont la partie centrale loge la moelle épinière.

Plan latéral. — La présence du canal central y est révélée par la série des trous de conjugaison qui communiquent avec lui et par lesquels passent les nerfs qui émanent de la moelle. On voit sur les côtés des corps vertébraux de la région dorsale, au niveau des disques intervertébraux, les facettes articulaires destinées à la tête des côtes et composées chacune de deux facettes : facette supérieure aux dépens de la vertèbre qui est au-dessus, facette inférieure aux dépens de celle qui est au-dessous. La ligne des apophyses transverses dans la même région est fortement déjetée en arrière. Les apophyses transverses de la région lombaire, nommées aussi costiformes, représentent les côtes de la région thoracique, les tubercules apophysaires des apophyses articulaires supérieures pouvant être considérés comme les analogues des apophyses transverses.

Les prolongements latéraux de la colonne vertébrale peuvent donc être divisés en deux séries :

1° Série antérieure, comprenant la moitié antérieure des apophyses transverses de la région cervicale, les côtes de la région thoracique, les apophyses transverses costiformes de la région lombaire ;

2° Série postérieure, comprenant la moitié postérieure des apophyses transverses cervicales, les apophyses transverses dorsales et les tubercules apophysaires des apophyses articulaires supérieures de la région lombaire.

Plan postérieur. — La succession des apophyses épineuses surmontées par le ligament surépineux donne lieu à une longue arête désignée sous le nom de crête épinière. De chaque côté sont les gouttières vertébrales, dont le fond est formé par les lames des vertèbres.

Dimensions. — Il faut distinguer entre la longueur et la hauteur de la colonne vertébrale. La longueur est mesurée par une ligne suivant les flexuosités de la colonne, et la hauteur par la distance de ses diverses parties au-dessus de l’horizontale. Les disques forment environ le quart de la longueur totale. La hauteur est la seule dimension qui nous intéresse.

La colonne vertébrale varie peu de hauteur, suivant les individus. M. Sappey lui assigne en moyenne 61 centimètres, ainsi répartis :

13 centimètres pour la région cervicale ;

30 centimètres pour la région dorsale ;

18 centimètres pour la région lombaire.

Les proportions du tronc en hauteur sont maintenues par la colonne vertébrale. Mesuré de la septième vertèbre, ou vertèbre proéminente, au sommet du sacrum, le tronc est environ le tiers de la taille ; d’une manière générale, il est plus long dans les races jaunes, plus court dans les races nègres, et intermédiaire dans les races blanches. La femme a le tronc plus long, tout au moins dans les races européennes ; les sujets de haute taille ont le tronc plus court. Le tronc triple de la naissance à l’âge adulte. Il croît jusqu’à vingt-cinq ou trente ans.


§ 5. — Mécanisme de la colonne vertébrale.


Le rachis représente une colonne élastique et mobile. L’élasticité est en raison de la hauteur des disques intervertébraux ; grâce à elle, les chocs sont amortis et ne se transmettent que très atténués à la tête. La mobilité est due également à la compression et à la distension que peuvent, subir les disques intervertébraux, ainsi qu’au glissement des apophyses articulaires.

La colonne cervicale est la partie la plus mobile du rachis. Elle doit cette mobilité à l’épaisseur des disques intervertébraux, à la direction oblique des articulations, à la brièveté et à la direction horizontale des apophyses épineuses des vertèbres moyennes de la région et à la laxité de leurs ligaments.

A la région dorsale, le rachis est peu mobile, à cause des côtes, qui sont comme autant d’arcs-boutants qui le maintiennent latéralement, à cause également de la direction verticale et plane des articulations, de l’étroitesse des ligaments et de la longueur des apophyses épineuses qui sont imbriquées comme les tuiles d’un toit.

Aux lombes, où la mobilité redevient plus grande, les disques intervertébraux sont plus épais, les ligaments plus lâches, les apophyses épineuses droites et courtes.


Équilibre du rachis.


Les viscères, que l’on peut regarder comme suspendus à la partie antérieure de la colonne vertébrale, la sollicitent par leur poids à s’incliner en avant. Elle est maintenue dans la verticale par les ligaments jaunes étendus entre les lames vertébrales et dont la force élastique, continuellement en jeu, est destinée à contre-balancer l’action de la pesanteur. Les muscles paraissent ainsi inutiles au maintien de la colonne. Ils n’ont à intervenir que dans des circonstances particulières.

La tête est placée sur la colonne vertébrale de manière à s’y trouver en équilibre, disposition particulière à l’homme. Chez les animaux, le centre de gravité de la tête est porté bien en avant, ce qui nécessite, pour unir solidement la tête à la colonne vertébrale et l’empêcher de tomber, la présence à la nuque d’un ligament robuste qui n’existe chez l’homme qu’à l’état rudimentaire.


Mouvements du rachis.


Les mouvements dont est susceptible le rachis sont de trois sortes :

1° Autour d’un axe transversal (flexion et extension) ;

2° Autour d’un axe antéro-postérieur (inclinaison latérale) ;

3° Autour d’un axe vertical (torsion ou rotation).

La flexion s’obtient par le tassement de la partie antérieure des disques intervertébraux. Elle est limitée par la distension des ligaments jaunes et surépineux. Dans ce mouvement, les apophyses épineuses s’écartent et font sous la peau des saillies d’autant plus prononcées que la flexion est portée plus loin.

L’extension est moins étendue que la flexion ; elle a pour limite la distension des disques intervertébraux.

L’inclinaison latérale dépend des apophyses articulaires, qui, placées latéralement, entravent ou favorisent ce mouvement suivant la direction de leurs surfaces. Au cou, où elles sont placées obliquement à 45°, ce mouvement ne peut pas se produire sans être accompagné d’un glissement des surfaces articulaires dont la conséquence est une rotation du corps de la vertèbre.

Il n’en est pas de même aux lombes, où la direction verticale des surfaces articulaires permet d’isoler complètement la rotation de l’inclinaison latérale. D’ailleurs, ces deux mouvements, dissociés pour l’étude, se rencontrent presque toujours combinés dans la nature.


Mécanisme des articulations de l’atlas, de l’axis et de l’occipital.


La tête est très mobile sur le rachis. Ses mouvements, comme ceux du rachis, se réduisent à trois ; mais, au lieu d’exister à la fois dans toutes les articulations, ils sont répartis dans chacune des deux articulations qui relient la tête et la colonne vertébrale. C’est ainsi que les mouvements de rotation se passent entre l’atlas et l’axis, pendant que les mouvements de flexion et d’inclinaison latérale ont lieu dans l’articulation de l’atlas et de l’occipital.

Cette dernière articulation se compose, ainsi que nous l’avons vu plus haut, des deux condyles de l’occipital qui sont exactement reçus dans les cavités articulaires supérieures des masses latérales de l’atlas, de telle façon que les mouvements de flexion et d’extension et aussi d’inclinaison latérale sont seuls permis. Dans la rotation, au contraire, atlas et occipital ne font plus qu’un et tournent ensemble sur l’axis. L’axe de ce dernier mouvement passe par l’apophyse odontoïde, autour de laquelle se meut l’anneau formé par l’arc antérieur de l’atlas et le ligament transverse, pendant qu’un mouvement de glissement se passe dans les articulations des masses latérales de l’atlas avec le corps de l’axis.


Article II. — THORAX.


Le thorax est une vaste cavité occupant toute la partie supérieure du tronc, composé de deux pièces médianes, la colonne dorsale en arrière, le sternum en avant, reliées entre elles par des arcs osseux, les côtes. S’appuyant en arrière sur la colonne vertébrale, les côtes gagnent le sternum en avant par l’intermédiaire de prolongements cartilagineux, les cartilages costaux. La colonne dorsale ayant été étudiée tout à l’heure, il nous reste à décrire le sternum et les côtes.


§ 1. — Sternum. (Pl. 8, fig. 1.)


Os impair et symétrique situé en avant de la poitrine, le sternum est incliné obliquement de haut en bas et d’arrière en avant. Il se compose, chez l’enfant, de quatre ou cinq pièces osseuses contiguës qui, chez l’adulte, se réduisent à deux par la soudure des trois ou quatre dernières en une seule. Il se termine en outre par un prolongement cartilagineux. Les anciens l’ont comparé à une épée de gladiateur tournée la pointe en bas, la pièce supérieure simulant la poignée, la seconde le corps ou la lame et l’appendice cartilagineux la pointe, d’où le nom de xiphoïde (ξίφος, épée) qui lui a été donné.

La face antérieure, presque entièrement sous-cutanée, offre au niveau de la jonction de la première pièce avec la seconde un angle saillant très appréciable au travers de la peau. La face postérieure, en rapport avec les viscères thoraciques, présente un angle rentrant, conséquence de l’angle saillant de la face antérieure.

Latéralement, le sternum est coupé d’échancrures en rapport avec le nombre des pièces dont il est formé chez l’enfant. Elles sont au nombre de onze : sept facettes articulaires pour les cartilages costaux, les quatre autres formant les bords libres des premières pièces sternales.

L’extrémité supérieure ou claviculaire est marquée de trois échancrures, une médiane sous-cutanée, qui forme le fond de la fourchette sternale, deux latérales, qui sont, à l’état frais, encroûtées de cartilage et destinées à l’articulation des clavicules. Inférieurement, le sternum est terminé par l’appendice xiphoïde de forme très variable, ordinairement droit ; quelquefois, déjetée en avant, sa pointe soulève la peau de la région du creux épigastrique.

Le sternum a, en moyenne, 19 centimètres de long ainsi répartis : première pièce, 5 centimètres ; deuxième pièce, 6 centimètres ; appendice, 3 centimètres. Il a 5 à 6 centimètres transversalement à la partie la plus large de la poignée. La partie la plus étroite correspond à la jonction du corps avec cette dernière.


§ 2. — Côtes. (Pl. 8, fig. 2.)


Au nombre de douze de chaque côté, les côtes se divisent en :

a) Côtes sternales, au nombre de sept, dont les cartilages aboutissent directement au sternum ;

b) Côtes asternales, au nombre de cinq, dont les trois premières ne rejoignent le sternum que par l’intermédiaire du cartilage de la septième côte ;

c) Les deux autres, dont l’extrémité antérieure est libre dans les chairs, ont reçu le nom de côtes flottantes.

On distingue encore les côtes par leur numéro d’ordre de la première à la douzième en procédant de haut en bas.


A) Caractères généraux.


Les côtes sont des arcs osseux aplatis présentant, suivant Leurs faces, deux courbures. L’une directe, ou courbure d’enroulement n’est pas régulière ; vers le quart ou le cinquième postérieur, la côte s’infléchit brusquement, formant un coude plus prononcé que l’on appelle l’angle de la côte. L’autre, plus complexe, dite de torsion, fait subir à la côte une torsion véritable en vertu de laquelle la face externe regarde en bas postérieurement, tandis qu’en avant elle regarde en haut, et inversement pour la face interne.

On signale encore une courbure suivant les bords, très faible, en forme d’S italique très allongée, à concavité postérieure et à convexité antérieure, qui ne s’observe que de la cinquième à la dixième côte.

Les côtes se composent d’un corps et de deux extrémités, l’une antérieure, l’autre postérieure.

L’extrémité postérieure offre à l’étude trois parties :

1° Tout à l’extrémité, la tête de la côte, pourvue d’une facette articulaire double ;

2° Une portion rétrécie ou col rugueux en arrière ;

3° Une saillie osseuse ou tubérosité dont la partie supérieure rugueuse donne attache à des filaments et dont la partie inférieure porte une facette articulée avec l’apophyse transverse correspondante.

Le corps présente deux faces et deux bords. La face interne est pourvue en bas d’une gouttière (gouttière costale). La face externe convexe se dessine parfois sous les muscles et la peau qui la recouvrent. Le bord supérieur est très épais en arrière, où il est légèrement creusé en gouttière. Le bord inférieur est tranchant.

L’extrémité antérieure, légèrement renflée, forme une sorte de nodosité parfois appréciable sous la peau. Elle s’articule avec le cartilage costal.


B) Caractères particuliers de quelques côtes.


La première côte, large, courte, est courbée suivant les bords, et les faces sont presque horizontales. L’angle très saillant répond à la tubérosité. Le col est très étroit, rectiligne. Facette unique à la tête.

La deuxième côte offre également une courbure, suivant les bords, très prononcée. L’angle mousse est situé à un centimètre de la tubérosité. L’extrémité antérieure est plus étroite que le corps.

Les deux dernières côtes n’ont qu’une facette articulaire. Sur la onzième, l’angle est très éloigné de la tête ; il n’y a pas de tubérosité.

La douzième ne présente ni angle, ni tubérosité, ni gouttière. L’extrémité antérieure en est plus ou moins aiguë.


§ 3. — Articulations du thorax. (Pl. 5, fig. 2 et 3.)


Articulations des côtes avec la colonne vertébrale.


a) La tête de la côte présente un angle saillant séparant deux demi-facettes. L’angle saillant répond au disque intervertébral, auquel il est relié par un ligament interarticulaire qui sépare l’articulation en deux articulations secondaires. Les deux facettes costales se mettent en rapport avec les demi-facettes correspondantes des corps des vertèbres.

En avant, un ligament très fort disposé en éventail de la côte à la partie voisine du corps des vertèbres, consolide l’articulation ; c’est le ligament costo-vertébral antérieur ou rayonné.

b) La facette articulaire de la tubérosité de la côte se met en rapport avec la facette articulaire du sommet de l’apophyse transverse ; un ligament court et solide maintient les surfaces articulaires, obliquement étendu du sommet de l’apophyse transverse à la partie externe de la tubérosité de la côte (ligament costo-transversaire).

c) Les côtes sont en outre rattachées aux vertèbres par des ligaments allant des apophyses transverses au col de la côte (cervico-transversaires). Ces ligaments sont de deux ordres ; ils partent du col de la côte pour se rendre, les uns à apophyse transverse qui est au-dessus (cervico-transversaires supérieurs), les autres à l’apophyse transverse qui est au-dessous (cervico-transversaires inférieurs).


Articulation des cartilages costaux.


Les articulations chondro-costales sont un simple engrènement de la côte et du cartilage qui la continue. Elles sont marquées par un renflement.

Les cartilages costaux s’unissent d’autre part au sternum (articulations chondro-sternales). Pour la première côte, la soudure est complète. Pour les autres côtes, bien que les mouvements soient très limités, il existe une cavité articulaire avec membrane synoviale. La deuxième côte a, de plus, un ligament interarticulaire qui divise l’articulation en deux articulations secondaires. Enfin je signalerai les ligaments rayonnés antérieurs et postérieurs.


§ 4. — Du thohax en général.


Les côtes sont toutes dirigées obliquement de haut en bas et d’arrière en avant. Le sommet de la dernière côte ne se trouve séparé de la crête iliaque que par un intervalle de 4 à 5 centimètres.

Les côtes sont disposées, par rapport à l’axe médian de la poitrine, de telle façon que les quatre premières s’en éloignent progressivement ; les cinq suivantes se maintiennent à peu près à la même distance, la huitième cependant faisant la plus forte saillie ; les quatre dernières, au contraire, s’en rapprochent d’autant plus qu’elles sont plus inférieures.

Les côtes sont séparées par un espace, dit espace intercostal, occupé par de petits muscles qui forment paroi et ferment la cavité thoracique. Les espaces intercostaux vers la partie moyenne du thorax, égalent la largeur des côtes ; ils sont plus grands en bas, et encore davantage supérieurement. Le même espace intercostal va en augmentant d’arrière en avant.


Plan antérieur. (Pl. 9, fig. 1.)


Le sternum n’entre point en relation directe avec les côtes ; il en est séparé par les cartilages costaux, que l’on désigne d’après le numéro d’ordre de la côte qu’ils prolongent. Le premier est le plus court et légèrement ascendant. Le deuxième est transversal. Les suivants sont d’autant plus longs et s’inclinent d’autant plus qu’ils sont plus inférieurs. Les cinquième, sixième et septième, continuant la direction de la côte, forment un coude pour remonter vers le sternum. Les huitième, neuvième et dixième se terminent en pointe et s’accolent au cartilage qui est au-dessus. Les onzième et douzième se terminent par une extrémité libre, amincie.

Sur les bords du sternum, les articulations chondro-sternales font saillie et peuvent se traduire extérieurement, si les muscles pectoraux sont peu développés, par une série de nodosités correspondantes. Plus en dehors se trouve une seconde série de nodosités parfois également appréciables sous la peau, dirigée suivant une ligne oblique de haut en bas et de dehors en dedans. Elle correspond aux articulations chondro-costales.

La surface antérieure du thorax n’est sous-cutanée que sur la ligne médiane. Dans le reste de son étendue, elle est recouverte par les muscles ; en bas et en dehors, elle supporte les mamelles.


Plan postérieur. (Pl. 10, fig. 1.)


La partie médiane est occupée par le plan postérieur de la colonne dorsale, qui présente au milieu la crête épinière, latéralement les séries des apophyses transverses, et entre les deux les gouttières vertébrales. Les côtes sont en rapport, par leur tubérosité, avec les apophyses transverses, la tête et le col étant masqués par le rachis.

Les angles des côtes, situés plus en dehors, sont disposés suivant une ligne oblique de haut en bas et de dedans en dehors. Cette ligne part en haut de l’apophyse transverse de la première vertèbre dorsale, l’angle de la première côte se confondant avec la tubérosité. Entre la ligne formée par les angles des côtes et la saillie des apophyses transverses se trouve, de chaque côté, une véritable gouttière (vertébro-costale) que remplissent les muscles spinaux.

En haut et en dehors, ce plan supporte l’omoplate.


Plan latéral. (Pl. 9, fig. 2.)


Le profil postérieur est limité par la ligne des angles costaux, que dépasse un peu la crête épinière, surtout dans la moitié supérieure, il est régulièrement courbe. Le profil antérieur est également courbe et formé d’abord par le sternum, oblique de haut en bas et d’arrière en avant, puis par les cartilages des fausses côtes, dont le rebord prolonge la direction du sternum.

Cette courbe antérieure descend donc par en bas bien au-dessous du sternum, ce qui contribue à donner à l’ensemble du thorax, vu de profil, un aspect ovoïde très accentué. La saillie des cartilages costaux, qui forme l’extrémité inférieure de l’ovoïde, a été généralement méconnue. Elle a cependant, au point de vue morphologique, une grande importance, ainsi qu’on le verra plus loin par l’étude de la région sous-mammaire[6].

L’inclinaison du sternum par rapport à la verticaux est d’environ 20 à 21°.


La circonférence supérieure du thorax est circonscrite, en arrière par le corps de la première vertèbre dorsale, en avant par le sternum, sur les côtés par les premières côtes et leurs cartilages. Elle est dans un plan oblique de haut en bas et d’arrière en avant. Dans la station droite et vue par devant, l’échancrure sternale se projette vers le milieu du corps de la deuxième vertèbre dorsale.

La circonférence inférieure présente une vaste échancrure antérieure partagée au sommet par l’appendice xiphoïde, circonscrite latéralement par le rebord cartilagineux des côtes de la septième à la dixième. Cette échancrure, de forme manifestement ogivale, se traduit sous la peau des sujets maigres par un relief très accusé qui forme la limite de la poitrine et de l’abdomen en avant. Sur le modèle, cette échancrure antérieure du thorax ne saurait prendre, ainsi que nous le verrons plus loin, la forme cintrée, chère aux antiques, que si l’angle supérieur est comblé par la partie supérieure des muscles droits de l’abdomen.


Dimensions.


M. Sappey donne, pour les dimensions du thorax, les moyennes suivantes :

Diamètre transverse, mesuré à la huitième côte, 28 centimètres ;

Diamètre antéro-postérieur, 20 centimètres ;

Diamètre vertical antérieur, 13.5 centimètres ;

Diamètre vertical postérieur, 31.5 centimètres.

Toutes proportions gardées, le thorax de la femme a moins de hauteur et plus de largeur.


§ 5. — Mécanisme du thorax.


Le thorax doit subir les changements de volume nécessaires à la respiration. Il doit et augmenter sa capacité (inspiration) et, la diminuer (expiration).

Sans parler ici des forces musculaires qui entrent en jeu dans le mouvement de la respiration, je dois signaler par quel mécanisme l’augmentation du thorax peut se faire. Elle résulte d’un double mouvement des arcs costaux qui peut être ainsi décomposé :

1° Augmentation du diamètre antéro-postérieur du thorax, par un mouvement d’élévation de l’extrémité antérieure de la côte, l’axe de rotation de ce mouvement, à peu près horizontal, passant par la tête de la côte et par la tubérosité.

2° Augmentation du diamètre transverse du milieu de l’arc costal, l’axe de rotation antéro-postérieur passant par le col de la côte en arrière et par l’articulation chondro-sternale en avant.

La diminution de capacité du thorax se fait par un mécanisme inverse.

Il est évident que toutes les côtes ne prennent pas une part également active à ces mouvements.

Chez la femme, la mobilité plus grande des premières côtes permet, dans le jeu de la respiration, une ampliation plus considérable de toute la partie supérieure du thorax. C’est la respiration thoracique, destinée à compenser le défaut d’action du diaphragme (respiration abdominale) lorsque le jeu de ce muscle se trouve entravé, comme dans la grossesse.


Article III. — ÉPAULE.


Le squelette de l’épaule comprend deux os : la clavicule en avant et l’omoplate en arrière.


§ 1. — Clavicule. (Pl. 11, fig. 1.)


Os pair, situé à la partie supérieure de la poitrine, appuyé sur le sternum en dedans, en contact en dehors avec l’omoplate, la clavicule est dirigée de dedans en dehors, d’avant en arrière et un peu de bas en haut. Elle offre deux courbures en forme d’S italique, l’interne à convexité antérieure, l’externe à convexité postérieure.

La partie interne de l’os est prismatique triangulaire, la portion moyenne arrondie, la portion externe aplatie de haut en bas.

La face supérieure est lisse et entièrement sous-cutanée. Elle se dessine sous la peau, au travers de laquelle sa forme d’S est facile à reconnaître.


§ 2. — Omoplate. (Pl. 11, fig. 2.)


Os pair, aplati, triangulaire, l’omoplate est située à la partie postérieure et latérale du thorax, la base tournée en haut et le sommet en bas, dans un plan oblique d’arrière en avant et de dedans en dehors. Elle s’étend depuis le premier espace intercostal jusqu’à la septième côte. Son bord interne est à peu près vertical.

La face antérieure concave (fosse sous-scapulaire), comblée par un seul muscle, est sillonnée de crêtes obliques pour les insertions musculaires ; elle repose sur la paroi thoracique dans toute son étendue.

La face postérieure ou cutanée est divisée en deux parties inégales par l’épine ; au-dessus est la fosse sus-épineuse ; au-dessous, la fosse sous-épineuse. L’épine naît au bord interne par une surface triangulaire qui se traduit sur le nu par une dépression. De là elle se dirige en dehors et en haut en formant une saillie de plus en plus forte, et se termine par une large apophyse aplatie de haut en bas et d’arrière en avant, l’acromion (ἄκρος, sommet ; ὦμος, épaule). Les dépressions profondes que l’épine de l’omoplate laisse sur la face postérieure (fosses sous et sus-épineuses) sont comblées par des muscles. Le bord postérieur de l’épine est, avec l’acromion, la seule portion de l’os qui soit sous-cutanée ; il se traduit extérieurement, suivant le volume des muscles, par une saillie ou par une dépression.

L’acromion forme le sommet de l’épaule, où sa face supérieure est facile à reconnaître sous la peau. Son bord antérieur présente une facette articulaire pour la clavicule.

Le bord supérieur de l’omoplate, très mince en dedans, se termine en dehors par une apophyse (apophyse coracoïde) recourbée à la manière d’un doigt demi-fléchi.

L’angle externe est occupé par une fossette concave, ovalaire, à grand diamètre vertical, articulée avec l’humérus (cavité glénoïde) et supportée par une portion rétrécie (col de l’omoplate). Il est surmonté par deux apophyses qui s’avancent au-dessus de lui, en arrière l’acromion, et en avant l’apophyse coracoïde.


§ 3. — Articulations de la clavicule. (Pl. 11, fig. 3.)


La clavicule s’articule en dedans avec le sternum (articulation sterno-claviculaire), en dehors avec l’acromion (articulation acromio-claviculaire). Elle est, en outre, réunie à l’apophyse coracoïde par des ligaments (ligaments coraco-claviculaires).


A) Articulation sterno-claviculaire.


La clavicule déborde en tous sens la facette sternale, avec laquelle elle s’articule et forme, en conséquence, une saillie très appréciable sous la peau ; d’ailleurs, les deux facettes articulaires ne concordent pas. Elles sont séparées par un fibro-cartilage qui divise l’articulation en deux, et dont chacune des faces s’adapte exactement à la facette articulaire avec laquelle elle est en rapport.

Les capsules synoviales sont renforcées par des fibres décrites sous le nom de ligament antérieur et postérieur.

Deux autres ligaments assurent la solidité de l’articulation le ligament interclaviculaire, étendu d’une clavicule à l’autre, et le ligament costo-claviculaire, allant de la partie supérieure du premier cartilage costal à la partie interne de la clavicule.


B) Articulation acromio-claviculaire.



Les surfaces articulaires, ovalaires et à peu près planes, sont maintenues par des fibres courtes, très résistantes à la partie supérieure, où elles ont pris le nom de ligament supérieur.


Ligaments coraco-claviculaires.


Très forts, les ligaments caraco-claviculaires sont au nombre de deux, et le nom qu’on leur a donné indique leur forme générale.

1° Le ligament trapézoïde, le plus externe et antérieur, va de la base de l’apophyse coracoïde à la face inférieure de la clavicule.

2° Le ligament conoïde s’attache par son sommet à une saillie du bord interne de l’apophyse coracoïde, près de sa base, et se rend de là au bord postérieur de la clavicule.


§ 4. — Du squelette de l’épaule en général.


L’omoplate et la clavicule réunies en dehors forment un angle ouvert en dedans. La demi-ceinture osseuse ainsi formée embrasse latéralement le sommet du thorax, auquel elle n’est réunie étroitement que par son extrémité antérieure (articulation sterno-claviculaire).

L’omoplate, en effet, ne présente aucune articulation avec le thorax, sur lequel elle est simplement appliquée.

Cette ceinture osseuse élargit considérablement le diamètre transversal de la poitrine à la partie supérieure. A son angle externe est appendu le membre supérieur qu’elle rattache au tronc.

La position de l’omoplate par rapport à la cage thoracique est très variable suivant les individus ; d’où résultent de grandes variétés dans la forme des épaules, de la poitrine et du cou. Chez la femme, les épaules sont relativement plus basses, ce qui donne à la clavicule une inclinaison légèrement oblique en dehors et en bas.


§ 5. — Mécanisme des articulations de la clavicule et de l’omoplate.


Articulation sterno-claviculaire.


Les mouvements, peu étendus, sont de deux sortes :

a) Mouvements d’élévation et d’abaissement ;

b) Mouvements en avant et en arrière.

Dans tous ces mouvements, l’extrémité interne de la clavicule subit un mouvement en sens inverse de celui de l’extrémité externe, l’os se comportant comme une sorte de levier à branches très inégales dont le point fixe se trouverait vers l’attache du ligament costo-claviculaire. D’où il résulte que la saillie de l’extrémité interne de la clavicule doit être moins forte lorsque l’épaule se porte en avant, et inversement saillir davantage si l’épaule se porte en arrière.


Articulation omo-claviculaire.


Les ligaments qui réunissent la clavicule à l’apophyse coracoïde ont une certaine longueur, ce qui permet à l’angle formé par le plan de l’omoplate et là clavicule de varier d’ouverture, suivant le glissement transversal de l’omoplate sur la paroi postérieure du thorax. Il en résulte l’éloignement ou le rapprochement du bord spinal scapulaire de l’épine dorsale, et le mouvement en avant ou en arrière du moignon de l’épaule.

Le moignon de l’épaule peut en outre se porter en haut et en bas.


Article IV. — BASSIN.


Le bassin est formé par la réunion du sacrum, du coccyx et des os iliaques. Le sacrum et le coccyx ayant été décrits avec la colonne vertébrale, nous n’avons plus à étudier ici que l’os coxal.


§ 1. — Os coxal ou iliaque. (Pl. 12.)


Cet os pair, large, irrégulier, étranglé à sa partie moyenne, est tordu sur lui-même de telle sorte que la moitié supérieure ne se trouve pas dans le même plan que la moitié inférieure. Au centre, sur la face externe, existe une cavité hémisphérique articulée avec le fémur (cavité cotyloïde). La moitié supérieure de l’os a reçu le nom d’ilium. La moitié inférieure est percée d’une large ouverture (trou obturateur) en avant de laquelle se trouve le pubis et en arrière l’ischion.

L’anatomie descriptive lui considère deux faces et quatre bords, que je me contenterai d’énumérer ici, avec l’indication de leurs particularités les plus utiles à connaître.

Sur la face externe ou fessière on voit :

En haut, la fosse iliaque externe, partagée inégalement par deux lignes courbes, ligne courbe supérieure et ligne courbe inférieure ; elle donne attache aux muscles fessiers.

Au milieu, la cavité cotyloïde surmontée du sourcil cotyloïdien ouvert en bas (échancrure cotyloïdienne), avec une fractuosité centrale (arrière-fond de la cavité cotyloïde).

En bas, le trou obturateur, ovale chez l’homme, triangulaire chez la femme, surmonté de la gouttière obturatrice ou sous-pubienne.

La face interne est divisée en deux parties par une crête oblique qui concourt à former le détroit supérieur du bassin. Au-dessus se trouve la fosse iliaque interne, comblée par le muscle iliaque et en arrière de laquelle on voit la tubérosité iliaque et la facette auriculaire destinée à l’articulation avec le sacrum. Au-dessous du détroit supérieur existe une surface quadrilatère répondant au fond de la cavité cotyloïde, et le trou sous-pubien surmonté de la gouttière sous-pubienne.

Des quatre bords, deux sont convexes : ce sont le bord supérieur et le bord inférieur. Les deux autres, le bord antérieur et le bord postérieur, sont profondément et très irrégulièrement entaillés.

En procédant de haut en bas, le bord antérieur présente les particularités suivantes (voy. pl. 12, fig. 2) : l’épine iliaque antérieure et supérieure ; l’épine iliaque antérieure et inférieure ; la gouttière du psoas ; l’éminence ilio-pectinée ; la surface pectinéale, bordée en dedans par la crête pectinéale ; l’épine du pubis et l’angle du pubis.

Au bord postérieur on note, en procédant également de haut en bas l’épine iliaque postérieure et supérieure ; l’épine iliaque postérieure et inférieure ; l’échancrure sciatique supérieure ; l’épine sciatique ; l’échancrure sciatique inférieure, et l’ischion on tubérosité ischiatique.

Le bord inférieur va de l’ischion au pubis et concourt à former, avec celui du côté opposé, l’arcade du pubis.

Le bord supérieur, ou crête iliaque, joue un rôle important au point de vue de la morphologie extérieure.

Il est large, épais, divisé, en raison des nombreuses insertions musculaires qu’il reçoit, en lèvre externe, interstice et lèvre interne.

Il décrit, dans le sens antéro-postérieur, une courbe à sommet supérieur se rapprochant de l’ogive, et dans le sens horizontal, une double courbure en forme d’S que le plan supérieur (voy. pl. 12, fig. 1) met bien en lumière. La courbe antérieure en occupe la plus grande étendue ; elle est à grand rayon à convexité tournée en dehors, et son extrémité antérieure se trouve légèrement déjetée dans le même sens. La courbe postérieure est courte, brusque, anguleuse. Elle mérite de porter le nom d’angle rentrant le la crête iliaque, et répond sur le nu à une dépression remarquable par sa constance, ainsi que nous le verrons plus loin.


§ 2. — Articulations et ligaments du bassin. (Pl. 15.)


Les deux os iliaques réunis en avant forment avec le sacrum, qui se trouve interposé entre eux en arrière, une véritable ceinture osseuse qui est le bassin.

Nous étudierons successivement l’articulation de l’os iliaque avec le sacrum (articulation sacro-iliaque), l’articulation des deux os iliaques entre eux (symphyse du pubis), et les ligaments du bassin, qui constituent des articulations à distance.


A) Articulation sacro-iliaque.


La surface articulaire de l’os iliaque présente des aspérités qui s’engrènent avec une facette articulaire analogue du sacrum. Elle est oblique de haut en bas et de dedans en dehors, de façon que le sacrum, enclavé entre les deux os iliaques, a la forme d’un coin à base inférieure.

On décrit deux ligaments antérieurs, un supérieur et un inférieur.

En arrière, l’excavation profonde laissée entre le sacrum et la tubérosité iliaque est remplie par une masse ligamenteuse très puissante, dont la partie profonde forme le ligament sacro-iliaque interosseux, et la partie superficielle, le ligament sacro-iliaque postérieur.


B) Symphyse du pubis.


Les deux surfaces articulaires sont séparées par un disque fibreux, disque interpubien.

Tout au pourtour sont des fibres ligamenteuses dont les plus épaisses en bas forment le ligament sous-pubien, triangulaire, occupant le sommet de l’arcade pubienne.


C) Ligaments du bassin.


Ligament iléo-lombaire. — Le ligament iléo-lombaire, formé de faisceaux horizontaux épais, s’étend de l’apophyse transverse de la cinquième vertèbre lombaire au bord supérieur de l’os iliaque.

Ligaments sacro-sciatiques. — Le grand ligament sacro-sciatique s’attache par une base élargie aux épines iliaques postérieures et aux bords du sacrum, et d’autre part à la lèvre interne de l’ischion. De sa face antérieure partent des fibres qui vont s’insérer à l’épine sciatique et forment le petit ligament sacro-sciatique.

Membrane obturatrice. — On désigne sous ce nom des faisceaux fibreux entre-croisés qui ferment le trou obturateur, à l’exception de la partie supérieure, où la gouttière sous-pubienne se trouve transformée en orifice pour le passage des nerfs et des vaisseaux.

Ligament de Poupart. — Étendu en ligne droite, de l’épine iliaque antérieure et supérieure à l’épine du pubis, ce ligament circonscrit, avec le bord antérieur de l’os coxal, un espace allongé. Cet espace est divisé en deux par des faisceaux fibreux qui de sa face inférieure se rendent à l’éminence ilio-pectinée. En dehors passe le muscle iliaque ; en dedans, les vaisseaux et les nerfs qui, du bassin, vont à la cuisse.

La face supérieure du ligament donne insertion aux muscles de l’abdomen.

Son bord antérieur est relié à la face profonde de la peau d’où résulte un pli constant, le pli de l’aine.


§ 3. — Du bassin dans son ensemble. (Pl. 13, 14 et 15.)


Le bassin est une vaste ceinture osseuse soutenant en arrière la colonne vertébrale et portée elle-même par les deux têtes fémorales.

La surface intérieure est divisée en deux par un étranglement circulaire qui part du pubis en avant pour se terminer en arrière à la base même du sacrum ; c’est le détroit supérieur, au-dessus duquel la région prend le nom de grand bassin, et au-dessous, de petit bassin.

Le grand bassin s’ouvre en avant par une large circonférence composée des crêtes iliaques et des ligaments de Poupart.

Le petit bassin est limité en bas par le détroit inférieur, formé par l’arcade pubienne, la tubérosité ischiatique, le grand ligament sciatique et le coccyx.

Le bassin, dans la station debout, est incliné fortement en avant. La grande échancrure cotyloïde est dirigée directement en bas. Le détroit supérieur, ou une ligne allant du promontoire à la partie supérieure de la symphyse, forme avec l’horizon un angle d’environ 60°.

Chez la femme, le bassin subit de notables modifications en rapport avec la maternité.

Il est plus large et moins haut que celui de l’homme. On donne généralement les moyennes suivantes pour les dimensions du bassin suivant les deux diamètres principaux : diamètre transversal, pris des points les plus éloignés de la crête iliaque, 28 centimètres chez l’homme et 30 centimètres chez la femme, tandis que le diamètre vertical en hauteur du bassin mesure 20 centimètres chez l’homme et 18 centimètres chez la femme.

On peut observer, en outre, que l’arcade pubienne est plus ouverte dans le bassin de la femme, les ischions plus distants, le sacrum et le coccyx moins élevés et plus aplatis, la grande échancrure sciatique plus ouverte et moins profonde.


Mécanisme.


Les différentes pièces du bassin n’offrent aucune mobilité les unes sur les autres, et les articulations pubiennes et sacro-iliaques ne servent qu’à décomposer les chocs auxquels le bassin est soumis.


Article V. — SQUELETTE DU TRONC EN GÉNÉRAL. — SON ACTION SUR LES FORMES EXTÉRIEURES. (Pl. 16, 17 et 18.)


Toutes les pièces osseuses que nous venons d’étudier en détail constituent, par leur réunion, le squelette du tronc, sur lequel nous devons maintenant jeter un coup d’œil d’ensemble. La colonne vertébrale en forme le centre ; elle repose sur le bassin et soutient la tête par son extrémité supérieure ; sur ses côtés et vers son milieu s’attache la cage thoracique, dont l’extrémité inférieure n’est distante de la crête iliaque que de 4 à 5 centimètres.

La colonne vertébrale maintient les proportions en hauteur du torse, pendant que le thorax dont la largeur n’atteint pas celle du bassin, détermine, suivant son degré de développement, l’ampleur ou l’étroitesse de la poitrine. La cage thoracique est terminée en forme de cône à son extrémité supérieure, et c’est par l’adjonction, sur ses côtés, du squelette de l’épaule que le torse prend supérieurement l’élargissement latéral que l’on désigne vulgairement sous le nom de carrure des épaules. L’omoplate appliquée sur la partie postérieure du thorax, en dehors de la ligne formée par l’angle des côtes, s’étend en hauteur de la deuxième à la huitième côte ; son bord spinal est dirigé à peu près verticalement. On a fait remarquer que la distance qui sépare les deux omoplates est à peu près égale au bord spinal, qui aurait lui-même la même longueur que la clavicule. Sans être d’une grande rigueur, ces mesures peuvent être de quelque utilité pratique. Le bassin termine par en bas le squelette du tronc. De son développement dépend la largeur des hanches et les modifications des formes qui, dans cette région, différencient les sexes.

Les mesures de hauteur du tronc sont déterminées par les dimensions de la colonne vertébrale que nous avons déjà données. (Voyez page 22.) Quant aux mesures de largeur, elles se réduisent sur le squelette aux deux diamètres transverses bi-acromial et bi-iliaque. Le premier s’étend de l’extrémité de l’acromion au même point du côté opposé. Le second mesure la distance qui sépare les deux crêtes iliaques. Chez l’homme, le diamètre bi-acromial est en moyenne de 32 centimètres, et le bi-iliaque de 28 centimètres. Chez la femme, les rapports sont renversés à cause de la prédominance des mesures de largeur du bassin le diamètre bi-acromial est de 29 centimètres, et le bi-iliaque atteint 30 centimètres. Ces chiffres, d’ailleurs, n’ont guère d’intérêt que pour l’étude. Ils mettent bien en valeur les mesures de largeur qui caractérisent les sexes. Mais, sur le modèle, le tronc ne va pas sans la racine des membres, et ses diamètres, en largeur, se mesurent aux têtes humorales et aux grands trochanters. Or, le rapport de ces deux diamètres, bi-huméral et bi-trochantérien, est de même sens dans les deux sexes. Chez l’homme comme chez la femme le diamètre supérieur l’emporte sur l’inférieur, mais d’une quantité fort différente, ainsi qu’en témoignent les chiffres suivants :

Homme. Femme.
Diamètre bi-huméral. 39 35
Diamètre bi-trochantérien. 31 32

Le rôle que jouent dans la morphologie du tronc les diverses pièces osseuses qui en composent le squelette est considérable.

La colonne vertébrale, noyée au milieu des parties molles, ne laisse paraître à l’extérieur qu’une faible partie de ses détails anatomiques. Seule la crête formée par la suite des apophyses épineuses est sous-cutanée dans la plus grande partie de son étendue et occupe la ligne médiane postérieure du tronc. Les muscles saillants de chaque côté transforment cette crête épinière en une rainure plus ou moins profonde suivant les régions, mais au fond de laquelle on peut retrouver quelques détails des saillies osseuses. Ainsi, visibles aux reins, les apophyses épineuses disparaissent d’ordinaire à la région du dos, pour reparaître à la limite du cou, où la saillie de la « proéminente » (septième vertèbre cervicale) est constante ; elle constitue un point de repère usité dans les mensurations du tronc sur le vivant. Le plus souvent l’apophyse épineuse de la sixième vertèbre cervicale forme également une saillie moindre, mais bien appréciable. Au-dessus, la colonne cervicale s’enfonce plus profondément et disparaît même complètement au milieu des parties molles du cou.

Les courbures de la colonne vertébrale se retrouvent dans les formes générales de la partie postérieure du tronc. Les reins excavés répondent à la concavité de la courbure lombaire ; le dos arrondi, à la convexité de la courbure dorsale ; au cou, la concavité de la courbure cervicale est toujours atténuée, sinon redressée par la présence des muscles de la nuque.

Sous les formes partielles dues aux reliefs des muscles disposés à sa surface, le thorax maintient la voussure qui donne la forme générale de la poitrine. Ici plus qu’en aucune autre partie du corps, à l’exception du crâne toutefois, le squelette joue un rôle morphologique considérable, bien qu’il n’apparaisse immédiatement sous la peau que dans des limites fort restreintes. En arrière, je rappellerai la situation de la crête épinière dorsale. En avant, le sternum est sous-cutané dans toute sa hauteur, mais non dans toute sa largeur. Puis il faut encore signaler, en arrière, vers l’angle de l’omoplate, un tout petit espace triangulaire dont la dimension varie avec les mouvements de l’épaule. Partout ailleurs la cage thoracique est recouverte par des muscles.

Le sternum occupe le fond de cette rainure médiane peu profonde qui s’étend de la fourchette sternale au creux épigastrique.

Le creux épigastrique répond à l’appendice xiphoïde, toujours situé sur un plan plus reculé que le corps du sternum et dont la pointe, parfois recourbée en avant, vient soulever les téguments en cet endroit.

Chez les personnes très maigres, les saillies costales se dessinent sous la peau, en avant, de chaque côté du sternum, comme aussi sur les côtés, et en arrière au-dessous de l’omoplate. En avant, les cartilages costaux et leurs articulations soit avec le sternum, soit avec les côtes, soit entre eux, apparaissent très nettement. Nous reviendrons en détail sur ces formes osseuses, à propos de l’étude des régions.

Par leur réunion, les cartilages des côtes sternales forment, avec ceux du côté opposé, une arcade d’aspect ogival qui constitue l’échancrure antérieure de la poitrine. Le rebord costal forme saillie dans la station droite et cambrée, même chez les individus bien musclés. On peut alors remarquer (ce qui se voit très nettement de profil) que le rebord saillant des fausses côtes proémine d’une façon notable au delà des pectoraux et du sternum, dont il continue la direction oblique. Dans cette attitude, le point le plus saillant de la cage thoracique n’est donc pas vers l’extrémité inférieure du sternum qui répond à la cinquième côte, mais plus bas, au niveau du rebord formé par les cartilages de la neuvième et de la dixième côte.

Les deux dernières côtes, côtes flottantes, disparaissent au milieu des parties molles du flanc. On les sent sous le doigt en déprimant fortement les téguments de la région, et il est alors facile de constater qu’elles sont en réalité fort proches de la crête iliaque, ainsi que nous l’avons déjà fait remarquer.

La clavicule est un os dont le modelé se révèle très complètement au travers de la peau. Elle est, en effet, sous-cutanée par sa face supérieure et par son bord antérieur, dont la courbure en forme d’S italique se reconnaît facilement. La partie convexe occupe la moitié interne ; la partie concave est située au dehors.

Dans la position debout du soldat sans armes, la poitrine saillante, les épaules effacées et la paume de la main tournée en avant, la clavicule offre une direction légèrement oblique en dehors et en haut. Lorsque les bras retombent naturellement le long du tronc, elle est à peu près horizontale ; mais sa direction varie suivant les sujets, et il n’est pas rare de la voir s’incliner légèrement en bas et en dehors. Son extrémité interne, articulée avec le sternum, fait une forte saillie qui augmente singulièrement la profondeur de la fourchette sternale. Je rappellerai que cette extrémité renflée déborde en tous sens la facette articulaire qui lui est destinée au sternum et avec laquelle elle ne s’articule que par l’intermédiaire d’un fibro-cartilage.

L’extrémité externe, aplatie dans le sens transversal, s’unit à l’acromion, avec lequel elle contribue à former le sommet de l’épaule.

La clavicule fait parfois sur l’acromion une saillie parfaitement appréciable sous la peau et qu’il ne faut pas confondre avec l’extrémité externe de ce même acromion, dont le relief est masqué par les insertions du deltoïde.

L’omoplate disparaît au milieu des muscles du dos, à l’exception de la crête de l’épine et de l’acromion, qui termine cette épine en dehors.

Sur les sujets maigres, l’épine forme une saillie qu’on a comparée à l’arête d’un toit, à laquelle aboutissent deux plans inclinés répondant aux fosses sus-épineuses et sous-épineuses comblées incomplètement par les muscles. Mais chez les sujets vigoureux elle se convertit en un sillon déterminé par les saillies musculaires voisines. La direction de ce sillon est naturellement celle de l’épine osseuse, oblique en haut et en dehors, il commence en dedans, au bord interne de l’os, par une petite dépression triangulaire due à une disposition spéciale des fibres du trapèze sur laquelle nous reviendrons plus loin. En dehors, il aboutit à une sorte de plate-forme qui termine l’épaule par en haut.

Le bord interne de l’omoplate, lorsque les bras retombent naturellement le long du corps, forme une saillie longitudinale transformée en dépression par la contraction des muscles qui s’y attachent lorsque les épaules sont rejetées en arrière. Sa direction est presque parallèle à la raie du dos, dont il est distant de 7 à 8 centimètres ; il s’en éloigne un peu plus en bas. L’angle inférieur de l’omoplate est également saillant, surtout lorsque les épaules sont abaissées ; mais cette saillie est émoussée par les fibres musculaires du grand dorsal, qui passent par-dessus.

Par en bas, le squelette du tronc est terminé par la ceinture osseuse du bassin. Entouré de masses musculaires puissantes, le bassin n’est sous-cutané qu’au niveau de la face postérieure du sacrum en arrière, du pubis en avant, de la crête iliaque sur les côtés.

Les gouttières de la face postérieure du sacrum sont comblées par des muscles, masses sacro-lombaires maintenues par une solide aponévrose prenant attache latéralement sur les saillies latérales du sacrum et sur l’épine iliaque postérieure, et au milieu, sur la crête sacrée. Il résulte de cette disposition une rainure médiane qui remplace la crête sacrée et qui continue la rainure lombaire pour s’effacer inférieurement un peu au-dessus de la profonde rainure interfessière. Cette rainure médiane est marquée d’une dépression correspondant à la jonction du sacrum avec la colonne lombaire et due à l’angle que forment entre elles ces deux pièces osseuses.

Le bord supérieur de l’os iliaque, ou crête iliaque, reçoit de nombreuses insertions musculaires et n’est sous-cutané que par son contour extérieur.

Vers son tiers postérieur, il subit une inflexion à sinus tourné en dehors (angle rentrant de la crête iliaque) et qui se traduit extérieurement par une dépression (fossette lombaire latérale supérieure). Dans ses deux tiers antérieurs, cette crête osseuse ne forme saillie que chez les sujets très maigres. Chez les sujets musclés, au contraire, les reliefs musculaires qui s’y attachent par en haut et par en bas la transforment en un sillon qui cependant ne suit pas exactement la configuration de la ligne osseuse, ainsi que je le démontrerai plus loin. L’épine iliaque antérieure et supérieure forme toujours une petite saillie à l’extrémité antérieure de ce sillon.

En arrière, sur les limites de la région sacrée, la tubérosité iliaque est transformée en une dépression par les reliefs musculaires qui l’entourent (fossette lombaire latérale inférieure).

L’os du pubis en avant est recouvert par un coussinet adipeux épais qui en atténue les angles.

Il est relié à l’épine iliaque antérieure et supérieure par une bride aponévrotique solide (lig. de Poupart) tendue comme un pont entre les deux points osseux où elle s’attache, cette bride, qui répond au pli de l’aine, marque la limite entre la cuisse et l’abdomen.

CHAPITRE III

SQUELETTE DU MEMBRE SUPÉRIEUR


L’épaule ayant été étudiée avec le tronc, il nous reste à décrire les os du bras, de l’avant-bras et de la main. Ces os sont répartis de la façon suivante :

Au bras, un os l’humérus ;

A l’avant-bras, deux os : le radius et le cubitus ;

A la main, trois segments :

1° Le carpe, composé de huit os : le scaphoïde, le semi-lunaire, le pyramidal et le pysiforme, le trapèze, le trapézoïde, le grand os et l’os crochu ;

2° Le métacarpe, composé de cinq os les cinq métacarpiens ;

3° Les doigts, composés chacun de trois os : la phalange, la phalangine et la phalangette, à l’exception du pouce, qui n’en a que deux, la phalange et la phalangette.


Article premier. — OS DU BRAS.


Humérus. (Pl. 19.)


Situé au milieu des parties molles du bras, l’humérus est un os long qui paraît tordu, suivant son axe. Comme à tous les os longs, les anatomistes, pour les facilités de la description, lui considèrent un corps et deux extrémités.

Le corps, à peu près cylindrique en haut, est triangulaire à la partie inférieure, ou il s’élargit transversalement ; l’extrémité supérieure est arrondie, tandis que l’extrémité inférieure est élargie transversalement et aplatie d’avant en arrière.

Corps. — On lui distingue trois faces et trois bords. Le bord antérieur est à peu près également marqué dans toute l’étendue de l’os ; il se confond en haut avec le bord antérieur de la gouttière bicipitale, et se bifurque en bas pour embrasser la cavité coronoïde. Les deux bords latéraux n’existent qu’à la partie inférieure de l’os. Ils sont alors plus tranchants que le bord antérieur.

La face externe présente vers son milieu une empreinte rugueuse en forme de V destinée à l’insertion du deltoïde.

L’extrémité supérieure est séparée du corps par le col chirurgical. Elle est divisée elle-même en deux parties par le col anatomique : 1° partie articulaire, dirigée en haut et en dedans, affectant la forme d’une surface arrondie d’un tiers de sphère ; 2° partie non articulaire formée par deux tubérosités destinées à des insertions musculaires, en avant, la petite tubérosité, en dehors, la grande tubérosité ; les deux tubérosités sont séparées par une gouttière destinée au passage du tendon de la longue portion du biceps et qui se prolonge sur la face interne (gouttière bicipitale).

L’extrémité inférieure offre à son centre deux surfaces articulaires distinctes destinées à chacun des os de l’avant-bras. En dehors, pour le radius, le condyle présente une surface arrondie dirigée en avant ; en dedans, pour le cubitus, la trochlée est une véritable poulie osseuse dont le bord interne descend beaucoup plus bas que l’externe. Une éminence osseuse surmonte chacune de ces surfaces articulaires : en dehors, l’épicondyle ; en dedans, l’épitrochlée, de beaucoup plus saillante. Nous devons noter également les dépressions suivantes au-dessus de la trochlée, la fosse coronoïde en avant, et la fosse olécranienne en arrière, et au-dessus du condyle, en avant seulement, la dépression suscondylienne.

D’après Rollet[7] pour la taille moyenne de 1m,66, l’humérus, dans sa plus grande dimension, aurait 32 cent. 8.


Article II. — OS DE L’AVANT-BRAS.


§ 1. — Cubitus. (Pl. 20.)


Os long, prismatique, triangulaire, le cubitus est situé à la partie interne de l’avant-bras.

Le corps plus volumineux supérieurement, a trois faces et trois bords.

La face antérieure est concave et unie.

La face postérieure est inégalement divisée en deux parties par une crête osseuse dans toute sa longueur.

La face interne, convexe, lisse et arrondie, est sous-cutanée.

Le bord externe, le plus tranchant, donne attache au ligament interosseux.

Le bord antérieur, mousse, naît du bord interne de l’apophyse coronoïde et se termine à l’apophyse styloïde.

Enfin le bord postérieur, effacé au quart inférieur de l’os, se continue en haut avec l’olécrane.

L’extrémité supérieure est creusée d’une cavité articulaire (grande cavité sigmoïde) ouverte en avant et en haut, inégalement divisée par une crête osseuse longitudinale pour s’articuler avec la trochlée de l’humérus. Cette cavité est formée aux dépens de la face antérieure de l’olécrane et de la face supérieure de l’apophyse coronoïde.

L’olécrane forme la pointe du coude et donne attache au muscle triceps brachial. Il est terminé, en avant et en haut, par un bec recourbé reçu dans la cavité olécranienne de l’humérus, lorsque le membre s’étend.

L’apophyse coronoïde donne attache, par sa face inférieure triangulaire, au muscle brachial antérieur. Son bord externe est creusé d’une facette articulaire pour le radius (petite cavité sigmoïde), et son sommet, en forme de bec, est reçu dans la cavité coronoïde de l’humérus, lors de la flexion du membre.

L’extrémité inférieure ou tête du cubitus est surmontée en arrière par l’apophyse styloïde et creusée d’une gouttière pour le tendon du cubital postérieur.

Pour la taille moyenne de 1m,66, le cubitus a 25 cent. 9 de longueur (Rollet).


§ 2.–Radius. (Pl. 20.)


Os long, triangulaire comme le cubitus, le radius est situé à la partie externe de l’avant-bras.

Le corps, plus volumineux intérieurement, présente trois faces et trois bords dont la disposition est symétrique aux faces et aux bords du cubitus.

La face externe porte vers son milieu une empreinte pour l’insertion du rond pronateur.

Le bord interne, tranchant, donne attache au ligament interosseux. Le bord antérieur, né de la tubérosité bicipitale, se termine à l’apophyse styloïde, et le bord postérieur n’est marqué que vers le milieu de l’os.

L’extrémité supérieure est formée par une partie articulaire arrondie, la tête supportée par une portion rétrécie, le col. La tête est creusée supérieurement d’une cupule pour l’articulation avec l’humérus, et elle est bordée d’un pourtour qui roule sur la petite cavité sigmoïde du cubitus.

Le col s’unit au corps en formant un angle obtus ouvert en dehors et au sommet duquel se trouve la tubérosité bicipitale qui donne insertion au biceps.

L’extrémité inférieure, volumineuse, aplatie d’avant en arrière, est creusée inférieurement d’une surface articulaire divisée en deux par une crête antéro-postérieure.

En arrière, elle est sillonnée de coulisses pour les muscles suivants, en allant de dehors en dedans, le long abducteur et le court fléchisseur du pouce, les deux radiaux, le long extenseur du pouce, l’extenseur commun des doigts et l’extenseur propre de l’index. En dehors, elle se termine par l’apophyse styloïde, qui descend plus bas que l’apophyse de même nom du cubitus. En dedans se trouve une petite cavité sigmoïde pour l’articulation de la tête du cubitus.

Pour la taille moyenne de 1m,66, le radius a de longueur 24 cent. 2 (Rollet).


Article III. — OS DE LA MAIN. (Pl. 21.)


§ 1. — Carpe.


Le carpe est composé de huit os disposés sur deux rangées et qui sont, en allant de dehors en dedans :

1° Rangée : scaphoïde, semi-lunaire, pyramidal, pisiforme ;

2° Rangée : trapèze, trapézoïde, grand os, os crochu.

Ces petits os sont juxtaposés dans chaque rangée, à l’exception du pisiforme, placé hors rang, en avant du pyramidal.

Le carpe présente :

1° Une face supérieure articulaire formée par le scaphoïde, le semi-lunaire et le pyramidal, articulée avec le radius directement et avec le cubitus par l’intermédiaire du ligament triangulaire ;

2° Une face inférieure très irrégulière articulée avec les métacarpiens ;

3° Une face postérieure convexe ;

4° Une face antérieure concave et transformée en gouttière par la présence sur les côtés de quatre apophyses osseuses, dont deux internes : le pisiforme et l’apophyse unciforme de l’os crochu, et deux externes : l’apophyse du scaphoïde et la saillie du trapèze.


§ 2. — Métacarpe.


Le métacarpe se compose de cinq os, les métacarpiens, désignés par leur numéro d’ordre en les comptant de dehors en dedans. Ils sont séparés par les espaces interosseux.

Le premier métacarpien est isolé des autres qui, maintenus dans un rapport assez étroit, forment dans leur ensemble une masse concave antérieurement, — continuant la gouttière carpienne, — et convexe postérieurement.

Inférieurement, les têtes des quatre derniers métacarpiens sont disposées suivant une ligne courbe dont la partie la plus saillante est au troisième métacarpien.

Les caractères communs à tous les métacarpiens sont les suivants :

Le corps triangulaire présente deux faces latérales et une face dorsale ;

La base ou extrémité supérieure a des facettes articulaires pour le carpe et les métacarpiens voisins ;

La tête, ou condyle, ou extrémité inférieure, est terminée par une surface articulaire sphérique marquée latéralement de dépressions rugueuses.

Les caractères distinctifs portent particulièrement sur la base et peuvent se résumer ainsi :

Le premier métacarpien est court, volumineux. La surface articulaire de l’extrémité supérieure, ou base, est en forme de selle, et prolongée en avant par une pointe saillante.

Le deuxième métacarpien offre à sa base trois facettes articulaires pour les os du carpe et un pour le troisième métacarpien. A la face dorsale se trouve le tubercule d’insertion du premier radial externe.

Le troisième métacarpien possède une facette articulaire médiane pour le grand os et deux latérales pour les métacarpiens voisins ; la base est prolongée en arrière et en dehors par une apophyse styloïde, qui donne insertion au deuxième radial externe. La base du quatrième métacarpien a trois facettes articulaires, une médiane pour l’os crochu et deux latérales doubles pour les métacarpiens voisins. Enfin, celle du cinquième métacarpien possède une facette articulaire pour l’os crochu et une autre pour le quatrième métacarpien ; en dedans, elle est surmontée par une tubérosité rugueuse pour l’attache du cubital postérieur.


§ 3. — Phalanges. (Pl. 21, fig. 6.)


Le pouce est formé de deux segments, les quatre autres doigts de trois. Ces segments sont désignés, en allant de haut en bas, sous les noms de : première phalange, deuxième phalange ou phalangine, troisième phalange ou phalangette. Les phalanges vont en diminuant de volume de haut en bas.

Les premières phalanges ont leur extrémité supérieure creusée d’une cavité articulaire unique pour le métacarpien ; leur extrémité inférieure offre une surface articulaire en forme de poulie en contact avec la phalangine.

Sur les deuxièmes phalanges ou phalangines, la facette articulaire de l’extrémité supérieure est divisée en deux par une crête antéro-postérieure. La facette inférieure est en forme de poulie.

Enfin, les phalangettes ont la facette articulaire de l’extrémité supérieure semblable à celle de la phalangine, et leur corps, aminci et court, porte à son extrémité inférieure une tubérosité qui sert de soutien à l’ongle (tubérosité unguéale).


Article IV. — ARTICULATIONS DU MEMBRE SUPÉRIEUR.


§ 1. — Articulation de l’épaule, ou articulation scapulo-humérale.


Surfaces articulaires. — L’humérus, par la portion sphéroïde de son extrémité supérieure, est mis en contact avec la cavité glénoïde de l’omoplate, dont la profondeur est augmentée par la présence du bourrelet glénoïdien, bourrelet fibreux, prismatique, triangulaire, appliqué par sa base sur le rebord de la cavité et dont le bord tranchant s’applique sur la tête de l’humérus.

En haut et en arrière, une voûte ostéo-fibreuse complète l’articulation. Elle est formée par l’acromion et l’apophyse coracoïde réunis par un ligament fort épais, le ligament acromio-coracoïdien.

Ligaments. — Les deux os sont réunis par une sorte de manchon ou capsule fibreuse qui s’attache d’un côté au col anatomique de l’humérus et de l’autre au pourtour de la cavité glénoïde. Elle est renforcée par le ligament coraco-huméral ou suspenseur de l’humérus, qui va du bord interne de l’apophyse coracoïde à sa partie supérieure et postérieure, et par tous les tendons des muscles qui s’insèrent aux tubérosités et se confondent avec elle.

Le tendon de la longue portion du biceps s’engage dans l’intérieur de l’articulation par la coulisse bicipitale et se termine à la partie supérieure de la cavité glénoïde en se confondant avec le bourrelet glénoïdien.

Mécanisme. — Cette articulation est remarquable par son excessive mobilité, due au peu d’étendue de la cavité de réception et à la laxité de la capsule articulaire.

Tous les mouvements sont possibles ; ils peuvent être rattachés à trois directions principales : adduction et abduction, mouvement en avant et en arrière, rotation.


§ 2. — Articulation des deux os de l’avant-bras. (Pl. 22, fig. 3.)


Les deux os de l’avant-bras sont articulés entre eux par leurs extrémités.


Articulation radio-cubitale supérieure.


Le rebord cylindrique de la tête du radius est reçu dans un anneau ostéo-fibreux formé par la petite cavité sigmoïde du cubitus et par un ligament, le ligament annulaire.


Articulation radio-cubitale inférieure.


Les surfaces articulaires sont à l’inverse de celles de l’articulation supérieure. C’est le radius qui fournit une petite cavité sigmoïde, contre laquelle vient s’appliquer la tête du cubitus. Mais cette tête du cubitus n’est articulaire que dans les deux tiers de son pourtour environ, et les os sont maintenus en contact par le ligament triangulaire disposé transversalement au-dessous de la tête cubitale. Ce ligament s’attache par sa base au radius, à l’angle qui forme la facette cubitale avec la facette carpienne, et par son sommet à la portion externe de l’apophyse styloïde du cubitus.

Une membrane interosseuse comble en outre l’espace entre les deux os de l’avant-bras, excepté en haut et en bas. Elle s’attache aux bords interosseux des deux os.


§ 3. — Articulation du coude, ou articulation huméro-cubitale. (Pl. 22, fig. 2.)


Surfaces articulaires. — A la partie interne, la grande cavité sigmoïde du cubitus se moule exactement sur la trochlée humérale, qu’elle embrasse dans la moitié de son étendue environ, pendant que, en dehors, le condyle huméral est en rapport avec la cupule du radius.

Ligaments. — Une capsule assez lâche entoure l’articulation en avant et en arrière. Le contact des os est maintenu par de solides ligaments latéraux. Le ligament latéral interne, en forme d’éventail, va de l’épitrochlée au bord interne de l’olécrane et de l’apophyse coronoïde, et le ligament latéral externe se rend de l’épicondyle au ligament annulaire, sans aucune insertion au radius.

Mécanisme des articulations du coude et de l’avant-bras. — L’articulation du coude est une véritable charnière, et les mouvements ne sont possibles que dans une seule direction. La flexion qui rapproche l’avant-bras du bras n’est limitée que par la rencontre de l’apophyse coronoïde avec la cavité coronoïdienne, et l’extension, qui met l’avant-bras dans le prolongement du bras, est arrêtée par la rencontre du bec de l’olécrane avec le fond de la cavité olécranienne.

L’axe de rotation est transversal, et non perpendiculaire à l’axe de l’humérus ; il est incliné de haut en bas et de dehors en dedans. Il en résulte que, dans l’extension, la main s’éloigne du plan médian du corps, l’avant-bras formant avec le bras un angle obtus ouvert en dehors, tandis que, dans la flexion, la main se rapproche de la ligne médiane, l’avant-bras formant avec le bras un angle très aigu.

Pronation et supination. — On désigne ainsi les mouvements de rotation de l’avant-bras sur son axe et qui sont la conséquence du déplacement des deux os radius et cubitus. Dans la supination, la paume de la main regarde en avant ; dans la pronation, la paume de la main regarde en arrière.

Ces mouvements ne résultent pas, ainsi que le décrivent la plupart des auteurs, d’un simple mouvement de rotation du radius autour du cubitus, qui resterait fixe. Duchenne de Boulogne a parfaitement démontré que, pendant la pronation et la supination, ces deux os se meuvent d’une manière très visible dans leur quart inférieur et surtout à leurs extrémités inférieures, en décrivant chacun un arc de cercle en sens contraire. Il a démontré également que ces deux mouvements sont solidaires. C’est dans l’articulation radio-cubitale inférieure que se passe ce double mouvement en sens inverse. Dans l’articulation supérieure, la tête du radius roule sur elle-même, maintenue par le ligament annulaire pendant que le cubitus subit un très léger mouvement de flexion et d’extension.


§ 4. — Articulation du poignet et de la main. (Pl. 22, fig. 4.)


Je décrirai d’abord les surfaces articulaires de ces diverses articulations de la main, me réservant de rassembler dans un même paragraphe tous les ligaments qui les entourent.


A) Articulations du radius et du carpe, ou radio-carpienne.


Surfaces articulaires. — D’un côté, la cavité formée par la facette inférieure du radius et le ligament triangulaire reçoit un condyle formé, de l’autre côté, par la face supérieure des os de la première rangée du carpe, moins le pisiforme : scaphoïde, semi-lunaire et pyramidal.


B) Articulation des deux rangées des os du carpe entre elles, ou carpo-carpienne.


Les surfaces articulaires sont très complexes, formées en haut par la face inférieure des os de la première rangée, moins le pisiforme, et en bas par la face supérieure des os de la deuxième rangée.

Chacune de ces surfaces est alternativement concave et convexe, la convexité de l’une se moulant sur la concavité de l’autre.


C) Articulation du trapèze avec le premier métacarpien, ou trapézo-métacarpienne.


C’est le type des articulations en selle, ou par emboîtement réciproque.


D) Articulation des métacarpiens avec le carpe, ou carpo-métacarpienne.


L’interligne articulaire est très irrégulier ; il est formé par les faces inférieures des os de la deuxième rangée du carpe, avec l’extrémité supérieure des quatre derniers métacarpiens.


E) Ligament des articulations du poignet et de la racine de la main.


Il faut signaler tout d’abord des ligaments interosseux, qui unissent solidement entre eux les petits os qui constituent chacune des rangées du carpe, à l’exception toutefois du trapèze. Il existe, en outre, un ligament interosseux étendu du grand os et de l’os crochu au troisième et au quatrième métacarpien.

Les ligaments périphériques sont divisés en ligaments dorsaux, palmaires et latéraux. Ils sont étendus entre deux os voisins ; je n’en signalerai que les principaux faisceaux. En arrière, on remarque un faisceau oblique, allant du radius au pyramidal, et que l’on décrit comme ligament postérieur de l’articulation radio-carpienne. En avant, deux faisceaux obliques se dirigent des deux os de l’avant-bras vers le grand os qui occupe le centre du carpe : l’un, très large, faisceau radio-carpien, l’autre, plus étroit, faisceau cubito-carpien. Sur les côtés, on signale les ligaments latéraux, étendus, en dehors de l’apophyse styloïde du radius au scaphoïde et du scaphoïde au trapèze, en dedans de l’apophyse styloïde du cubitus au pyramidal et du pyramidal à l’os crochu.

Le pisiforme est en outre solidement maintenu par deux ligaments qui vont, l’un à l’apophyse unciforme, l’autre au cinquième métacarpien. L’articulation trapézo-métacarpienne est entourée par une capsule fibreuse.

Enfin la gouttière du carpe est transformée en un anneau par un fort ligament, le ligament annulaire, qui s’attache en dehors à l’apophyse du scaphoïde et à la crête du trapèze, en dedans au pisiforme et au crochet de l’unciforme. Dans cet anneau passent les tendons des muscles fléchisseurs des doigts.


F) Mécanisme des articulations du poignet et de la racine de la main.


L’articulation radio-carpienne et l’articulation carpo-carpienne sont susceptibles de mouvements assez étendus.

Elles n’agissent point isolement, et leurs mouvements combinés donnent lieu aux déplacements de la main sur l’avant-bras, qui peuvent s’exécuter dans deux directions principales : dans le sens antéro-postérieur, flexion et extension, et dans le sens latéral, adduction et abduction.

L’excursion de la flexion et de l’extension est de plus de deux angles droits ; celle de l’inclinaison latérale, de 45° à 50°.

Les articulations des deuxième et troisième métacarpiens avec le carpe sont à peu près immobiles. Le quatrième métacarpien présente une assez grande mobilité encore plus prononcée pour le cinquième, dont l’articulation avec l’os crochu forme une véritable articulation en selle.

L’articulation du premier métacarpien avec le trapèze jouit de la plus grande mobilité. Les mouvements se font dans deux directions principales : 1° Le pouce s’approche ou s’éloigne de l’axe de la main : adduction et abduction. Ce mouvement est limité en dedans par la rencontre des deux métacarpiens, et en dehors par la tension de la capsule articulaire. 2° Le pouce se porte en avant et en arrière : flexion et extension. L’obliquité du trapèze fait que, dans le mouvement de flexion, le premier métacarpien se place en avant des autres, d’où résulte le mouvement d’opposition.


G) Articulation du métacarpe et des doigts, ou métacarpo-phalangienne.


La tête du métacarpien est reçue dans la cavité de l’extrémité supérieure de la phalange complétée en avant par un ligament épais, le ligament glénoïdien. Le ligament transverse du métacarpe réunit les ligaments glénoïdiens des quatre derniers doigts. Le ligament glénoïdien de l’articulation du pouce contient deux os sésamoïdes.

Des ligaments latéraux très forts, triangulaires, vont du tubercule postérieur de la tête du métacarpien à la partie latérale de la phalange et au ligament glénoïdien.

Mécanisme. — Les mouvements sont de deux sortes :

1° Flexion et extension. Limité par la résistance des ligaments, ce mouvement dépasse toujours l’angle droit.

2° Adduction et abduction. D’une extension assez faible, ce mouvement est limité par la résistance des ligaments latéraux.

Il existe en outre de légers mouvements de circumduction.


H) Articulations des phalanges.


Ces articulations sont de petites trochlées munies d’un ligament antérieur ou glénoïdien et de deux ligaments latéraux. Elles constituent de véritables charnières dans lesquelles les seuls mouvements possibles sont la flexion et l’extension.


Article V. — DU SQUELETTE DU MEMBRE SUPÉRIEUR EN GÉNÉRAL. SON ACTION SUR LES FORMES EXTÉRIEURES. (Pl. 23, 24 et 25.)


L’humérus soutient les parties molles du bras. Son extrémité supérieure renflée concourt à la saillie de l’épaule, en débordant la voûte osseuse formée par l’acromion. Son extrémité inférieure fait en dedans (épitrochlée) une saillie très prononcée sous la peau, pendant qu’en dehors (épicondyle) elle disparaît sous le relief des muscles externes de l’avant-bras.

L’axe de l’avant-bras forme avec celui du bras un angle obtus ouvert, en dehors, déjà signalé plus haut. Dans l’attitude de pronation, cet angle disparaît, et l’avant-bras continue la direction du bras. Placés côte à côte, les deux os de l’avant-bras contribuent à lui donner la forme aplatie d’avant en arrière qu’il possède dans l’attitude de supination. En arrière et en haut, l’olécrane forme la saillie du coude. Tout le bord postérieur du cubitus est sous-cutané et se dessine sur le modèle par un sillon dû aux reliefs des muscles environnants. Inférieurement, les deux apophyses styloïdes font deux saillies distinctes en dedans, celle du cubitus ; en dehors et descendant plus bas, cette du radius.

La main est, dans sa position naturelle, un peu inclinée sur le bord cubital ; d’où il résulte que son axe forme, avec celui de l’avant-bras, un angle obtus ouvert en dedans, c’est-à-dire dans le sens opposé à celui formé par les axes de l’avant-bras et du bras.

La gouttière carpienne, comblée par les tendons et les ligaments, ne se révèle pas au dehors. Le talon de la main est formé en dehors par la saillie du trapèze, et en dedans par celle du pisiforme, qui remonte beaucoup plus haut.

Le creux de la main et la convexité du dos de la main rappellent la forme du métacarpe. Les phalanges se dessinent à la face dorsale des doigts.

La longueur proportionnelle de l’humérus et du radius a une grande importance, puisqu’elle détermine la proportion des deux grands segments du membre supérieur, le bras et l’avant-bras. Ce rapport varie d’ailleurs suivant la race.

Broca a exprimé ce fait d’une manière très judicieuse en montrant que, l’humérus étant égal à 100, le radius moyen de l’Européen était de 73.8, tandis que celui du nègre est de 79.4 ; d’où il résulte que les nègres ont les membres supérieurs plus longs que l’Européen, et que cette différence de longueur est due aux dimensions plus grandes de l’avant-bras.


CHAPITRE IV

SQUELETTE DU MEMBRE INFÉRIEUR


Au membre inférieur, les os sont répartis de la façon suivante :

A la cuisse, un os : le fémur.

A la jambe, deux os : le tibia et le péroné.

Au pied, trois segments :

1° Le tarse, composé de sept os l’astragale, le calcanéum, le scaphoïde, les trois cunéiformes, le cuboïde ;

2° Le métatarse, composé de cinq os les cinq métatarsiens ;

3° Les orteils, composés chacun de trois os la phalange, la phalangine et la phalangette.

Le gros orteil n’a que deux segments la phalange et la phalangette.


Article premier. — OS DE LA CUISSE.


Fémur. (Pl. 26.)


Os long, le fémur offre une courbure à convexité antérieure ; il est coudé supérieurement et dirigé obliquement de haut en bas et de dehors en dedans.

Le corps prismatique triangulaire, présente une face antérieure, deux faces latérales, deux bords latéraux et un bord postérieur.

La face antérieure est lisse, convexe, excavée inférieurement. Les deux bords latéraux sont arrondis, et le bord postérieur, par contre, est rugueux, saillant. On le désigne sous le nom de ligne âpre du fémur. La ligne âpre, née supérieurement par deux origines, l’une provenant du grand trochanter et l’autre du petit, se bifurque inférieurement pour intercepter un espace triangulaire (espace poplité).

L’extrémité supérieure se compose d’une tête arrondie soutenue par un col qui repose sur une portion de l’os élargie par la présence de deux tubérosités (le grand elle le petit trochanter).

La tête représente les deux tiers environ d’une sphère dirigée en dedans et en haut. Elle est creusée d’une dépression pour l’attache du filament rond, sur la ligne médiane, plus près du bord inférieur que du supérieur.

Le col forme avec le corps un angle obtus, ouvert, en dedans et exagéré chez la femme.

Le grand trochanter occupe en dehors le sommet de l’angle que nous venons de signaler. Il présente un bord supérieur saillant, et sa face interne est creusée d’une cavité (la cavité digitale). Le petit trochanter est situé en bas et en dedans. Une ligne rugueuse, en avant, une crête saillante, en arrière, réunissent les deux trochanters.

L’extrémité inférieure est volumineuse, quadrilatère, formée de deux condyles séparés en arrière par une vaste échancrure et dont l’axe transversal est dirigé de haut en bas et de dehors en dedans de telle sorte que, reposant sur un plan horizontal par son extrémité inférieure, le fémur ne s’élève pas verticalement, mais s’incline en dehors et prend la direction oblique, qu’il affecte lorsqu’il est mis en place dans le corps humain.

En avant, les deux condyles réunis forment une véritable poulie articulaire sur laquelle repose la rotule. Le bord externe monte plus haut et est plus saillant que l’interne. Les deux condyles, dirigés obliquement, vont en s’éloignant du plan médian ; ils sont séparés par une vaste échancrure en arrière (échancrure intercondylienne), et leur extrémité postérieure proémine fortement. Sur les côtés, les deux condyles sont surmontés par deux saillies osseuses (tubérosité interne et tubérosité externe). Il faut signaler, au-dessus de la tubérosité interne, le tubercule du grand adducteur.

Pour la taille moyenne de 1m,66, le fémur a 45 cent. 3 de long (Rollet.)


Article II. — OS DE LA JAMBE.


§ 1. — Tibia. (Pl. 27 et 28.)


Os long, dirigé verticalement, le tibia présente deux très légères courbures dans le sens de sa longueur. La courbure supérieure est à concavité externe, et l’inférieure à concavité interne. Il est tordu sur lui-même, et les axes transversaux des surfaces articulaires supérieure et inférieure font entre eux un angle d’environ 20°, d’où résulte la direction du pied en dehors.

Le corps est prismatique triangulaire, avec deux faces latérales et une face postérieure, un bord antérieur et deux bords latéraux. La face externe, concave en haut, devient convexe et antérieure en bas. La face interne, lisse, légèrement convexe, est sous-cutanée dans toute son étendue. La face postérieure est divisée en deux parties inégales par la ligne oblique, dirigée de haut en bas et de dehors en dedans. Au-dessus de la ligne oblique se trouve la surface poplitée.

Le bord antérieur, ou crête du tibia, a la forme d’une S italique très allongée ; il vient mourir au devant, de la malléole interne. Le bord externe se bifurque inférieurement pour recevoir le péroné.

L’extrémité supérieure, volumineuse, en contact avec les condyles fémoraux, est aplatie supérieurement. Cette face supérieure présente deux cavités articulaires peu profondes à grand axe antéro-postérieur et séparées par l’épine du tibia. Ces cavités articulaires, désignées sous le nom de cavités glénoïdes ou condyles, sont de forme un peu différente : l’externe plus large et moins longue que l’interne. Elles reposent sur un élargissement de l’os qui constitue les tubérosités. La tubérosité externe porte en dehors et en arrière une facette articulaire pour le péroné, et en avant le tubercule du jambier antérieur. La tubérosité interne est creusée sur son pourtour d’une gouttière transversale pour le tendon réfléchi du demi-membraneux. Enfin, en avant et plus bas se trouve la tubérosité antérieure du tibia, qui donne attache au tendon rotulien et surmonte le bord antérieur de l’os.

L’extrémité inférieure, quadrangulaire, offre inférieurement une facette trapézoïde excavée, articulée avec l’astragale.

En dedans descend une apophyse épaisse qui forme la malléole interne.

En dehors on voit la surface triangulaire articulée avec le péroné, et en arrière la gouttière du tibial postérieur.

D’après Rollet, pour la taille de 1m,66, le tibia a une longueur de 36 cent. 6.


§ 2. — Péroné. (Pl. 27 et 28.)


Le péroné est un os long, grêle, prismatique triangulaire et tordu sur lui-même.

Dans la partie supérieure de l’os, on distingue deux faces latérales et une face postérieure. Il résulte de la torsion du corps de l’os qu’en bas la face externe devient postérieure ; les autres faces et les bords subissent la même déviation.

La face interne est divisée par une crête longitudinale, crête interosseuse.

L’extrémité supérieure, ou tête, porte au sommet une facette articulaire plane, en dehors de laquelle l’os forme une saillie, l’apophyse styloïde du péroné.

L’extrémité inférieure, ou malléole externe, de forme triangulaire, est en rapport avec les téguments par sa face externe. Sur sa face interne se trouve une facette verticale articulée avec l’astragale, et au-dessous une dépression rugueuse pour l’insertion des ligaments. Son bord postérieur est creusé en gouttière pour les tendons des péroniers latéraux. Le péroné a la même longueur que le tibia, à peu de chose près.

Pour la taille de 1m,66, le péroné a une longueur de 36 cent. 2 (Rollet).


§ 3. — Rotule. (Pl. 27.)


De forme aplatie, triangulaire, la rotule est située à la partie antérieure de l’articulation du genou, reposant sur les condyles fémoraux et donnant attache supérieurement au tendon du quadriceps et inférieurement au tendon rotulien.

Elle offre deux faces et une circonférence. La face antérieure est rugueuse, sous-cutanée.

La face postérieure, articulaire, est séparée en deux portions inégales par une crête osseuse correspondant à la gorge de la poulie.

La circonférence a la forme d’un triangle dont la base est tournée en haut. Elle donne attache à des ligaments de tous les côtés.


Article III. — OS DU PIED.


Comme à la main, le squelette du pied comprend trois segments :

Le tarse, le métatarse et les orteils.


§ 1. — Tarse. (Pl. 28 et 29.)


Le tarse comprend sept os, divisés en deux rangées :

Première rangée : l’astragale, le calcanéum, le scaphoïde ;

Deuxième rangée : les trois cunéiformes, le cuboïde.


Astragale.


L’astragale forme le sommet du squelette du pied. En rapport supérieurement avec les os de la jambe, il surmonte le calcanéum. On lui distingue une tête, un corps, un col. Sans entrer dans la description détaillée de chacune de ces parties, nous examinerons l’os sous ses diverses faces.

Supérieurement se trouve une surface articulaire en forme de poulie pour le tibia, plus large en avant qu’en arrière et séparée par une dépression de la tête située en avant d’elle.

La face externe présente une facette articulaire de forme triangulaire pour l’extrémité inférieure du péroné (facette malléolaire externe), au-dessous de laquelle l’os proémine en dehors (apophyse externe).

A la face interne se voit la facette malléolaire interne, en forme de croissant.

En arrière, l’os est creusé obliquement par la gouttière du long fléchisseur du gros orteil.

En avant, la tête de l’astragale montre une surface arrondie articulée avec le scaphoïde.

Enfin, à la face inférieure on voit les deux facettes articulaires destinées au calcanéum, séparées par la gouttière du sinus du tarse.


Calcanéum.


Le calcanéum est l’os du talon. Il est massif et irrégulièrement cuboïde. On distingue en avant la grande apophyse, la petite apophyse, puis le corps, qui forme toute la partie postérieure de l’os.

Comme pour l’astragale, nous le considérerons sous ses diverses faces.

La face supérieure est étroite, rugueuse, en arrière. En avant, elle porte deux facettes articulaires séparées par une gouttière (sinus du tarse) et qui s’articulent avec la face inférieure de l’astragale.

Inférieurement, l’os forme trois saillies inégales, une antérieure (tubérosité antérieure) et deux postérieures situées côte à côte, en dedans le gros tubercule, en dehors le petit tubercule.

La face externe est plane, rugueuse et verticale ; un tubercule sépare les gouttières du long et du court péronier latéral.

La face interne, au contraire, est lisse. Elle est tout entière transformée en gouttière pour les tendons des muscles postérieurs et profonds de la jambe, grâce à la saillie de la petite apophyse.

En arrière, l’os porte l’empreinte pour l’insertion du tendon d’Achille.

En avant, la grosse apophyse présente une surface articulaire en contact avec le cuboïde.


Scaphoïde.


Le scaphoïde, d’un volume plus restreint que les deux os qui précèdent, a la forme d’un disque ovale. Il présente deux faces et une circonférence.

Les deux faces sont articulaires. La face antérieure est divisée en trois facettes pour les trois cunéiformes ; la face postérieure est, au contraire, unique et excavée pour recevoir la tête de l’astragale.

La circonférence, rugueuse, est convexe supérieurement. En dehors, elle se prolonge sous forme d’apophyse (apophyse scaphoïde) ; en dedans, elle est généralement pourvue d’une facette articulaire pour le cuboïde.


Cunéiformes.


Les cunéiformes, au nombre de trois, articulés avec le scaphoïde en arrière et les trois premiers métatarsiens en avant, doivent leur nom à leur forme de coin et sont désignés par leur numéro d’ordre en commençant par le dedans du pied.

Le premier cunéiforme est le plus volumineux ; sa base est tournée en bas, et le tranchant est dirigé en haut. La face latérale interne, rugueuse, est marquée en bas et en avant d’une empreinte pour l’attache du jambier antérieur ; la face latérale externe s’articule en arrière avec le deuxième cunéiforme et en avant avec le deuxième métatarsien.

Les deux autres cunéiformes, plus petits, ont leur base tournée en haut. Ils forment la partie la plus saillante du dos du pied ; le troisième cunéiforme s’articule par sa face latérale interne avec le deuxième et une partie de la tête du deuxième métatarsien, et par sa face latérale externe avec l’os cuboïde.


Cuboïde.


Cet os, de forme irrégulièrement cuboïde, d’où lui vient son nom, est situé au bord externe du pied, en dehors du scaphoïde et des cunéiformes. La face dorsale, rugueuse, est fortement inclinée vers le bord externe du pied.

La face plantaire est creusée d’une gouttière oblique pour le tendon du long péronier latéral (gouttière du long péronier latéral) et séparée du reste de l’os par une crête mousse, saillante (crête ou tubérosité du cuboïde). La face postérieure s’articule avec le calcanéum, la face antérieure avec les deux derniers métatarsiens, la face interne, plane, avec le scaphoïde et le troisième cunéiforme, et la face externe, réduite à un bord épais, porte une excavation légère, point de départ de la gouttière du long péronier latéral.


§ 2. — Métatarse. (Pl. 28 et 29.)


Le métatarse se compose de cinq os articulés, en arrière, avec la deuxième rangée du tarse, en avant avec les phalanges, et désignes par leur numéro d’ordre en allant de dedans en dehors.

Ce sont, comme les métacarpiens, de petits os longs présentant un corps et deux extrémités. Le corps, prismatique triangulaire, tourne une de ses faces vers le dos du pied. L’extrémité tarsienne est épaisse, irrégulièrement cuboïde. L’extrémité antérieure ou tête présente une surface articulaire arrondie, plus étendue à la face plantaire, où elle se termine par deux tubercules.

Les caractères distinctifs des métatarsiens sont les suivants :

Le premier métatarsien est court, très volumineux ; son extrémité postérieure se termine en bas par une forte saillie, tubérosité du premier métatarsien.

La base du deuxième métatarsien entre à la manière d’un coin dans une sorte de mortaise formée par les trois cunéiformes. En outre de leur articulation avec les os du tarse, les extrémités postérieures des deuxième, troisième, quatrième et cinquième métatarsiens s’articulent les unes avec les autres par les faces qui se correspondent.

Le cinquième métatarsien présente à sa base, en arrière et en dehors, une apophyse saillante, apophyse styloïde du cinquième métatarsien.


§ 3. — Phalanges.


Analogues à celles des doigts.


Article IV. — ARTICULATIONS DU MEMBRE INFÉRIEUR.


§ 1. — Articullation de la hanche, ou coxo-fémorale. (Pl. 25.)


Les surfaces articulaires sont, du côté de l’os iliaque, la cavité cotyloïde, dont la profondeur est augmentée par le bourrelet cotyloïdien, de forme prismatique analogue au bourrelet glénoïdien, dont la base s’appuie sur le sourcil cotyloïdien et dont la face interne prolonge la cavité articulaire. Le bourrelet cotyloïdien passe comme un pont au-dessus de l’échancrure cotyloïdienne.

Du côté du fémur, la surface articulaire formée par la tête de l’os appartient à une sphère de même rayon que la cavité qui la reçoit.

Ligaments. — 1° Une capsule fibreuse entoure l’articulation, véritable manchon fibreux allant du pourtour de la cavité cotyloïde à la base du col du fémur.

On y distingue des faisceaux longitudinaux dont le plus considérable part de l’épine iliaque antérieure et inférieure pour gagner la ligne intertrochantérienne. Il forme un véritable ligament très fort (ligament antérieur ou de Bertin). Il existe, en outre, des faisceaux circulaires qui forment la partie inférieure et postérieure de la capsule.

Plusieurs de ces faisceaux ligamenteux, en outre de ceux qui partent de l’épine iliaque antérieure et inférieure, viennent du pubis et de l’ischion.

Les fibres longitudinales ont une sorte de disposition en spirale autour du col du fémur, grâce à laquelle leur torsion est augmentée dans l’extension et diminuée dans la flexion.

Ligament rond. — Logé dans l’arrière-fond de la cavité cotyloïde, ce ligament a une direction verticale. Il descend en s’épanouissant de la dépression de la tête fémorale vers l’échancrure cotyloïdienne, au bord de laquelle il s’insère, ainsi qu’à la partie voisine de l’arrière-fond de la cavité et à la portion du bourrelet cotyloïdien qui traverse l’échancrure. Il est formé de trousseaux fibreux très résistants. Ce ligament intra-articulaire dont on a longtemps méconnu l’importance, n’est pas destiné à maintenir le contact des deux surfaces articulaires. Il supporte une partie du poids du bassin qui pèse d’autant moins sur les têtes fémorales. C’est un véritable ligament suspenseur du tronc, ainsi que l’a récemment démontré mon ami Paul Poirier.

Mécanisme. La tête fémorale remplit exactement toute la cavité cotyloïdienne augmentée du bourrelet cotyloïdien. Il en résulte une disposition analogue à ce qui s’appelle noix en mécanique, avec cette différence toutefois que le bourrelet, n’étant point inflexible, ne suffirait point à maintenir en contact les deux surfaces articulaires si d’autres causes n’intervenaient. Ces autres causes sont la résistance des ligaments, la tonicité des muscles voisins et surtout la pression atmosphérique.

Les mouvements du fémur, par suite de la sphéricité des surfaces articulaires en contact, peuvent avoir lieu dans tous les sens néanmoins on peut les ramener à trois directions principales.

Flexion et extension. — Ce mouvement a lieu autour d’un axe transversal passant par les centres des têtes fémorales. La flexion est limitée par la rencontre de la cuisse et du tronc, l’extension par la tension du ligament antérieur. C’est dans la flexion que les mouvements qui suivent ont le plus d’étendue, d’après les auteurs, ils seraient impossibles dans l’extension complète.

Rotation en dedans et en dehors. — Ce mouvement s’exécute autour d’un axe vertical. Il est limité par la résistance des ligaments capsulaires.

Mouvements de latéralité, ou abduction et adduction. — Ce mouvement se passe autour d’un axe antéro-postérieur. Il est limité en dedans (adduction) par le ligament rond et par le ligament de Bertin, en dehors (abduction) par la rencontre du rebord cotyloïdien et du col.


§ 2. — Articulation du genou. (Pl. 30.)


Les surfaces articulaires appartiennent à trois os.

Du côté du fémur. — La surface articulaire est divisée en trois portions : en avant, la surface rotulienne, parcourue en son milieu par une rainure verticale ; en arrière, les deux surfaces condyliennes, séparées de la surface rotulienne par deux petites gouttières obliques.

Du côté de la rotule. — La face postérieure de l’os est articulaire dans sa plus grande étendue.

Du côté du tibia. — Les cavités glénoïdes du tibia, presque planes et séparées par l’épine du tibia, sont les surfaces articulaires sur lesquelles les condyles du fémur reposent ; elles sont complétées par deux ménisques fibro-cartilagineux qui en augmentent la profondeur et par suite suppléent au défaut de concordance des deux surfaces en contact. Ces ménisques ont, la forme de croissants ; on les nomme aussi ligaments semi-lunaires. Le bord convexe, épais, correspond à la périphérie des cavités glénoïdes. Le bord concave, très mince, est tourné vers le centre de la cavité. L’externe est presque circulaire ; il s’insère par ses deux extrémités à l’épine du tibia. L’interne, qui s’attache en avant et en arrière des insertions du précédent, a la forme d’un croissant.

Dans les mouvements de l’articulation, les ménisques se meuvent avec le tibia sur le fémur.

Ligaments. — 1° Au centre de l’articulation se trouvent les ligaments croisés. Ce sont des ligaments très solides remplissant en partie l’échancrure intercondylienne et allant du tibia aux faces intérieures des deux condyles fémoraux. Ils se croisent dans le sens antéro-postérieur et dans le sens transversal. L’antérieur, qui naît en avant de l’épine du tibia, se porte en arrière et en dehors pour s’insérer à la partie postérieure de la face interne du condyle externe. Le postérieur se dirige au contraire d’arrière en avant, de la partie postérieure du tibia à la partie antérieure de l’échancrure intercondylienne, face intérieure du condyle interne.

2° Tout au pourtour de l’articulation sont disposés les ligaments suivants :

Les ligaments antérieurs sont formés au centre par un très fort ligament allant du tubercule antérieur du tibia à la rotule et qui se continue par les fibres les plus antérieures avec le tendon du muscle quadriceps ; de chaque côté, des ligaments plus minces, membraneux, partent des bords de la rotule et vont s’attacher aux condyles.

Les ligaments postérieurs n’existent pas à proprement parler. Ils sont remplacés par les muscles voisins et leurs expansions tendineuses.

Les ligaments latéraux sont fort distincts.

Le ligament latéral externe, sous la forme d’un cordon fort et résistant, va de la tubérosité externe du fémur à la tête du péroné.

Le ligament latéral interne, au contraire, est aplati ; il s’attache en haut à la tubérosité interne du fémur, et en bas à la partie postérieure et supérieure de la face interne du tibia.

Mécanisme. — L’articulation du genou est une articulation à charnière bien imparfaite. Elle permet, non seulement la flexion et l’extension, mais aussi la rotation. Il est vrai que ce dernier mouvement est incompatible avec l’extension, et qu’il n’a lieu que dans la demi-flexion.

Flexion et extension. — Ce mouvement s’opère par le glissement et le roulement des condyles du fémur sur les cavités glénoïdes munies des ligaments semi-lunaires.

L’extension est arrêtée, dès que le tibia et le fémur forment une ligne droite par la tension des ligaments croisés et des ligaments latéraux. La flexion peut être portée jusqu’à la rencontre de la jambe et de la cuisse.

Rotation. — Ce mouvement n’a lieu que dans les positions intermédiaires entre l’extension et la flexion complètes, à cause du relâchement des ligaments qui se produit alors. Ce mouvement, se passe surtout dans le condyle externe, qui se meut pour ainsi dire autour de l’interne. Ce qui s’explique en partie, parce que le ligament latéral externe est bien plus relâché dans la flexion que le ligament latéral interne, qui maintient plus solidement le contact entre le tibia et le fémur de ce côté. Dans la rotation en dedans, le croisement des ligaments croisés s’augmente, ce qui limite très vite ce mouvement. Au contraire, ils sont décroisés dans la rotation en dehors, qui n’est limitée que par la résistance des ligaments latéraux.


§ 3. — Articulations du péroné et du tibia, ou péronéo-tibiales.


Le péroné s’articule avec le tibia par ses deux extrémités. Les deux os sont en outre réunis par une membrane interosseuse qui s’insère en dedans au bord externe du tibia, en dehors à la crête interosseuse de la face interne du péroné, et dans son tiers inférieur au bord antérieur de cet os.

L’articulation péronéo-tibiale supérieure est formée de deux facettes articulaires à peu près planes, entourées d’une capsule fibreuse.

L’articulation péronéo-tibiale inférieure n’a pas de surface articulaire proprement dite. Les deux os sont solidement réunis à leur extrémité inférieure par un ligament interosseux et par deux ligaments extérieurs, l’un antérieur et l’autre postérieur, qui complètent la mortaise tibio-péronière.


§ 4. — Articulation du cou-de-pied, ou tibio-tarsienne. (Pl. 31.)


Articulation en charnière formée d’une part par l’astragale et de l’autre par la mortaise tibio-péronière.


Surfaces articulaires.


Du côté de l’astragale. — Les surfaces articulaires affectent la forme d’un segment de poulie disposé dans le sens antéro-postérieur. Supérieurement se trouve la gorge, plus large en avant qu’en arrière, plus étendue dans le sens antéro-postérieur que dans le sens transversal, et dont le bord externe est plus saillant que l’interne.

Latéralement sont deux facettes qui se continuent sans interruption avec la surface supérieure. Elles sont de forme un peu différente : la facette externe est triangulaire, la facette interne est falciforme.

Du côté du péroné et du tibia. — La mortaise tibio-péronière emboîte la poulie astragalienne, mais non exactement. Elle présente une moindre étendue d’avant en arrière ; de telle façon qu’il reste toujours une partie de la surface astragalienne non recouverte par la mortaise.

Les ligaments de cette articulation sont disposés latéralement. En avant et en arrière, la synoviale est lâche et doublée seulement de quelques trousseaux fibreux.

Ligament latéral interne du deltoïdien. — Très épais, triangulaire, il s’attache au sommet de la malléole interne pour s’étendre de là en rayonnant et s’insérer au scaphoïde, à la petite apophyse du calcanénm et à la partie postérieure de l’astragale ; les fibres les plus profondes, qui forment un faisceau à part, vont toutes à la face interne de l’astragale.

Ligament latéraux externes. — Au nombre de trois, ils se subdivisent ainsi :

a) Antérieur. Péronéo-astragalien antérieur, qui va du bord antérieur de la malléole externe, à l’astragale en avant de la facette articulaire.

b) Moyen. Péronéo-calcanéen, étendu du sommet de la malléole à la face externe du calcanéum.

c) Postérieur. Péronéo-astragalien postérieur, transversal, qui se rend de la face postérieure et interne de la malléole au bord postérieur de l’astragale, en dehors de la gouttière du long fléchisseur du pouce.


§ 5. — Articulations du pied. (Pl. 31.)


A) Articulation sous-astragalienne.


Cette articulation se subdivise en deux articulations distinctes : l’une postérieure, du corps de l’astragale avec le calcanéum ; l’autre antérieure, de la tête de l’astragale avec le calcanéum et le scaphoïde. Ces deux articulations sont séparées par des faisceaux fibreux très forts remplissant le sinus du tarse et réunissant solidement les deux os ; c’est le ligament calcanéo-astragalien interosseux.


Articulation sous-astragalienne postérieure.


Les surfaces articulaires concordantes sont convexes du côté du calcanéum et concaves du côté de l’astragale.

En outre du ligament interosseux très solide dont nous venons de parler, et qui se trouve en avant, on signale, en arrière et en dedans, deux ligaments réunissant les deux os.


Articulation sous-astragalienne antérieure.


Surfaces articulaires. — La tête de l’astragale est reçue dans une cavité formée en arrière par la facette antérieure concave du calcanéum, en avant par la facette postérieure concave du scaphoïde, et entre ces deux os par un ligament fibro-cartilagineux qui les réunit, ligament calcanéo-scaphoïdien inférieur.

Ligaments. — On signale en entre deux ligaments : en dehors, un ligament étendu du calcanéum à la partie externe du scaphoïde (branche interne du ligament en V), puis à la partie supérieure un ligament astragalo-scaphoïdien dorsal, étendu du col de l’astragale au dos du scaphoïde.


B) Articulation calcanéo-cuboïdienne.


Articulation en selle. — La surface articulaire du calcanéum est convexe de dedans en dehors et concave de haut en bas, celle du cuboïde a des courbures inverses.

Les ligaments sont au nombre de trois :

1) Ligament calcanéo-cuboïdien dorsal.

2) Ligament interne, qui est la branche externe du ligament en V.

3) Ligament inférieur, formé par le grand ligament plantaire, allant des tubérosités du calcanéum à toute la face inférieure du cuboïde, et même par ses fibres les plus superficielles jusqu’au troisième cunéiforme et à la base des quatre derniers métatarsiens.


C) Articulation scaphoïdo-cuboïdo-cunéenne.


Les trois cunéiformes et le cuboïde s’articulent entre eux par des surfaces planes, et le scaphoïde s’articule avec les trois cunéiformes par trois facettes triangulaires à peu près planes, il existe quelquefois une quatrième facette en contact avec le cuboïde.

Ligaments. — Les cunéiformes et le cuboïde sont réunis entre eux par trois sortes de ligaments : un ligament dorsal, un ligament plantaire et : un ligament interosseux. En outre, tous les quatre sont réunis au scaphoïde par un ligament dorsal et un ligament plantaire ; de plus, il existe un ligament interosseux allant du scaphoïde au cuboïde.


D) Articulations tarso-métatarsiennes.


Le premier métatarsien s’articule avec le premier cunéiforme, le second avec les trois cunéiformes, le troisième avec le troisième cunéiforme, et les deux derniers avec le cuboïde. En outre, les métatarsiens, à l’exception du premier, s’articulent entre eux par des facettes latérales.

Toutes ces pièces osseuses sont maintenues en contact par trois sortes de ligaments : des ligaments dorsaux, des ligaments plantaires et des ligaments interosseux.


E) Articulation métatarso-phalangiennes.


Ce sont des articulations condyliennes formées par une tête convexe du côté des métatarsiens, et une facette concave du côté des phalanges.

Ligaments. — Le ligament glénoïdien fibro-cartilagineux complète intérieurement la cavité phalangienne. Les ligaments glénoïdiens sont tous réunis entre eux par une bandelette transversale plantaire, ligament transverse du métatarse.

Il existe de chaque côté un ligament latéral très résistant.


E) Mécanisme du pied.


Le pied forme une voûte surbaissée portant sur le sol par plusieurs points d’appui : en arrière, par le calcanéum ; en avant, par les têtes des métatarsiens, puis en dehors, par toute l’étendue du bord externe. Cette voûte, qui supporte tout le poids du corps, est maintenue par la configuration même des os, par la résistance des ligaments, surtout des grands ligaments plantaires, enfin par des muscles et des aponévroses.

Les mouvements du pied sur la jambe sont de deux espèces, qui se répartissent dans deux articulations différentes.

La flexion et l’extension appartiennent à l’articulation tibio-tarsienne, l’adduction et l’abduction à l’articulation sous-astragalienne.

Articulation tibio-tarsienne. — C’est une véritable charnière dont l’axe est transversal, horizontal. En vertu des mouvements qui s’y passent, la pointe du pied s’élève et s’abaisse. Elle est composée d’un véritable tenon fourni par l’astragale et reçu dans la mortaise tibio-péronière.

Les surfaces articulaires sont plus larges en avant qu’en arrière, de sorte que dans l’extension la partie la plus étroite de l’astragale vient se placer dans la partie la plus large de la mortaise ; d’où il résulte que certains mouvements de latéralité sont alors possibles, qui ne le sont pas dans la flexion.

La flexion et l’extension ont pour limite la rencontre des surfaces osseuses.

Articulation sous-astragalienne. — Dans l’adduction, la pointe du pied se tourne en dedans et le bord externe s’abaisse. Le mouvement est inverse dans l’abduction.

Pendant ces mouvements, le calcanéum et le scaphoïde, et avec eux le reste du pied, se meuvent sur l’astragale immobilisé dans la mortaise. L’adduction est plus étendue que l’abduction.

Les autres articulations tarsiennes entrent aussi en jeu dans ces mouvements.

Les articulations tarso-métatarsiennes sont très serrées, et les mouvements en sont très limités.

Dans les articulations métatarso-phalangiennes la flexion est moins étendue que l’extension, qui, à cause de la laxité des ligaments, peut s’accompagner d’inclinaison latérale, ce qui n’a pas lieu dans la flexion.


Article V. — DU SQUELETTE DU MEMBRE INFÉRIEUR EN GÉNÉRAL. SON ACTION SUR LES FORMES EXTÉRIEURES. (Pl. 32, 33, 34 et 35.)


Le fémur n’occupe pas, comme l’humérus, le centre du membre dont il forme le squelette. Il paraît cependant, sur une vue de profil (pl. 34), situé juste au milieu des parties molles et parallèle à l’axe de la cuisse ; mais, en le considérant de face (pl. 32), on constate qu’il est très obliquement dirigé et que, affleurant la peau (par son grand trochanter) à la partie supérieure et externe de la cuisse, il se rapproche de l’axe du membre par en bas. Son extrémité inférieure occupe en effet le centre du genou.

Les os de la jambe sont dirigés à peu près verticalement, de telle sorte qu’ils forment avec le fémur un angle très obtus ouvert au dehors et dont le sommet correspond à la partie interne du genou.

La rotule, placée en avant de la trochlée fémorale, la dépasse par son bord supérieur dans la station droite, la pointe ou extrémité inférieure de la rotule descendant à peine au niveau de l’interligne articulaire du genou.

En outre qu’ils maintiennent les proportions en hauteur du membre, les os du membre inférieur se révèlent directement à l’extérieur en de nombreux endroits. En haut, le grand trochanter fait un relief puissant toujours facilement appréciable dans la station droite, plus obscur dans la flexion de la cuisse. (Nous en verrons plus loin les motifs.)

Je rappellerai ici que la convexité antérieure du fémur contribue pour une part à la courbure dans le même sens de la face antérieure de la cuisse.

Au genou, le squelette joue un rôle des plus importants dans la conformation extérieure. Abstraction faite de la saillie rotulienne en avant, le genou a dans son ensemble un aspect quadrangulaire qu’il doit à la conformation des deux extrémités osseuses qui forment sa charpente. Parmi les reliefs multiples qui s’observent à sa surface, un certain nombre sont produits directement par des saillies osseuses. En avant on observe la saillie bien connue de la rotule, et quelques travers de doigt plus bas, au niveau de la naissance de la jambe, le tubercule antérieur du tibia. La trochlée fémorale est donc masquée par la présence de la rotule. Mais dans la flexion du genou, les rapports des os changent, et je dois signaler le relief angulaire que fait le bord externe de la trochlée, tandis que l’interne est masqué par le muscle vaste interne, qui le coiffe pour ainsi dire.

Sur la face externe, les deux tubérosités superposées du fémur et du tibia soutiennent la forme sans faire de fortes saillies, à cause des reliefs musculaires puissants qui, situés au-dessus et au-dessous, placent ce côté externe du genou au fond d’une large dépression.

Il n’en est pas de même en dedans, où les mêmes tubérosités se trouvent au sommet de l’angle formé par le squelette de la cuisse et par celui de la jambe. Elles se traduisent au dehors par deux fortes saillies entre lesquelles un sillon transversal marque l’interligne articulaire, visible quelquefois aussi en dehors.

La tête du péroné fait en dehors un relief constant, mais dont la saillie, de beaucoup diminuée à cause des muscles qui s’y rattachent, n’est généralement pas considérable.

A la jambe, toute la face interne du tibia est sous-cutanée, et au cou-de-pied, les extrémités inférieures du tibia en dedans et du péroné en dehors constituent les deux malléoles : la malléole interne plus large, plus près du bord antérieur et plus élevée ; la malléole externe plus étroite, située à peu prés à égale distance du plan antérieur et du plan postérieur, et plus basse.

La saillie du talon est due tout entière au volume du calcanéum. La voûte du pied est soutenue par le squelette de la région, disposé dans ce but. Sur le bord interne, on note vers son milieu la saillie du scaphoïde, et à son extrémité antérieure le relief de l’extrémité antérieure du premier métatarsien. Le bord externe repose tout entier sur le sol ; on observe à la partie moyenne le relief de l’apophyse du cinquième métatarsien.

De même que pour le membre supérieur, les anthropologistes ont cherché pour le membre inférieur à établir les dimensions relatives des os de la cuisse et de la jambe, du fémur et du tibia.

D’après Topinard, le fémur égalant 100, le tibia, pour l’Européen, a une longueur de 80.4, et pour le nègre une longueur de 82.9 ; de sorte que, pour l’indice tibio-fémoral, les différences entre la race blanche et la race noire sont les mêmes que pour l’indice antibrachial, mais plus minimes toutefois.


II

MYOLOGIE


GÉNÉRALITÉS


Entre les os, qui forment au centre la charpente du corps, et la peau, étendue à sa périphérie, se trouvent les muscles, qui à eux seuls comblent presque tout l’espace. Les vaisseaux et les nerfs, en effet, à cause de leur volume restreint, n’entrent pour ainsi dire pas en ligne de compte dans la masse du corps. Je ne parle pas ici de la graisse, qui se trouve plus particulièrement disposée en couche à la face profonde de la peau et dont j’aurai soin de faire ressortir plus loin l’importance morphologique.

La masse totale des muscles peut être évaluée approximativement à plus de la moitié du poids total du corps. Ils sont composés d’une partie centrale rouge contractile, désignée sous le nom de ventre ou corps du muscle, et d’extrémités résistantes d’un blanc nacré, tendons ou aponévroses d’insertion constituées par du tissu fibreux et rattachant le corps charnu aux diverses parties du squelette qu’il fait mouvoir. Quelques muscles s’attachent par une de leurs extrémités à la face profonde de la peau (muscles peauciers). D’autres sont disposés circulairement autour des ouvertures naturelles (muscles sphincters, orbiculaires).

Le corps charnu est constitué par la réunion des fibres musculaires primitives qui s’accolent pour former des faisceaux primitifs, lesquels forment à leur tour des faisceaux secondaires, puis tertiaires. Une enveloppe du tissu connectif entoure tout l’organe et envoie des prolongements entre les divers faisceaux qui le composent.

Les tendons sont tout à fait comparables aux ligaments.

On divise les muscles du squelette en muscles longs, muscles courts et muscles larges. Les premiers se rencontrent principalement aux membres, les seconds près du rachis, autour des articulations, et les derniers sur le tronc.

Il est très important de considérer la direction des fibres charnues du muscle et la façon dont elles s’implantent sur le tendon. Quelquefois les fibres charnues continuent la direction des fibres tendineuses. C’est ce qui arrive dans quelques muscles plats. Mais le plus souvent les fibres charnues s’implantent obliquement sur les fibres tendineuses, de telle sorte qu’une seule fibre tendineuse peut recevoir un nombre plus ou moins considérable de fibres charnues, et le muscle, qui prend un aspect fusiforme, se termine alors en pointe vers le tendon.

Des schémas feront facilement comprendre les dispositions variables des fibres charnues relativement aux deux tendons entre lesquels elles sont ordinairement placées.

A représente le cas déjà signalé, les fibres tendineuses faisant suite aux fibres charnues.

Dans la figure B, le tendon supérieur, en forme de cône plein, reçoit à sa surface les fibres charnues qui se rendent inférieurement à l’intérieur d’un cône creux formé par le tendon inférieur. Ce genre de muscle est dit penniforme à cause de la disposition des fibres, qui ressemble à celle des barbes d’une plume. Le type figuré en C n’est en quelque sorte que la moitié du précédent. Il est dit semi-penniforme.

Cette disposition s’accentue en D. En E, elle existe également ; mais on observe un rapport inverse entre les dimensions de la partie tendineuse et de la portion charnue.

De cet agencement variable des fibres charnues nous pouvons déduire plusieurs faits importants. La fibre charnue est de même longueur entre A B C, et cependant le corps charnu est plus long en B et C qu’en A. Le corps charnu est également de même longueur en D et E, et cependant la fibre musculaire est bien plus courte en D qu’en E. Il faut donc distinguer avec soin la longueur d’un muscle, y compris le tendon, la longueur de la portion charnue seule et la longueur des fibres musculaires.

Les deux premières notions ont une grande importance morphologique, à cause du relief que forment les fibres charnues en s’implantant sur le tendon et qui se traduit toujours à l’extérieur, si le muscle est superficiel. La dernière est capitale en physiologie, car elle indique seule le degré de raccourcissement dont le muscle est susceptible, et par suite l’étendue possible du mouvement qu’il doit effectuer.

Dans les exemples que nous avons cités plus haut, les fibres charnues d’un même muscle ont toutes la même longueur ; mais il n’en est pas nécessairement ainsi, et c’est particulièrement dans les muscles plats qu’on observe des différences dans la longueur des fibres charnues qui les composent.

Tous les muscles sont renfermés dans de véritables gaines formées par les aponévroses de contention ou fascias. C’est ainsi que leur situation réciproque est maintenue, car toutes les gaines d’une même région sont d’autre part étroitement unies par leur surface en contact. Ces aponévroses, naissant des saillies osseuses, sont parfois renforcées par des expansions des tendons. Quelques muscles s’y attachent directement, c’est-à-dire qu’ils ont, comme le tenseur du fascia lata, par exemple, un tendon membraniforme qui joue le rôle d’aponévrose de contention à l’égard d’autres muscles. Enfin, ces enveloppes aponévrotiques sont d’épaisseur fort variable suivant les régions. Elles exercent sur les muscles contenus dans leur gaine une compression permanente qui augmente la puissance de la contraction.

Sans entrer dans de grands détails sur le phénomène si complexe de la contraction musculaire, je ne puis me dispenser d’en dire ici quelques mots.

La fibre musculaire rouge est le tissu générateur du travail mécanique, tandis que le tendon n’est qu’un organe inerte de transmission. C’est la fibre rouge qui possède cette propriété, désignée sous le nom de contractilité et qui consiste dans son raccourcissement sous l’influence d’un excitant (influx nerveux, électricité, agents mécaniques, etc.). Elle est, en outre, douée d’élasticité, c’est-à-dire qu’elle se laisse distendre par des tractions pour reprendre ensuite sa forme primitive.

Quand le muscle est libre par ses extrémités, il est mou, comme fluctuant, qu’il soit à l’état de contraction ou de repos. Il ne devient dur que sous l’influence de la traction de ses deux extrémités, d’où il résulte que la dureté du muscle n’est pas un signe de son degré de contraction, et qu’un muscle tendu par l’action de l’antagoniste, ou simplement par l’éloignement mécanique de ses points d’attache, peut être aussi dur qu’un muscle contracté. Le muscle libre par ses extrémités se ramasse, au moment de la contraction, en une masse globuleuse qui occupe à peine le tiers de sa longueur primitive. Sur le vivant, dans les conditions physiologiques, le raccourcissement ne dépasse guère le tiers de cette longueur.

La quantité de travail dont un muscle est capable est proportionnelle à la quantité de substance active qu’il renferme, c’est-à-dire au poids de ses fibres rouges. Mais le travail ne saurait être le même suivant que le même poids est composé d’une certaine quantité de fibres longues ou d’une quantité plus considérable de fibres courtes. Les physiologistes ont, en effet, constaté que l’étendue des mouvements qu’un muscle peut produire est proportionnelle à la longueur de ses fibres, tandis que sa force est proportionnelle à sa section transversale, c’est-à-dire à la somme des fibres élémentaires qu’il contient. Il en résulte une relation nécessaire entre la forme du muscle et sa fonction. Cette donnée dont l’importance au point de vue morphogénique est considérable a été mise en lumière comme il convient par M. Marey[8].

Le muscle attaché par ses deux extrémités sur deux os réunis par une articulation imprime à l’os mobile, lors de sa contraction, un mouvement dont la direction est déterminée par la conformation des surfaces articulaires. Du mode d’insertion du muscle sur l’os mobile dépend la puissance du mouvement.

Les notions élémentaires de mécanique nous apprennent qu’une force a son maximum d’action lorsqu’elle s’exerce perpendiculairement au levier à mouvoir, et qu’elle perd d’autant plus qu’elle s’exerce dans une direction plus parallèle. Un muscle aura donc d’autant plus de puissance que ses fibres seront perpendiculaires à l’os qu’il doit mouvoir.

Cette disposition est rare toutefois dans l’organisme, et les muscles des membres sont pour la plupart disposés parallèlement au grand axe des os qu’ils sont destinés à mettre en mouvement ; mais on notera l’importance des saillies articulaires, qui font pour quelques tendons l’office de poulies de renvoi et, en augmentant l’angle sous lequel se fait l’insertion musculaire, corrigent dans une certaine mesure la disposition défectueuse que je viens de signaler.

Il résulte également de ce qui précède que, pour un même muscle, l’angle d’insertion variant avec le déplacement de l’os mobile, son degré de puissance variera également ; si cet angle arrive à l’angle droit, le muscle aura à ce moment sa plus grande puissance c’est ce qu’on appelle le moment d’un muscle.

Dans ces mouvements, l’os mobile représente un levier dont le point d’appui est à l’articulation, la puissance à l’insertion du muscle, et la résistance vers l’extrémité libre de l’os déplacé. Cette résistance est représentée par la pesanteur, la résistance des antagonistes et, en somme, par tous les obstacles qui s’opposent au déplacement. Suivant les positions respectives de ces trois points, l’os mobile représentera un levier du premier, du deuxième et du troisième genre. Ce dernier genre est le plus répandu dans l’économie.

Les muscles sont disposés par groupes agissant dans le même sens, on a ainsi le groupe des fléchisseurs, des extenseurs, des adducteurs, etc.

Ces groupes musculaires, disposés autour des articulations, sollicitent le segment mobile tour à tour en sens opposé. Quand un mouvement se produit dans un sens sous une action musculaire donnée, il existe toujours une puissance musculaire opposée destinée à produire le mouvement en sens inverse et à ramener le membre déplacé à la position du point de départ.

Les muscles agissant dans une direction donnée (les fléchisseurs, par exemple) sont les antagonistes des muscles agissant en sens opposé (les extenseurs).

Il importe de résumer ici certaines lois qui président au jeu complexe du système musculaire.

Le muscle, même à l’état de repos, est toujours dans un certain degré de tension, et lorsque, sur le vivant, on sectionne un muscle par le milieu, on voit les deux fragments s’écarter l’un de l’autre. Cette tension a été désignée par les auteurs sous le nom de tonicité.

Un muscle ne se contracte jamais seul. Non seulement son action est accompagnée d’un ou de plusieurs des muscles congénères qui concourent au même but, mais les muscles antagonistes eux-mêmes entrent en contraction. Leur action a pour effet de modérer et de rendre plus précis le mouvement provoqué par les premiers, si bien qu’il est faux de dire que dans la flexion, par exemple, les seuls muscles fléchisseurs se contractent. Quel que soit le mouvement à produire, les groupes antagonistes entrent en même temps en action, et le sens du mouvement (flexion ou extension) n’est déterminé que par la prédominance d’action d’un groupe sur son antagoniste, des fléchisseurs, par exemple, sur les extenseurs, ou vice versa. Enfin, tous les segments du squelette ayant une certaine mobilité les uns sur les autres, il faut, pour qu’un muscle déplace avec sûreté et précision l’os attaché à l’une de ses extrémités, que celui sur lequel prend insertion son autre extrémité devienne fixe et soit, par suite, immobilisé par la contraction des autres muscles qui s’y attachent. C’est ainsi que, dans les mouvements un peu violents, cette contraction synergique gagne de proche en proche jusqu’aux parties les plus éloignées de la région du corps siège de l’action.

Pour terminer ces quelques considérations générales, je dégagerai des données précédentes les points principaux qui intéressent plus particulièrement la forme extérieure.

1° A l’endroit où elles s’attachent sur les fibres aponévrotiques, les fibres charnues forment un relief parfaitement appréciable sous la peau, et que la contraction musculaire, en augmentant le volume de la portion charnue, met encore plus en évidence. Le modelé d’un muscle superficiel sera donc marqué de dépressions au niveau de ses portions aponévrotiques, abstraction faite de la saillie que peut faire le tendon lui-même.

2° Les longueurs relatives du corps charnu et des fibres tendineuses pour un même muscle ne sont pas les mêmes chez tous les individus. Il y a à ce sujet de grandes variétés. La partie charnue étant la partie essentielle du muscle, je désignerai sous le nom de muscle long celui dont le corps charnu est relativement plus long, et, de même, muscle court celui dont le corps charnu sera relativement plus court. Si nous considérons à l’état d’écorché un individu dont les muscles appartiennent au type long, on verra les fibres rouges descendre plus bas sur les aponévroses nacrées, qui diminueront d’étendue, l’écorché sera plus rouge.

Si, au contraire, les muscles appartiennent au type court, les parties rouges perdront de leur importance aux dépens des portions nacrées, qui gagneront en étendue ; ce sera un écorché plus nacré. Or, ces différences de couleur, invisibles sous la peau du modèle, se traduisent cependant à l’extérieur par des différences dans la forme, les parties rouges répondant généralement à des reliefs et les parties nacrées à des dépressions.

Ainsi, ou reconnaîtra facilement les hommes à muscles longs par l’atténuation générale des formes, malgré le volume musculaire, par l’absence de heurts violents au niveau des insertions musculaires, par l’aspect fuselé des membres. Les antiques, pour la plupart, se rattachent à ce type.

L’homme à muscles courts, au contraire, est pour ainsi dire tout en bosse et en creux. Le ventre du muscle plus court est plus saillant, et de larges dépressions avoisinent ses extrémités. La forme générale est heurtée. Elle a moins d’harmonie.

3° Les aponévroses d’enveloppe sont composées parfois de faisceaux distincts et plus résistants qui brident le corps charnu musculaire et provoquent, dans certaines conditions, des modifications fort importantes du modelé, comme il arrive, par exemple, à la partie inférieure de la cuisse, au niveau du vaste interne, dans l’extension du membre, avec relâchement musculaire, et à la fesse, au niveau du moyen fessier, lors de la flexion de la cuisse. Cette influence des aponévroses sur la forme extérieure n’a pas été jusqu’ici nettement formulée.

4° Le muscle qui entre en action se raccourcit et augmente d’épaisseur. Son relief sous la peau s’accroît alors, et il acquiert une dureté considérable. Le modèle d’un muscle contracté est donc bien différent de celui d’un muscle à l’état de repos. Mais je ferai remarquer ici que l’état de repos n’existe pas pour un seul muscle d’un membre en mouvement, Il faut donc se garder d’exagérer les oppositions entre les reliefs des groupes antagonistes. A l’harmonie du jeu musculaire doit correspondre l’harmonie de la forme. Je rappellerai comment la synergie musculaire s’exerce souvent, même pour un mouvement limité, sur des points très variés et très étendus du corps.

5° Enfin, un muscle relâché est soumis à action de la pesanteur, et sa masse, se déplaçant sous cette influence, donne la raison de certaines formes que nous étudierons plus loin.

De plus, si les points d’attache en se rapprochant dépassent les limites de l’élasticité, le corps charnu peut se replier en quelque sorte sur lui-même et former quelques plis perpendiculaires à la direction des fibres, ainsi qu’on l’observe assez souvent pour les muscles spinaux, dans la région des reins.


CHAPITRE PREMIER

MUSCLES DE LA TÊTE

(Pl. 36 et 37.)


Les muscles de la tête se divisent en trois groupes :

a) Les muscles épicraniens ;

b) Les muscles de la face ;

c) Les muscles qui meuvent la mâchoire inférieure.

Parmi les muscles de la tête, un muscle épicranien, le frontal, et tous les muscles de la face ont pour fonction de faire mouvoir le tégument du visage et de concourir à l’expression des sentiments et des passions. Je n’ai pas à entreprendre ici cette étude de la physionomie, que je réserve pour un ouvrage spécial ; je me contenterai donc de relever à propos de chaque muscle l’action qu’il exerce sur la peau et les plis qu’il y détermine d’après le remarquable ouvrage de Duchenne de Boulogne.


Article premier. — MUSCLES ÉPICRANIENS.


Ces muscles, tous superficiels, sont disposés autour d’une aponévrose qui recouvre la voûte du crâne à la manière d’une calotte. Ils forment quatre groupes : en avant les frontaux, en arrière l’occipital, et sur les côtés les auriculaires.


Frontal.


Insertions : en haut, au bord antérieur de l’aponévrose épicranienne ;

En bas, à la peau de la région du sourcil et du nez.

Ce muscle aplati n’est séparé de celui du côte opposé que par un étroit espace triangulaire ouvert en haut. Son bord supérieur décrit une courbe à convexité supérieure qui se distingue parfois au travers de la peau sur les fronts qui portent haut placée la ligne d’implantation des cheveux.

Action. — En outre qu’il est tenseur de l’aponévrose épicranienne, il plisse transversalement la peau du front et l’élève en même temps, lorsqu’il prend son point fixe à l’occipital. Il exprime l’étonnement. Le sourcil élevé décrit une courbe à convexité supérieure, et les plis frontaux curvilignes sont concentriques à l’arc du sourcil.


Occipital.


Insertions : en haut, au bord postérieur de l’aponévrose épicranienne ;

En bas, aux deux tiers externes de la ligne courbe supérieure de l’occipital.

Action. — Il tend l’aponévrose épicranienne.


Auriculaires.


Divisés en auriculaire antérieur, auriculaire postérieur et auriculaire supérieur, ces muscles rudimentaires s’attachent d’un côté à l’aponévrose épicranienne, et de l’autre au cartilage de l’oreille externe. Ils n’ont qu’une action très limitée, et les mouvements du pavillon auriculaire n’existent que peu accentués, et chez certaines personnes seulement.


Article II. — MUSCLES DE LA FACE.


Ces muscles sont divisés en trois groupes disposés autour des orifices des paupières, des narines et des lèvres.


§ 1. — Muscles des paupières.


Sourcilier.


Insertions : en dedans, à la partie interne de l’arcade sourcilière ;

En dehors, à la peau du sourcil.

Étendu transversalement, recouvert par le muscle orbiculaire, il est légèrement oblique en dehors et en haut.

Action. — Ce muscle exprime la douleur. La tête du sourcil s’élève et se gonfle, le sourcil lui-même est oblique en bas et en dehors. Des plis transversaux se dessinent sur la partie médiane du front, qui devient lisse au-dessus de la moitié externe du sourcil.


Orbiculaire des paupières.


Très mince, disposé en cercle autour de l’orifice palpébral, il se divise en deux parties : portion palpébrale et portion orbitaire.

La portion palpébrale occupe l’épaisseur des paupières. Son action amenant l’abaissement de la paupière supérieure et l’élévation de l’inférieure produit l’occlusion de l’œil.

La partie orbitaire, excentrique à la précédente, repose sur le pourtour osseux de l’orbite.

Ce muscle possède un tendon qui se rend de l’angle interne de l’œil à la crête lacrymale de l’apophyse montante et dont le relief, légèrement oblique de dehors en dedans et de bas en haut, se lit assez facilement au travers de la peau.

Le muscle orbiculaire s’attache en outre au bord interne de l’orbite. De là les fibres se dirigent en dehors pour décrire autour de l’œil un cercle presque complet.

Action. — La partie orbitaire supérieure abaisse le sourcil en masse en effaçant les rides frontales. Le sourcil devient rectiligne, et des plis verticaux se dessinent au-dessus de lui. C’est le muscle de l’attention.

La portion orbitaire inférieure soulève la paupière inférieure, qui se gonfle légèrement. C’est le muscle de la bienveillance.


§ 2. — Muscles du nez.


Pyramidal.


Insertions : en haut, à la peau de la racine du nez ;

En bas, à la partie inférieure de l’os du nez.

Situé près de la ligne médiane, ce muscle, de petit volume, est parfois confondu avec le faisceau le plus interne du frontal. D’après Duchenne, son action sur la physionomie est très importante.

Action. — Il tire en bas la tête du sourcil, dont la moitié interne est dirigée de haut en bas et de dehors en dedans. La peau de la partie médiane du front est lisse et tendue, et la racine du nez est coupée de plusieurs plis transversaux, Il exprime les sentiments agressifs.


Transverse du nez.


Étendu transversalement sur le plan latéral du nez, ce muscle se confond sur la ligne médiane avec celui du côté opposé par l’intermédiaire d’une lame fibreuse. En dehors, il s’attache aux téguments au-dessus et en arrière de l’aile du nez.

Action. — Il attire en haut et en avant l’aile du nez, et des plis se forment sur les parties latérales de l’organe.


Myrtiforme.


Insertions : en bas, au maxillaire inférieur ; En haut, à la peau de l’aile du nez et à la cloison des narines.

Ce muscle, profondément situé, est appliqué sur l’os maxillaire et recouvert par la muqueuse de la bouche.

Action. — Il est constricteur des narines et donne à la voix un timbre particulier (muscle nasillard).


Dilatateur des narines.


Ce petit muscle est situé dans l’épaisseur même de la narine, dont il agrandit, en se contractant, l’orifice inférieur.


§ 3. — Muscles des lèvres.


Canin.


Ce muscle de petit volume, le plus profondément situé, est directement appliqué sur le maxillaire supérieur. Il s’attache : en haut, à l’os au-dessous du trou sous-orbitaire ; en bas, ses fibres se terminent dans la lèvre supérieure.

Action. — Il élève la commissure labiale, en l’attirant un peu en dedans.


Releveur profond de l’aile du nez et de la lèvre supérieure.


Insertions : en haut, à l’os maxillaire au-dessus du trou sous-orbitaire ;

En bas, à la peau de l’aile du nez et à la peau de la lèvre supérieure.

Action. — La même que celle du muscle suivant.


Releveur superficiel de l’aile du nez et de la lèvre supérieure.


Insertions : en haut, au devant du rebord orbitaire, à la crête de la branche montante du maxillaire supérieur ;

En bas, à l’aile du nez et à la lèvre supérieure.

Action. — L’aile du nez est attirée en haut. Le sillon naso-labial allongé est plus droit. La lèvre supérieure elle-même est attirée en haut. Il concourt à l’expression du dédain.


Petit zygomatique.


Insertions : en dehors, à l’os malaire ;

En dedans, à la peau de la lèvre supérieure.

Action. — Il attire en haut et en dehors la portion moyenne de la moitié de la lèvre supérieure. Le sillon naso-labial décrit une courbe à concavité inférieure. C’est un muscle du pleurer, pendant que le muscle suivant, bien que de même nom, est le muscle du rire.


Grand zygomatique.


Insertions : en dehors, à l’apophyse zygomatique ;

En dedans, à la peau de la commissure des lèvres.

Action. — La commissure labiale est tirée en haut et en dehors. La ligne naso-labiale décrit une courbe légère. La pommette se gonfle et soulève légèrement la paupière inférieure.

C’est le muscle du rire.


Orbiculaire des lèvres.


Ce muscle occupe l’épaisseur des lèvres, disposé à la manière d’un sphincter autour de l’orifice buccal.

Les fibres les plus internes forment un cercle complet ; les autres, périphériques, se continuent avec les muscles qui rayonnent autour de la bouche.

Action. — Sous l’action des fibres centrales, les lèvres se froncent, s’appliquent l’une contre l’autre. Elles se renversent en dehors et se projettent en avant, sous l’influence de la contraction des fibres périphériques.

Il concourt à l’expression du doute et des passions agressives et méchantes.


Le buccinateur.


Insertions : ce muscle a trois insertions fixes : en haut, au maxillaire supérieur, au-dessus du rebord alvéolaire ;

En bas, au maxillaire inférieur, au-dessous du rebord alvéolaire ;

En arrière, à une bandelette aponévrotique qui va de l’aile interne de l’apophyse ptérygoïde au maxillaire inférieur.

En avant, son insertion mobile se fait vers la commissure des lèvres, en se continuant en partie avec le muscle orbiculaire.

Action. — Les deux muscles se contractent à la fois, éloignent les commissures l’une de l’autre et font subir aux lèvres une élongation transversale qui a pour effet de les rapprocher.


Carré du menton.


Insertions : en bas, à la ligue oblique externe du maxillaire inférieur ;

En haut, à la peau de la lèvre inférieure.

Action. — Il attire la moitié correspondante de la lèvre en bas et en dehors. Lorsque les deux muscles se contractent à la fois, cette lèvre est tendue et largement renversée en avant.


Triangulaire des lèvres.


Insertions : en bas, à la face antérieure du maxillaire inférieur, près de son bord inférieur ;

En haut, à la commissure labiale.

Action. — Les commissures des lèvres sont tirées en bas et en dehors. Le sillon inter-labial décrit une courbe à concavité inférieure, la lèvre inférieure est un peu attirée en avant, et la ligne naso-labiale allongée tend à devenir rectiligne.

Ce muscle concourt à l’expression de tristesse et de dégoût.


Houppe du menton.


Insertions : en haut, au maxillaire inférieur sur les côtés de la symphyse ;

En bas, à la peau du menton.

Action. — Ce muscle élève la peau du menton en la fronçant, et par suite élève également la lèvre inférieure en la renversant un peu en dehors.


Article III. — MUSCLES DE LA MACHOIRE.


Les muscles de la mâchoire sont au nombre de quatre, deux superficiels et deux profonds.

Les muscles profonds sont cachés par la branche du maxillaire inférieur, à la face interne de laquelle ils prennent insertion tous deux, pendant que de l’autre côté ils s’attachent à l’apophyse ptérygoïde ; d’où le nom de muscles ptérygoïdiens qu’on leur donne. L’un d’eux, le ptérygoïdien interne, représente pour ainsi dire un masséter profond ; comme ce dernier, que nous étudierons tout à l’heure, il élève la mâchoire.

L’autre, le ptérygoïdien externe, préside aux mouvements de la mâchoire en avant et aux mouvements de latéralité.

Les deux muscles superficiels, qui méritent une description plus détaillée, sont le masséter et le temporal.


Masséter.


Insertions : en haut, au bord inférieur de l’arcade zygomatique ;

En bas, à la partie inférieure de la branche du maxillaire inférieur.

Ce muscle quadrilatère, court et épais, occupe la partie postérieure de la face sur laquelle sa contraction se dessine très nettement dans les mouvements de la mâchoire.

Action. — Il élève la mâchoire inférieure.


Temporal. (Pl. 37, fig. 1.)


Insertions : en haut, à toute l’étendue de la fosse temporale ;

En bas, au sommet de l’apophyse coronoïde.

Disposé en éventail, ce muscle est recouvert par une très forte aponévrose qui s’attache au pourtour de la fosse temporale et à l’arcade zygomatique. Il se trouve ainsi contenu dans une véritable loge ostéo-fibreuse. Son volume assez considérable lui permettant de combler et au delà la fosse osseuse qui le loge, il fait généralement sur le reste du crâne un relief qui s’accuse encore lors de sa contraction.

Action. — Il élève la mâchoire inférieure.


CHAPITRE II

MUSCLES DU TRONC ET DU COU


Article premier. — RÉGION POSTÉRIEURE


§ 1. — Couche profonde.



Je ne ferai que signaler les petits muscles interépineux qui n’existent qu’au cou et aux lombes. Disposés par paires, ils réunissent les apophyses épineuses des vertèbres voisines.

Je citerai également les muscles intertransversaires, dont le nom indique assez la disposition, et qui ne se trouvent qu’aux mêmes régions. Au cou, ils sont disposés par paires et divisés en antérieurs et en postérieurs. Ils s’étendent des deux lèvres qui limitent la gouttière supérieure d’une apophyse transverse au bord inférieur de l’apophyse qui est immédiatement au-dessus. Ils ne se rencontrent point à la région dorsale, mais les intercostaux, dont nous parlerons tout à l’heure, peuvent être considérés comme leurs analogues, les côtes n’étant que des prolongements des apophyses transverses.


Transversaires épineux. (Pl. 38.)


Insertions : d’une part au sommet des apophyses épineuses de toutes les vertèbres (celle de l’axis y compris) ;

D’autre part, aux tubercules externes des trous sacrés, aux tubercules apophysaires de la région lombaire, aux apophyses transverses de la région dorsale, aux apophyses articulaires des cinq dernières vertèbres cervicales.

Ce muscle comble en partie les gouttières latérales dont le fond est formé par les lames vertébrales et qui sont limitées, en dedans, par la ligne des apophyses épineuses, et en dehors, par la série des apophyses transverses. Il est formé d’une succession de petits muscles obliquement dirigés.

Action. — Ces muscles sont extenseurs de la colonne vertébrale, ils l’inclinent latéralement lorsqu’ils ne se contractent que d’un seul côté.

A la partie supérieure de la colonne vertébrale, les mouvements plus étendus des deux premières vertèbres exigent une disposition musculaire un peu plus complexe. Nous trouvons alors : en arrière, le grand droit postérieur, le petit droit postérieur, le grand oblique, le petit oblique ; sur les côtés, le droit latéral ; et en avant, le grand droit antérieur, le petit droit antérieur.

Je donnerai ici une description sommaire de tous ces petits muscles, qu’il convient de rapprocher à cause de leur action commune sur la tête et de leur intérêt nul au point de vue de la forme extérieure.


Grand droit postérieur de la tête. (Pl. 38.)


Insertions : d’une part, à l’apophyse épineuse de l’axis ;

D’autre part, à la partie externe de la ligne demi-circulaire inférieure de l’occipital.

Action. — Extenseur de la tête, et rotateur de la face du même côté.


Petit droit postérieur de la tête. (Pl. 38.)


Muscle de forme triangulaire.

Insertions : d’une part, au tubercule postérieur de l’atlas ;

D’autre part, à la moitié interne de la ligne courbe occipitale inférieure et de la surface sous-jacente.

Action. — Extenseur de la tête.


Grand oblique de la tête. (Pl. 38.)


Insertions : d’une part, à l’apophyse épineuse de l’axis ;

D’autre part, à l’apophyse transverse de l’atlas.

Action. — Rotateur de la face de son côté.


Petit oblique de la tête. (Pl. 38.)


Insertions : d’une part, au sommet de l’apophyse transverse de l’atlas ;

D’autre part, à l’occipital en dehors de l’insertion du grand droit postérieur.

Action. — Il étend la tête et l’incline latéralement.


Droit latéral de la tête. (Pl. 45, fig. 2.)


Insertions : d’une part, à l’apophyse transverse de l’atlas ;

D’autre part, à la surface jugulaire de l’occipital.

Action. — Il incline la tête latéralement.


Grand droit antérieur de la tête. (Pl. 45, fig. 2.)


Insertions : d’une part, aux tubercules antérieurs des apophyses transverses des troisième, quatrième, cinquième et sixième vertèbres cervicales ;

D’autre part, à l’apophyse basilaire de l’occipital.

Action. — Il incline la tête en avant et tourne légèrement la face de son côté.


Petit droit antérieur de la tête. (Pl. 45, fig. 2.)


Insertions : d’une part, à la partie antérieure des masses de l’atlas et à la base des apophyses transverses ;

D’autre part, à la partie inférieure de l’apophyse basilaire de l’occipital.

Action. — Comme pour le grand droit antérieur.


§ 2. — Couche moyenne.


Les muscles qui composent cette couche moyenne ont une importance considérable au point de vue de la forme extérieure, et j’aurai soin, à propos de chacun d’eux, de la mettre en lumière.

Je pense même qu’il faut les placer, à ce point de vue, avant les muscles superficiels qui ne sont que des muscles plats, se bornant en bien des circonstances à se modeler sur les formes profondes.

En commençant par les plus profonds, ces muscles sont : à la nuque, les deux complexus, le splénius ; dans toute l’étendue du tronc, les muscles spinaux ; puis les petits dentelés postérieurs ; enfin, deux muscles qui se trouvent sur les limites du cou et du torse, le rhomboïde et l’angulaire de l’omoplate.


Grand complexus. (Pl. 39, fig. 1 et 2.)


Muscle allongé, profondément situé au voisinage de la ligne médiane à la partie postérieure du cou où il est le plus épais, le grand complexus descend en s’effilant jusqu’à la partie moyenne du dos.

Insertions : d’une part, à l’occipital (empreinte rugueuse située en dehors de la crête occipitale externe et entre les deux lignes courbes) ;

D’autre part, aux vertèbres cervicales, moins l’atlas (apophyses articulaires et transverses), aux vertèbres dorsales (apophyses transverses des six premières, apophyses épineuses de la première et de la deuxième).

Action. — Il étend la tête et tourne la face du côté opposé.

Le grand complexus joue un rôle important dans les formes extérieures de la nuque. Bien qu’il soit profondément situé et recouvert par les splénius et la partie supérieure du trapèze, son modelé se traduit extérieurement par deux saillies longitudinales situées de chaque côté de la ligne médiane. Chez les sujets très maigres, ces reliefs sont exagérés sous la forme de deux véritables cordes, séparées par un sillon d’autant plus profond qu’il est plus proche de l’occipital.

Chez les sujets jeunes, bien musclés, les deux saillies se fondent en une sorte de méplat toujours un peu déprimé sur la ligne médiane et marqué d’une dépression plus accentuée près de l’attache du muscle à l’occipital. Cette fossette constante, mais d’ordinaire masquée par la chevelure, répond à la protubérance occipitale externe.

Ce muscle forme le relief dont il vient d’être question par son bord postérieur épais et tendu en quelque sorte à la manière d’une corde entre le dos et l’occipital. Le sillon de la dépression médiane correspond au ligament de la nuque qui les sépare.


Petit complexus. (Pl. 39, fig. 1 et 2.)


Placé sur les côtés et en dehors du muscle précédent.

Insertions : d’une part, à l’apophyse mastoïde du temporal (bord postérieur et sommet) ;

D’autre part, aux quatre dernières vertèbres cervicales (apophyses transverses).

Action. — Il incline la tête latéralement.


Splénius. (Pl. 39, fig. 3 et 4.)


Insertions : d’une part, au ligament de la nuque, à la septième vertèbre cervicale et aux cinq premières dorsales (apophyses épineuses) ;

D’autre part, a) à l’apophyse mastoïde (moitié postérieure de la face externe) et aux deux tiers externes de la ligne courbe occipitale supérieure : — splenius capitis ;

b) Aux trois premières vertèbres cervicales (tubercules postérieurs des apophyses transverses) : — splenius cervicis.

De forme triangulaire, aplati, ce muscle se modèle sur les muscles plus profonds qui viennent d’être décrits. Il contribue avec eux à combler le vide qui existe sur le squelette entre la colonne cervicale et la face inférieure de l’occipital. Il adoucit la saillie longitudinale du complexus qu’il recouvre et maintient l’élargissement du cou en haut et en dehors.

Action. — Il étend la tête, l’incline de son côté et fait tourner la face du même côté.


Muscles spinaux. — Long dorsal et sacro-lombaire. (Pl. 40.)


Ces deux muscles naissent en bas par une masse charnue indivise, appelée masse commune.

Insertions : en bas (masse commune) :

a) A la face profonde d’une forte aponévrose qui se prolonge en haut jusque vers le milieu de la région dorsale et s’attache à l’épine iliaque postérieure et supérieure et à la partie voisine de la crête iliaque ;

b) A la face postérieure du sacrum, à la crête sacrée, aux apophyses épineuses des vertèbres lombaires et des dernières vertèbres dorsales ;

En haut et en dehors (sacro-lombaire) : à la partie externe de l’angle des douze côtes et par son faisceau de renforcement (cervical descendant) aux tubercules postérieurs des apophyses transverses des cinq dernières vertèbres cervicales ;

En haut et en dedans (long dorsal) :

a) Aux apophyses costiformes des vertèbres lombaires et aux douze côtes (en dehors de la tubérosité costale) (faisceaux externes) ;

b) Aux tubercules apophysaires des vertèbres lombaires et aux apophyses transverses des vertèbres dorsales (faisceaux moyens).

Ces faisceaux sont prolongés jusqu’au cou par un muscle distinct qui s’étend des apophyses transverses des deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième vertèbres dorsales aux apophyses transverses des cinq dernières vertèbres cervicales (transversaire du cou).

c) Des faisceaux distincts vont des apophyses épineuses lombaires aux apophyses épineuses dorsales (faisceaux internes).

Ces deux muscles, indivis en bas, ainsi que je l’ai déjà dit, se séparent, en haut, en un nombre considérable de faisceaux que les anatomistes ont groupés diversement suivant leurs insertions. Ils doivent être confondus, au point de vue de la morphologie, en une même masse comblant, à la partie postérieure du tronc, la large gouttière limitée en dedans par la crête épinière et en dehors par l’angle des côtes et la tubérosité iliaque.

Cette masse charnue, puissante dans la partie inférieure, diminue d’épaisseur au fur et à mesure qu’elle s’élève pour se prolonger jusqu’au cou par l’intermédiaire des faisceaux de renforcement. On peut la diviser en deux régions : région lombaire (ou spinaux lombaires) et région dorsale (ou spinaux dorsaux).

Cette division, que la morphologie légitime, est également consacrée par la physiologie, ainsi que l’a démontré Duchenne de Boulogne.

Spinaux lombaires. — Très épais, présentant à la coupe une section ovoïde, les spinaux lombaires comblent l’espace vide entre la cage thoracique et le bassin, en arrière du carré lombaire. Leur face superficielle est occupée, en bas et en dedans, par une large aponévrose, signalée déjà à propos des insertions. En dehors, les fibres charnues descendent plus ou moins près de l’insertion inférieure à la crête iliaque (angle rentrant), et s’attachent sur l’aponévrose en suivant une ligne courbe à convexité interne et qui se dirige de bas en haut et de dehors en dedans. Ce corps charnu forme en dehors, à la région des reins, un relief très appréciable qu’une flexion légère du tronc met bien en lumière ce relief est limité en dedans par un sillon oblique qui répond à l’insertion des fibres charnues sur l’aponévrose. Ce sillon ne doit pas être confondu avec celui qui est formé par la ligne d’insertion des fibres charnues du grand dorsal sur leur aponévrose d’insertion et qui est situé en général au-dessus et en dehors. En dedans de ce relief, on observe, dans certains mouvements du tronc, une saillie en forme de corde qui limite le sillon lombaire médian et qui est due aux fibres charnues profondes contenues par l’aponévrose superficielle.

Spinaux dorsaux. — A la région dorsale, ces muscles n’intéressent la forme extérieure que dans la moitié inférieure du dos. Ils présentent une surface arrondie limitée en dehors par le sillon latéral du dos répondant à l’angle des côtes, et visible surtout dans l’élévation du bras.

Enfin on observe parfois, au niveau de l’angle inférieur du trapèze, un relief arrondi formé par les fibres charnues du long dorsal.

Action. — Malgré la diversité de leurs insertions supérieures, les spinaux impriment à la colonne vertébrale un même mouvement oblique d’extension et d’inflexion latérale du côté correspondant à l’excitation.

Seuls les faisceaux interépineux du long dorsal produisent l’extension directe. Duchenne de Boulogne a démontré que les spinaux, dans la région lombaire, avaient une action indépendante des spinaux de la région dorsale. Les premiers imprimant à la colonne vertébrale une courbure dorso-lombaire, les seconds une courbure dorso-cervicale, ces deux courbures peuvent se produire simultanément et en sens inverse des deux côtés, donnant à toute la colonne une forme d’S qui se produit dans certaines attitudes physiologiques et dont l’exagération pathologique entraîne la déformation connue sous le nom de scoliose[9].

La fonction principale des muscles spinaux réside dans l’extension du torse qu’ils produisent avec force. — Dans la station debout, ils sont d’ordinaire inactifs, ainsi que le modelé de la région le démontre clairement. (Voy. plus loin, dans la partie morphologique : région lombaire.)

Dès que l’équilibre est rompu par une légère inclinaison du tronc en avant, on les voit se contracter avec vigueur.

Immédiatement appliqués sur les muscles spinaux, on trouve les deux muscles suivants :


Petits dentelés postérieurs. (Pl. 41.)


Petit dentelé postérieur et supérieur.

Insertions : en dedans, au ligament de la nuque, aux apophyses épineuses de la septième vertèbre cervicale et des trois premières dorsales ;

En dehors, par quatre languettes charnues à la face externe des deuxième, troisième, quatrième et cinquième côtes en dehors de l’angle des côtes.

Petit dentelé postérieur et inférieur.

Insertions : en dedans, aux apophyses épineuses des deux dernières vertèbres dorsales et des trois premières lombaires (cette insertion se fait au moyen d’une large aponévrose confondue avec celle du grand dorsal) ;

En dehors, au bord inférieur des quatre dernières côtes.

Ces deux muscles sont reliés par une aponévrose intermédiaire qu’ils tendent et qui complète la gaine de contention pour les muscles spinaux. Le petit dentelé inférieur peut influencer la forme extérieure, lorsque, dans certains mouvements où le dos s’arrondit, la partie inférieure et postérieure de la cage thoracique se découvre. Il laisse paraître ses digitations au travers du grand dorsal relâché.

Enfin, les deux muscles qui restent à décrire appartiennent à l’épaule, puisqu’ils s’attachent par une de leurs extrémités à l’omoplate ; mais, par leur situation, ils contribuent au modelé du cou et du dos.


Rhomboïde. (Pl. 42.)


Insertions : en dedans, à la partie inférieure du ligament de la nuque, aux apophyses épineuses de la septième vertèbre cervicale et des cinq premières vertèbres dorsales ;

En dehors, au bord spinal de l’omoplate.

Action. — Il rapproche l’omoplate de la ligne médiane, en même temps qu’il l’élève et lui imprime un mouvement de rotation pour lequel il a le grand dentelé comme antagoniste.

Ce muscle aplati, de forme losangique, est recouvert par le trapèze au-dessous duquel il forme un relief très appréciable, de chaque côté de la raie du dos, en dedans de l’omoplate. Son corps charnu augmente d’épaisseur de bas en haut.


Angulaire de l’omoplate. (Pl. 42.)


Insertion : d’une part, aux quatre premières vertèbres cervicales (tubercule postérieur des apophyses transverses) ;

D’autre pary, à l’angle interne de l’omoplate et au bord spinal au-dessus de l’épine.

Action. — Il élève le moignon de l’épaule.

Ce muscle, auquel l’omoplate se trouve pour ainsi dire suspendu par son angle interne, contribue à l’élargissement du cou en bas et en arrière.


§ 3. — Couche superficielle.


Deux muscles larges, étendus sur tous ceux que nous venons de décrire, complètent la myologie de la partie postérieure du cou et du tronc. C’est le grand dorsal dans la moitié inférieure et dans la moitié supérieure, le trapèze.


Grand dorsal. (Pl. 43.)


Insertions : d’une part, (au tronc), aux apophyses épineuses des six dernières vertèbres dorsales et de toutes les vertèbres lombaires, à la crête sacrée, à la tubérosité iliaque, au tiers postérieur de la crête iliaque, à la face externe des trois dernières côtes ;

D’autre part (au membre supérieur), au fond de la coulisse bicipitale de l’humérus.

Muscle large, d’inégale épaisseur, c’est au voisinage de son insertion supérieure que le grand dorsal est le plus épais, il forme là, à l’endroit où il se contourne en spirale pour embrasser le grand rond, un corps charnu fort distinct dans les mouvements du bras. Son bord antérieur se dessine en saillie verticale sur les côtés du tronc, où ses insertions costales forment chez les sujets très musclés des digitations qui font suite à celles du grand dentelé. Son bord supérieur dirigé presque horizontalement, recouvert en dedans par la pointe du trapèze, recouvre l’angle inférieur de l’omoplate qu’il applique contre la cage thoracique et, dans certains mouvements, se dessine très nettement sous la peau dans presque toute son étendue.

La ligne d’implantation des fibres charnues sur l’aponévrose inférieure est marquée par un relief souligné d’un sillon qui se dirige, en suivant une courbe irrégulière à convexité interne, de bas en haut et de dehors en dedans, de l’insertion inférieure à la crête iliaque, à l’insertion supérieure aux vertèbres dorsales. Ce sillon est situé généralement en haut et en dehors du sillon analogue formé par l’implantation des fibres charnues des spinaux sur leur aponévrose. (Voy. p. 87.) Mais sa situation est en somme fort variable, puisqu’il dépend de la longueur des fibres charnues qui, suivant les individus, descendent plus ou moins bas. Il se confond quelquefois avec le sillon des muscles spinaux auquel il est alors superposé, ou bien il est situé beaucoup plus haut. Le sillon spinal étant lui-même susceptible de quelques variations, ainsi que nous l’avons dit, on comprend que les dispositions individuelles qui en résultent peuvent être fort nombreuses. Gerdy avait fait du sillon du grand dorsal la limite supérieure de la région des reins. J’ai cru qu’il était préférable de reporter cette limite au sillon des muscles spinaux à cause de sa constance plus grande et de sa situation généralement plus inférieure. (Voyez plus loin, partie morphologique, région des reins.)

Le corps charnu du muscle, d’épaisseur moyenne, plus mince en dedans qu’en dehors, se modèle sur le relief du grand dentelé limité en bas par un sillon oblique plus ou moins profond, et laisse paraître d’une façon très distincte, dans l’élévation du bras, le relief des spinaux et la cage thoracique avec les saillies costales.

Action. — Par leur tiers supérieur les muscles grands dorsaux, lorsqu’ils agissent simultanément, rapprochent les omoplates, effacent les épaules et produisent énergiquement l’extension du tronc.

Par leurs deux tiers inférieurs, ils abaissent puissamment les épaules.


Trapèze.


Insertions : en dedans, aux apophyses épineuses des dix premières vertèbres dorsales et de la septième cervicale, au ligament de la nuque, à l’occipital (tiers interne de la ligne courbe supérieure) ;

En dehors, à la clavicule (tiers externe du bord supérieur), à l’omoplate (bord supérieur de l’acromion et épine).

La plupart de ces insertions se font par des fibres aponévrotiques assez courtes, mais ces fibres, plus longues en trois endroits, forment de petites aponévroses qui méritent d’être signalées :

1° Au pourtour de la saillie de la proéminente, une aponévrose ovalaire formée par la réunion des deux muscles de chaque côté de la ligne médiane ;

2° Une aponévrose triangulaire qui termine par en bas la pointe du trapèze ;

3° Au niveau des insertions de l’épine de l’omoplate, une seconde aponévrose triangulaire.

Ces trois aponévroses influencent la forme extérieure : la première produit le méplat médian, qui se trouve à la limite du cou et de la région spinale et au milieu duquel se voit la saillie de la proéminente ; la deuxième tronque le sommet inférieur du trapèze ; enfin la troisième est la cause de la dépression qui s’observe à la naissance de l’épine de l’omoplate près du bord spinal. Suivant les individus, ces aponévroses varient d’étendue ; il en résulte de grandes modifications dans les formes dont elles sont la cause.

Muscle plat et triangulaire, le trapèze est d’une épaisseur très inégale. Mince en haut, mince en bas, il devient très épais à sa partie médiane qui comprend tout l’angle externe dont l’insertion se fait à la clavicule et à l’acromion.

Cette partie épaisse du muscle repose sur le sus-épiueux et l’angulaire de l’omoplate. Elle forme la ligne sinueuse de l’élargissement inférieur et postérieur du cou chez les sujets fortement musclés.

En haut, le muscle se moule exactement sur la couche profonde, le bord antérieur seul se distingue parfois nettement depuis l’occipital jusqu’à la clavicule. En bas, le trapèze est soulevé par le relief puissant du rhomboïde, puis appliqué sur les spinaux et le grand dorsal, et la forme triangulaire de son extrémité inférieure se lit généralement assez bien sous la peau.

Action. — Par son faisceau occipital il étend la tête, l’incline de son côté et tourne la face du côté opposé. Quand les deux trapèzes agissent simultanément, la tête est étendue directement.

Par sa partie moyenne, il élève le moignon de l’épaule. Par son tiers inférieur, il abaisse le moignon de l’épaule et rapproche l’omoplate de la ligne médiane.


Article II. — RÉGION CERVICALE ANTÉRO-LATÉRALE.


§ 1. — Couche profonde.


Long du cou. (Pl. 45, fig. 1.)


Ce muscle, directement appliqué sur la colonne cervico-dorsale, comprend trois ordres de faisceaux :

1° Faisceaux supérieurs qui vont du tubercule antérieur de l’atlas aux tubercules antérieurs des apophyses transverses des troisième, quatrième et cinquième vertèbres cervicales ;

2° Faisceaux inférieurs qui vont des tubercules antérieurs des apophyses transverses des cinquième et sixième vertèbres cervicales au corps des trois premières vertèbres dorsales ;

3° Faisceaux internes qui se rendent des corps des deuxième et troisième vertèbres cervicales aux corps des quatre dernières vertèbres cervicales et des trois premières dorsales.

Action. — Il incline la colonne vertébrale en avant, et fait tourner sa face antérieure de son côté par ses fibres supérieures et du côté opposé par ses fibres inférieures.

Ce muscle est sans action sur les formes extérieures.


Scalène antérieur. (Pl. 45, fig. 3 et 4.)


Insertions : d’une part, aux troisième, quatrième, cinquième et sixième vertèbres cervicales (tubercule antérieur des apophyses transverses) ;

D’autre part, à la première côte (tubercule de la face supérieure).

Action. — Il élève la première côte (inspirateur) ou incline latéralement la colonne vertébrale.


Scalène postérieur. (Pl. 45, fig. 3 et 4.)


Insertions : d’une part, aux apophyses transverses des dernières vertèbres cervicales (tubercules postérieurs) ;

D’autre part, à la première côte (face supérieure) et à la deuxième côte (bord supérieur).

Action. — Semblable à celle du scalène antérieur.

Étendus sur les parties latérales du cou, de la colonne cervicale à la cage thoracique, les scalènes contribuent à l’élargissement latéral du cou à sa partie inférieure et sont superficiels sur un point de leur étendue, dans le triangle sus-claviculaire, en même temps que le splénius situé au-dessus d’eux et que l’omoplat-hyoïdien placé au-dessous. (Voy. pl. 47, fig. 2.)


§ 2. — Couche moyenne.


A la partie antérieure du cou se trouvent des organes dépendant des grands appareils de la respiration et de la digestion, et que je dois signaler ici, parce qu’ils soutiennent les muscles de la région et leur prêtent de nombreux points d’insertion.

L’œsophage occupe la partie médiane et profonde contre la colonne vertébrale. En avant de lui, se trouve la trachée-artère terminée en haut par le larynx, que surmonte l’os hyoïde. Une glande d’un volume variable, plus accusé chez la femme, recouvre les parties supérieures et latérales du tube aérien, c’est le corps thyroïde. (Pl. 46, fig. 1.)

L’os hyoïde est situé sur les confins de la région sons-mentonnière, qui morphologiquement appartient à la tête, et anatomiquement doit être rattachée au cou sous la dénomination de région sus-hyoïdienne.

Les muscles de la région antérieure du cou ont été divisés par les anatomistes, d’après leur situation relativement à l’os hyoïde, en deux régions : région sus-hyoïdienne et région sous-hyoïdienne.


A. Région sus-hyoïdienne.


La région sus-hyoïdienne forme le plancher de la bouche. Elle est composée de muscles disposés en divers sens et qui relient l’os hyoïde au maxillaire inférieur, à l’apophyse mastoïde et à l’apophyse styloïde de la base du crâne.

Ces muscles n’ont, au point de vue de la forme extérieure, qu’une importance secondaire ; je me contenterai d’indiquer leurs insertions. Ce sont, en allant de la profondeur à la surface, les muscles suivants :


Genio-hyoïdien.


Insertion : en avant, aux apophyses geni inférieures ;

En arrière, au corps de l’os hyoïde (partie supérieure).


Mylo-hyoïdien. (Pl. 47, fig. 2.)


Insertion : et dehors, à la ligne mylo-hyoïdienne du maxillaire inférieur ;

En dedans, au raphé médian et au corps de l’os hyoïde.


Stylo-hyoïdien. (Pl. 47, fig. 2.)


Insertions : en haut, à l’apophyse styloïde ;

En bas, au corps de l’os hyoïde.


Digastrique. (Pl. 46, fig. 2, et pl. 47, fig. 2.)


Insertions : en arrière, à l’apophyse mastoïde (rainure digastrique) ;

En avant, au maxillaire inférieur (fossette digastrique).

Le tendon médian est rattaché à l’os hyoïde par une expansion aponévrotique.


B. Région sous-hyoïdienne.


Ces muscles, au nombre de quatre, forment deux couches : la couche profonde composée du sterno-thyroïdien et du thyro-hyoïdien, et la couche superficielle qui comprend le sterno-hyoïdien et l’omoplat-hyoïdien.


Sterno-thyroïdien. (Pl. 46 et pl. 47.)


Insertions : d’une part, à la face postérieure du sternum ;

D’autre part, à la ligne oblique du cartilage thyroïde.

Action. — Il abaisse le cartilage thyroïde.


Thyro-hyoïdien. (Pl. 46 et pl. 47.)


Insertions : d’une part, à la ligne oblique du cartilage thyroïde ;

D’autre part, à l’os hyoïde (bord inférieur du corps et des grandes cornes).

Action. — Il abaisse l’os hyoïde ou élève le cartilage thyroïde.


Sterno-hyoïdien. (Pl. 46, fig. 2, et pl. 47.)


Insertions : d’une part, au sternum (face postérieure) et à la tête de la clavicule (partie postérieure) ;

D’autre part, au corps de l’os hyoïde (bord inférieur).

Action. — Il abaisse l’os hyoïde.


Omoplat-hyoïdien. (Pl. 46, fig. 2, et pl. 47.)


Insertions : en haut, au corps de l’os hyoïde (bord inférieur) ;

En bas, au bord supérieur de l’omoplate.

Action. — Il abaisse l’os hyoïde. Il est tenseur d’une aponévrose qui réunit les deux muscles d’un côté à l’autre.

Les deux muscles qui se rendent au sternum, le sterno-hyoïdien et le sterno-thyroïdien, sont aplatis, de forme rubanée, et soulevés, au-dessous et sur les côtés du larynx, par la glande thyroïde.

L’omoplat-hyoïdien traverse le triangle sus-claviculaire où, dans certains mouvements du cou, il forme une corde très appréciable.


§ 3. — Couche superficielle.


Sterno-cléido-mastoïdien. (Pl. 47.)


Insertions : d’une part, à l’apophyse mastoïde (face externe), à la ligne courbe occipitale supérieure (deux tiers externes) ;

D’autre part, au sternum (faisceau sternal), à la clavicule (tiers interne de la face supérieure) (faisceau claviculaire).

Aplati et quadrilatère, ce muscle, sous-cutané dans toute son étendue, descend sur la région latérale du cou en se contournant sur lui-même et en se rapprochant en bas de la ligne médiane.

Simple en haut, il se divise inférieurement en deux faisceaux : l’un interne ou sternal est arrondi et terminé par un tendon qui s’insère sur les côtés de la fourchette sternale, l’autre externe ou claviculaire est aplati.

Ces deux faisceaux s’écartent en bas l’un de l’autre et circonscrivent un espace triangulaire.

Le bord antérieur du muscle est plus épais que le bord postérieur ce qui est du en partie à un faisceau profond qui part en haut de l’apophyse mastoïde pour descendre, en croisant obliquement la direction des fibres superficielles, s’insérer en bas, en arrière de l’attache du faisceau claviculaire.

Action. — Le sterno-cléido-mastoïdien incline la tête de son côté et fait tourner la face du côté opposé ; l’action bilatérale produit l’extension de la tête.


Peaussier. (Pl. 53.)


Ce muscle large et mince se confond par son insertion supérieure avec les muscles du menton et de la lèvre inférieure. De là ses fibres se portent en bas et en dehors, recouvrent toute la partie latérale et antérieure du cou pour s’attacher en bas à l’aponévrose du grand pectoral et du deltoïde.

Son bord interne, rectiligne, forme avec celui du côté opposé un triangle allongé à base inférieure. Son bord externe irrégulier recouvre le bord antérieur du trapèze.

Il se moule exactement sur les parties qu’il recouvre, dont il ne modifie en aucune façon les contours, lorsqu’il est dans le relâchement. Quand il se contracte, il tend les téguments plissés transversalement, il amène un élargissement marqué du cou et entraîne par en bas la lèvre inférieure. Il concourt à l’expression de la terreur et de l’effroi.


Article III. — MUSCLES DE LA POITRINE.


§ 1. — Muscles profonds.


Intercostaux. (Pl. 38.)


Ces muscles complètent la cage thoracique en remplissant les espaces intercostaux. Ils s’étendent d’une côte à l’autre, formant une double couche dont les fibres ont une direction différente.

Les intercostaux externes s’attachent en haut à la lèvre externe de la gouttière du bord inférieur costal, et en bas au bord supérieur de la côte qui est au-dessous.

Ils occupent tout l’espace intercostal en arrière et sur les côtés. Ils s’arrêtent en avant au voisinage des cartilages costaux.

La direction de leurs fibres est oblique de haut en bas, d’arrière en avant. À la partie postérieure du thorax, les sur-costaux s’attachent en haut à l’apophyse transverse de la vertèbre et en bas au bord supérieur et à la face externe de la côte qui est au-dessous. Leur direction est semblable à celle des intercostaux externes.

Les intercostaux internes s’étendent du bord interne de la gouttière inférieure costale au bord supérieur et à la face interne de la côte qui est au-dessous.

Ils occupent tout l’espace intercostal en avant et sur les côtés. En arrière, ils s’arrêtent au niveau de l’angle des côtes.

Leurs fibres présentent une obliquité en sens inverse de celle des intercostaux externes.

Les sous-costaux s’insèrent à la face interne des côtes et s’étendent entre deux côtes voisines et quelquefois entre des côtes séparées par une ou deux autres.

Les intercostaux jouent un rôle important dans les fonctions de la respiration.


§ 2. — Région antérieure.


Sous-clavier. (Pl. 48, fig. 2.)


Petit muscle caché sous la clavicule.

Insertions : en dedans, au cartilage de la première côte ;

En dehors, à la clavicule (face inférieure).

Action. — Il maintient l’extrémité interne de la clavicule appliquée contre le sternum.


Petit pectoral. (Pl. 48, fig. 2.)


Insertions : en haut, à l’apophyse coracoïde (bord antérieur) ;

En bas, à la face externe des troisième, quatrième et cinquième côtes.

De forme triangulaire, ce muscle se divise inférieurement en trois languettes. Il soutient en dehors le plan du grand pectoral qui le recouvre complètement dans la position ordinaire du bras. Dans l’élévation verticale du membre, le bord externe du petit pectoral se découvre dans sa partie inférieure et, sans former un relief distinct, prend part au modelé de la région.

Action. — Ce muscle abaisse le moignon de l’épaule.


Grand pectoral. (Pl. 48, fig. 1.)


Insertions : en dedans, à la clavicule (deux tiers internes du bord antérieur), au sternum (face antérieure), aux cartilages des six premières côtes, à la quatrième et à la cinquième côte (face externe), à l’aponévrose abdominale ;

En dehors, à l’humérus (bord antérieur de la coulisse bicipitale).

Ce muscle est formé de faisceaux convergents vers l’insertion humérale. Les supérieurs sont dirigés de haut en bas, les moyens transversalement, les inférieurs de bas en haut. Mais ces divers faisceaux se croisent avant d’atteindre l’humérus, les faisceaux supérieurs passent en avant des inférieurs. Le faisceau le plus élevé vient de la clavicule, il est de beaucoup le plus épais, et ses fibres charnues se rendent à la face antérieure et au bord inférieur d’une aponévrose d’insertion distincte supérieurement de l’aponévrose, à laquelle se rendent les fibres des faisceaux postérieurs et inférieurs. Cette dernière aponévrose règne dans le corps du muscle.

Cet entre-croisement des faisceaux charnus a pour résultat de doubler en dehors l’épaisseur du muscle au point où il quitte le thorax pour former la paroi antérieure de l’aisselle.

Les fibres charnues augmentent de longueur de haut en bas, et le faisceau le plus inférieur qui descend jusqu’à l’aponévrose abdominale a de beaucoup les fibres les plus longues.

Le grand pectoral joue un grand rôle au point de vue de la forme extérieure de la poitrine. Il est sous-cutané ; son tendon et une petite portion triangulaire du faisceau claviculaire sont seuls recouverts par le deltoïde. Appliqué de chaque côté de la ligne médiane sur la partie antérieure et supérieure du thorax, ce muscle puissant élargit la poitrine, mais n’efface point pour cela la forme bombée de la cage osseuse.

Dans son ensemble, le plan des pectoraux est donc plus ou moins convexe, et il ne regarde pas directement en avant, mais en même temps en dehors et en haut.

Lorsque le muscle pectoral est très développé, les divers faisceaux musculaires, convergeant vers l’angle externe, sont séparés par des sillons obliques parfaitement appréciables au travers de la peau. Le plus constant de ces sillons est celui qui limite par en bas le faisceau claviculaire. Au point de vue de la forme extérieure, le faisceau abdominal sert à atténuer la transition du plan des pectoraux à la surface convexe de la région sous-mammaire.

Si, au contraire, le muscle est pauvre, les saillies costales peuvent être senties au travers de lui, et à la partie interne on voit deux séries de nodosités correspondant, les unes aux articulations des cartilages costaux avec le sternum, et les autres, plus en dehors, aux articulations des côtes avec les mêmes cartilages.

Action. — Au point de vue de l’action qu’il produit, le grand pectoral doit être divisé en deux portions : portion supérieure, comprenant la partie du muscle qui s’attache à la clavicule et à la première pièce sternale, et portion inférieure, comprenant le reste du muscle.

La portion inférieure abaisse les bras et tire en bas le moignon de l’épaule, si le bras est abaissé.

La portion supérieure agit différemment suivant la position du bras. Si le bras est tombant le long du corps, elle élève le moignon de l’épaule (action de porter un fardeau sur les épaules, expression de la crainte, de l’humiliation). Si le bras est placé horizontalement, elle lui fait décrire une courbe en le portant en avant et en dedans (mouvement de la natation). Enfin elle abaisse le bras levé verticalement, en le rapprochant de la ligne médiane (action de frapper du sabre ou d’un bâton).

§ 3. — Région latérale.


Grand dentelé. (Pl. 48, fig. 3 et 4, et pl. 49, fig. 2.)


Insertions : en avant, aux huit premières côtes (face externe) ;

En arrière, au bord spinal de l’omoplate.

Ce muscle très large est situé sur les parties latérales du thorax contre lequel il est directement appliqué dans toute son étendue. La face profonde de l’omoplate repose sur sa partie la plus postérieure. Son insertion aux côtes se fait par huit à neuf digitations suivant une ligne courbe dentée à convexité antérieure. Ces digitations se groupent en plusieurs faisceaux dont le plus important, faisceau radié, s’attache à l’extrémité inférieure du bord spinal de l’omoplate.

Le grand dentelé n’est sous-cutané que dans sa partie la plus antérieure et la plus inférieure. Les quatre dernières digitations apparaissent très nettement sous la peau en avant du bord antérieur du grand dorsal et en arrière des insertions costales du grand oblique. (Voy. pl. 55.)

Bien que profond, le reste du muscle n’en joue pas moins un rôle important dans les formes extérieures, et le faisceau radié fait un relief très apparent au travers du grand dorsal qui le recouvre.

Action. — Le grand dentelé, de concert avec le rhomboïde qui semble le continuer jusqu’à la crête vertébrale, maintient le bord spinal de l’omoplate contre le thorax. Il produit l’élévation en masse de l’épaule. Et par le mouvement de rotation qu’il fait subir à l’omoplate, il concourt à l’élévation du bras.


Article IV. — MUSCLES DE L’ÉPAULE.


Les muscles de l’épaule peuvent être ainsi subdivisés :

1° Muscles qui entourent l’omoplate : sous-scapulaire, sus-épineux, sous-épineux, petit rond, grand rond ;

2° Muscle superficiel : deltoïde.


§ 1. — Muscles qui entourent l’omoplate.


Sous-scapulaire. (Pl. 49, fig. 1 et 2.)


Insertions : d’une part, à l’omoplate (fosse sous-scapulaire) ;

D’autre part, à la petite tubérosité de l’humérus.

Ce muscle comble la fosse sous-scapulaire de l’omoplate. Il est rotateur de l’humérus en dedans.


Sus-épineux. (Pl. 49, fig. 3.)


Insertions : d’une part, à l’omoplate (fosse sus-épineuse) ;

D’autre part, à la grosse tubérosité de l’humérus (facette supérieure).

Recouvert par le trapèze, ce muscle, suivant son degré de développement, remplit plus ou moins la fosse sus-épineuse de l’omoplate, et par suite agit sur la forme extérieure.

Action. — Il est élévateur de l’humérus.


Sous-épineux. (Pl. 49, fig. 3.)


Insertions : d’une part, à l’omoplate (fosse sous-épineuse) ;

D’autre part, à la grosse tubérosité de l’humérus (facette moyenne).

Ce muscle est superficiel dans la plus grande partie de son étendue. Maintenu par une forte aponévrose, il forme au centre de la région scapulaire un relief surbaissé.

Action. — Il est rotateur en dehors de l’humérus.


Petit rond. (Pl. 49, fig. 3.)


Insertions : d’une part, à la fosse sous-épineuse de l’omoplate, près du bord axillaire ;

D’autre part, à la grosse tubérosité de l’humérus (facette inférieure).

Muscle de petit volume, de forme allongée, il se confond au point de vue de la forme extérieure avec le muscle précédent.

Action. — Il est rotateur en dehors de l’humérus.


Grand rond. (Pl. 49, fig. 1 et 2.)


Insertions : d’une part, à la fosse sous-épineuse de l’omoplate (partie inférieure et externe) ;

D’autre part, à l’humérus (lèvre postérieure de la coulisse bicipitale).

Ce muscle joue un rôle morphologique important. Il forme avec le grand dorsal la paroi postérieure de l’aisselle. Lorsque le bras tombe naturellement le long du corps, il est la cause de ce relief arrondi qui s’observe chez les sujets un peu musclés en dehors de l’angle inférieur du scapulum.


§ 2. — Muscle superficiel.


Deltoïde. (Pl. 49, fig. 4 et 5, pl. 55.)


insertions : en haut, à la clavicule (tiers externe du bord antérieur), à l’omoplate (bord externe de l’acromion et bord inférieur de l’épine) ;

En bas, à l’humérus (empreinte deltoïdienne).

Le deltoïde est entièrement sous-cutané, il constitue la saillie de l’épaule, recouvrant l’articulation scapulo-humérale de trois côtés : en avant, en arrière et en dehors.

Il est formé de trois faisceaux principaux divisant à peu près le muscle par tiers. Le tiers moyen ou faisceau acromial est composé de nombreux faisceaux secondaires qui sont obliques en divers sens. Il naît de l’acromion par des fibres aponévrotiques très courtes et se trouve parcouru au voisinage de son insertion inférieure par plusieurs cloisons verticales aponévrotiques sur lesquelles se rendent les fibres charnues. Il forme en bas la pointe du muscle, les deux autres faisceaux, l’antérieur et le postérieur, s’enfonçant au-dessous de lui à leur extrémité inférieure. Le faisceau antérieur naît de la clavicule par des fibres aponévrotiques très courtes auxquelles succèdent des fibres charnues toutes dirigées parallèlement. Le faisceau postérieur naît de l’épine de l’omoplate par une aponévrose triangulaire. Il est constitué par des fibres longitudinales décrivant un léger mouvement de spire en s’engageant inférieurement sous le faisceau moyen.

Le deltoïde détaché de ses points d’insertion est un muscle plat et qui affecte la forme triangulaire du Δ qui lui a donné son nom. Il est plus épais au centre qu’à ses extrémités.

Mis en place, son relief n’est pas uniforme. Il est beaucoup plus accusé en avant à cause de la saillie plus considérable de la tête humérale à ce niveau. En arrière, au contraire, la surface deltoïdienne est aplatie. Le bord supérieur suit les saillies osseuses. Le bord antérieur est rendu très évident par une dépression linéaire qui le sépare du grand pectoral. Le bord postérieur est beaucoup moins net. Il est en quelque sorte interrompu vers son milieu par une aponévrose qui remonte de l’aisselle et, le bridant en ce point, occasionne un méplat.

Son insertion inférieure se traduit en dehors par une dépression qui occupe environ le milieu de la face externe du bras.

Action. — Le deltoïde est élévateur de l’humérus, et, suivant le siège de la contraction, il élève le bras en avant, en arrière, ou directement en dehors.

Sous son action isolée le bras ne saurait dépasser l’horizontale. L’élévation verticale du bras s’obtient par le concours d’autres muscles (grand dentelé et trapèze).


Article V. — MUSCLES DE L’ABDOMEN.


§ 1. — Muscles profonds.


Je décrirai sommairement le muscle carré des lombes qui, profondément situé dans l’abdomen, fait partie de sa paroi postérieure, puis le diaphragme qui ferme par en haut la cavité abdominale et la sépare de la cavité thoracique.


Carré des lombes. (Pl. 38 et pl. 52, fig. 1.)


Insertions : d’une part, au bord inférieur de la dernière côte et au sommet des apophyses transverses des quatre premières vertèbres lombaires ;

D’autre part, au ligament iléo-lombaire et à la partie voisine de la crête iliaque.

Action. — Il incline latéralement la colonne vertébrale et le tronc.


Diaphragme.


Ce muscle membraneux, disposé à la façon d’une voûte, est étendu transversalement à l’intérieur de la base du thorax.

La convexité de la voûte regarde du côté du thorax. Les fibres musculaires n’en occupent que le pourtour, tandis que toute la partie culminante, qui a reçu le nom de centre phrénique ou trèfle aponévrotique, est formée de faisceaux aponévrotiques entre-croisés.

De ce centre s’écartent en divergeant les fibres musculaires qui, par l’autre extrémité, se fixent au pourtour de l’ouverture inférieure du thorax. En avant, elles sont très courtes et s’attachent à la face postérieure du sternum au niveau de l’appendice xiphoïde. Sur les côtés, elles descendent jusqu’à la face postérieure des cartilages costaux des six dernières côtes. En arrière, elles se prolongent jusqu’à la région lombaire de la colonne vertébrale (deuxième, troisième et quatrième vertèbre).

Profondément caché au centre de l’organisme, ce muscle joue un rôle physiologique fort important dans l’acte de la respiration, mais sur lequel nous n’avons pas à nous étendre ici.


§ 2. — Région antérieure.


Grand droit de l’abdomen. (Pl. 51, fig. 2.)


Insertions : en bas, au pubis ;

En haut : a) à l’appendice xiphoïde ;

b) Aux cartilages de la septième, de la sixième et de la cinquième côte.

Le muscle grand droit confond ses insertions supérieures avec celles du grand pectoral.

Situés de chaque côté de la ligne médiane, les deux muscles grands droits, légèrement écartés à la partie supérieure, se rapprochent complètement au-dessous de l’ombilic. Ils sont donc séparés par un sillon faisant suite au creux épigastrique, plus large supérieurement, et descendant jusqu’à l’ombilic au-dessous duquel il disparaît. Le bord externe du muscle grand droit, limité par un second sillon, fait saillie sur l’aponévrose du grand oblique.

Le muscle est divisé transversalement par des intersections aponévrotiques qui circonscrivent des quadrilatères charnus dont la saillie est très appréciable. Ces intersections sont en général au nombre de trois, la plus basse est située au niveau de l’ombilic. Il existe quelquefois dans la région sons-ombilicale l’indice d’un quatrième sillon transversal.

L’intersection aponévrotique la plus élevée se continue avec le sillon qui borde sur les côtés la saillie des fausses côtes, de telle sorte que l’extrémité supérieure du muscle comble l’angle formé par l’échancrure antérieure du thorax et transforme pour ainsi dire son aspect ogival en plein cintre. Sur le nu, la saillie qui, sur les côtés, est formée par le rebord des fausses côtes, au lieu de se prolonger comme sur le squelette jusqu’au creux épigastrique, se continue en haut et en dedans avec le relief formé par l’extrémité supérieure du muscle grand droit qui paraît, à ce niveau, bien plus appartenir à la poitrine qu’à l’abdomen.

Cette forme cintrée a été bien comprise et parfois même exagérée par les antiques.

Action. — Ce muscle est fléchisseur du tronc.


Pyramidal de l’abdomen. (Pl. 51, fig. 2.)


Petit muscle triangulaire, situé à l’extrémité inférieure du muscle grand droit et étendu du pubis à la ligne blanche.


§ 3. — Région latérale.


Sur les côtés, la paroi de l’abdomen est formée par la superposition de trois muscles. Les deux plus profonds, le transverse et le petit oblique, s’étendent exactement du rebord costal au bassin, tandis que le plus superficiel, le grand oblique, remonte beaucoup plus haut, recouvrant une certaine étendue de la cage thoracique.

Nous étudierons ces trois muscles successivement, en allant de la profondeur vers la périphérie.


Transverse de l’abdomen. (Pl. 50, fig. 1.)


Insertions : d’une part, aux six dernières côtes (face interne), à l’aponévrose abdominale postérieure, à la crête iliaque (trois quarts antérieurs de la lèvre interne) ;

D’autre part, à l’aponévrose abdominale antérieure.

Le corps charnu est mince et les fibres dirigées transversalement.

Action. — Il étreint à la manière d’une ceinture la cavité abdominale qu’il rétrécit.


Petit oblique de l’abdomen. (Pl. 50, fig. 2, et pl. 51, fig. 2.)


Insertions : d’une part, à l’aponévrose abdominale postérieure, aux trois quarts antérieurs de la crête iliaque, au tiers externe de l’arcade crurale ;

D’autre part, aux trois dernières côtes, à l’aponévrose abdominale antérieure.

Plus large en avant qu’en arrière, ce muscle possède des fibres qui partent de la crête iliaque en rayonnant dans trois directions les supérieures obliquement en haut et en avant, les moyennes transversalement, les inférieures obliquement en bas et en avant.

Action. — Si les deux muscles agissent à la fois, ils sont fléchisseurs du tronc. Quand un seul muscle se contracte, il fait tourner la face antérieure du tronc de son côté et est antagoniste du grand oblique.


Grand oblique de l’abdomen. (Pl. 51.)


Insertions : d’une part, à la face externe des huit dernières côtes ;

D’autre part, à la crête iliaque (moitié antérieure de la lèvre externe), à l’arcade crurale, à l’aponévrose abdominale antérieure.

L’insertion supérieure se fait par des digitations qui forment par leur réunion une ligne dentelée oblique en bas, en arrière et en dehors, et qui s’entre-croisent avec les digitations du grand dentelé et du grand dorsal. De là, les fibres se portent obliquement en bas, en avant et en dedans, en croisant perpendiculairement la direction des fibres supérieures du petit oblique. Ce muscle, d’une épaisseur qui ne dépasse guère un centimètre appliqué sur les côtes supérieurement, est doublé, dans sa partie qui répond à l’abdomen, des deux muscles précédents, le petit oblique et le transverse.

On peut lui distinguer deux portions, l’une supérieure ou thoracique, l’autre inférieure ou abdominale.

Toute la portion thoracique se modèle sur le squelette qu’elle recouvre et dont les formes variées peuvent apparaître à l’extérieur (saillies costales, enfoncements intercostaux, saillies du rebord, articulations des cartilages costaux, etc.), plus ou moins altérées suivant le développement du muscle et le relief variable de ses digitations.

La partie abdominale répond au flanc.

Elle forme un relief caractéristique qui se confond en arrière avec le bourrelet graisseux spécial à la région et que je signalerai plus loin. (Voy. chap. : Peau et tissu adipeux.) Il est bordé en bas par le sillon du flanc dont la direction ne se confond point avec la crête iliaque, ainsi que nous le verrons également plus loin. En avant, les fibres charnues s’arrêtent à peu de distance du muscle droit suivant une ligne descendante, qui s’en écarte inférieurement, pour se recourber brusquement en dehors, un peu au-dessus de l’épine iliaque antérieure et supérieure, de telle façon que le sillon, qui sépare en haut le grand oblique du grand droit, se termine en bas par une surface triangulaire dont la base est au pli de l’aine. Mais cette surface est en même temps légèrement : convexe, et elle contribue à la courbe uniforme de la région hypogastrique.

Action. — Les deux muscles, agissant ensemble, fléchissent le tronc. L’action isolée d’un seul muscle fait tourner le tronc dont la face antérieure est dirigée du côté opposé.


Article VI. — MUSCLES DU BASSIN.


Je diviserai les muscles du bassin en :

a) Muscles profonds : psoas iliaque, pyramidal, jumeau supérieur, jumeau inférieur, obturateur interne, obturateur externe, carré crural ;

b) Muscles fessiers : petit fessier, moyen fessier, grand fessier.


§ 1. — Muscles profonds.


Psoas iliaque. (Pl. 52, fig. 1.)


Insertions : en haut, sur la partie latérale des corps vertébraux dans toute la région lombaire, aux apophyses transverses des vertèbres lombaires (psoas), à la fosse iliaque interne (muscle iliaque) ;

En bas, au petit trochanter du fémur.

Ce muscle est situé à l’intérieur du bassin. Il tapisse la fosse iliaque par sa partie externe ou iliaque et se prolonge sur les côtés de la colonne lombaire par sa portion interne (muscle psoas). Se dirigeant toutes vers un même tendon inférieur, les fibres charnues se réunissent en un corps fusiforme qui se réfléchit sur le bord antérieur de l’os iliaque avant d’atteindre le petit trochanter. Il répond en cet endroit à un méplat qui se trouve au-dessous du pli de l’aine dans sa moitié externe.

Action. — Ce muscle est fléchisseur de la cuisse sur le bassin et en même temps rotateur de la cuisse en dehors. Si le fémur est fixé, le bassin se fléchit, et le tronc se tourne la face antérieure dirigée du côté opposé.


Pyramidal. (Pl. 52, fig. 4.)


Ce muscle et les suivants profondément situés à la face postérieure du bassin ne sauraient en rien intéresser les formes extérieures. Je me contenterai d’indiquer leurs insertions et leur action.

Insertions : en dedans, à la face antérieure du sacrum, à la partie supérieure de l’échancrule sciatique ;

En dehors, au bord supérieur du grand trochanter, en arrière du petit fessier, au-dessus de l’obturateur interne.

Action. — Il est abducteur et rotateur de la cuisse en dehors.


Obturateur interne et jumeaux. (Pl. 52, fig. 4.)


Insertions : en dedans, à la face interne de l’os iliaque, au pourtour du trou obturateur, à la face interne de la membrane obturatrice (obturateur interne), à l’épine sciatique (jumeau supérieur), à la partie supérieure de l’ischion (jumeau inférieur) ;

En dehors, au bord supérieur du grand trochanter au-dessous du pyramidal.

Action. — Ces muscles sont rotateurs en dehors de la cuisse.


Carré crural. (Pl. 52, fig. 4.)


Insertions : en dedans, au bord externe de l’ischion, en avant du demi-membraneux ;

En dehors, à une crête située entre le grand et le petit trochanter.

Action. — Il est rotateur en dehors de la cuisse.


Obturateur externe. (Pl. 63, fig. 2.)


Insertions : en dedans, à la face externe de l’os iliaque (pourtour du trou obturateur), à l’aponévrose obturatrice ;

En dehors, au fémur (cavité digitale).

Action. — Il est rotateur de la cuisse en dehors.


§ 2. — Muscles fessiers.


Petit fessier. (Pl. 52, fig. 3.)


Insertions : en haut, à la fosse iliaque externe au-dessous de la ligne demi-circulaire antérieure ;

En bas, au grand trochanter (bord antérieur et partie antérieure du bord supérieur).

Toutes les fibres charnues disposées en éventail convergent vers le tendon inférieur. Ce muscle est entièrement recouvert par le moyen fessier.

Action. — Il est abducteur de la cuisse et rotateur en dedans par ses fibres antérieures, en dehors par ses fibres postérieures.


Moyen fessier. (Pl. 52, fig. 2, 4 et 5.)


Insertions : en haut, à la fosse iliaque externe entre les deux lignes courbes, aux trois quarts antérieurs de la lèvre externe de la crête iliaque, à l’épine iliaque antérieure et supérieure par une bandelette commune avec le tenseur du fascia lata ;

En bas, à la face externe du grand trochanter suivant une ligne oblique en bas et en avant.

Ce muscle rayonné et en forme d’éventail comme le précédent est recouvert dans sa partie postérieure seulement par le grand fessier. Il est maintenu par une aponévrose solide qui s’attache en haut à la crête iliaque et se confond en bas avec le tendon du grand fessier et l’aponévrose fémorale. Le rôle morphologique de cette aponévrose est très important, ainsi que nous le verrons plus loin. (Voy. partie morphologique, région de la fesse.)

Action. — Elle est différente suivant la portion du muscle qui entre en jeu. La portion moyenne est abductrice de la cuisse, la portion antérieure est rotatrice en dedans, et la portion postérieure rotatrice en dehors.

Le moyen et le petit fessier, par leur action abductrice, sont seuls destinés à fixer le bassin sur la cuisse, lorsque le tronc reposant sur l’un des membres inférieurs, soit pendant la station debout, soit pendant le second temps de la marche, tend par son poids à faire incliner le bassin du côté opposé.


Grand fessier. (Pl. 52, fig. 2 et 5.)


Insertions : en haut, à la partie la plus postérieure de la fosse iliaque externe, à la tubérosité iliaque, à la partie externe du sacrum et aux bords du coccyx, à la partie postérieure du grand ligament sacro-sciatique ;

En bas, à la bifurcation externe de la ligne âpre, depuis le grand trochanter jusqu’au tiers moyen du fémur, à l’aponévrose fémorale.

Le grand fessier est un muscle épais, d’égale épaisseur à peu près dans toute son étendue, à gros faisceaux distincts et affectant dans son ensemble la forme d’un quadrilatère irrégulier. Les fibres dirigées obliquement de haut en bas et de dedans en dehors prennent naissance à son insertion supérieure par de très courtes fibres tendineuses ; inférieurement, au contraire, elles se rendent à une large aponévrose qui règne d’abord sur leurs deux faces, puis se divise en plusieurs tendons distincts qui constituent l’insertion à la ligne âpre. Ces tendons passent en arrière du grand trochanter, dont ils sont séparés par une bourse séreuse facilitant le glissement. Nous verrons en effet que, dans la flexion de la cuisse sur le bassin, ce tendon vient se placer en dehors du grand trochanter qui se trouve alors recouvert par la partie la plus externe du grand fessier.

Les fibres charnues du bord supérieur sont plus courtes de beaucoup que les fibres inférieures ; par contre, les fibres aponévrotiques d’insertion diminuent de longueur de haut en bas. Un faisceau assez puissant, isolable souvent, limite le bord inférieur du muscle et s’insère au moins partiellement sur l’aponévrose fémorale.

En outre de cette insertion directe des fibres charnues sur l’aponévrose fémorale, le tendon tout entier contracte des adhérences très intimes avec cette même aponévrose, qui remonte en haut jusqu’à la crête iliaque et se confond en avant avec le fascia lata.

Entièrement sous-cutané, le grand fessier recouvre l’ischion et les muscles de la couche profonde, il concourt à former la saillie de la fesse, à laquelle contribue également le tissu graisseux souvent accumulé en grande abondance dans cette région.

Son bord inférieur, oblique en bas et en dehors, n’est pour rien dans la production du pli fessier dont la direction est horizontale ; nous le démontrerons plus loin.

Action. — Il étend puissamment la cuisse sur le bassin. Si le fémur devient fixe, il est extenseur du bassin sur la cuisse.

Il a peu d’action dans la station debout et dans la marche horizontale. Il n’intervient que dans les exercices qui demandent un effort : saut, course, action de monter, de se relever une fois assis, etc.


CHAPITRE III

MUSCLES DU MEMBRE SUPÉRIEUR.


Les muscles de l’épaule ayant été étudiés avec le tronc, nous n’avons pas à y revenir ici. Nous étudierons donc successivement les muscles du bras, de l’avant-bras et de la main.


Article premier. — MUSCLES DU BRAS.


En avant de l’humérus, les muscles qui composent la masse charnue du bras sont au nombre de trois, disposés en deux couches : la couche profonde comprend le coraco-huméral et le brachial antérieur ; la couche superficielle est réduite au seul muscle biceps.

Toute la partie postérieure du bras est occupée par un seul muscle, mais par un muscle puissant, le triceps brachial composé de trois corps charnus distincts.


Coraco-huméral. (Pl. 56, fig. 1.)


Insertions : en haut, au sommet de l’apophyse coracoïde avec la courte portion du biceps ;

En bas, à la face interne de l’humérus, au niveau de son tiers moyen.

Ce muscle profondément situé et de petit volume n’intéresse pas les formes extérieures, du moins lorsque le bras retombe le loup du tronc. Dans l’élévation verticale du bras, il forme au fond de l’aisselle une saillie distincte.

Action. — Il concourt à l’élévation du bras et le porte en même temps en avant et en dedans.


Brachial antérieur. (Pl. 56, fig. 2.)


Insertions : supérieurement, aux deux faces et au bord antérieur de l’humérus ;

Inférieurement, à l’apophyse coronoïde de du cubitus.

Ce muscle, appliqué directement sur le squelette au devant de l’articulation du coude, soulève la partie inférieure du biceps qu’il déborde de chaque côté.

Action. — Il fléchit l’avant-bras sur le bras.


Biceps brachial. (Pl. 56, fig. 2.)


Muscle allongé divisé supérieurement en deux portions : la longue portion et la courte portion.

Insertions : supérieurement, au rebord supérieur de la cavité glénoïde de l’omoplate (par la longue portion) et au sommet de l’apophyse coracoïde (par la courte portion) ;

Inférieurement, à la moitié postérieure de la tubérosité bicipitale du radius.

L’agencement des fibres charnues de ce muscle est des plus simples. Nées supérieurement de l’intérieur d’un cône creux tendineux (pour la longue portion) et de la face profonde d’une aponévrose d’insertion (pour la courte portion), elles se rendent inférieurement aux deux faces d’une aponévrose centrale dont les fibres se rassemblent pour constituer un tendon fort résistant.

Étendu du squelette de l’épaule à celui de l’avant-bras, le biceps occupe presque à lui seul la face antérieure du bras où il est sous-cutané dans les deux tiers inférieurs environ de son étendue. Le tiers supérieur, en effet, est masqué par le deltoïde et par le grand pectoral à son insertion humérale. C’est au-dessous de ce dernier muscle que le corps charnu du biceps apparaît, au moment on viennent de se fusionner les deux portions qui le composent supérieurement. Chez quelques sujets, on peut saisir, dans certains mouvements du bras, la marque de cette scission à la partie supérieure du relief bicipital. Sa situation permet d’apprécier facilement les changements de forme qu’il subit suivant les degrés divers de la contraction. On peut noter d’une façon générale que les fibres charnues descendent un peu plus bas en dedans qu’en dehors inférieurement son tendon est visible sous la peau, jusqu’au point où il s’enfonce entre le brachial antérieur et le long supinateur pour gagner la tubérosité bicipitale, c’est-à-dire peu au-dessous du pli de la saignée. Il est d’autant plus visible que le muscle est en action et son relief varie avec le degré de flexion du membre. On reconnaît parfaitement, au travers de la peau, l’expansion aponévrotique qui se dirige vers le bord interne de l’avant-bras. (Pl. 59.)

La longueur du corps charnu est fort variable suivant les individus, elle se fait aux dépens du tendon inférieur qui diminue en proportion, de telle façon que le modelé du membre est fort différent suivant que le biceps se rattache au type des muscles courts ou à celui des muscles longs. Dans le premier cas, la partie antérieure du bras, même dans le relâchement musculaire, prend l’aspect globuleux, les méplats du brachial antérieur augmentent d’étendue. Dans le second, au contraire, le bras prend une forme plus allongée, plus pleine ; le relief du biceps descend presque jusqu’à la saignée, donnant à la région plus d’uniformité et plus d’harmonie.

Action. — Le biceps brachial est fléchisseur de l’avant-bras sur le bras en même temps qu’il est supinateur de l’avant-bras. Par le tendon de sa longue portion, il maintient la tête de l’humérus appliquée contre la cavité glénoïde.


Triceps brachial. (Pl. 56, fig. 3 et 4.)


Ce muscle volumineux se divise supérieurement en trois chefs.

Insertions : supérieurement, au bord axillaire de l’omoplate au-dessous de la cavité glénoïde (partie moyenne ou longue portion), à l’humérus au-dessus de la gouttière radiale (partie externe ou vaste externe), à l’humérus au-dessous de la gouttière radiale (partie interne ou vaste interne) ;

Inférieurement, à la partie supérieure et postérieure de l’olécrane.

Nées des insertions supérieures multiples, les fibres charnues se groupent en trois corps charnus dont la disposition un peu complexe peut être ainsi résumée. Les fibres charnues de la longue portion et celles du vaste externe occupent la partie supérieure de la région et donnent naissance au large tendon qui forme l’insertion olécranienne. Les fibres charnues du vaste interne descendent plus bas que les précédentes, elles s’attachent au bord interne du tendon commun et à toute sa face profonde, le matelassant pour ainsi dire, et apparaissant même à son bord externe, au-dessous des fibres du vaste externe, où elles se confondent avec les fibres les plus supérieures de l’anconé. Le tendon commun offre une partie interne qui s’attache au sommet de l’olécrane et une partie externe qui se prolonge en bas jusqu’au bord postérieur du cubitus, recouvrant l’anconé et se continuant avec l’aponévrose antibrachiale.

Ce muscle occupe à lui seul toute la région postérieure du bras où il est sous-cutané, à l’exception de sa partie la plus supérieure qui disparaît sous le deltoïde. On distingue facilement sous la peau le méplat dû au large tendon commun qui le termine par en bas. Ce méplat remonte jusqu’à la partie moyenne du bras, et il est dirigé obliquement de bas en haut et de dedans en dehors. Il est soutenu par les fibres musculaires profondes du vaste interne. Le relief des fibres charnues du vaste externe le limite en haut et en dehors. En dedans, il est bordé par le relief beaucoup plus volumineux de la longue portion et du vaste interne réunis. Il est vrai que la part la plus considérable de ce relief revient à la longue portion, et que le vaste interne, d’ordinaire séparé du précédent par un sillon, n’en occupe que la partie la plus inférieure.

Le méplat du tendon et les saillies musculaires qui le bordent n’apparaissent avec toute leur netteté que lors de la contraction du muscle. On distingue alors facilement les corps charnus des trois portions. Chaque portion même est parfois divisée en reliefs secondaires parallèles à la direction des fibres musculaires et dus à des faisceaux distincts.

Action. — Duchenne de Boulogne a bien mis en lumière l’action de la longue portion désignée également sous le nom de grand anconé. Elle abaisse faiblement le bras et se contracte cependant très fortement lorsque ce mouvement d’abaissement du bras est fait avec effort. Elle a alors pour but, sans nuire à l’abaissement opéré surtout par le grand dorsal et le grand pectoral, de lutter contre la tendance qu’ont ces muscles de luxer l’humérus par en bas. Le grand anconé, dans la position de repos du membre, élève l’humérus et maintient fortement cet os appliqué contre la cavité glénoïde. Le coraco-huméral remplit une fonction analogue.

Le vaste interne et le vaste externe produisent l’extension de l’avant-bras sur le bras.


Article II. — MUSCLES DE L’AVANT-BRAS.


Les muscles de l’avant-bras se subdivisent en deux régions : la région antéro-externe et la région postérieure.


§ 1. — Région antéro-externe.


La région antéro-externe comprend trois couches :

Une couche profonde : le court supinateur et le carré pronateur ;

Une couche moyenne : les fléchisseurs ;

Et une couche superficielle qui se divise elle-même en région antérieure comprenant : le rond pronateur, le grand palmaire, le petit palmaire et le cubital antérieur ; et en région externe comprenant : le long supinateur, le premier radial externe et le deuxième radial externe.


A. Couche profonde.


Court supinateur. (Pl. 57, fig. 1.)


Muscle profond enroulé au tiers supérieur du radius.

Insertions : supérieurement, à l’épicondyle, au ligament latéral externe du coude, au ligament annulaire et au cubitus au-dessous de la petite cavité sigmoïde ;

Inférieurement, au tiers supérieur du radius, au-dessus de la ligne oblique de la face antérieure.

Ce muscle concourt à la saillie supérieure du bord externe de l’avant-bras.

Action. — Il est supinateur, conjointement avec le biceps.


Carré pronateur. (Pl. 57, fig. 1.)


Muscle profond, épais, quadrilatère, étendu transversalement entre les deux os de l’avant-bras dans leur quart inférieur.

Insertions : en dedans, au quart inférieur de la face antérieure et au bord interne du cubitus ;

En dehors, au quart inférieur du bord externe et de la face antérieure du radius. Il concourt à l’épaisseur du quart inférieur de l’avant-bras, en un point où les muscles plus superficiels qui passent au devant de lui sont presque exclusivement réduits à leur portion tendineuse.

Action. — Il est pronateur.


B. Couche moyenne.


Fléchisseur profond des doigts et fléchisseur propre du pouce. (Pl. 57, fig. 2.)


Ces deux muscles accolés l’un à l’autre tapissent toute la partie antérieure et interne du squelette de l’avant-bras.

Insertions : supérieurement, aux deux tiers supérieurs de la face interne et de la face antérieure du cubitus et au ligament interosseux (fléchisseur profond des doigts), aux trois quarts supérieurs de la face antérieure du radius et au ligament interosseux (fléchisseur propre du pouce) ;·

Inférieurement, aux dernières phalanges des doigts troisième phalange des quatre derniers doigts (fléchisseur profond des doigts), deuxième phalange du pouce (fléchisseur propre du pouce).

Ces muscles concourent à la saillie médiane et antérieure de l’avant-bras. Le fléchisseur profond des doigts comble en outre l’excavation produite sur le squelette par l’inflexion latérale de la moitié supérieure du cubitus.

Action. — Ces muscles sont fléchisseurs des doigts et plus particulièrement des dernières phalanges où ils s’insèrent.


Fléchisseur superficiel des doigts. (Pl. 57, fig. 3.)


Superposé aux précédents, ce muscle n’existe qu’à la face antérieure, pendant que le muscle fléchisseur profond s’étend jusqu’à la face interne de l’avant-bras.

Insertions : en haut, à l’épitrochlée (tendon commun), à la partie interne de l’apophyse coronoïde du cubitus, à la ligne oblique de la face antérieure du radius ;

En bas, à la phalangine (sur les parties latérales de la face antérieure).

Les muscles fléchisseurs des doigts donnent naissance intérieurement chacun à quatre tendons destinés aux quatre doigts de la main. Tous ces tendons passent en faisceau dans la gouttière du carpe. Chaque doigt reçoit donc deux tendons fléchisseurs. Ces deux tendons superposés dans leur parcours se comportent en bas d’une façon spéciale. Le tendon superficiel se divise en deux parties qui contournent le profond pour s’attacher aux côtés de la phalangine. Le tendon profond continue sa course et descend jusqu’à la phalangette.

Les muscles fléchisseurs des doigts forment une masse charnue assez volumineuse occupant toute la partie antérieure et le bord interne de l’avant-bras. Les fibres charnues descendent assez bas sur les tendons, beaucoup plus bas que les muscles de la couche superficielle que nous allons étudier.

Le relief qu’ils forment lorsqu’ils entrent en action occupe la partie interne et médiane de l’avant-bras.


C. Couche superficielle.


Couche superficielle antérieure.


Tous les muscles de la couche superficielle antérieure ont une insertion supérieure commune[10] à l’épitrochlée. Ils sont au nombre de quatre le rond pronateur, le grand palmaire, le petit palmaire et le cubital antérieur.


Rond pronateur. (Pl. 57, fig. 1.)


Insertions : en haut, à l’épitrochlée et un peu au bord interne de l’humérus, à la partie interne de l’apophyse coronoïde du cubitus ;

En bas, à l’empreinte située vers le milieu de la face externe du radius.

Les fibres charnues se rendent à un tendon qui apparaît sur la face antérieure du muscle et qui inférieurement s’enroule autour du radius avant de s’y attacher.

Dans sa moitié inférieure environ, ce muscle est recouvert par les muscles de la région externe. Sa moitié supérieure forme sur le modèle un relief distinct en dedans du pli du coude.

Action. — Il est surtout pronateur. Il concourt également à la flexion de l’avant-bras sur le bras.


Grand palmaire. (Pl. 57, fig. 4.)


Insertions : en haut, à l’épitrochlée (tendon commun) ;

En bas, à la base du deuxième métacarpien.

Le corps charnu, descendant un peu obliquement en bas et en dehors, donne naissance, vers le milieu de l’avant-bras, à un tendon aplati, fort visible sous la peau, jusqu’au poignet, au niveau duquel ce tendon s’enfonce dans une gaine spéciale pour atteindre son point d’insertion au deuxième métacarpien.

Action. — Fléchisseur de la main dont il entraîne le bord externe en avant.


Petit palmaire. (Pl. 57, fig. 4.)


Ce petit muscle manque environ une fois sur huit. Il naît, en haut, du tendon commun des muscles épitrochléens, et son tendon inférieur long et grêle s’épanouit dans l’aponévrose palmaire, en passant au-dessus du ligament annulaire du carpe.

Son tendon, très saillant sous la peau, occupe au niveau du poignet le milieu de la face antérieure. Il est plus oblique que le tendon du grand palmaire qui se trouve plus en dehors.

Action. — Il est tenseur de l’aponévrose palmaire et fléchisseur direct de la main sur l’avant-bras.


Cubital antérieur. (Pl. 57, fig. 4.)


Insertions : en haut, à l’épitrocblée, à l’olécrane, à la crête du cubitus par l’intermédiaire de l’aponévrose antibrachiale (pl. 60) ;

En bas, au pisiforme et au cinquième métacarpien.

Situé au bord interne de l’avant-bras, ce muscle recouvre les fléchisseurs profonds. Son bord antérieur, sur lequel apparaît le tendon puissant qui forme son attache inférieure, est séparé du palmaire grêle par un espace triangulaire fort allongé à base inférieure et qui laisse paraître le fléchisseur superficiel. (Pl. 59.)

Action. — Il est fléchisseur de la main dont il entraîne en avant le bord interne.


Couche superficielle externe.


Cette couche comprend trois muscles : le long supinateur et les deux radiaux.


Long supinateur. (Pl. 58, fig. 3, et pl. 61.)


Insertions : en haut, au bord externe de l’humérus (tiers inférieur) ;

En bas, à la base de l’apophyse styloïde du radius.

Muscle long, dont les fibres subissent un mouvement de torsion d’un quart de cercle environ, mince supérieurement à l’endroit où ses fibres contournent le brachial antérieur, il est plus épais en bas à la face antérieure de l’avant-bras, où son bord interne s’avance jusqu’au grand palmaire qu’il recouvre dans une petite étendue. (Pl. 59.)

Il est aplati en deux sens différents. En haut, dans sa portion qui répond au bras, il est aplati latéralement ; dans sa partie inférieure située à l’avant-bras, il est aplati d’avant en arrière.

Action. — Il est fléchisseur de l’avant-bras sur le bras et en même temps demi-pronateur.


Radial externe. (Pl. 58, fig. 2, et pl. 61.)


Insertions : en haut, à la partie inférieure du bord externe de l’humérus, au-dessous du précédent ;

En bas, à la partie postérieure de la base du deuxième métacarpien.

Le corps charnu, bien plus court que celui du muscle précédent, s’en rapproche par sa forme. Il est, comme lui, aplati en haut latéralement et en bas dans le sens antéro-postérieur. Les deux muscles superposés subissent le même mouvement de torsion. En haut, par exemple, ils se touchent par leurs bords, en bas par leurs faces. Le premier radial est recouvert par le long supinateur et recouvre lui-même le deuxième radial. Il n’apparaît sur l’écorché que par une surface triangulaire à sommet inférieur entre le long supinateur et le premier radial externe. (Pl. 61.)

Son relief, toujours distinct de celui du deuxième radial, se confond avec celui du long supinateur. Ce n’est que dans certains mouvements de flexion avec effort que les deux corps charnus se distinguent sous la peau. (Pl. 104, fig. 1.)

Action. — Il est extenseur abducteur de la main sur l’avant-bras.


Deuxième radial externe. (Pl. 58, fig. 1, et pl. 61.)


Insertions : en haut, à l’épicondyle (tendon commun avec les muscles superficiels de la face postérieure de l’avant-bras) ;

En bas, à l’apophyse styloïde du troisième métacarpien.

Le corps charnu épais est recouvert, dans sa moitié antérieure, par les muscles précédents, et sa partie postérieure superficielle forme, sur le bord externe de l’avant-bras, un relief allongé fort distinct. Il donne naissance à un seul tendon qui descend, avec celui du premier radial, jusqu’à la main, en passant sous les muscles de la face postérieure qui se rendent au pouce.

Action. — Il est extenseur direct de la main sur l’avant-bras.


§ 2. — Muscles de la région postérieure.


Ces muscles sont disposés en deux couches composées chacune de quatre muscles :

L’une profonde qui comprend l’extenseur propre de l’index et les trois muscles du pouce long abducteur, court extenseur et long extenseur ;

L’autre superficielle qui comprend : l’anconé, le cubital postérieur, l’extenseur propre du petit doigt et l’extenseur commun des doigts.


A. Couche profonde.


Tous les muscles de cette couche sont dirigés obliquement de haut en bas et de dedans en dehors. Ils n’intéressent directement les formes extérieures que par leurs extrémités inférieures.


Long abducteur du pouce. (Pl. 58, fig. 1.)


Insertions : en haut, aux faces postérieures du cubitus et du radius ;

En bas, à l’extrémité supérieure du premier métacarpien.

Action. — Il attire le métacarpien obliquement en dehors et en avant.


Court extenseur du pouce. (Pl. 58, fig. 1.)


Insertions : en haut, au radius ;

En bas, à l’extrémité supérieure de la première phalange du pouce.

Ce muscle et le précédent sont accolés l’un à l’autre dans tout leur parcours ; ils croisent obliquement les tendons des radiaux ; leurs corps charnus descendent jusqu’au voisinage du poignet et forment à la partie inférieure du bord externe de l’avant-bras un relief oblique très distinct.

Action. — Il étend la phalange du pouce et produit l’abduction directe du métacarpien.


Long extenseur du pouce. (Pl. 58, fig. 1.)


Insertions : en haut, au cubitus ;

En bas, à la deuxième phalange du pouce.

Son tendon, distant de ceux des muscles précédents, passe dans une gouttière oblique du radius et croise les tendons des radiaux.

Il borde en dedans une dépression (tabatière anatomique) limitée en dehors par les tendons réunis des muscles court extenseur et long abducteur du pouce.

Action. — Il étend les deux phalanges du pouce et renverse en arrière le métacarpien.


Extenseur propre de l’index. (Pl. 58, fig. 1.)


Ce muscle situé plus bas que le précédent prend insertion en haut au cubitus, et son tendon se confond intérieurement avec le tendon de l’extenseur commun.

Il n’intéresse en rien les formes extérieures.


B. Couche superficielle. (Pl. 58, fig. 2.)


Extenseur commun des doigts.


Insertions : en haut, à l’épicondyle (tendon commun) ;

En bas, à la base de la deuxième et de la troisième phalange des doigts.

Le corps charnu est divisé en plusieurs faisceaux, auxquels succèdent quatre tendons qui passent sous le ligament annulaire du carpe et se dirigent vers les quatre doigts correspondants en s’envoyant des languettes obliques quelquefois visibles à travers la peau. Accolé aux muscles radiaux, il forme en arrière d’eux un relief qui traverse un peu obliquement en bas et en dedans la face postérieure de l’avant-bras.

Fort distinct dans la moitié supérieure lorsque le muscle est contracté, il n’est plus appréciable dans le quart inférieur de l’avant-bras, mais ses tendons, chez les sujets maigres, sont toujours parfaitement visibles au dos de la main.

Action. — Extenseur des phalanges.


Extenseur propre du petit doigt. (Pl. 58, fig. 2.)


Ce muscle grêle confond son insertion supérieure avec celle des muscles épicondyliens ; inférieurement son tendon se réunit à celui de l’extenseur commun.

Son relief se confond avec celui du muscle précédent.


Cubital postérieur. (Pl. 58, fig. 2.)


Insertions : en haut, à l’épicondyle (tendon commun) et à la crête du cubitus (par l’aponévrose antibrachiale) ;

En bas, à la tête du cinquième métacarpien.

Il forme sur le nu un relief allongé fort distinct, bordé en dedans par le sillon oblique qui répond à la crête du cubitus. Son tendon inférieur passe dans une gouttière de la tête du cubitus dont il augmente la saillie.

Action. — Il est extenseur abducteur de la main sur l’avant-bras.


Anconé. (Pl. 58, fig. 2.)


Insertions : d’une part, à l’épicondyle par un tendon distinct ;

D’autre part, à la partie externe de l’olécrane et à la face postérieure du cubitus (partie la plus supérieure).

Ce muscle très court, d’aspect triangulaire, forme un relief parfaitement appréciable sous la peau.


Article III. — MUSCLES DE LA MAIN.


Ces muscles peuvent être divisés en trois régions :

1) Région moyenne ou creux de la main ;

2) Région externe ou éminence thénar ;

3) Région interne ou éminence hypothénar.


§ 1. — Région moyenne.


Interosseux dorsaux et palmaires. (Pl. 58, fig. 4 et 5.)


Petits muscles situés dans les espaces intermétacarpiens, au nombre de deux par espace, les interosseux sont divisés en dorsaux et palmaires.

Leur insertion supérieure se tait sur les parties latérales des métacarpiens ; inférieurement, ils s’attachent sur les côtés de l’extrémité supérieure des premières phalanges. Les interosseux dorsaux ont un double corps charnu qui se confond en bas en un seul tendon, mais s’attache en haut aux deux métacarpiens qui limitent l’espace interosseux où ils sont logés. Ce sont eux qu’on voit sur la face dorsale du métacarpe. Il convient de signaler tout particulièrement le premier interosseux dorsal qui forme la saillie oblongue visible sur le dos de la main en dehors du deuxième métacarpien. Les interosseux palmaires n’ont qu’un seul corps charnu qui s’insère à la face latérale des métacarpiens tournée vers l’axe de la main. Il faut faire exception pour l’interosseux palmaire du premier espace qui, à cause de ses différences d’insertion, mérite une description spéciale, et n’est autre que le court adducteur du pouce dont nous parlerons plus loin. Tous les interosseux palmaires sont situés à la face palmaire du métacarpe, sur laquelle on voit également à côté d’eux une portion des interosseux dorsaux. Le schéma ci-joint fera facilement comprendre les différents détails anatomiques que je viens de signaler.


FIGURE SCHÉMATIQUE DESTINÉE A MONTRER LES INSERTIONS DES MUSCLES INTEROSSEUX. LES LIGNES POINTILLÉES REPRÉSENTENT LES INTEROSSEUX PALMAIRES, ET LES LIGNES CONTINUES LES INTEROSSEUX DORSAUX.

Il résume également l’action de ces petits muscles qui, suivant leur position par rapport à l’axe de la main passant par le troisième métacarpien et le doigt médius, sont adducteurs ou abducteurs des doigts. Les abducteurs qui éloignent les doigts de l’axe médian sont les interosseux dorsaux. Les adducteurs qui les en rapprochent au contraire sont les interosseux palmaires.


Lombricaux. (Pl. 57, fig. 2.)


Les lombricaux sont de petits muscles situés dans la région du creux de la main, accolés au côté externe des tendons du fléchisseur profond des doigts. Ils s’attachent supérieurement aux tendons de ce muscle, pendant qu’en bas ils s’insèrent à la partie supérieure, latérale et externe des phalanges.

Leur rôle, au point de vue de la forme extérieure, est nul. Ils remplissent le creux de la main avec les tendons des muscles fléchisseurs, et la forte aponévrose palmaire, qui occupe toute la région, ne permet pas aux organes qu’elle recouvre de dessiner leur forme extérieurement.


§ 2. — Muscle de l’éminence thénar.


Au point de vue de la forme extérieure, nous pouvons diviser ces muscles en deux groupes : l’un externe qui forme la saillie de la racine du pouce, l’autre interne, plus profond, qui soutient la partie inférieure et surbaissée de l’éminence thénar.

Le premier groupe comprend trois muscles : le court abducteur du pouce, le court fléchisseur et l’opposant ;

Le second groupe, un seul muscle, le court adducteur.


Court adducteur du pouce. (Pl. 58, fig. 4.)


Insertions : en dedans, au grand os, à la partie antérieure du troisième métacarpien (dans toute sa longueur), à la partie supérieure du deuxième métacarpien ;

En dehors, à la tubérosité interne de l’extrémité supérieure de la première phalange du pouce (os sésamoïde interne).

Ce muscle triangulaire, profondément situé, est recouvert par les tendons des muscles fléchisseurs accompagnés des lombricaux. Il ne devient superficiel que par son extrémité externe, où il forme la partie inférieure et surbaissée de l’éminence thénar.

Action. — Il est adducteur du premier métacarpien.


Opposant. (Pl. 58, fig. 4.)


Insertions : en haut, à la partie antérieure du trapèze, au ligament du carpe ;

En bas, au bord externe et à la face antérieure du premier métacarpien.

Action. — Profondément situé, ce petit muscle, de forme triangulaire, est fléchisseur et adducteur du premier métacarpien.


Court fléchisseur du pouce. (Pl. 59.)


Insertions : en haut, au trapèze, au ligament annulaire du carpe ;

En bas, à l’extrémité supérieure de la première phalange du pouce.

Ce muscle épais, situé à la partie interne de l’éminence, se subdivise en deux faisceaux entre lesquels passe le tendon du long fléchisseur du pouce.

Action. — Il fléchit la première phalange du pouce et porte le métacarpien en avant et en dedans.


Court abducteur du pouce. (Pl. 59.)


Insertions : supérieurement, à l’apophyse du scaphoïde et au trapèze, au ligament annulaire du carpe ;

Inférieurement, à l’extrémité supérieure et externe de la première phalange.

Ce muscle aplati est le plus superficiel et le plus externe de la région.

Action. — Il n’est pas abducteur. Il fléchit la première phalange et porte le métacarpe en avant et en dedans.


§ 3. — Muscle de l’éminence hypothénar. (Pl. 59.)


Les muscles de l’éminence hypothénar ne méritent pas de description spéciale. Ils sont en quelque sorte les analogues de ceux de l’éminence thénar et portent les mêmes noms. Ce sont, en commençant par la profondeur, l’opposant du petit doigt, le court fléchisseur et l’abducteur.

Ils occupent le bord interne de la main et contribuent aux divers mouvements du petit doigt et du cinquième métacarpien. Ces mouvements sont beaucoup plus limités que ceux du pouce ; aussi les muscles de l’éminence bypothénar ont-ils un volume moindre que ceux de l’éminence thénar.

Je signalerai cependant le muscle le plus superficiel de la région, le palmaire cutané qui s’attache, en dehors, au bord interne de l’aponévrose palmaire et, en dedans, à la face profonde de la peau du bord interne de la main. Quand il se contracte, il occasionne en cet endroit une dépression longitudinale parcourue de plis cutanés et fort caractéristique.


CHAPITRE IV

MUSCLES DU MEMBRE INFÉRIEUR


Nous étudierons successivement les muscles de la cuisse, de la jambe et du pied.


Article premier. — MUSCLES DE LA CUISSE.


Trois groupes musculaires distincts se partagent la cuisse :

Un groupe antéro-externe qui comprend le quadriceps (triceps crural des auteurs), le tenseur du fascia lata et le couturier ;

Un groupe interne composé des adducteurs et du droit interne ;

Un groupe postérieur formé du biceps, du demi-membraneux et du demi-tendineux.


§ 1. — Groupe antéro-externe.


Quadriceps crural (triceps crural des auteurs) (Pl. 63, fig. 1.)


Les anciens auteurs décrivaient quatre muscles distincts le droit antérieur, le vaste interne, le vaste externe et le crural, au lieu et place du triceps des auteurs modernes composé du droit antérieur, du vaste interne avec lequel est confondu le crural, et du vaste externe. Mon ami Paul Poirier a démontré récemment que la fusion du vaste interne et du crural était une erreur, que le muscle triceps était manifestement composé de quatre chefs aisément séparables, et que la dénomination de quadriceps, en accord avec les descriptions des anciens anatomistes, devrait lui être attribuée.

J’accepte d’autant plus volontiers cette manière de voir qu’elle est confirmée par l’étude de la forme extérieure. En effet, les quatre portions du muscle forment des reliefs parfaitement distincts. Aux saillies généralement connues du droit antérieur, du vaste interne et du vaste externe, vient s’ajouter, à la partie externe du genou, celle du crural que l’on passe généralement sous silence.

Je décrirai donc le quadriceps, muscle composé de quatre chefs le droit antérieur, le vaste externe, le vaste interne et le crural, réunis inférieurement en un seul tendon.

Insertions : supérieurement, pour le droit antérieur à l’épine iliaque antérieure et inférieure (tendon direct) et rebord de la cavité cotyloïde (tendon réfléchi) ;

Pour le vaste externe, à la base du grand trochanter et à la lèvre externe de la ligne âpre ;

Pour le vaste interne, à la lèvre interne de la ligne âpre ;

Pour le crural, à la face antérieure et externe du fémur, à la cloison intermusculaire externe ;

Inférieurement, à la base, aux deux bords et à la face antérieure de la rotule, puis, par l’intermédiaire du tendon rotulien, à la tubérosité antérieure du tibia.

a) Le droit antérieur, fusiforme, est la portion la plus superficielle du quadriceps. Il occupe le milieu de la face antérieure de la cuisse et suit dans sa direction l’obliquité du fémur. Sa position rend très appréciable le relief qu’il forme sous la peau lorsqu’il se contracte. Ce relief est marqué à son centre par un méplat longitudinal dû à la disposition de l’aponévrose supérieure du muscle.

Supérieurement, il s’enfonce dans l’angle formé par le couturier et le tenseur du fascia lata pour gagner son insertion à l’os des iles. Cette insertion faite par un double tendon permet au muscle d’agir aussi efficacement dans deux positions différentes. Dans l’extension du membre, par exemple, c’est le tendon direct qui est enjeu ; dans la flexion de la cuisse, au contraire, tout l’effort porte sur le tendon réfléchi. Inférieurement, son tendon se rend à la base de la rotule, et les fibres charnues l’abandonnent à un travers de main environ au-dessus de cet os.

b) Vaste interne et vaste externe. — Ces deux corps charnus volumineux, situés latéralement, se rejoignent sur la ligne médiane au-dessous du muscle précédent. Leur insertion inférieure se fait par de larges surfaces aponévrotiques qui s’unissent intimement au tendon du droit antérieur et descendent de chaque côté s’insérer sur les bords latéraux de la rotule.

Le vaste externe, le plus volumineux, occupe presque toute la face externe de la cuisse ; il est maintenu par le fascia lata, au travers duquel cependant, dans certaines positions du membre, il est possible de distinguer les différents faisceaux qui le composent. Les fibres charnues s’arrêtent à plusieurs travers de doigt de la rotule.

Le vaste interne occupe la partie inférieure et interne de la cuisse. Il s’y dessine sous l’aspect d’une masse ovoïde dont la grosse extrémité est tournée en bas et dont la pointe supérieure s’engage dans l’angle formé par le droit antérieur et le couturier. Ses fibres se dirigent obliquement de haut en bas et de dedans en dehors. Le corps charnu descend fort bas, jusqu’au niveau du milieu de la rotule. Il y a donc sous ce rapport une grande différence entre les deux vastes, et ce détail a une très grande influence sur le modelé de la région.

c) Le crural accolé au fémur est la portion la plus profonde du quadriceps, s’étendant au-dessous du vaste interne et surtout du vaste externe. Néanmoins son action sur les formes extérieures de la cuisse n’est pas nulle, car il est un point où il déborde en bas le tendon du vaste externe, et il devient superficiel dans une petite étendue, à la face externe du genou. Cette portion du crural est masquée dans l’extension du membre par le relief du fascia lata (pl. 70) ; mais elle forme dans la flexion une saillie ovoïde distincte.

Je dois indiquer ici une disposition, jusqu’ici peu remarquée, de l’aponévrose fémorale au niveau de la partie inférieure du triceps, parce qu’elle rend compte d’une forme spéciale que je signalerai plus loin.

Il existe à trois ou quatre travers de doigt de la rotule une condensation des fibres transversales de l’aponévrose, formant un véritable faisceau ou ruban aponévrotique, que je propose de désigner sous le nom de fibres arciformes inférieures de l’aponévrose fémorale. (Pl. 68, 70 et 71.) Elles embrassent en effet dans leur courbure la partie supérieure et latérale interne du genou. L’extrémité externe épanouie en éventail se confond avec le fascia lata. En dedans, les fibres convergentes croisent le vaste interne suivant une direction perpendiculaire à celle de ses fibres charnues, à deux travers de doigt environ de son bord inférieur, passent sur la tubérosité fémorale interne, et descendent au devant du couturier avec le tendon duquel elles s’entre-croisent inférieurement à angle aigu. Aux points où ce faisceau rencontre les cloisons aponévrotiques intermusculaires interne et externe, des fibres profondes s’en détachent, qui adhèrent à ces cloisons, et vont jusqu’aux divisions de la ligne âpre du fémur où elles s’insèrent, complétant ainsi une sorte d’anneau ostéo-fibreux disposé dans un plan transversal, incliné de haut en bas et de dehors en dedans, et enserrant la partie inférieure du muscle triceps.

Inférieurement, ce faisceau offre un bord assez net, et les extrémités inférieures des muscles vaste externe et vaste interne n’apparaissent plus recouvertes que par un lacis aponévrotique lâche. Ses limites supérieures sont moins tranchées, et les fibres qui le composent se confondent insensiblement avec les fibres transversales de l’aponévrose fémorale.

L’importance de cette bride au point de vue des formes de la région est facile à mettre en lumière. Dans le relâchement musculaire, les extrémités charnues du vaste interne et du vaste externe viennent faire hernie au-dessous d’elle et forment des reliefs que nous étudierons plus loin et parfaitement distincts du corps même des muscles.

Action. — Il étend la jambe sur la cuisse. Il est en outre, par le droit antérieur, fléchisseur du bassin sur la cuisse.


Tenseur du fascia lata. (Pl. 68 et 70.)


Insertions : en haut, à l’épine iliaque antérieure et supérieure ;

En bas, au tubercule externe de la tubérosité antérieure du tibia.

Le corps charnu court et épais est situé à la partie supérieure et externe de la cuisse. Son relief se confond en arrière avec le moyen fessier auquel il est accolé. Il descend jusqu’au devant du grand trochanter, qu’il dépasse de quelques travers de doigt. L’épaisse bandelette fibreuse qui constitue son tendon inférieur se confond avec la portion externe de l’aponévrose fémorale désignée sous le nom de fascia lata. Cette aponévrose s’unit intimement au tendon du grand fessier et remonte, en recouvrant le moyen fessier, jusqu’à la crête iliaque à laquelle elle adhère solidement.

Action. — Ce muscle est fléchisseur de la cuisse sur le bassin. Il produit en même temps la rotation de dehors en dedans contre-balancée par l’action rotative en sens opposé du psoas iliaque.


Couturier. (Pl. 68 et 71.)


Insertions : en haut, à l’épine iliaque antérieure et supérieure ;

En bas, à la crête du tibia au-dessous du tendon rotulien.

Ce muscle, le plus long du corps humain, aplati, large de deux travers de doigt environ, traverse obliquement la face antérieure de la cuisse pour se porter à la partie interne du genou, en décrivant une sorte de spirale allongée.

Inférieurement, les fibres charnues se terminent en pointe à la partie postérieure d’un tendon aplati. Elles descendent plus ou moins bas, suivant les individus, mais dépassent généralement l’interligne articulaire du genou.

Action. — Il est fléchisseur de la jambe sur la cuisse en même temps qu’il fléchit la cuisse sur le bassin. Il n’est pas abducteur et ne place point le membre dans l’attitude habituelle aux tailleurs, ainsi qu’on l’a dit, mais il est en même temps rotateur de la jambe en dedans.


§ 2. — Groupe interne.


Muscles adducteurs : pectiné, premier, deuxième et troisième grand adducteur. (Pl. 63, fig. 2 et 3, et pl. 64, fig. 1.)


Les anatomistes ne sont pas d’accord, sur la division du groupe des adducteurs en quatre muscles distincts nommés ci-dessus. Et de fait, ces muscles se confondent souvent. Pour nous, ces distinctions n’offrent aucun intérêt. Les adducteurs réunis forment une masse puissante à la partie supérieure et interne de la cuisse, et cette masse ne se subdivise jamais.

Insertions : en haut, à la crête pectinéale et à la surface triangulaire située en avant de cette crête (pectiné), à l’épine du pubis et au-dessous (premier et deuxième adducteur), à la tubérosité de l’ischion et à toute sa branche inférieure (troisième ou grand adducteur) ;

En bas, à la bifurcation interne de la ligne âpre, à tout l’interstice de la ligne âpre, et au tubercule saillant du condyle interne du fémur (faisceau du grand adducteur).

Action. — Les adducteurs sont tous, ainsi que leur nom l’indique, adducteurs de la cuisse. Les plus supérieurs sont en même temps fléchisseurs et rotateurs en dehors. La partie inférieure du troisième adducteur est au contraire rotatrice en dedans.


Droit interne. (Pl. 71.)


Insertions : en haut, au pubis et à l’arcade pubienne jusqu’au voisinage de l’ischion ;

En bas, à la crête du tibia.

Ce muscle mince et allongé descend verticalement au côté interne de la cuisse et confond son relief avec celui des adducteurs. Le corps charnu, de longueur variable suivant les individus, descend quelquefois presque jusqu’à la partie inférieure de la cuisse. Le tendon qui lui succède est en conséquence plus ou moins long. Il suit le bord postérieur du couturier et concourt à la formation du lacis aponévrotique qui recouvre la partie supérieure de la face interne du tibia et qui a été désigné sous le nom de patte d’oie.

Action. — Le droit interne produit à la fois l’adduction de la cuisse, la flexion de la jambe sur la cuisse et sa rotation en dedans. La première action est la plus puissante.


§ 3. — Groupe postérieur.


Biceps crural. (Pl. 64, fig. 2 et 3.)


Insertions : en haut, à l’ischion par un tendon commun avec le demi-tendineux (long chef du biceps), à la partie moyenne de la ligne âpre (court chef du biceps) ;

En bas, au tubercule moyen de la tête du péroné.

Le corps charnu allongé et fusiforme de la longue portion donne naissance inférieurement à un tendon qui règne sur la face postérieure du muscle, et qui reçoit par son bord externe le faisceau charnu de la courte portion qui vient du fémur. Le tendon inférieur, très fort, recouvre le ligament latéral externe du genou.

Action. — (Voir plus bas.)


Demi-membraneux. (Pl. 64, fig. 2 et 3.)


Insertions : en haut, à l’ischion au-dessous et en avant du demi-tendineux et du biceps ;

En bas, à la partie postérieure de la tubérosité interne du tibia, où il se divise en trois faisceaux :

a) Un inférieur qui s’insère à la partie inférieure de cette même tubérosité ;

b) Un externe qui se réfléchit en dehors et en haut pour renforcer le ligament postérieur de l’articulation ;

c) Un interne qui glisse dans la gouttière horizontale de la tubérosité.

Ce muscle très puissant forme une sorte de gouttière qui reçoit le demi-tendineux. L’extrémité inférieure de son corps charnu fait à la partie supérieure du creux poplité une saillie arrondie que la contraction rend fort distincte. Le tendon supérieur règne sur le bord externe du muscle, et est caché sous le demi-tendineux, tandis que le tendon inférieur qui se montre sur le bord interne est sous-cutané et se voit en arrière du tendon du droit interne. (Pl. 71.)


Demi-tendineux. (Pl. 64, fig. 2 et 3.)


Insertions : en haut, à l’ischion par un tendon commun avec le biceps ;

En bas, à la crête du tibia.

Ce muscle est le plus superficiel des muscles de la région postérieure. Le corps charnu occupe la partie supérieure de la cuisse en dedans du biceps. Il donne naissance inférieurement à un tendon arrondi et assez grêle qui descend sur la face interne du tibia pour former avec les tendons du couturier et du droit interne le lacis aponévrotique appelé patte d’oie.

Action. — Le demi-tendineux et le biceps crural produisent un triple mouvement :

1° Flexion de la jambe sur la cuisse ;

2° Extension de la cuisse sur le bassin ;

3° Rotation de la jambe sur la cuisse, le premier en dedans, le deuxième en dehors.

Le demi-membraneux, plus puissant que les deux muscles précédents, n’exerce aucune action rotatrice sur la cuisse. Il est extenseur du bassin sur la cuisse et fléchisseur de la jambe sur la cuisse.


Article II. — MUSCLES DE LA JAMBE.


Nous diviserons les muscles de la jambe en deux régions :

1° Région antéro-externe qui comprend cinq muscles : l’extenseur propre du gros orteil, l’extenseur commun des orteils, le jambier antérieur, le court péronier latéral, le long péronier latéral ;

2° Région postérieure qui en renferme cinq également : le poplité, le jambier postérieur, le fléchisseur commun des orteils, le fléchisseur propre du gros orteil, le triceps sural.


§ 1. — Région antéro-externe.


Extenseur propre du gros orteil. (Pl. 65, fig. 1 et 2.)


Insertions : en haut, à la face interne du péroné, au ligament interosseux ;

En bas, à la base de la deuxième phalange du gros orteil.

Profondément caché supérieurement, ce muscle apparaît à la partie inférieure de la jambe entre les deux muscles suivants.

Il passe sous le ligament annulaire, et son tendon est visible sur le dos du pied.

Action. — Il est extenseur du gros orteil et fléchisseur adducteur du pied.


Extenseur commun des orteils. (Pl. 65, fig. 1 et 2.)


Insertions : en haut, à la tubérosité externe du tibia, aux trois quarts supérieurs de la face interne du péroné ;

En bas, à la deuxième et à la troisième phalange des orteils.

Ce muscle occupe la partie antérieure de la jambe dans toute sa hauteur ; son corps charnu forme supérieurement un relief qui se confond d’ordinaire avec celui du jambier antérieur situé en dedans de lui. En bas, ses tendons, au nombre de quatre, passent réunis sous le ligament annulaire et ne s’écartent que sur le dos du pied, pour se rendre aux orteils.

Son corps charnu est continué inférieurement par un petit muscle que les anatomistes décrivent sous le nom de péronier antérieur, et dont le tendon s’attache à l’extrémité supérieure du cinquième métatarsien.

Action. — Ce muscle est principalement fléchisseur abducteur du pied. Son action d’extension sur les orteils est très limitée. Sa véritable puissance s’exerce sur l’articulation tibio-tarsienne.


Jambier antérieur. (Pl. 65, fig. 2.)


Insertions : en haut, à la tubérosité externe du tibia, aux deux tiers supérieurs de la face externe du même os ;

En bas, à la partie interne du premier cunéiforme et jusqu’au premier métatarsien.

Ce muscle assez épais, fusiforme, fait un relief qui dépasse la crête du tibia et rend plus mousse le bord antérieur de la jambe. Le corps charnu se termine vers le milieu de la région par un tendon dont la saillie, oblique en bas et en dedans, est facilement suivie jusqu’à son insertion inférieure.

Ce relief tendineux est bien plus considérable que celui des tendons des muscles extenseurs situés en dehors de lui, ce qui dépend d’une disposition anatomique spéciale. Pendant que le ligament annulaire passe tout entier au-dessus des muscles extenseur commun des orteils et extenseur propre du gros orteil, il embrasse dans un dédoublement le tendon du jambier antérieur, de telle façon que ce dernier tendon se trouve appliqué à la face antérieure du cou-de-pied par un lien deux fois plus faible que celui qui retient les tendons voisins. Ainsi s’explique le relief plus puissant qu’il forme sous la peau, lorsque, par suite de la contraction musculaire, il s’éloigne des surfaces osseuses sur lesquelles il est appliqué au repos et que l’angle qu’il décrit au niveau du cou-de-pied tend à se redresser.

Action. — Il est fléchisseur adducteur du pied sur la jambe.


Court péronier latéral. (Pl. 66, fig. 1, et pl. 70.)


Insertions : en haut, aux deux tiers inférieurs de la face externe du péroné ;

En bas, à l’apophyse du cinquième métatarsien.

Placé au-dessous du muscle suivant, les fibres charnues descendent en arrière jusqu’au niveau de la malléole, en arrière de laquelle son tendon creusé en gouttière reçoit celui du long péronier. Sur le côté externe du pied, son tendon forme une corde très nette, lorsqu’il entre en contraction, tandis que le tendon du long péronier, qui gagne les profondeurs du pied, reste invisible.

Action. — Il est abducteur du pied.


Long péronier latéral. (Pl. 66, fig. 1, et pl. 70.)


Insertions : en haut, à la tête du péroné, au tiers supérieur de la face externe du péroné, aux cloisons aponévrotiques qui le séparent des muscles voisins ;

En bas, à la partie externe de la base du premier métatarsien.

Le corps charnu, allongé, se termine vers le milieu de la jambe par un tendon qui recouvre celui du court péronier situé au-dessous. Les deux tendons glissent en arrière de la malléole externe dans une gaine commune leur présence arrondit la saillie malléolaire et en augmente le diamètre transversal. Inférieurement, le tendon du long péronier quitte celui du court péronier et traverse obliquement la voûte plantaire.

Action. — Il est extenseur du pied sur la jambe, comme le triceps sural dont il contre-balance l’action adductrice par une action abductrice prononcée (Duchenne).


§ 2. — Région postérieure.


Les muscles de cette région, au nombre de cinq, forment deux couches, une couche superficielle composée d’un seul muscle et une couche profonde qui comprend les quatre autres.


Couche profonde.


Les muscles de la couche profonde sont, en haut, le poplité et, au-dessous de lui, descendant jusqu’au pied, le jambier postérieur, le long fléchisseur commun des orteils et le long fléchisseur propre du gros orteil.

Ces muscles, directement appliqués contre le squelette de la jambe, n’apparaissent guère à la surface du membre qu’en arrière de la malléole interne, alors que, réduits à leurs extrémités tendineuses, ils vont s’engager dans la gouttière calcanéenne pour gagner la face inférieure du pied.

Je me contenterai en conséquence de signaler leurs insertions et leur action.


Poplité. (Pl. 66, fig. 1.)


Insertions : en haut, à une dépression de la tubérosité externe du fémur ;

En bas, à la face postérieure du tibia, au-dessus de la ligne oblique.

Action. — Il est fléchisseur de la jambe sur la cuisse et rotateur en dedans, la jambe une fois fléchie.


Jambier postérieur. (Pl. 65, fig. 3, et pl. 66, fig. 1.)


Insertions : en haut, à la ligne oblique du tibia et à la partie la plus externe de la face postérieure de cet os, à la partie de la face interne du péroné située en arrière du ligament interosseux ;

En bas, à l’apophyse du scaphoïde.

Action. — Il est adducteur du pied, qu’il place dans une position intermédiaire entre la flexion et l’extension.


Long fléchisseur commun des orteils. (Pl. 65, fig. 3, et pl. 66, fig. 1.)


Insertions : en haut, à la ligne oblique et au tiers moyen de la face postérieure du tibia ;

En bas, à la base des phalanges unguéales.

Action. — Il est fléchisseur des dernières phalanges.


Long fléchisseur propre du gros orteil. (Pl. 65, fig. 3, et pl. 66, fig. 1.)


Insertions : en haut, aux deux tiers inférieurs de la face postérieure du péroné ;

En bas, à l’extrémité postérieure de la phalange unguéale du gros orteil.

Action. — Il est fléchisseur de la dernière phalange du gros orteil.


Triceps sural et plantaire grêle. (Pl. 66, fig. 2 et 3.)


Insertions : en haut, au-dessus du condyle interne du fémur, au tubercule sus-condylien, à une fossette de la face interne du condyle (jumeau interne), au-dessus du condyle externe du fémur, au tubercule sus-condylien, à une fossette de la face externe du condyle au-dessus de l’insertion du poplité (jumeau externe), à la tête et au tiers supérieur de la face postérieure du péroné, à la ligne oblique du tibia et au tiers moyen de son bord interne (soléaire) ;

En bas, à la partie moyenne de la face postérieure du calcanéum (tendon d’Achille).

Le plantaire grêle est un tout petit muscle dont le corps charnu surmonte le jumeau externe et qui se termine par un très long tendon descendant jusqu’au calcanéum, en dedans du tendon d’Achille.

Le triceps sural se compose, dans sa portion supérieure charnue, de deux couches l’une profonde, le soléaire ; l’autre superficielle, les deux jumeaux.

Le soléaire forme un corps charnu, aplati, composé de fibres musculaires courtes, obliquement dirigées et se rendant à une cloison aponévrotique antéro-postérieure. Ses deux bords seuls apparaissent, sur l’écorché, aux côtés correspondants du membre. Une très forte aponévrose occupe la face postérieure et se réunit à celles des jumeaux pour former le tendon d’Achille que les fibres charnues du soléaire accompagnent assez bas sur les côtés.

Les jumeaux nés de chacun des condyles se réunissent sur la ligne médiane. Une forte aponévrose descend sur le milieu de la face postérieure de chacun d’eux et est la cause de méplats latéraux. L’extrémité inférieure des fibres charnues descend plus ou moins bas, suivant les individus, et se termine assez brusquement sur l’aponévrose commune, occasionnant ainsi le relief bien connu du mollet. Le jumeau interne est plus volumineux, empiète sur la face interne du membre et descend plus bas que l’externe ; il se termine par une extrémité arrondie qui marque le défaut du mollet. Le jumeau externe offre un volume moindre et présente une extrémité inférieure généralement plus aiguë.

Le tendon commun, large en haut, se retrécit en s’approchant du calcanéum pour s’élargir légèrement de nouveau à son point d’attache. Il offre une surface sous-cutanée plus saillante au milieu et qui s’abaisse sur les côtés. Il est accompagné latéralement par les fibres du soléaire qui descendent plus ou moins bas suivant les individus et contribuent à l’élargissement de cette portion de la jambe qui soutient le mollet.

Action. — Il est fortement extenseur du pied et entraîne en même temps la pointe du pied en dedans.

Son action est faible comme fléchisseur de la jambe sur la cuisse.


Article III. — MUSCLES DU PIED.


Ces muscles se divisent en deux régions : région dorsale et région plantaire.


§ 1. — Région dorsale.

Cette région comprend un seul muscle, le pédieux.


Pédieux. (Pl. 76, fig. 1.)


Insertions : en arrière, à la partie antérieure du calcanéum, dans le creux caleanéo-astragalien.

En avant, ce muscle se termine par quatre tendons dont le plus interne s’attache à l’extrémité postérieure de la première phalange du gros orteil, et les trois autres se confondent avec les tendons de l’extenseur commun destinés aux deuxième, troisième et quatrième orteils.

Situé sous les tendons des muscles extenseurs qui occupent le dos du pied, le corps charnu du pédieux, obliquement dirigé, forme en dehors, près de son insertion postérieure, un relief très important dans le modelé du dos du pied.

Action. — Il est extenseur des orteils.


§ 2. — Région plantaire.


Les muscles de la région plantaire ont peu d’intérêt au point de vue de la forme extérieure. Ils comblent partiellement la voûte osseuse à laquelle revient le principal rôle dans la conformation de la région. Seuls les muscles situés sur les bords forment parfois des reliefs distincts, appréciables sous la peau.

Il nous suffira de les signaler en indiquant leurs insertions. On les divise, comme à la main, en trois régions : région moyenne, région externe et région interne.


A. Région moyenne.


Muscles interosseux. (Pl. 67, fig. 2.)


Divisés comme à la main en dorsaux et en plantaires, ces muscles ont la même disposition qu’à la main, avec cette différence que l’axe du pied, au lieu de passer par le troisième métatarsien, doit passer par le deuxième.


Adducteur oblique du gros orteil. (Pl. 67, fig. 2.)


Insertions : en arrière, à la partie antérieure et interne du cuboïde, à la base du troisième et à celle du quatrième métatarsien ;

En avant, au côté interne de la base de la première phalange du gros orteil.

Action. — Il est adducteur du gros orteil.


Adducteur transverse du gros orteil.


Insertions : d’un côté, aux ligaments glénoïdiens des trois dernières articulations métatarso-phalangiennes ;

De l’autre, à la base de la première phalange du gros orteil, en confondant ses insertions avec le précédent.

Action. — Il contribue à maintenir la voûte du pied dans le sens transversal.


Lombricaux. (Pl. 67, fig. 3.)


Analogues aux lombricaux de la main, ces petits muscles s’attachent aux tendons du fléchisseur commun en occupant leur côté interne, et se rendent, en avant, à la première phalange des orteils.


Accessoire du long fléchisseur. (Pl. 67, fig. 3.)


Insertions : en arrière, à la face inférieure du calcanéum ;

En avant, au bord externe du tendon du fléchisseur commun.

Action. — Il redresse l’action oblique du long fléchisseur commun.


Court fléchisseur commun des orteils. (Pl. 67, fig. 4.)


Insertions : en arrière, à la tubérosité interne et inférieure du calcanéum ;

En avant, aux bords des deuxièmes phalanges des quatre derniers orteils. Les tendons antérieurs se comportent vis-à-vis de ceux du long fléchisseur commun, comme les tendons du fléchisseur superficiel des doigts, vis-à-vis de ceux du fléchisseur profond.

Action. — Il fléchit les deuxièmes phalanges.


B. Muscles de la région interne.


Court fléchisseur du gros orteil. (Pl. 67, fig. 2.)


Insertions : en arrière, au troisième cunéiforme ;

En avant, aux deux côtés de la base de la première phalange du pouce.

Divisé en deux faisceaux, ce muscle forme gouttière pour le tendon du long fléchisseur du pouce. Sa double insertion inférieure se fait par des tendons communs à d’autres muscles, et renfermant de petits os, désignés sous le nom d’os sésamoïde interne et d’os sésamoïde externe, qui augmentent le relief que l’articulation métatarso-phalangienne du premier orteil forme à la plante du pied.

L’os sésamoïde externe reçoit une portion du court fléchisseur, l’adducteur oblique et l’adducteur transverse.

L’os sésamoïde interne reçoit une portion du court fléchisseur et le court abducteur qui nous reste à signaler.

Action. — Il fléchit la première phalange du gros orteil.


Court adducteur du gros orteil. (Pl. 67, fig. 4.)


Insertions : en arrière, à la tubérosité interne du calcanéum ;

En avant, à la base de la première phalange du gros orteil (os sésamoïde interne).

Au bord interne du pied, ce muscle par son bord supérieur forme un relief longitudinal utile à noter.

Action. — Il est abducteur du gros orteil par rapport à l’axe du pied.


C. Muscle de la région externe.


Court fléchisseur du petit orteil. (Pl. 67, fig. 3.)


Insertions : en arrière, à l’apophyse du cinquième métatarsien ;

En avant, à la partie externe de la première phalange du petit orteil.

Action. — Il est fléchisseur de la première phalange du petit orteil.


Court abducteur du petit orteil. (Pl. 67, fig. 4.)


Insertions : en arrière, à la tubérosité externe du calcanéum ;

En avant, à l’apophyse du cinquième métatarsien par une expansion fibreuse, à la base de la première phalange du petit orteil (tendon commun avec le muscle précédent).

Action. — Il est abducteur du petit orteil par rapport à l’axe du pied.


III

VEINES


Les veines sont des canaux membraneux destinés à ramener au cœur le sang répandu dans les organes et qui y a été apporté par les artères. Le sang n’est point libre dans l’intérieur des tissus, il est contenu dans une infinité de petits canaux microscopiques appelés capillaires et qui, interposés entre les veines et les artères, établissent la communication entre les deux systèmes de vaisseaux. Ce sont les capillaires cutanés qui donnent à la peau sa coloration rosée. Les veines contiennent du sang noir impropre à la nutrition les artères du sang rouge chargé de toutes les qualités nutritives.

Les veines sont disposées dans la profondeur des parties et aussi à la surface. Les veines superficielles, qui seules nous intéressent, prennent naissance dans la peau. Elles cheminent dans le tissu cellulaire sous-cutané et offrent dans leur origine et leur trajet une variabilité extrême. Seule leur terminaison, c’est-à-dire le point où elles s’abouchent avec les veines profondes, offre une certaine constance. La forme des veines est irrégulièrement cylindrique on les voit comme dilatées en certains points et rétrécies dans d’autres, ce qui leur donne un aspect noueux. Cette apparence est due à la présence dans leur intérieur de valvules destinées à faciliter le cours du sang. Elles sont toujours d’une couleur bleuâtre à cause du sang noir qu’elles contiennent, et chez les personnes dont la peau est fine et transparente, leur coloration paraît au travers du tégument.

Les veines communiquent souvent entre elles et forment un lacis à mailles très inégales.

Les artères sont des canaux parfaitement cylindriques et à parois résistantes ; mais comme elles sont toujours profondément situées, je n’ai pas à m’en occuper ici. On peut citer néanmoins l’artère temporale dont les flexuosités se voient très bien sous les téguments de la tempe, et qui se reconnaît facilement au battement (pulsations artérielles) dont elle est animée.

Dans les veines, le sang circule de la périphérie au centre, en sens inverse de la direction qu’il suit dans les artères. Aux membres il a donc à vaincre l’action de la pesanteur, d’où l’utilité des valvules dont nous avons déjà parlé. Tout obstacle apporté au cours du sang veineux a pour effet de gonfler les veines, qui dessinent alors sous la peau leurs moindres ramifications, comme il arrive si l’on place un lien à la racine d’un membre. Un résultat analogue peut être atteint dans des conditions purement physiologiques. Par exemple, dans le phénomène de l’effort, la suspension de la respiration et la contraction musculaire entravent le cours du sang dans les grosses veines du cou, qui se gonfle et se congestionne, ainsi que la face elle-même. L’exercice, en activant la circulation, augmente la quantité de sang qui circule dans les veines. Enfin la contraction musculaire a pour effet de comprimer les veines profondes et de faire refluer le sang dans les veines superficielles, qui paraissent alors plus gonflées. Je me contenterai de signaler ici quelques veines superficielles que les artistes sont souvent appelés à représenter.


I


Au cou, on voit, dans les efforts, saillir une grosse veine qui coupe obliquement la direction du sterno-mastoïdien. (Pl. 73, fig. 1.) C’est la veine jugulaire externe qui née de la réunion des veines superficielles du crâne, parmi lesquelles la temporale est parfois très apparente, se dirige de l’angle de la mâchoire vers la fosse sus-claviculaire, dans laquelle elle pénètre immédiatement en dehors de l’insertion du sterno-mastoïdien. Parmi les affluents de cette veine qui sont parfois visibles à la face, il faut noter la veine frontale ou préparate qui descend sur le milieu du front, et la veine angulaire qui la continue en suivant le sillon nasal ; la veine faciale se perd généralement dans les tissus de la joue.

Au torse, une seule veine est à citer, la tégumenteuse de l’abdomen, qui ne se voit encore que rarement. Elle descend du bas-ventre, traverse obliquement le pli de l’aine pour gagner la saphène interne au moment où cette dernière se jette dans les veines profondes de la cuisse.


II


C’est aux membres que le plan veineux superficiel est le plus développé. Il apparaît surtout chez les sujets maigres et chez ceux qui sont habitués aux exercices corporels violents. La raison en est facile à donner : chez les premiers, elle réside dans l’absence de la graisse qui enveloppe les vaisseaux et en masque les reliefs ; chez les derniers, elle consiste dans un développement exagéré des veines superficielles, produit par les congestions répétées dont elles sont l’objet par suite de la contraction musculaire qui chasse vers elles le sang des veines profondes, ainsi que je l’ai dit plus haut.

Au membre supérieur (Pl. 72), les veines superficielles occupent à leur origine le plan postérieur, au dos des doigts et de la main ; puis elles coupent obliquement les bords de l’avant-bras, pour gagner, au niveau de la saignée, le plan antérieur. On ne saurait trop insister sur l’irrégularité du parcours veineux.

Les veines collatérales des doigts se réunissent et se jettent, au dos de la main, dans un lacis veineux qui revêt plus ou moins la figure d’une arcade, arcade du métacarpe.

L’extrémité externe de l’arcade forme la céphalique du pouce, de laquelle naît la veine radiale qui monte sur le bord externe de l’avant-bras. L’extrémité interne devient la salvatelle qui se jette dans la veine cubitale, laquelle occupe le bord interne de l’avant-bras. A la région antérieure du poignet quelques petites veines, nées des éminences thénar et hypothénar, gagnent les veines radiales et cubitales et remontent jusqu’à la veine médiane qui occupe le milieu de la face antérieure de l’avant-bras.

A la région antérieure du coude ou région de la saignée, nous retrouvons les trois veines de l’avant-bras, au milieu la médiane, en dedans la cubitale, en dehors la radiale.

La médiane s’ouvre en deux branches qui se dirigent obliquement vers les côtés du bras ; en dehors elle devient la médiane céphalique et en dedans la médiane basilique. Chacune de ces deux divisions, après un assez court trajet, se réunit aux veines latérales de l’avant-bras, donnant ainsi naissance aux deux troncs veineux du bras. Cette disposition des veines de la saignée a été comparée à un M majuscule.

Les deux veines du bras sont : en dehors, le veine cette qui remonte sur le bord du biceps pour gagner le sillon pectoro-deltoïdien et ne disparaître dans la profondeur qu’au niveau de la dépression sous-claviculaire ; en dedans, la veine basilique qui se dirige en haut directement et va se jeter dans les veines profondes de l’aisselle.


III


Au membre inférieur (pl. 73, fig. 2 et 3), on voit deux gros troncs veineux, l’un à la face interne dans toute son étendue, la veine saphène interne ; l’autre, à la partie postérieure de la jambe seulement, la veine saphène externe.

Comme à la main, les veines collatérales des orteils se jettent dans une veine disposée transversalement d’une façon plus ou moins régulière et désignée sous le nom d’arcade dorsale du pied. En dedans, cette veine longe le bord interne du pied, où elle prend le nom de grande veine du pied et forme l’origine de la grande veine saphène interne. Cette dernière monte à la face interne de la jambe, croisant obliquement la saillie du soléaire et le bord du jumeau interne. Elle embrasse en dedans et en arrière l’articulation du genou, puis gagne, en suivant le plan du couturier, la partie interne et supérieure de la cuisse où elle disparaît, pour s’aboucher avec les veines profondes. Elle reçoit à ce niveau la tégumenteuse de l’abdomen dont nous avons déjà parlé et les veines honteuses externes qui viennent des organes génitaux.

La veine saphène externe ou postérieure naît par deux racines de chaque côté du pied. La branche interne vient du bord interne du pied et du talon, la branche externe naît au dos du pied et au bord externe ; souvent quelques-uns de ces rameaux coupent transversalement la malléole externe. Ces deux branches convergent pour se réunir à angle aigu sur le tendon d’Achille. Puis la saphène monte directement en suivant la ligne médiane jusqu’au jarret où elle se jette dans les veines profondes.

Il n’est pas inutile d’ajouter que tous les principaux troncs veineux, au membre supérieur, comme au membre inférieur, communiquent entre eux par un réseau dont les plus grosses divisions sont parfois apparentes. Ils sont souvent accompagnés de rameaux plus petits qui suivent une direction parallèle ; d’autres fois, au lieu de former un tronc unique, ils se subdivisent en plusieurs branches réunies à leur embouchure.


IV

PEAU ET TISSU ADIPEUX


L’union intime de la face profonde de là peau avec la couche graisseuse qui la double nous a fait réunir dans un même chapitre l’étude du tégument et du tissu adipeux. Mais, fidèle à la méthode qui nous porte constamment des parties profondes vers la surface, je commencerai par la description de ce dernier.


A. —Tissus adipeux.


La graisse affecte dans l’organisme deux localisations différentes :

Elle est disposée en couche entre la peau et l’aponévrose générale d’enveloppe, c’est le pannicule adipeux.

Elle est distribuée dans les vides que laissent entre eux les organes profonds, c’est le tissu adipeux d’interposition.


Particule adipeux.


Quelque importante que soit la part qui revient aux muscles dans la conformation extérieure du corps, il ne faut pas oublier qu’entre la surface de l’écorché et la forme du nu, il y a loin encore, plus loin peut-être qu’on ne pense généralement.

En effet, la peau n’est pas directement appliquée sur les muscles revêtus de leurs enveloppes aponévrotiques. Autrement dit, pour vêtir un écorché, il ne suffirait pas de le recouvrir du tégument dont le rôle ne consisterait alors qu’à en atténuer les formes trop heurtées, mais sans y rien changer d’essentiel. Entre la peau et les muscles intervient cette nouvelle couche d’un tissu spécial, le pannicule adipeux, dont la présence, suivant les régions, modifie complètement les formes de l’écorché. Et ceci se produit non seulement chez les sujets doués d’embonpoint dont les formes disparaissent pour ainsi dire noyées dans la graisse, mais aussi chez les individus jeunes, robustes, bien portants et sans aucune surcharge graisseuse.

Cette couche cellulo-graisseuse, ainsi que je l’ai déjà dit, double la peau dans la plus grande partie de son étendue et y adhère intimement. Lorsque la peau se déplace, c’est cette dernière couche qui glisse sur les aponévroses, et non le tégument externe sur la couche graisseuse sous-cutanée.

Le pannicule adipeux est d’ailleurs d’épaisseur fort inégale suivant les régions et suivant les individus. Il existe chez tous les sujets, même chez ceux qui sont qualifiés de maigres, et, à moins d’émaciation extrême et morbide, il ne fait jamais défaut. Mais on comprendra combien son développement plus ou moins grand influe sur les formes extérieures. Ces dernières seront plus enveloppées chez celui dont le pannicule adipeux sera plus abondant, tandis qu’elles seront plus sèches, plus dures, plus heurtées, chez celui qui le présentera réduit à sa couche la plus mince. Chez la femme et chez l’enfant, c’est à l’abondance du pannicule adipeux que l’on doit la forme plus généralement arrondie et l’effacement presque complet des saillies musculaires.

Mais les variations que présente la couche graisseuse sous-cutanée, suivant les régions, chez un même individu, sont encore plus intéressantes au point de vue morphologique. Elles sont en effet considérables. Des mensurations, faites sur une vingtaine de sujets dont les trois quarts appartenaient à la catégorie des gens maigres et dont pas un seul ne dépassait les limites d’un embonpoint fort modéré, nous ont donné les résultats suivants[11] :

Le pannicule adipeux manque sous la peau du nez, des paupières, etc. ; il est très mince au dos de la main, du pied, au niveau des clavicules (1 à 2 millimètres). C’est sur le torse qu’il est le plus épais, et il y est répandu très inégalement. Le maximum d’épaisseur est aux fesses (1 centimètre en moyenne et jusqu’à 3 centimètres) ; puis vient la partie postérieure du flanc (8 millimètres en moyenne et jusqu’à 1 centimètre et demi) puis la région mammaire, dans sa moitié inférieure, aux environs du mamelon (6 millimètres en moyenne et jusqu’à 1 centimètre et demi). A l’abdomen, il est plus abondant au-dessus qu’au-dessous de l’ombilic (en moyenne 6 millimètres et demi au-dessus, 4 millimètres au-dessous). A la région sous-mammaire, il est peu abondant (en moyenne 3 à 4 millimètres). Au cou, son épaisseur est en arrière, à la nuque, environ double de ce qu’elle est, en avant, au niveau de la pomme d’Adam. Aux membres, il diminue d’épaisseur de haut en bas. Au bras, il est plus épais en arrière qu’en avant. Au membre inférieur, la différence est notable entre la cuisse et la jambe, de même qu’entre le haut et le bas de la jambe où il acquiert son minimum d’épaisseur.

On voit, par ces quelques indications, la part considérable qui revient au pannicule adipeux dans la conformation extérieure. Il intervient, en effet, non plus seulement à la manière d’un voile pour atténuer les heurts de l’écorché, mais comme facteur direct de la forme au même titre que les muscles et les os. Il y apporte un élément spécial, destiné à accentuer certaines saillies qui existaient déjà chez l’écorché ou même à en créer de nouvelles. Il est certaines régions du corps où, par sa constance et son abondance relative même chez les maigres, il acquiert une sorte d’autonomie. Sans empiéter sur les descriptions détaillées dont seront l’objet, dans la suite, les diverses régions du corps, je crois bon de signaler ici celles dans lesquelles le tissu graisseux joue véritablement un rôle morphologique spécial.

En premier lieu vient la région de la fesse. La graisse y est accumulée surtout vers le centre et au bord inférieur, au-dessus du pli fessier. Elle entre pour beaucoup surtout chez la femme dans le volume de la région. Elle contribue à lui donner la fermeté de consistance et l’élasticité que l’on observe chez les jeunes sujets. Son développement exagéré constitue la stéatopygie des femmes boschimanes, dont il est donné d’observer, pour ainsi dire, chez les Européennes divers degrés d’atténuation.


STÉATOPYGIE CHEZ LES FEMMES BOSCHIMANES.

Il convient de rattacher également à la stéatopygie une accumulation graisseuse à la partie supérieure et externe des cuisses dont les femmes boschimanes présentent le maximum de développement, mais dont on retrouve aussi presque toujours la trace chez l’Européenne, à un degré très variable, il est vrai.


AMAS GRAISSEUX DE LA PARTIE SUPÉRIEURE ET EXTERNE DE LA CUISSE CHEZ DEUX EUROPÉENNES.

BOURRELET GRAISSEUX DU FLANC CHEZ L’HOMME ET CHEZ LA FEMME.

A la partie postérieure des flancs, sur la limite des reins, il existe constamment une sorte de bourrelet graisseux qui non seulement comble sur l’écorché le vide laissé entre la masse commune et le bord postérieur du grand oblique, mais, de plus, fait une saillie fort distincte et dont le rôle morphologique n’a pas été, je pense, signalé jusqu’à présent. Cette accumulation de graisse a pour effet de prolonger en arrière la surface du flanc et d’en augmenter de ce côté la saillie, de telle sorte que le relief formé par le flanc, et si nettement accusé sur les statues antiques, est musculeux en avant et graisseux en arrière. Chez les sujets qui commencent à avoir un peu d’embonpoint, le bourrelet graisseux du flanc prend tout de suite un développement remarquable. Chez la femme, il se confond, pour ainsi dire, en arrière du flanc, avec le tissu graisseux de la fesse, si bien que celle-ci semble remonter jusqu’au défaut des côtes qui est la limite supérieure du flanc et qui marque la taille. Il résulte de cette disposition que le sillon de la hanche, très visible chez l’homme, disparaît presque complètement en arrière chez la femme, alors qu’il reste toujours bien visible, chez cette dernière, dans toute la partie antérieure, malgré l’élargissement de la crête iliaque.

Je signalerai également le tissu graisseux de la région mammaire. Chez la femme, en outre de la présence de la glande mammaire, c’est lui qui détermine et le volume et la forme des seins. Les seins volumineux sont surtout formés par de la graisse ; les médecins savent bien, en effet, qu’au point de vue de la qualité d’une nourrice, la grosseur des seins n’est qu’un indice de médiocre valeur.

Il est intéressant de noter que même chez l’homme, qui porte une mamelle toute rudimentaire, le tissu graisseux joue un rôle important dans la morphologie de la région. Il en augmente la saillie dans toute la partie inférieure, au-dessus du sillon sous-mammaire. Si bien qu’en cet endroit le relief de la région pectorale n’est point uniquement dû à la saillie des fibres charnues du grand pectoral, ainsi que le pensait Gerdy, mais que le tissu graisseux, même chez les gens maigres, y entre pour une certaine part. Il n’est pas rare de voir des gens peu musclés présenter une saillie assez considérable de la région mammaire, qui constitue, pour ainsi dire, un lieu de prédilection pour l’accumulation de la graisse chez les personnes qui prennent de l’embonpoint.

Enfin, je citerai, simplement pour mémoire, le tissu graisseux de la face palmaire de la main et surtout de la plante du pied, qui, par sa disposition spéciale dans les cellules d’un tissu conjonctif élastique qui le comprime, forme une sorte de coussinet élastique destiné à s’adapter plus exactement à la surface des objets et à supporter les pressions.


Tissus adipeux d’interposition.


Le tissu adipeux d’interposition est celui qui est situé au-dessous de l’aponévrose générale d’enveloppe. Il est bien moins important que le pannicule adipeux et, chez les sujets gras, n’augmente jamais dans la proportion de ce dernier. Il comble les interstices musculaires, accompagne les vaisseaux, remplit les vides autour des ligaments, des insertions musculaires, etc.

Au point de vue de la forme extérieure, il joue un rôle qui mérite d’être signalé en plusieurs régions.

Il comble le creux de l’aisselle et le creux poplité.

Au-dessous du tendon rotulien, il forme deux reliefs latéraux, très importants à connaître pour la morphologie de la région.

Enfin, à la face, la « boule graisseuse de Bichat » comble le vide qui existe sur le squelette au-dessous de l’os de la pommette.


B. — Peau.


La peau, ou tégument externe, est une enveloppe membraneuse, solide, résistante et élastique, étendue à la surface du corps. Elle ne présente aucune solution de continuité et se continue sans interruption avec les muqueuses au niveau des orifices naturels.

L’épaisseur de la peau est variable suivant les régions. Sur la plus grande étendue du corps, elle est de 1 millimètre environ. Elle atteint jusqu’à 3 millimètres à la face palmaire de la main, à la face plantaire du pied et vers la partie supérieure du dos et de la nuque.

La peau est élastique, et dans l’état normal, elle est tendue, de manière qu’elle revient sur elle-même en cas d’amaigrissement tant que celui-ci n’est pas excessif. Mais si l’amaigrissement accompagne en même temps, comme dans la vieillesse, d’une diminution de l’élasticité cutanée, il se produit des plissements de la peau, qui sont les rides que l’on observe dans ce cas.

La peau doublée du pannicule adipeux, ainsi que nous l’avons vu plus haut, n’est unie, dans la plus grande partie de son étendue, aux parties qu’elle recouvre, que par un tissu cellulaire extrêmement lâche, qui lui permet de glisser sur les parties profondes et d’opérer des déplacements assez étendus ; soit sous une action extérieure, soit simplement sous l’influence des mouvements des diverses parties du corps. Mais cette mobilité de la peau, qui varie d’ailleurs suivant les individus, n’est point la même pour toutes les régions. Aux membres, elle est généralement moins mobile du côté de la flexion que du côté de l’extension, en dedans qu’en dehors.

L’adhérence est complète au cuir chevelu, à la nuque, à la face palmaire des mains et à la plante des pieds. Enfin sur le reste du corps l’adhérence se fait plus intime en certains points très limités et devient la cause de sillons et de dépressions remarquables par leur constance.

Je signalerai, comme rentrant dans cette catégorie, la dépression de la peau sur la ligne médiane antérieure du tronc et sur la ligne médiane postérieure, à partir de la proéminente, la fossette de l’épicondyle, la dépression au niveau du tendon du deltoïde, la fossette fémorale, etc.

Parmi les sillons dus aux adhérences intimes de la peau aux parties profondes, il faut indiquer les plis de flexion du poignet ; les plis de flexion de la main et des doigts, le pli de l’aine, le pli de l’aisselle, le pli fessier. Je ne fais que les énumérer ici, parce que tous ces plis seront étudiés en détail avec les régions où ils se trouvent.

D’autres plis, bien que sans adhérence de la peau aux parties profondes, n’en sont pas moins constants, tels que les plis d’extension des doigts, le pli de la saignée, le pli du jarret, le pli de flexion du tronc, le pli demi-circulaire de l’abdomen, les plis de la région antérieure du cou désignés sous le nom de collier de Vénus, qui ne sont autres également que des plis de flexion.

Tous les plis dont nous venons de parler s’accusent sous l’influence des déplacements articulaires ; on les désigne sous la dénomination de plis de locomotion.

D’autres plis cutanés, spéciaux à la face, se produisent sous l’influence de la contraction musculaire. Ce sont les plis musculaires. Ils sont déterminés par les muscles de la face qui sont des muscles peaussiers. Attachés au squelette par une de leurs extrémités, ils attirent la peau par l’autre extrémité qui y prend insertion, et la plissent perpendiculairement à la direction de leurs fibres. Par les changements qu’ils font subir aux traits du visage, ils concourent à l’expression des sentiments et des passions.

Enfin, il faut encore signaler les plis ou mieux les rides de la vieillesse. Ils se produisent sur toutes les parties du corps. Ils résultent de ce que la peau cesse d’avoir l’élasticité suffisante pour revenir sur elle-même de la quantité que nécessiteraient les tissus qu’elle recouvre, atrophiés par les progrès de l’âge. Elle se double alors et forme ainsi des replis bordés de sillons dont la direction est des plus variées.

En outre des plis que nous venons d’étudier et qui disparaissent dès que la peau est détachée des parties sous-jacentes, il en est d’autres qui lui sont propres et dépendent de sa structure même. Je citerai d’abord les sillons papillaires de la plante du pied et de la face palmaire de la main. Les autres régions de la peau, vues à la loupe, offrent une multitude de petites éminences séparées par des plis losangiques qui lui donnent l’aspect grenu de la surface d’une orange. Il existe encore de petites saillies arrondies à la base des poils et qui, devenant quelquefois très apparentes sous l’influence d’une émotion vive, constituent le phénomène bien connu de la chair de poule.

C’est cette irrégularité de surface qui donne à la peau son aspect mat. Ce n’est que lorsqu’elle est tendue qu’elle devient lisse et brillante.

La peau est formée de deux couches superposées. L’épiderme, couche la plus superficielle, très mince, dépourvue de nerfs et de vaisseaux, se moule exactement, en y adhérant intimement, sur le derme, couche profonde, qui porte à sa surface les papilles ou petites élévations où se rendent les nerfs et les vaisseaux. Les glandes sudoripares et les glandes sébacées contenues dans son épaisseur s’ouvrent à la surface de la peau par des orifices microscopiques. Les poils sont considérés comme des productions épidermiques.

La couleur de la peau varie selon les races, les individus, les diverses régions du corps, et aussi avec l’âge. Mais je pense, sur un tel sujet, n’avoir rien à apprendre aux artistes, et je bornerai là ma description.

DEUXIÈME PARTIE

MORPHOLOGIE

Nous touchons ici au point culminant de cet ouvrage, et tout ce qui précède n’est pour ainsi dire que la préparation de ce qui va suivre. Nous étudierons d’abord chaque partie du corps dans l’immobilité de l’attitude choisie comme type d’étude. Puis je signalerai les modifications qui surviennent dans les formes extérieures de chacune de ces parties à la suite des divers mouvements.

Cette étude des formes en action sera précédée de quelques indications sur le mécanisme articulaire et les puissances musculaires qui entrent alors en jeu.


CHAPITRE PREMIER

FORMES EXTÉRIEURES DE LA TÊTE ET DU COU


Article premier. — FORMES EXTÉRIEURES DE LA TÊTE


Je n’entrerai pas dans de grands développements sur les formes extérieures de la tête. Désireux de ne pas sortir du plan de cet ouvrage qui traite exclusivement de l’anatomie et de ses rapports avec la forme extérieure, je laisserai de côté les nombreuses variétés morphologiques individuelles, de même que les différences qui spécialisent les races je ne parlerai pas non plus de l’expression des traits du visage au repos ou en mouvement. Toutes ces questions si intéressantes demandent à être traitées à part, et ce n’est pas ici le lieu. D’ailleurs, la face humaine n’est pas, comme le reste du corps, voilée par les nécessités du climat ou les conventions sociales. Elle reste ainsi le grand problème soumis à tout instant à l’observation pénétrante de l’artiste. Sur ce point donc, l’expérience personnelle peut remplacer les données de la science, comme, dans l’antiquité, l’observation quotidienne du nu dans les gymnases a pu suppléer aux études anatomiques.


A la partie supérieure et postérieure de la tête, l’ovoïde crânien dessine sa forme sous la chevelure qui en masque les détails. Sur les têtes chauves, on peut reconnaitre les traces des diverses sutures qui sillonnent la surface du crâne. (Voy. pl. 2.)

Toute la partie antérieure de la tête est occupée par la face qui regarde directement en avant et dont le sommet, formé par le front, appartient également au crâne.

La tête repose sur le cou qu’elle déborde de tous les côtés, mais d’une manière inégale. La plus grande saillie est en avant, si bien qu’au niveau du menton la tête reste libre par en bas dans une petite région, la région sous-mentonnière, région qui a la forme d’un croissant embrassant par sa concavité la partie supérieure du cou dans sa moitié antérieure. Saillante sur la ligne médiane, cette région se creuse latéralement en deux dépressions très distinctes chez les personnes maigres (dépression sous-maxillaires ou sous-mentonnières) (Gerdy). Bien qu’au point de vue de la morphologie, je n’aie pas cru devoir séparer cette région de la tête, elle fait anatomiquement partie du cou, et le lecteur trouvera les détails anatomiques qui la concernent au chapitre de l’anatomie du cou (région sus-hyoïdienne). Il y verra que le muscle mylo-hyoïdien s’insère sur la face interne du maxillaire bien au-dessus de son bord inférieur. La glande sous-maxillaire n’arrive pas à combler l’espace laissé libre entre le muscle et l’os, d’où la dépression latérale que je viens de signaler.

Dans la description de la face, j’étudierai successivement le front, les yeux, le nez, la bouche et le menton.


A. Front.


Le front est limité en haut par les cheveux ou par la ligne de leur implantation lorsqu’ils ont disparu, sur les côtés par les tempes, et en bas par la racine du nez et les sourcils.

La forme du front est partagée en deux plans réunis, à angle plus ou moins obtus, au niveau des bosses frontales. Il reproduit presque exactement la forme de l’os frontal, mais non complètement toutefois, car si les bosses latérales frontales du squelette se lisent parfaitement sous la peau, la bosse nasale chez certains sujets occupe le fond d’une dépression occasionnée par les saillies latérales des sourcils. La peau du front est sillonnée de rides qui jouent un grand rôle dans l’expression des passions.

L’arcade du sourcil ne doit pas être confondue avec l’arcade orbitaire. Superposées à leur partie interne, elles se séparent en dehors chez certains sujets. Ce fait s’explique par la direction oblique en haut et en dehors que prend le sourcil, pendant que l’arcade orbitaire, ainsi que nous l’avons vu sur le squelette, se dirige en dehors et en bas. Entre les deux arcades, il existe alors une petite dépression (dépression sus-orbitaire).


B. Œil.


Logé dans l’intérieur de l’orbite avec l’appareil musculaire destiné à le mouvoir, le globe oculaire ne montre à l’extérieur qu’une portion de son segment antérieur encadré par les paupières et comme enchâssé dans le quadrilatère osseux qui forme le pourtour du trou orbitaire. Cette portion du squelette se fait sentir tout autour de l’œil et joue un rôle capital dans la forme extérieure de toute la région. Le bord supérieur est le plus saillant ; il appartient au front et supporte le sourcil, ainsi que je l’ai déjà dit. L’inférieur, formé par les bords correspondants des os de la pommette et de l’os maxillaire, se déprime en dehors. Le côté interne se confond avec les plans latéraux du nez, et le côté externe reporté en arrière découvre l’œil qui, moins abrité de ce côté, apparaît en entier sur une tête vue de profil. On se souvient, en effet, que, sur le squelette, l’orbite ne s’ouvre pas directement en avant, et que sa base se trouve contenue dans un plan vertical légèrement incliné en bas et en même temps fortement dévié en dehors et en arrière. Cette dernière direction en dehors et en arrière est également suivie par l’axe transversal de l’œil (on désigne ainsi la ligne droite qui passerait par les deux commissures des paupières), de telle façon que l’angle interne de l’œil est situé sur un plan antérieur à celui de l’angle externe. Cet axe transversal ne paraît pas généralement parfaitement horizontal. Il se relève un peu en dehors, disposition qui, exagérée, constitue un des caractères du type de la race jaune.

Le globe de l’œil, ainsi que je l’ai déjà dit, n’apparaît que partiellement au travers d’une véritable boutonnière cutanée formée par les paupières. Dans l’occlusion de l’œil, les deux paupières se touchent par leur bord libre, et la plus grande partie de la course est fournie par la paupière supérieure qui descend au devant du globe oculaire en se moulant sur lui, pendant que la paupière inférieure ne remonte que très légèrement. La surface de la paupière supérieure est marquée d’un ou deux plis qui suivent à peu près la courbure de son bord libre. Quand elle est relevée, elle disparaît dans sa plus grande étendue sous un repli de la peau, ne montrant plus qu’un rebord plus ou moins large, suivant les individus, et généralement plus large en son milieu, au-dessus de la pupille, qu’aux extrémités, au voisinage des commissures. La paupière inférieure offre quelques rides légères qui, de l’angle interne, se dirigent obliquement en bas et en dehors.

Le bord libre des paupières, garni de cils plus longs à la paupière supérieure qu’à l’inférieure, s’y présente sous un aspect fort différent. Supérieurement, il disparaît sous l’ombre des cils ; inférieurement, au contraire, il incline en avant son épaisseur où la lumière se réfléchit vivement et trace une ligne lumineuse entre le globe oculaire et la ligne sombre formée par les cils. Enfin le bord de la paupière supérieure décrit un arc beaucoup plus accentué que celui de la paupière inférieure.

Au-dessus de la paupière supérieure, se trouve une dépression variable, mais toujours plus marquée en dedans qu’en dehors et qui la sépare du relief formé par l’arcade sourcilière. En bas, la paupière inférieure n’est séparée du bord inférieur de l’orbite que par un sillon large et peu profond.

Les deux angles de l’œil, dont nous avons déjà indiqué plus haut la direction et la position relative, sont très différents l’un de l’autre. L’interne est marqué par une sorte d’échancrure allongée au fond de laquelle ou observe la saillie rougeâtre de la caroncule lacrymale ; de cet angle part, se dirigeant en dedans et légèrement en haut, une saillie allongée qui reflète vivement la lumière et qui est formée parle tendon du muscle orbiculaire palpébral. L’angle externe de l’œil est marqué d’un pli qui prolonge en bas et en dehors le bord libre de la paupière supérieure.

Il nous reste à parler maintenant de la portion du globe de l’œil visible par l’ouverture des paupières. Au centre, un segment de la sphère apparaît, transparent comme du cristal et formant par sa courbure une saillie analogue à celle d’un verre de montre : c’est la cornée, enchâssée en quelque sorte dans la membrane blanche qui forme tout le reste du globe oculaire et qui se nomme la sclérotique. Le relief de la cornée sur cette dernière est tel qu’il est parfaitement appréciable au travers de la paupière supérieure abaissée.

La sclérotique n’est visible que dans une faible portion de son étendue ; elle est recouverte d’une membrane très mince d’un blanc jaunâtre, la conjonctive, qui se réfléchit des paupières sur le globe de l’œil pour se terminer aux limites de la cornée. Le blanc de l’œil est plus ou moins pur, suivant que la conjonctive, toujours semée de petits vaisseaux, est plus ou moins injectée de sang. Il est blanc bleuâtre, comme chez les enfants, lorsque la sclérotique peu épaisse et la conjonctive peu vasculaire laissent transparaître légèrement la teinte noire de la membrane interne de l’œil.

La cornée recouvre l’iris coloré et à son centre un véritable trou, — la prunelle ou la pupille, — qui paraît obscur parce qu’il s’ouvre dans l’intérieur du globe oculaire, dont le fond, comme l’intérieur des appareils d’optique, est tapissé d’une membrane noire, excepté toutefois chez les albinos.


C. Nez.


Le nez, par sa partie la plus supérieure, est en continuité directe avec le front. Tantôt, et c’est le cas le plus fréquent, une échancrure marque la racine du nez, d’autres fois la transition du front au nez s’opère par une ligne droite. C’est cette forme qu’ont adoptée les sculpteurs de la Grèce antique.

La base du nez est libre et tournée en bas, elle est percée de deux ouvertures séparées par une cloison médiane et qui forment les narines. Renflée sur les côtés pour former les ailes du nez, elle possède également un renflement à l’extrémité antérieure (lobe du nez).

Les ailes du nez sont généralement circonscrites, en haut et en arrière, par un sillon curviligne qui les sépare du reste du nez et des joues. Les narines sont ouvertes en bas et aussi en dehors, ce qui tient à ce que la cloison médiane descend plus bas que le bord inférieur des ailes, de telle sorte que ces orifices apparaissent également sur une figure vue de profil. Ils sont ovalaires et plus ouverts en arrière qu’en avant. La cloison qui les sépare s’implante sur la lèvre supérieure.

Le lobe est parfois uniformément arrondi, d’autres fois il présente divers plans déterminés par les inflexions des cartilages qui entrent dans sa structure ; il n’est pas rare alors, sur un nez sec et maigre, de voir le lobe se diviser en deux saillies étroites, séparées par un léger sillon vertical et dues aux deux cartilages qui entourent de chaque côté l’ouverture des narines. Le dos du nez tantôt droit, convexe ou concave, est, d’autres fois, marqué d’un léger renflement au point de réunion des os du nez avec les cartilages.


D. Bouche.


La bouche est circonscrite par les deux lèvres qui reposent sur la saillie convexe des arcades dentaires. La rencontre des dents d’en haut et de celles d’en bas maintient la hauteur des lèvres ; aussi, lorsque les dents manquent, comme il arrive souvent chez le vieillard, on voit les lèvres diminuer de hauteur, en même temps qu’elles rentrent dans la bouche. Il n’est pas inutile de faire remarquer que les dents qui se rencontrent sont les molaires ; les dents de devant se croisent à la manière des deux lames d’une paire de ciseaux, les supérieures descendent au devant des inférieures qu’elles circonscrivent. Lorsque la bouche est fermée, les dents rapprochées au contact en arrière, et croisées en avant, comme il vient d’être dit, l’interstice des lèvres rapprochées sans effort correspond environ à la partie médiane des dents du haut.

La lèvre supérieure est marquée d’un sillon vertical médian qui la partage dans sa hauteur. Un sillon semblable, moins profond et plus large, existe aussi sur la lèvre inférieure.

Les bords vermeils des deux lèvres ont des formes sinueuses bien connues sur lesquelles je n’ai pas besoin d’insister. Ils sont constitués par la muqueuse, et l’endroit où elle s’unit avec la peau est marqué d’un liséré saillant qui en arrête les contours. Les commissures sont abritées en dehors par un relief oblique.


E. Menton.


Le menton termine la face par en bas. Il fait une saillie fort variable suivant les individus, uniformément arrondie chez les uns, marquée chez les autres d’une dépression médiane. Cette saillie est due, d’une part, au corps du maxillaire inférieur sur lequel le menton repose et, d’autre part, à l’accumulation d’un tissu graisseux assez dense qui double la peau. Ce tissu graisseux peut être, chez certains individus, assez considérable pour modifier les formes du squelette en augmentant notablement dans le sens de la hauteur les proportions du visage.

Le menton s’arrondit par en bas, où il empiète légèrement sur la face inférieure. Il est séparé de la région sous-mentonnière par un pli transversal, plus ou moins profond, mais constant, et qui ne s’efface jamais, quel que soit l’embonpoint ; on voit, en effet, sur les faces chargées de graisse, le menton toujours nettement limité inférieurement par ce pli sous-mentonnier et parfaitement distinct d’autres reliefs transversaux développés aux dépens de la région inférieure de la face et que l’on désigne vulgairement sous le nom de second et de troisième menton.

Sur les côtés de la tête, nous étudierons les tempes, les joues, les oreilles.


F. Tempe.


Les tempes continuent le front en dehors, elles répondent sur le squelette aux fosses temporales, mais n’en reproduisent que très exceptionnellement, et chez les sujets très maigres, la forme excavée. En effet, sur le vivant, la dépression temporale est comblée par un muscle puissant qui forme une saillie fort appréciable surtout dans les mouvements du maxillaire inférieur. En haut, la tempe se confond avec le front et le sommet de la tête, dont elle est quelquefois séparée par une légère ligne courbe qui suit les insertions supérieures du muscle temporal et qui aboutit en avant à l’apophyse orbitaire externe. À ce niveau, comme en bas, les limites de la tempe sont toujours assez distinctes. En effet, la tempe est séparée de l’œil par le relief du bord externe de l’orbite qui, bien que surbaissé, est toujours senti. Par en bas, elle est bordée par un relief transversal dû à la saillie de l’arcade zygomatique qui sert de limite supérieure à la joue.


G. Joue.


La joue qui s’étend du nez et de la bouche à l’oreille, des yeux et des tempes au menton et à la région sous-mentonnière, se confond insensiblement avec les diverses parties qu’elle avoisine. L’os jugal, ou os de la pommette, uni au maxillaire supérieur, en forme le squelette et en constitue le point le plus proéminent situé un peu au-dessous et en dehors de l’orbite.

En avant de ce point, la joue remonte obliquement au-dessous de l’œil pour rejoindre le plan latéral du nez dont elle est séparée par un sillon large et peu profond. En arrière, elle se déprime légèrement et s’aplanit au devant de l’oreille et de l’angle de la mâchoire, où se trouve le plan quadrilatère du muscle masséter, oblique en bas et en arrière. Sur les limites, nous voyons en avant un pli curviligne qui sépare la joue de l’aile du nez, puis un autre oblique en bas et en dehors (pli naso-labial) qui la sépare de la lèvre supérieure. En arrière, elle touche à l’oreille. En bas, elle se continue avec la région sous-mentonnière d’une façon plus ou moins insensible suivant l’embonpoint du sujet et le degré de saillie du bord du maxillaire inférieur. En haut, elle avoisine la tempe dont elle est séparée par la saillie transversale que nous avons déjà signalée et due à l’arcade zygomatique. Ce relief, très visible chez l’homme maigre, se confond en avant avec la pommette. En arrière, il aboutit à la base du tragus, dont il est séparé cependant par une petite fossette et par la saillie légère du condyle du maxillaire inférieur. Quand la bouche s’ouvre, cette saillie se porte en avant et en bas, et laisse à sa place une cavité assez profonde.


H. Oreille.


Le pavillon de l’oreille situé sur les limites de la face, du crâne et du cou a, dans son ensemble, une forme ovoïde dont la grosse extrémité est dirigée en haut, un peu en arrière et de plus un peu en dehors. Il adhère aux parois de la tête par son tiers antérieur environ. Le reste du pavillon présente donc une face interne généralement distante du crâne de un à un centimètre et demi, mais qui chez certains individus s’en écarte beaucoup plus.

Le pavillon auriculaire ressemble à un cornet aplati dont la paroi, plusieurs fois repliée sur elle-même, offre un mélange de formes singulières qui varient beaucoup suivant les sujets, mais que l’on décrit généralement de la façon suivante : Au centre, une cavité, sorte d’antichambre du conduit auditif externe qui y aboutit : c’est la conque. A la périphérie, un repli qui borde toute la partie supérieure et postérieure du pavillon : c’est l’hélix. L’hélix par son extrémité antérieure prend naissance au fond de la conque, au-dessus du conduit auditif externe. Il se termine en bas en se confondant avec une masse charnue ovoïde, libre sur ses deux faces, se continuant avec la joue par la partie la plus élevée de son bord antérieur et qui constitue le lobule.

La cavité de la conque est bordée en arrière par l’anthélix qui se termine en haut par deux branches entre lesquelles se trouve une dépression, la fosse naviculaire. L’hélix et l’anthélix sont, en outre, souvent séparés par une fossette allongée, la fossette scaphoïde. Enfin deux saillies, en bas et en avant, rétrécissent l’entrée de la conque en la réduisant à une sorte d’incisure fort caractéristique c’est en avant le tragus qui abrite l’entrée du conduit auditif, puis en arrière et en bas l’antitragus qui prolonge l’anthélix.

Au-dessous de l’oreille, et en arrière de la mâchoire, se trouve creusée la dépression sous-auriculaire limitée en arrière par la saillie mastoïdienne et le bord antérieur du muscle sterno-mastoïdien. Cette saillie très prononcée est séparée de l’oreille par un sillon profond qui limite la partie adhérente du pavillon et conduit en bas à la fosse sous-auriculaire.


Article II. — FORMES EXTÉRIEURES DU COU.


Le cou est la partie du corps qui supporte la tête et l’unit au tronc.

Ses limites sont les suivantes :

Du côté de la tête, le cou commence, en arrière, au niveau d’une ligne courbe horizontale partant d’une apophyse mastoïde pour aboutir à l’autre et suivant la direction de la ligne courbe supérieure de l’occipital. En avant, le cou est séparé de la face par une ligne qui, partant également des apophyses mastoïdes, descendrait en arrière du maxillaire inférieur.

Du côté du tronc, les limites du cou, très précises en avant, sont plus indécises en arrière. En avant, le cou s’arrête naturellement aux saillies claviculaires. Sur les côtés, il convient de le laisser s’étendre, jusqu’aux extrémités externes de la clavicule, et en arrière, il est borné par une ligne tout artificielle qui part de ces saillies osseuses latérales pour rejoindre, sur la ligne médiane, la saillie de la septième vertèbre cervicale, dite proéminente.

On voit que le cou, ainsi délimité, est loin d’être dans son ensemble uniformément arrondi. En effet, dans sa moitié supérieure où il est presque rond en arrière, il porte en avant la forte brèche comblée par la moitié inférieure de la face. Dans sa moitié inférieure, si, par contre, il s’approche davantage en avant de la forme ronde, il s’en éloigne en arrière et sur les côtés, où il s’élargit considérablement.

La colonne cervicale, qui forme le squelette du cou et en maintient les proportions, n’est susceptible, suivant les individus, que de faibles changements de hauteur. Nous avons vu, en effet, que la colonne vertébrale dans son ensemble est la partie du squelette qui présente les dimensions les plus fixes, quelle que soit la taille dont l’accroissement résulte plus particulièrement du développement des membres inférieurs.

La longueur du cou, si variable suivant les sujets, dépend donc presque uniquement de la variabilité de sa limite inférieure formée par la ceinture osseuse scapulo-claviculaire. Le cou long, en effet, s’accompagne d’épaules tombantes ; les épaules élevées, au contraire, font le cou court. Dans le premier cas, la clavicule est oblique en dehors et en bas ; dans le second, elle est oblique en dehors et en haut[12].

Je décrirai successivement :

La région antérieure du cou, ou gorge ;

Le plan antéro-latéral du sterno-mastoïdien ;

La région postérieure, ou nuque ;

Le creux sus-claviculaire.


§ 1. — Région antérieure du cou ou gorge. (Pl. 74 et 77.)


Les bords antérieurs des muscles sterno-cléido-mastoïdiens, en dedans desquels se dessine une légère dépression linéaire, limitent un espace triangulaire dont le sommet est au sternum et la base aux apophyses mastoïdes. Toute la moitié supérieure environ de ce triangle est occupée par la partie inférieure de la face dont la mâchoire inférieure proémine surtout en avant. L’angle de la mâchoire est peu distant du bord antérieur du muscle sterno-mastoïdien. Tout en haut, ce muscle est séparé du maxillaire inférieur par une dépression située au-dessous de l’oreille et dont nous avons déjà parlé plus haut (dépression sous-auriculaire).

Au-dessous du menton, tout l’espace compris entre les deux muscles sterno-mastoïdiens est comblé par une surface arrondie dans son ensemble, séparée en haut par un sillon courbe (sillon hyoïdien) de la région sous-mentonnière, et se terminant en bas par une extrémité rétrécie au niveau du creux sus-sternal.

Cette surface est marquée des accidents de forme suivants. Sur la ligne médiane et en haut, une saillie anguleuse est formée par le cartilage thyroïde du larynx. Désignée vulgairement sous le nom de pomme d’Adam cette saillie est fort variable suivant les individus, et nulle chez la femme. L’os hyoïde, situé au-dessus du larynx, au niveau de l’angle rentrant formé par la rencontre du cou et de la région sous-mentonnière, ne se révèle à l’extérieur que dans l’extension forcée du cou. Il existe, sur les parties latérales, une dépression au fond de laquelle on sent la saillie de la grande corne de l’os hyoïde et que pour cette raison Gerdy appelle la fosse hyoïdaire. Cette dépression est située sur le parcours du sillon hyoïdien, environ à égale distance du corps de l’os hyoïde et de l’angle de la mâchoire inférieure. Elle se confond avec lui dans la situation normale de la tête, mais elle devient très distincte dans l’extension forcée.

Au-dessous de la pomme d’Adam, le cou s’arrondit et doit alors sa forme au corps thyroïde sur lequel se moulent non seulement l’enveloppe cutanée, mais aussi les petits muscles aplatis de la région.

Il arrive parfois que le corps thyroïde, toujours plus développé chez la femme que chez l’homme, soulève également l’extrémité inférieure des muscles sterno-mastoïdiens et provoque en ce point un élargissement marqué. Au-dessous du corps thyroïde, la peau se déprime entre les tendons des deux sterno-mastoïdiens, à leur insertion au sternum, pour former le creux sus-sternal ou fourchette sternale.


§ 2. — Plan des muscles sterno-mastoïdienne. (Pl. 76 et pl. 79.)


Le plan des sterno-mastoidiens traduit assez exactement au dehors la forme même du muscle, qui est sous-cutané dans toute son étendue. (Voy. p. 95.)

Nous savons que, de l’apophyse mastoïde et de la ligne courbe supérieure de l’occipital où il prend ses insertions en haut, ce muscle descend en bas et en avant, en se contournant sur lui-même et en se rapprochant de la ligne médiane. Il se divise, à son attache inférieure, en deux faisceaux : l’interne arrondi s’attache au sternum, l’externe aplati s’attache à la clavicule. Ces deux faisceaux laissent entre eux un espace triangulaire qui se traduit au dehors par une petite dépression (fossette sterno-claviculaire).

Le plan du sterno-mastoïdien est obliquement traversé par la veine jugulaire externe.


§ 3. — Région postérieure de la nuque. (Pl. 75 et pl. 78.)


Sur la ligne médiane, on observe, au niveau de la jonction du cou et du crâne, une dépression répondant sur le squelette à la protubérance occipitale externe ; c’est la fossette de la nuque, masquée d’ordinaire par les cheveux. Un méplat légèrement arrondi lui succède, qui conduit à une surface ovalaire un peu déprimée, au milieu de laquelle s’élève la saillie de la septième vertèbre cervicale ou proéminente.

Sur les parties latérales se trouvent deux reliefs musculaires qui répondent à la partie supérieure des muscles trapèzes. Ces muscles entièrement sous-cutanés, comme les sterno-mastoïdiens, sont aplatis et se moulent exactement sur les parties profondes qui jouent, au moins en cet endroit, le principal rôle dans les formes de la région. C’est ainsi que les deux saillies longitudinales de la nuque sont dues au relief des muscles complexus, recouverts par les splénius et par l’extrémité supérieure du trapèze. La fossette de la nuque s’explique facilement par l’écartement des deux muscles complexus à leur insertion à l’occipital. Le méplat qui suit trouve sa raison dans le rapprochement du corps de ces deux muscles, et surtout dans la jonction des deux splénius dont les insertions sur la ligne médiane se rencontrent à ce niveau. Enfin la dépression ovalaire, au milieu de laquelle se détache la saillie de la proéminente, correspond à l’aponévrose ovalaire du trapèze.

En bas et en dehors, le trapèze, au-dessus de son insertion claviculaire, est également soulevé par les muscles profonds qui sont les scalènes et l’angulaire de l’omoplate. C’est ainsi que se produit cet élargissement du cou en bas et en arrière qui sur le sujet, vu de face, dessine deux lignes courbes inclinées descendant du milieu du cou vers le sommet de l’épaule. Mais il faut, en outre, faire intervenir ici un épaississement relativement considérable du muscle à ce niveau, d’où résulte, chez les sujets bien musclés, l’accentuation de la forme que je viens de signaler. (Voy. p. 91.)

Le bord du trapèze assez mince se dessine sous la peau. Il permet en haut de suivre l’insertion du muscle jusqu’à l’occipital, où il touche presque le bord postérieur du sterno-mastoïdien. En dehors, il descend. jusqu’à la clavicule, à l’union du tiers externe et des deux tiers internes.


§ 4. — Creux sus-claviculaire. (Pl. 77 et suiv.)


Entre le bord postérieur du sterno-mastoïdien et le bord antérieur du trapèze, on trouve un espace allongé dont la partie supérieure offre une surface arrondie, pendant que la partie inférieure, plus large et descendant jusqu’à la clavicule, est déprimée et forme ce qu’on appelle la fosse ou le creux sus-claviculaire.

En haut, les muscles profonds du cou comblent toute la place libre entre le sterno-mastoïdien et le trapèze. En bas, au contraire, entraînés à leurs insertions inférieures avec la clavicule qui s’éloigne de la cage thoracique, ces deux derniers muscles s’écartent des muscles profonds, et occasionnent, par là même, la dépression dont il s’agit. D’où il suit également que cette dépression est plus accusée en dehors qu’en dedans, du côté du trapèze que du côté du sterno-mastoïdien.

Le creux sus-claviculaire correspond à la partie moyenne de la clavicule qui le borde par en bas. Il est fort variable suivant les sujets. Très prononcé chez les personnes maigres, il l’est beaucoup moins chez celles qui présentent un peu d’embonpoint. La situation des épaules influe également sur son degré d’accentuation. Profond chez les personnes qui ont les épaules hautes, il s’efface chez celles qui ont les épaules tombantes. A son angle interne naît la veine jugulaire externe qui remonte en croisant obliquement le muscle sterno-mastoïdien.


Article III. — MOUVEMENTS DE LA TÊTE ET DU COU.


Nous avons vu, au chapitre de l’anatomie, que les mouvements de la tête sur la colonne vertébrale se passaient dans les articulations des deux premières vertèbres cervicales (atlas et axis), entre elles et avec l’occipital (voy. p. 24 et pl. 4). Ces mouvements sont de trois espèces : 1° mouvements de rotation qui ont lieu dans l’articulation de l’atlas et de l’axis ; 2° mouvements de flexion et d’extension ; 3° mouvements d’inclinaison latérale, ces deux derniers mouvements ayant lieu dans l’articulation de l’atlas et de l’occipital.

Nous avons vu, d’autre part, comment la colonne cervicale était la partie la plus mobile du rachis, et comment s’exécutaient les mouvements dont elle était susceptible et qui sont également de trois espèces : rotation, flexion et extension, inclinaison latérale. On peut remarquer que ces mouvements sont les mêmes que ceux de la tête.

Je n’ai pas à revenir sur le mécanisme de ces diverses articulations exposé plus haut et avec détail. Les mouvements de la tête sont rarement isolés de ceux du cou ; les uns et les autres se confondent et se complètent, agissant le plus souvent dans le même sens. Aussi ne séparerons-nous pas, dans l’étude qui va suivre, les mouvements de la tête et ceux du cou.


§ 1. — Mécanisme articulaire.


Dans les mouvements autour d’un axe transversal (flexion et extension), la tête, par l’intermédiaire des condyles de l’occipital, roule sur les cavités glénoïdes des masses latérales de l’atlas. Dans la flexion, le maxillaire inférieur vient à la rencontre de la convexité antérieure de la colonne cervicale ; dans l’extension, l’occipital descend en arrière. Ce dernier mouvement a le plus d’étendue.

Lorsque la colonne cervicale continue le même mouvement, l’amplitude en est considérablement augmentée, et la tête ne roule plus seulement sur elle-même, mais subit en même temps un mouvement de translation dans le plan antéro-postérieur, le menton se rapprochant du sternum qu’il touche presque en avant, et, en arrière, l’occiput arrivant à quelques centimètres de la saillie de la proéminente.

Dans la flexion, la colonne cervicale, convexe en avant, se redresse et se courbe même dans le sens opposé, de telle sorte qu’elle continue la courbure de la région dorsale, les deux régions ne formant plus qu’une seule et même courbe inclinée dans le même sens. Dans l’extension, au contraire, l’incurvation normale de la colonne cervicale s’accentue. Dans le mouvement de rotation, la tête et le cou sont entièrement solidaires. La rotation de l’une ne peut se faire sans entraîner la rotation de l’autre, si peu que le mouvement ait d’étendue. A la limite extrême du mouvement, le visage arrive à se placer de profil sur un tronc vu entièrement de face.

L’inclinaison latérale ne se produit presque jamais isolément. Lorsque pour l’étude on cherche à la produire, elle a toute l’apparence d’un mouvement forcé, et son amplitude est restreinte. Presque toujours, elle s’accompagne d’un mouvement de rotation qui dirige la face en haut et du côté opposé. Nous avons vu la raison anatomique de cette association dans la disposition spéciale des surfaces articulaires de la région. (Voy. p. 24.)


§ 2. — Action musculaire.


Les mouvements de la tête sur le rachis sont assurés, dans tous les sens, par les petits muscles profonds qui entourent les articulations de l’occipital, de l’atlas et de l’axis. Mais ils n’y concourent pas seuls, et d’autres muscles plus puissants, dont la situation plus superficielle influe sur la forme extérieure, y prennent part. Ces derniers ont souvent une action indirecte de même sens sur la colonne cervicale[13].

Si nous ne considérons que les muscles dont la contraction influe sur la forme extérieure, nous avons pour la flexion : les muscles de la région sus et sous-hyoïdienne, les scalènes, les sterno-mastoïdiens ; pour l’extension : les gros muscles de la nuque, les trapèzes, les splénius, les grands complexus et les angulaires ; pour l’inclinaison latérale : le trapèze, le splénius, le grand complexus, le sterno-mastoïdien, les scalènes, l’angulaire ; pour la rotation : le splénius du côté où la face se dirige, et du côté opposé le sterno-mastoïdien, le trapèze, le grand complexus.

Hâtons-nous d’ajouter qu’il ne faudrait pas conclure de cette énumération qu’un mouvement étant donné, tous les muscles cités comme y contribuant dussent forcément entrer en action et se révéler au dehors par des reliefs appropriés.

Il y a d’abord le mouvement peu accusé qui peut se produire exclusivement par l’action des petits muscles profonds. Il faut ensuite faire intervenir l’action de la pesanteur qui, dans le jeu musculaire, joue un rôle très important et sur lequel on a peu insisté jusqu’à présent. Ainsi, par exemple, lorsque la tête est penchée en avant, le centre de gravité déplacé tend à l’entraîner dans ce sens, et ce mouvement, qui n’est autre chose que la flexion, se produit sous l’influence seule de la pesanteur. Pour empêcher la chute complète de la tête en avant, la contraction des muscles extenseurs devient, alors nécessaire. Il en résulte ce fait paradoxal en apparence : mouvement de flexion et contraction des extenseurs. Mais si un obstacle est apporté au mouvement de flexion, s’il doit vaincre l’action de la pesanteur, comme lorsqu’il se produit dans le décubitus dorsal, on voit alors tous les muscles fléchisseurs entrer en action et se dessiner vigoureusement sous la peau.

Il en est de même pour les autres mouvements du cou.

Ce n’est là, en somme, qu’une application d’une loi générale qui pourrait se formuler ainsi : Lorsque le déplacement d’un segment du corps se produit dans l’influence de son propre poids, l’action des muscles ordinairement destinés à agir dans le même sens devient inutile, et ce sont, au contraire, les muscles antagonistes qui entrent en contraction pour contre-balancer et régler l’action aveugle de la pesanteur.


§ 3. — Modification des formes extérieures dans les mouvements du cou et de la tête.


A. Extension ou renversement de la tête et du cou en arrière. (Pl. 87, fig. 2.)


Dans le renversement du cou, en position forcée, la protubérance occipitale externe se rapproche de la proéminente du cou, au point de n’en être distante que de quelques centimètres, réduisant ainsi la nuque à sa plus courte étendue.

Par contre, les régions antérieures sont distendues et acquièrent dans le sens vertical leurs plus grandes dimensions. La région sus-hyoïdienne, ou sous-mentonnière, tend à se placer dans le prolongement de la région sous-hyoïdienne, mais l’angle rentrant, que ces deux régions forment entre elles, ne s’efface jamais complètement et, bien qu’élargi, le sillon hyoïdien que nous avons signalé se retrouve toujours.

Dans ce mouvement la bouche tend à s’ouvrir. Le cou subit, en même temps, un élargissement notable latéralement, dont la cause réside dans le déplacement des muscles sterno-mastoïdiens.

Les formes extérieures se trouvent en conséquence modifiées de la façon suivante :

Sur la ligne médiane, le corps de l’os hyoïde se dessine quelquefois au fond du sillon hyoïdien élargi ; sur les côtés, les fosses hyoïdiennes se creusent.

Le larynx projeté en avant dessine vigoureusement sous la peau sa forme anguleuse. On reconnaît facilement le bord supérieur du cartilage thyroïde avec son angle antérieur en forme de V. Au-dessous du larynx proémine la saillie arrondie du corps thyroïde. Il existe, au sujet de cette double proéminence du larynx et du corps thyroïde, de grandes variétés suivant les individus.

Le bord antérieur des muscles sterno-mastoïdiens s’accuse plus nettement ; il en est de même de leurs attaches sternales et claviculaires, dont la saillie augmente la fossette sterno-claviculaire, contrairement au creux sus-sternal qui tend à s’effacer.

Les sterno-mastoïdiens glissent sur les côtés de la colonne cervicale, en même temps que leur bord postérieur se trouve soulevé par les attaches spinales des muscles profonds, d’où résulte l’élargissement du cou déjà signalé. Retenus dans leur loge aponévrotique rattachée elle-même par des fibres spéciales à l’angle du maxillaire, ils se courbent dans le même sens que le cou. La fosse sus-claviculaire est traversée obliquement par la corde de l’omoplat-hyoïdien elle est limitée en haut par le relief des muscles profonds.

La nuque est le siège de plusieurs gros plis cutanés dirigés transversalement.


B. Flexion. (Pl. 87, fig. 1.)


Dans la flexion du cou, le menton s’approche du sternum qu’il arrive à toucher chez quelques individus. Les régions antérieures du cou disparaissent sous des plis cutanés transversaux, plus petits et plus nombreux que ceux de la nuque dans l’extension, ce qui dépend tout simplement de la différence d’épaisseur de la peau dans les deux régions.

Les sterno-mastoïdiens refoulés par l’angle du maxillaire inférieur forment une saillie en cet endroit, et leurs extrémités inférieures disparaissent. La nuque s’arrondit en s’allongeant. La saillie de la proéminente plus accentuée surmonte les reliefs des apophyses épineuses de la première et de la deuxième vertèbre dorsale.

Sur les côtés, le bord antérieur du trapèze distendu se dessine et les muscles profonds sont saillants. Le creux sus-claviculaire diminue de hauteur.


C. Rotation du cou. (Pl. 88, fig. 1.)


Si nous examinons le côté du cou qui se trouve le plus à découvert, c’est-à-dire celui qui est opposé à la direction de la face, nous voyons le stemo-mastoïdien, d’oblique qu’il était, devenir vertical et faire un relief qui indique toute la part qu’il prend dans ce mouvement. Mais ce relief n’est pas dû à une égale contraction de tout le muscle, il est fusiforme et plus particulièrement occasionné par le faisceau sternal dont le tendon fait une saillie énorme, pendant que l’insertion claviculaire disparaît presque.

En avant du sterno-mastoïdien, la fosse hyoïdienne se creuse, rapprochée de l’angle du maxillaire.

Le creux sus-claviculaire tend à s’effacer, ce qui est dû en partie à la distension des fibres du muscle peaussier et de la peau. Il augmente au contraire de profondeur du côté opposé, c’est-à-dire du côté vers lequel la face est tournée. De ce même côté, le sterno-mastoïdien relâché disparaît sous les plis du tégument.


D. Inclinaison latérale. (Pl. 88, fig. 2.)


Dans ce mouvement, l’oreille s’approche de l’épaule sans toutefois arriver au contact. Elle en reste distante d’au moins quatre ou cinq travers de doigt.

Du côté de l’inclinaison, de nombreux plis cutanés se forment. De l’autre côté, les téguments sont distendus. Je me contenterai de signaler une saillie en forme de corde, très accentuée, qui limite en haut le creux sous-claviculaire et qui est due à la tension de l’angulaire de l’omoplate. En effet, cette corde s’accuse d’autant plus que l’épaule est plus basse.

CHAPITRE II

FORMES EXTÉRIEURES DU TRONC


Pour mettre quelque clarté dans la description des formes extérieures du tronc, il est absolument nécessaire de le subdiviser en plusieurs régions. Nous suivrons dans son ensemble, le plan adopté par Gerdy, mais en y introduisant quelques modifications qui tendront surtout à le simplifier.


TOPOGRAPHIE MORPHOLOGIQUE COMPARÉE DE L’HOMME ET DE LA FEMME.
(Plan antérieur.)

Le tronc, ou torse, se divise d’abord en trois grands segments naturels déterminés par le squelette : 1° le thorax qui répond à la cage thoracique ; 2° l’abdomen qui occupe tout l’espace laissé libre sur le squelette, entre la cage thoracique et le bassin ; 3° enfin, le bassin qui correspond à la réunion des os coxaux et du sacrum.

Chacun de ces segments se subdivise ainsi :

Le thorax comprend en avant, la poitrine, qui elle-même renferme la région sternale, la région mammaire et la région sous-mammaire ; en arrière, le dos subdivisé lui-même en région spinale, région scapulaire et région sous-scapulaire.


TOPOGRAPHIE MORPHOLOGIQUE COMPARÉE DE L’HOMME ET DE LA FEMME.
(Plan posérieur.)

L’abdomen comprend en avant, le ventre proprement dit ; sur les côtés, le flanc ; en arrière, les reins ou lombes.

Enfin, le bassin comprend : en avant, le pubis, l’aine ou pli inguinal ; en arrière, les fesses.


Article premier. — POITRINE.


La poitrine occupe toute la partie antérieure du thorax. Elle se subdivise naturellement en plusieurs régions : la région sternale au milieu, et, sur les côtés, la région mammaire et la région sous-mammaire.


§ 1. — Région sternale. (Pl. 77.)


Située sur la ligne médiane, la région sternale repose sur l’os sternum. Elle s’étend de la fourchette sternale au creux épigastrique ; elle est bornée latéralement par les reliefs des muscles pectoraux qui la transforment en une sorte de gouttière, dont la profondeur varie avec leur propre développement. La dépression est plus marquée dans la moitié inférieure, ce qui tient à ce que les pectoraux vont en augmentant d’épaisseur de haut en bas.

Cette région est formée de deux plans distincts : l’un supérieur, plus court et plus large, répond à la première pièce sternale ; l’autre, plus étroit, règne au-dessous, sur toute l’étendue du corps de l’os. Ces deux plans sont séparés par la saillie transversale due à l’articulation de la première pièce sternale avec la seconde.

Inférieurement, la gouttière sternale s’élargit en un méplat de forme triangulaire, occasionné par l’écartement des fibres musculaires à ce niveau ; disposition que l’on comprendra facilement, si l’on se souvient que l’insertion du muscle pectoral, sur les côtés du sternum, ne se fait point suivant une ligne droite, mais suivant une ligne courbe à convexité tournée vers le plan médian du corps.

Enfin, la situation plus profonde de l’appendice xyphoïde est la cause première d’une dépression située à son niveau et que l’on nomme creux épigastrique.

Ce creux est limité, supérieurement, par un ligament en arcade qui unit les cartilages des dernières côtes, au devant de l’appendice xyphoïde. Sur les côtés, proéminent les cartilages costaux eux-mêmes. En bas, ses limites, plus indécises, sont formées par l’écartement des extrémités supérieures des muscles droits de l’abdomen. Le creux épigastrique doit sa constance à cette disposition des fibres musculaires qui le bordent, mais on comprend que sa forme variera suivant le volume des muscles eux-mêmes.

L’extrémité inférieure de l’appendice xyphoïde, recourbée en avant, forme parfois une petite éminence à la partie inférieure du creux épigastrique.


§ 2. — Région mammaire. (Pl. 77.)


La région mammaire, bornée en dedans par la région sternale que nous venons d’étudier, s’étend depuis la clavicule qui la limite en haut, jusqu’à un vaste sillon qui la circonscrit inférieurement (sillon sous-mammaire). En dehors, elle touche à l’épaule. Elle répond exactement au muscle grand pectoral, dont un faisceau la déborde cependant par en bas.

Sa configuration est donc, à peu de chose près, celle du muscle lui-même, et elle variera nécessairement avec le degré d’émaciation ou de développement musculaire.

En haut, la clavicule fait une forte saillie sur le plan de la région, saillie due au peu d’épaisseur du muscle à ce niveau, en même temps qu’à la forte courbure en avant, présentée par toute la partie interne du bord antérieur de l’os où ce muscle prend insertion. Une dépression triangulaire, qui prend le nom de fossette sous-claviculaire, sépare les insertions du grand pectoral de celles du deltoïde. Elle est occasionnée par l’écartement de ces deux muscles qui, jusque-là accolés l’un à l’autre, s’éloignent au moment où ils atteignent la clavicule. Cette juxtaposition n’équivaut pas à une fusion. Un léger sillon (sillon pectoro-deltoïdien) partant de la dépression sous-claviculaire descend en bas et en dehors jusqu’au niveau de l’angle inférieur du deltoïde ; il établit la ligne de démarcation entre les deux muscles, et, en même temps, fixe les limites de la région pectorale et de la région de l’épaule. Ce sillon est occupé par une veinz qui vient du bras, la veine céphalique.

De tous les autres côtés, la région forme saillie sur les parties avoisinantes : en dedans, saillie légère sur la région sternale ; en bas, saillie d’autant plus vigoureuse que l’on approche du bras, au niveau duquel le muscle, quittant la cage thoracique pour aller s’insérer à l’humérus, constitue le bord antérieur de l’aisselle.

Ce bord antérieur, fort épais en raison d’une disposition des fibres musculaires sur laquelle je ne reviendrai pas ici (voy. p. 97), n’est pas dirigé directement en dehors. Même dans l’abaissement du bras, il suit une direction nettement ascendante, pour se perdre en s’amincissant entre le relief du biceps et celui du deltoïde, au niveau de l’extrémité inférieure du sillon pectoro-deltoïdien avec lequel il forme un angle aigu. Cette inclinaison du bord antérieur de l’aisselle résulte de la direction des fibres inférieures du muscle pectoral qui, nées des cartilages des fausses côtes et même de l’aponévrose abdominale, sont forcées de remonter pour gagner leur insertion humérale située sur un plan beaucoup plus élevé. Le bord antérieur de l’aisselle forme également un angle avec le sillon sous-mammaire qui borde la région par en bas. Mais cet angle est obtus et arrondi. C’est à son niveau que se trouve le mamelon, situé toujours en dedans d’une ligne verticale abaissée de la fossette sous-claviculaire.

Le sillon sous-mammaire n’est pas horizontal. Il est oblique de bas en haut et de dehors en dedans, il suit une direction très légèrement curviligne et parfois presque droite. Il est large, peu profond, peu accentué en dedans, et s’accuse d’autant plus qu’il est plus proche de l’aisselle où il se perd. Il est généralement exagéré sur les statues antiques. Sa situation répond au cartilage de la cinquième côte, dont il coupe très obliquement la direction. Il est occasionné par le relief des fibres charnues sur les fibres aponévrotiques d’insertion, qui elles-mêmes descendent jusqu’au cartilage de la sixième et de la septième côte. En dehors, le faisceau abdominal du grand pectoral descend beaucoup plus bas s’insérer à l’aponévrose abdominale. Le grand oblique remonte jusqu’au-dessous de ce faisceau, qui en masque ainsi la digitation la plus élevée.

Enfin lorsque le muscle est inactif, le bras tombant naturellement le long du corps, sa masse, pourvu qu’elle soit un peu puissante, se trouve entraînée par la seule action de la pesanteur en bas et en dehors, augmentant ainsi le relief inférieur de la région et la profondeur du sillon qui le borde.

Le bord interne de la région pectorale est marqué par la saillie des fibres charnues du grand pectoral qui prennent insertion sur le côté du sternum, saillie généralement peu accusée, plus marquée en bas qu’à la partie supérieure, et qui suit une ligne courbe plus ou moins irrégulièrement festonnée, ce qui tient à ce que les fibres du muscle, se groupant en plusieurs faisceaux, constituent une série de digitations au nombre de trois ou quatre et plus ou moins distinctes. Près de ce bord interne, on peut observer, chez les sujets maigres, les saillies des articulations chondro-sternales et chondro-costales.

La surface de la région, bombée dans son ensemble, présente parfois des dépressions linéaires, qui suivent la direction des fibres musculaires et séparent les différents faisceaux du muscle. Un de ces sillons est constant, il part de l’extrémité interne de la clavicule pour se perdre vers l’angle externe du muscle. Il sépare le faisceau dit claviculaire du reste du corps charnu. Ces sillons ne s’observent que chez les sujets très fortement musclés et à peau fine peu chargée de graisse. Chez ces mêmes personnes, on trouve vers l’angle externe de la région, à peu de distance du sillon pectoro-deltoïdien, une dépression qui s’accuse dans l’extension du bras en dehors et qui correspond à l’entre-croisement des faisceaux supérieurs avec les faisceaux inférieurs.

Chez les individus dont le système musculaire est peu développé, on retrouve facilement, au travers du grand pectoral, les saillies formées par les arcs costaux, séparées par les dépressions correspondant aux espaces intercostaux. Enfin lorsque, sans être gras, le sujet bien musclé a les formes pleines dues à un pannicule adipeux dense et assez ferme, la surface pectorale prend l’aspect simple et uniforme qu’elle a sur les statues antiques. On peut facilement constater alors que le pannicule adipeux n’est pas répandu en couche égale dans toute l’étendue de la région. Il augmente de haut en bas, de façon à acquérir sa plus grande épaisseur au niveau du mamelon et dans toute la partie inférieure, de telle sorte que la saillie que présente la région mammaire en ce point n’est pas due seulement au développement musculaire, mais aussi à l’accumulation d’une certaine quantité de graisse. Ces différences d’épaisseur du pannicule adipeux se retrouvent, toute proportion gardée, même chez les gens maigres.

Chez la femme, la présence de la glande mammaire donne à la région son aspect particulier. Je ne m’étendrai pas sur la forme si variable du sein lui-même, dont le relief est dû, non seulement à la glande mammaire, mais à une quantité assez considérable de tissu adipeux. Mais il n’est pas sans intérêt de déterminer exactement sa situation. La mamelle occupe la partie inférieure et externe de la région pectorale dont toute la partie supérieure est libre. Elle regarde en avant et en dehors, et le mamelon se trouve situé à la partie la plus saillante au point de rencontre des deux plans. Le bord inférieur dépasse la limite du muscle grand pectoral et empiète sur la région sous-mammaire, qui se trouve d’autant rétrécie chez la femme. Dans la jeunesse et lorsque la mamelle est peu volumineuse, son demi-globe se détache très nettement du plan sur lequel elle repose. Le bord antérieur de l’aisselle se dessine au-dessus d’elle, et un espace médian de plusieurs travers de doigt, sépare les deux seins. Lorsque, au contraire, la mamelle est volumineuse, ce qu’elle doit surtout à l’accumulation graisseuse, ses limites sont beaucoup moins nettes. Elle se confond en haut avec la région pectorale envahie elle-même par la graisse, pendant que le sillon qui la borde en bas est d’autant plus profond qu’elle retombe plus bas sous l’influence de la pesanteur. Enfin les deux mamelles arrivent presque à se joindre sur le milieu.


§ 3. — Région sous-mammaire. (Pl. 77 et pl. 79.)


La région sous-mammaire est limitée : en haut, par la région mammaire ; en dehors, par la saillie verticale du grand dorsal ; en bas, par le sillon supérieur du flanc, le sillon qui suit le rebord des fausses côtes et le sillon dû à la première intersection aponévrotique du muscle grand droit de l’abdomen ; en dedans, par le creux épigastrique et le sillon médian qui sépare les deux muscles grands droits.

On voit, d’après cette délimitation, que cette région, qui par l’extérieur paraît circonscrite d’une façon assez naturelle, ne possède pas un seul muscle qui lui appartienne en propre. Nous y trouvons, en effet, les portions de trois muscles différents la partie antérieure et inférieure du grand dentelé, la moitié supérieure environ du grand oblique de l’abdomen et l’extrémité supérieure du muscle grand droit.

Bombée dans son ensemble, ce qui tient à ce que les faisceaux musculaires sont exactement appliqués sur les côtes qui en forment le squelette, cette région n’en est pas moins très mouvementée et formée d’une grande quantité de plans différents. On y voit d’abord la série des digitations du grand dentelé, occasionnées par les insertions de ce muscle aux côtes inférieures. Ces digitations se traduisent extérieurement par une série de saillies anguleuses dirigées la pointe en avant et suivant une ligne courbe dont la convexité est tournée en bas et en avant. Elles reposent sur la saillie costale qu’elles exagèrent, le muscle prenant insertion sur la face externe de la côte. Elles sont au nombre de quatre, inégales de volume ; la première apparaît au niveau du bord inférieur du grand pectoral ; la dernière se perd sous la saillie du grand dorsal. Le muscle grand oblique présente des digitations entre-croisées avec celles du grand dentelé, moins saillantes parce qu’elles sont formées de faisceaux musculaires en général moins épais, et que, s’attachant au bord inférieur des côtes, elles reposent sur le plan déprimé des espaces intercostaux.

La première digitation apparente du grand oblique naît au-dessous de la première digitation apparente du grand dentelé. Au-dessus d’elle, ou voit une saillie musculaire qui touche, par en haut, au sillon inférieur de la région mammaire et qui semble une nouvelle digitation du grand oblique. Il n’en est rien. Ce relief est dû au faisceau du grand pectoral qui sort de la région pectorale pour aller s’attacher à l’aponévrose abdominale.

Le muscle grand oblique, né de ces différents faisceaux accolés, se moule en quelque sorte sur la portion de la cage thoracique qu’il recouvre, avant de s’en détacher pour descendre dans le flanc. De cet accolement découlent les formes variées de la région. Ces formes varieront, en effet, suivant le plus ou moins d’épaisseur du muscle. Elles dépendent des saillies costales séparées par les dépressions intercostales et sur lesquelles on note les tubérosités disposées en série des articulations chondro-costales confondues quelquefois avec les digitations musculaires. Elles dépendent également des inégalités résultant des cartilages des fausses côtes, le long du rebord costal.

Il faut donc tenir compte dans les formes de cette région de trois sortes de saillies saillies : musculaires, digitations du grand oblique, saillies osseuses dues aux côtes elles-mêmes ou à leurs articulations chondro-costales, et saillies des cartilages costaux.

De toutes ces saillies, la plus importante est celle qui termine par en bas le rebord costal. Gerdy l’appelle la saillie costo-abdominale. Elle est due au relief du cartilage de la dixième côte ou dernière fausse côte. Elle est généralement très apparente. Au-dessous d’elle commence le sillon latéral de l’abdomen.

Enfin, la partie la plus interne de la région a plus d’uniformité. Elle est d’ailleurs beaucoup plus étroite, et répond à la première division du muscle grand droit. Ce muscle est généralement assez épais à ce niveau pour masquer le relief du rebord cartilagineux, et combler le vide qui, sur le squelette, existe au-dessous de lui. Quelques faisceaux musculaires se distinguent quelquefois au niveau des attaches supérieures aux cartilages costaux. Le sillon qui borde en bas la saillie du rebord costal, au lieu de remonter vers le creux épigastrique, comme il fait d’ailleurs chez les personnes très maigres, s’en sépare au niveau du bord externe du muscle grand droit, pour se continuer transversalement avec le sillon formé par la première intersection aponévrotique du muscle, tronquant ainsi le sommet de l’échancrure antérieure de la poitrine, échancrure toujours plus ou moins anguleuse sur le squelette.


Article II. — DOS.


Le dos comprend toute la partie postérieure du thorax.

Ses limites sont les suivantes : par en haut, sur la ligne médiane, la saillie de la proéminente et la ligne qui de ce point rejoindrait l’extrémité externe de la clavicule (ce sont les limites inférieures du cou) ; par en bas, les deux sillons obliques qui, de la ligne médiane, se dirigent en bas et en dehors jusque derrière les flancs, et forment la limite supérieure des reins ; enfin, en dehors, la saillie verticale formée par le bord antérieur du grand dorsal qui le sépare de la région sous-mammaire.

Le dos peut se subdiviser en trois régions : en dedans et près de la colonne vertébrale, la région spinale ; en dehors, la région scapulaire et la région sous-scapulaire.


§ 1. — Région spinale. (Pl. 78.)


Le dos est parcouru dans toute sa hauteur par le sillon vertical médian, que l’on nomme vulgairement la raie du dos. Il se prolonge aux reins pour se perdre à la région sacrée. Ce sillon, qui répond sur le squelette à la saillie de la crête épinière, est d’autant plus profond que les masses musculaires qui le bordent sont plus développées. C’est le seul point où la colonne vertébrale soit sous-cutanée. Il est loin de présenter un aspect uniforme, et, suivant les régions, il offre des variations utiles à noter.

Dans la région du dos, il succède aux saillies des apophyses épineuses de la première et de la deuxième vertèbres dorsales qui souvent suivent celle de la proéminente. Il est donc large en haut pour se resserrer et gagner de profondeur en descendant. Le fond en est alors uni et ne laisse paraître les apophyses épineuses dorsales que chez les gens très maigres et dans les mouvements de flexion du tronc. Il y a lieu toutefois de faire une exception ; chez quelques sujets, on voit réapparaître, tout à la partie inférieure du dos, les saillies de deux ou trois apophyses épineuses, ce qui nous semble tenir à une conformation particulière de la colonne et à l’accentuation, dans la région dorsale, de la courbure normale.

Aux reins, le sillon médian présente d’intéressants détails sur lesquels nous insisterons plus loin.

La région spinale, qui occupe, dans toute sa hauteur, la partie du dos la plus proche de la colonne vertébrale, a pour limites externes, dans la moitié supérieure, le bord interne de l’omoplate qui la sépare de la région scapulaire et, au-dessous, le sillon latéral du dos qui confine à la région sous-scapulaire, sillon fort peu accentué d’ordinaire dans la station droite et correspondant à l’angle des côtes.

On n’y voit superficiellement que deux muscles : l’extrémité inférieure du trapèze et la partie la plus interne du grand dorsal. Mais ces deux muscles sont plats et de peu d’épaisseur, et la forme générale de la région emprunte beaucoup plus aux muscles profonds qui sont le rhomboïde en haut et, plus bas, la masse des muscles spinaux.

Le plan du trapèze occupe toute la partie supérieure de la région. On retrouve facilement, chez les sujets un peu musclés, la forme triangulaire de l’extrémité inférieure du muscle dont les insertions descendent jusqu’à l’apophyse épineuse de la dixième vertèbre dorsale. Néanmoins, on constate que le relief extérieur qui en est la conséquence ne descend pas jusqu’à ce niveau, ce qui s’explique facilement par ce fait, que les fibres charnues s’arrêtent à quelque distance de l’extrémité inférieure du muscle, représenté alors par un petit triangle aponévrotique, dont la saillie, presque nulle, ne saurait paraître au travers de la peau. Il résulte de cette disposition que, sur le nu, la terminaison inférieure du muscle trapèze se présente sous la forme de deux pointes situées de chaque côté de la ligne médiane.

Il est encore une autre partie aponévrotique du muscle trapèze qui influe beaucoup sur les formes extérieures. Toutes les fibres charnues de la pointe inférieure du trapèze, dont quelques-unes recouvrent le bord interne de l’omoplate, se rendent à une aponévrose d’insertion de forme à peu près triangulaire et s’attachant à l’extrémité interne de l’épine de l’omoplate. Cette aponévrose est la cause, en ce point, d’une dépression cutanée dont le rapport avec la partie du squelette sur laquelle elle repose est constant, et que je désignerai, avec Gerdy, sous le nom de dépression scapulaire.

Enfin je rappellerai ici, sur la limite supérieure et médiane de la région, le méplat correspondant à l’aponévrose ovalaire du muscle trapèze, au milieu duquel fait saillie l’apophyse épineuse de la proéminente du cou.

Toutes les parties aponévrotiques du trapèze sur lesquelles je viens d’insister, avec les dépressions ou les méplats qu’elles entraînent, sont plus que suffisantes pour expliquer comment, sur le modèle, l’extrémité inférieure du muscle s’éloigne de la forme si nettement triangulaire qu’il a sur l’écorché. Mais ce n’est pas tout, sa forme est encore altérée par un muscle puissant qui le soulève, le rhomboïde. C’est à ce muscle, en effet, qu’est dû le relief ovoïde qu’on voit chez les sujets fortement musclés, en dedans du bord interne de l’omoplate, et qui est surtout bien appréciable dans l’attitude conventionnelle que nous étudions en ce moment.

Chez les personnes d’une musculature médiocre, et dans la position normale des épaules, les bras tombant naturellement le long du corps, le relief du rhomboïde est limité en bas par une dépression linéaire oblique, remontant de l’angle inférieur de l’omoplate vers la colonne vertébrale et répondant au bord inférieur du muscle. Je dois également signaler ici une dépression située en dedans de l’angle inférieur de l’omoplate et qui répond, sur l’écorché, au seul point où la partie postérieure de la cage thoracique se trouve à découvert. Cet espace très restreint, de forme triangulaire, est limité par le grand dorsal en bas, le trapèze en dedans et le rhomboïde en dehors. Il varie d’étendue avec les mouvements de l’omoplate ; il disparaît lorsque l’épaule est portée en arrière, tandis qu’il s’accroît dans le mouvement contraire, par suite du déplacement de sa limite externe formée par le relief de l’extrémité inférieure du rhomboïde sous-cutané en cet endroit.

La partie inférieure de la région spinale est occupée entièrement par le relief de la partie charnue des muscles spinaux très saillants à ce niveau, au travers du grand dorsal recouvert lui-même, tout à la partie interne, par l’extrémité la plus inférieure du trapèze. La limite externe de cette saillie n’est pas très distincte, d’ordinaire, dans l’attitude du type choisi pour l’étude des formes au repos ; elle le devient davantage lorsque le bras est élevé verticalement. On voit alors très distinctement la dépression linéaire désignée sous le nom de sillon latéral du dos et qui répond, sur le squelette, à l’angle interne des côtes. Il faut encore ajouter que, chez certains sujets fort musclés, ces limites externes de la région sont altérées et reportées un peu plus en dehors par l’existence, à ce niveau, des digitations du petit dentelé inférieur qui s’attachent bien en dehors de l’angle des côtes.


§ 2. — Région scapulaire. (Pl. 78.)


Limitée en dedans par la région spinale, en haut par la limite inférieure du cou, en bas par le bord supérieur du grand dorsal qui sert également de limite à la région sous-scapulaire, la région scapulaire présente les détails suivants :

Plan du deltoïde dont la saillie est divisée par une forte aponévrose qui le bride vers son milieu ;

Plan du sous-épineux peu saillant à cause de la forte loge aponévrotique dans laquelle le muscle est maintenu ;

Plan du grand rond saillant en boule dans l’attitude du modelé et bridé par en bas par le grand dorsal.

L’épine de l’omoplate, saillante chez les individus maigres, est transformée en gouttière chez les individus musclés, en raison du volume des muscles qui s’y insèrent ; la saillie supérieure est la plus forte, elle est due au trapèze.

Le bord interne de l’omoplate, recouvert par les fibres ascendantes du trapèze, forme une saillie toujours mousse chez les sujets maigres. Sur les individus musclés, et dans la contraction des muscles qui s’y attachent, comme dans l’attitude du sujet, il est transformé en gouttière.

L’angle inférieur du scapulum, lorsque les bras retombent naturellement le long du corps, forme une saillie émoussée par le grand dorsal qui passe au-dessus de lui.

Le bord postérieur de l’aisselle, à peine apparent dans l’attitude du modèle, est formé par le grand rond et par le grand dorsal qui contourne le bord inférieur du muscle précédent pour gagner son insertion humérale.


§ 3. — Région sous-scapulaire. (Pl. 78.)


La région sous-scapulaire est limitée en haut par la région scapulaire, en dedans par le sillon latéral du dos qui la sépare de la région spinale, en dehors par la saillie du bord antérieur du grand dorsal, en bas parle sillon supérieur du flanc.

Un seul muscle superficiel remplit toute la région. C’est le grand dorsal, muscle plat qui laisse apparaître la conformation des parties qu’il recouvre. En haut et en dehors, le grand dentelé le soulève et détermine un large sillon qui se dirige de l’angle inférieur de l’omoplate, en bas et en dehors, vers le flanc. Ce sillon est parfois interrompu vers le milieu de sa longueur, et sa seconde partie se trouve située sur un plan un peu plus inférieur, ce qui résulte de la disposition des derniers faisceaux du muscle, dont la direction diffère de celle des faisceaux moyens.

Entre ce sillon du grand dentelé et le sillon latéral du dos, limite interne de la région, il existe un espace de forme triangulaire, à sommet situé vers l’angle de l’omoplate, à base tournée en bas et en dehors, espace où la cage thoracique n’est plus recouverte que par le grand dorsal, de dimension fort variable suivant les individus, et généralement assez restreint dans l’attitude du type que nous étudions. Il importe néanmoins de le signaler, parce que, dans les mouvements d’élévation du bras, à cause du déplacement du grand dentelé, il acquiert un développement considérable, et laisse apparaître, au travers de la peau et du grand dorsal, toute la portion inférieure de la cage thoracique à laquelle il correspond. (Pl. 92.)

Chez les sujets très maigres, les couches musculaires peu épaisses laissent apparaître dans toute la région le dessin des côtes saillantes et des espaces intercostaux déprimés.


Article III. — VENTRE.


Le ventre ou abdomen est toute la portion du torse comprise entre la poitrine et le bassin. Il doit être divisé en trois régions : en avant, le ventre proprement dit ; en arrière, les reins ou lombes ; sur les côtés, les flancs.


§ 1. — Ventre proprement dit. (Pl. 77.)


Le ventre proprement dit est limité en haut par l’échancrure antérieure de la poitrine, en bas par l’échancrure antérieure du bassin, et sur les côtés par les sillons verticaux (sillons latéraux du ventre) qui le séparent des flancs.

Il est parcouru, de haut en bas, sur sa ligne médiane, par un sillon de profondeur inégale qui s’efface à quelques travers de doigt au-dessous de l’ombilic. Ce sillon est dû aux reliefs que forment, de chaque côté, les muscles droits de l’abdomen, et sa disparition, à la partie inférieure du ventre, est la conséquence du rapprochement qui s’opère à ce niveau entre ces deux muscles.

L’ombilic se trouve environ à égale distance de l’extrémité de l’appendice xiphoïde et du pubis.

Sur les côtés de la ligne médiane, s’observe le plan des muscles droits de l’abdomen dont les intersections aponévrotiques se lisent très facilement chez les sujets bien musclés : le nombre de ces intersections varie avec les sujets, elles sont généralement au nombre de trois. Les anciens les ont régularisées, en schématisant les plans quadrilatères qui en résultent et se partagent la surface du muscle.

L’intersection la plus inférieure se trouve au niveau de l’ombilic, la plus élevée n’est qu’à quelques travers de doigt du creux épigastrique, et la moyenne, à égale distance des deux. L’intersection supérieure, la plus importante au point de vue des formes extérieures, a pour conséquence de reporter à son niveau, ainsi que je l’ai déjà dit, le sillon qui marque l’échancrure antérieure de la poitrine. La partie supérieure des muscles droits comble ainsi le sommet de l’angle formé par les rebords costaux, d’où résulte pour l’échancrure antérieure de la poitrine, sur le modèle, une forme se rapprochant du plein cintre, pendant que, sur le squelette, elle est manifestement angulaire.

D’ailleurs, la forme de l’échancrure antérieure de la poitrine varie avec les sujets, et, sur les individus très maigres, les formes du squelette sont prédominantes.

Inférieurement, le sillon qui limite le ventre est courbe, en sens inverse du sillon précédent, il répond latéralement au bord antérieur des os iliaques et forme les plis des aines. Sur la partie médiane, il limite supérieurement le pubis. Il n’est régulièrement arrondi que chez les sujets dont l’abdomen est chargé d’embonpoint. Chez les sujets maigres, les adolescents, la forme est angulaire à sommet tronqué, ce qui tient à la direction rectiligne du pli des aines qui descendent jusqu’au sillon sus-pubien également rectiligne.

Le sillon latéral du ventre, qui le sépare des flancs, commence à la saillie costo-abdominale que forme le cartilage de la dixième côte. Il descend de là vers l’aine, bordé latéralement par la saillie du muscle droit en dedans, par celle des fibres charnues du grand oblique en dehors, et s’élargit inférieurement, pour se terminer au-dessus de l’aine, en un méplat dû à l’écartement et à la courbure en sens inverse des deux muscles voisins ; le grand droit s’incline en effet en dedans, pendant que la ligne d’insertion des fibres charnues du grand oblique se dirige au contraire en dehors, vers l’épine iliaque antérieure et supérieure.

Le volume et la saillie de l’abdomen varient avec l’embonpoint du sujet ; même chez les gens maigres, le maximum de saillie se trouve au-dessus de l’ombilic. Nous avons pu d’ailleurs nous assurer que le pannicule adipeux est généralement plus épais dans la région sus-ombilicale qu’au-dessous.

Un peu au-dessus de l’ombilic, on observe un pli cutané transversal et superficiel répondant au mouvement de flexion du tronc en avant.

La région sous-ombilicale est marquée d’un sillon cutané, semi-circulaire, dont la concavité regarde en haut, et situé à quelques travers de doigt au-dessus du pubis. Ce sillon ne saurait être la conséquence de l’accumulation de la graisse en cette région, car on le retrouve même chez les sujets maigres.


§ 2. — Reins ou lombes. (Pl. 78.)


La région des reins a l’aspect d’un losange. Le V supérieur renversé est formé par la rencontre des deux sillons lombaires supérieurs qui limitent également le dos inférieurement. Les branches du V inférieur suivent le bord externe du sacrum et la partie postérieure de la crête de l’os des iles, saillies osseuses transformées en dépressions linéaires par le relief des muscles fessiers qui s’y attachent. L’angle inférieur répond à la rainure interfessière, et les angles latéraux tronqués touchent aux flancs.

Cette région est fort variable d’aspect, et ses limites supérieures, souvent indécises, diffèrent beaucoup suivant les individus.

Les sillons lombaires supérieurs, attribués par Gerdy au relief que forment les fibres charnues du grand dorsal sur leur aponévrose d’insertion, sont rarement bien accentués. Lorsqu’ils existent, ils partent de l’angle inférieur du trapèze pour se diriger, en bas et en dehors, vers la région des flancs. Chez beaucoup de sujets, on les distingue à peine ; chez certains, pourvu que la peau soit un peu épaisse, il est impossible de les trouver.


Torse sur lequel la limite supérieure des reins est formée par le relief des fibres charnues du grand dorsal, en raison du peu de développement des muscles spinaux. Le contraire a lieu sur le torse de la planche 78, sur lequel la limite supérieure des reins est formée par les reliefs des fibres charnues des spinaux. (Voir la Planche anatomique n° 43.)

Les muscles spinaux sont la cause d’un autre sillon oblique dirigé dans le même sens, mais situé plus bas et qui, par sa plus grande constance, mérite, à notre avis, de fixer la limite des reins et de prendre le nom de sillon lombaire supérieur. Il est occasionné par le relief des fibres charnues sur l’aponévrose d’insertion. (Voy. pl. 40.) Sa situation est variable et dépend de la longueur de ces mêmes fibres charnues. Il en est de même d’ailleurs du sinon décrit par l’insertion des fibres charnues du grand dorsal. On comprendra facilement l’aspect variable que doit présenter la région lombaire, au voisinage de sa limite supérieure, suivant que le grand dorsal et les spinaux appartiendront, l’un ou l’autre, ou tous deux à la fois, au type des muscles courts ou à celui des muscles longs, il en résultera pour les deux sillons dont il s’agit soit un éloignement, soit un rapprochement, soit même une sorte de fusion par superposition.

Par contre, la limite inférieure des reins est d’une grande fixité, elle repose sur le squelette dont les variations sont peu considérables. Elle est remarquable par la présence de deux fossettes, fossettes lombaires latérales, l’une supérieure et l’autre inférieure. Gerdy n’en signale qu’une seule, c’est la fossette lombaire latérale supérieure. Elle correspond au sinus ouvert en dehors que présente la crête de l’os des iles, au niveau du tiers postérieur de sa longueur. Elle se trouve donc tout près de l’angle externe de la région et immédiatement au-dessous de l’insertion du sacro-lombaire à cette portion de l’os. Une seconde fossette, non moins remarquable, est située un peu plus bas, vers le milieu du bord inférieur de la région, et répond à une saillie osseuse, l’épine iliaque postérieure et supérieure, transformée en dépression par le relief des masses charnues qui s’y attachent. La fossette supérieure s’efface quelquefois par suite d’une surcharge graisseuse dont nous parlerons à l’occasion des flancs ; souvent, pour la même cause, elle est en quelque sorte refoulée un peu par en bas. La fossette inférieure est beaucoup plus fixe. C’est la seule d’ailleurs qui existe chez la femme.

La région lombaire est traversée, en son milieu, par le sillon lombaire médian qui continue la raie du dos. Large et profond, ce sillon correspond, sur le squelette, à la crête spinale transformée en gouttière par les muscles puissants qui le bordent de chaque côté. Néanmoins, il est fréquent de voir les apophyses épineuses des vertèbres lombaires se révéler à l’extérieur par une série de saillies. nodulaires occupant le fond du sillon. Ces saillies, parfois irrégulières, ne se montrent généralement qu’au nombre de trois ou quatre. Elles sont toujours fort discrètes dans la station droite. Il en est autrement dans la flexion forcée du tronc en avant, ainsi que nous le verrons plus loin.

Le sillon lombaire médian descend jusque sur le sacrum, vers la moitié inférieure duquel il s’efface complètement. Près de sa terminaison, il est marqué généralement d’une dépression (fossette lombaire médiane), située un peu au-dessus du niveau des fossettes latérales inférieures et qui correspond à l’union de la colonne lombaire et du sacrum.

Toute la surface de la région lombaire est occupée par le relief puissant des muscles spinaux recouverts, à ce niveau, par leur propre aponévrose et par celle du muscle grand dorsal. Je ne reviendrai pas ici sur la saillie que forment, à la partie supérieure de la région, les fibres charnues du muscle sur la portion aponévrotique. Au-dessous du sillon qui en résulte et qui est le sillon lombaire supérieur, on remarque quelquefois dans la station droite, surtout lorsque la cambrure est exagérée, un ou plusieurs replis transversaux qu’on est tenté de prendre, au premier abord, pour des plis cutanés, mais qui sont bien dus à un plissement de la portion charnue sous-aponévrotique de la masse commune, laquelle, dans cette situation, est dans son maximum de relâchement. En effet, on les voit disparaître aussitôt que le muscle se contracte. Et lorsqu’ils existent, il est facile, en faisant glisser la peau de la région, de constater qu’elle n’entre pour rien dans leur formation.

En dehors du relief des spinaux, apparaît un sillon surtout visible dans la flexion du tronc, c’est le sillon lombaire latéral, en dehors duquel la région des reins est déprimée et touche aux flancs.


§ 3. — Flanc. (Pl. 77, 78 et 79.)


Les flancs forment les côtés du ventre ; ils comblent l’espace laissé libre entre la base de la poitrine et l’os de la hanche. Ils répondent à la moitié inférieure du muscle grand oblique.

La limite supérieure, généralement peu distincte, est marquée par un sillon transversal large et superficiel, dû au changement de direction du muscle grand oblique qui, supérieurement accolé aux côtes, s’en détache pour aller rejoindre la crête iliaque. Ce sillon aboutit en arrière à une dépression remarquable par sa constance et correspondant à l’extrémité inférieure du thorax, au point où les côtes viennent à manquer ; c’est cette dépression qui doit porter le nom de défaut des côtes, expression souvent employée, mais peu précise.

En avant, le flanc est limité par le relief des fibres charnues du grand oblique sur l’aponévrose abdominale. En arrière, il confine à la région lombaire.

En bas, il est circonscrit par le sillon de la hanche, ou sillon iliaque. Ce dernier nom lui a été donné en raison de ses rapports avec l’os iliaque, rapports d’ailleurs faussement interprétés par la plupart des auteurs. « Le sillon iliaque, dit le docteur Fau, correspond à la crête de l’os des iles… On a déjà vu des exemples de sillons semblables creusés au niveau de parties osseuses très saillantes… »

Cette proposition est loin d’être l’expression de la vérité. En effet, si dans son tiers antérieur environ le sillon du flanc repose sur la partie correspondante de la crête iliaque, il en est tout autrement pour ses deux tiers postérieurs, qui sont situés bien plus bas que la crête osseuse et affectent une courbe en sens inverse, ce qui est de la dernière évidence, si l’on compare le profil du bassin au profil du nu. Restent à expliquer les raisons anatomiques de cette discordance, qui d’ailleurs sont multiples.


FIGURE SCHÉMATIQUE POUR MONTRER LA DIFFÉRENCE DE DIRECTION DU SILLON DE LA HANCHE ET DE LA CRÊTE DE L’OS DES ILES.

Je rappellerai ici que les fibres les plus inférieures du grand oblique s’attachent, par de très courtes fibres aponévrotiques, à la lèvre externe de la crête iliaque, de telle sorte que le pli cutané qui résulte de leur relief se forme, non pas juste au niveau de la crête osseuse, mais au-dessous. Il en résulte que, même chez les sujets doués de muscles puissants, la crête osseuse elle-même contribue à la saillie du flanc, et cela d’autant plus que les muscles fessiers, maintenus par une forte aponévrose, forment sur l’os une saillie très modérée qui ne saurait s’opposer à cette descente du pli cutané dont la direction suit, à ce niveau, une courbe légère à convexité inférieure. En outre, la présence fréquente d’une certaine quantité de graisse à la partie postérieure des flancs, ainsi que nous le dirons tout à l’heure, contribue à accentuer le détail morphologique sur lequel nous insistons ici.

En avant, au contraire, au niveau du tiers antérieur de la crête iliaque, les fibres charnues du grand oblique s’éloignent de la crête osseuse, elles sont aussi moins épaisses, et leur relief est moindre. Il en résulte qu’à ce niveau, le sillon iliaque répond exactement à la crête osseuse, décrivant une courbe à convexité supérieure. L’épine iliaque antérieure et supérieure forme toujours une petite saillie à l’extrémité antérieure de ce sillon.

Sur un torse vu de profil, le sillon iliaque affecte donc la forme d’une S étendue transversalement et fort allongée.

La surface des flancs est toujours convexe d’avant en arrière. Elle l’est également de haut en bas chez les sujets bien musclés, tandis qu’elle est concave chez les sujets maigres et qu’elle laisse apparaître le dessin de la crête iliaque.

Chez les sujets musclés, elle trahit la forme du muscle de la région, dont le maximum de saillie est en avant sur le ventre et en bas sur la hanche. Il convient toutefois de faire intervenir, dans la morphologie de la partie postérieure de la région, un nouvel élément dont le rôle n’a pas été relevé jusqu’ici, et dont l’importance, dans certaines circonstances, peut devenir considérable. Il s’agit du pannicule adipeux sous-cutané.

Nous avons, en effet, constaté chez tous les individus que nous avons observés à ce sujet, même chez les plus maigres, un épaississement, nécessairement fort variable suivant les sujets, mais constant, de la couche graisseuse qui double la peau de la partie postérieure des flancs. Lorsque cet épaississement est peu marqué, il se borne à adoucir le relief du bord postérieur du muscle grand oblique et comble le vide qui, sur l’écorché, existe en arrière entre le grand oblique et le grand dorsal à son insertion à l’os iliaque. Mais, dans un très grand nombre de cas, la graisse s’amasse en cette région et y reste parfaitement localisée, au point de faire un véritable bourrelet qui continue en arrière le relief du muscle grand oblique en avant. Je ne parle pas des gens gras, chez lesquels ce bourrelet prend un grand développement. Il existe également chez des gens maigres, où il forme en arrière une véritable saillie qui se prolonge jusqu’à la fossette lombaire latérale supérieure, comblée parfois elle-même en partie. Enfin, chez la femme, le rôle du bourrelet graisseux de la hanche est considérable. Il comble en arrière le sillon, iliaque dont on ne retrouve plus pour ainsi dire qu’une trace superficielle, il comble également la fossette lombaire latérale supérieure qui n’existe pas. Il efface, en un mot, toute barrière entre la région des flancs et la fesse, de telle façon que cette dernière paraît remonter, par en haut, jusqu’au pli de la taille, qui n’est autre que le sillon supérieur du flanc, plus accentué ici que chez l’homme. Ces formes qui sont spéciales au sexe féminin, se retrouvent quelquefois atténuées chez l’homme, de même que certaines femmes peuvent se rapprocher, sous ce rapport, du type masculin, si bien que la nature, dans l’infinie variété des formes individuelles peut présenter tous les degrés intermédiaires entre les deux types qui caractérisent les sexes.


Article IV. — BASSIN.


Le bassin présente : en avant, une région étroite et médiane, le pubis ; en arrière, les fesses très saillantes en ce sens ; en dehors, l’articulation de la hanche.


§ 1. — Pubis.


La région dit pubis repose sur l’os du même nom, la peau y est généralement doublée par de la graisse qui atténue les formes osseuses. Elle est ombragée de poils. Région d’ordinaire très saillante chez la femme. Elle est limitée en haut par un sillon transversal qui va rejoindre les plis des aines et forme avec eux l’échancrure antérieure du bassin. Sur les côtés, elle est bordée par les sillons des cuisses, qui remontent vers les aines. Elle est de forme triangulaire, et son angle inférieur porte les organes de la génération. Dans le sillon étroit que présente le bassin par en bas, on observe d’abord les attributs des sexes, puis le périnée, et en arrière l’anus dans la rainure interfessière.


§ 2. — Aisne.


Le pli de l’aine sépare la cuisse de l’abdomen. Il se dirige obliquement, de l’épine iliaque antérieure et supérieure, au pubis. Dans la station droite, la cuisse étendue sur le tronc, le pli de l’aine est représenté par un sillon large et superficiel. Mais dans la flexion, il prend l’aspect d’un pli profond qui n’est pas sans analogie avec le pli de l’aisselle, lorsque le bras retombe le long du corps. Le pli de l’aine répond au ligament de Fallope dont il suit exactement la direction. Il est maintenu par des trousseaux fibreux qui unissent la face profonde de la peau, à son niveau, au ligament sous-jacent. Ces trousseaux fibreux sont les analogues du ligament suspenseur de l’aisselle que nous étudierons plus loin. Au-dessus du pli de l’aine, proémine la surface arrondie de l’hypogastre. Au-dessous de lui un méplat, souvent vivement éclairé, répond au psoas iliaque qui se réfléchit, à ce niveau, pour gagner son insertion profonde au petit trochanter. Le pli ou sillon de la cuisse, très accentué chez les gens gras et généralement très visible chez la femme, naît, en dedans, de la rainure qui sépare la cuisse du pubis ; il contourne la racine du membre en suivant une direction très légèrement ascendante, pour se terminer, en dehors, à quelques travers de doigt au-dessous de l’épine iliaque. Il est, à ce niveau, marqué d’une dépression qui répond à l’écartement des deux muscles : couturier et tenseur du fascia lata ; c’est la fossette fémorale, que nous retrouverons en étudiant la cuisse. Il forme avec le pli de l’aine situé au-dessus de lui un angle aigu ouvert en dehors. Il s’accentue dans la flexion du membre. On rencontre souvent, du moins chez la femme, à égale distance environ de l’épine iliaque et de la fossette fémorale, un pli transversal accessoire traversant obliquement le pli de l’aine pour se continuer avec le sillon transverse qui limite supérieurement le pubis.


PLI DE L’AINE CHEZ LA FEMME.


§ 3. — Fesse.


En arrière du bassin, proémine la fesse, limitée en dedans par la rainure interfessière, en bas par un sillon courbe qui la sépare de la cuisse, en dehors par la saillie du grand trochanter, en haut par le sillon lombaire inférieur et la partie postérieure du sillon de la hanche.

Ces limites circonscrivent un espace beaucoup plus haut que large et que la fesse remplit d’un relief inégal. La saillie la plus considérable occupe la partie inférieure et interne. Elle est arrondie. Elle répond au grand fessier. En haut et en dehors, la saillie du moyen fessier est plus ferme et plus surbaissée. Un sillon peu profond et oblique sépare quelquefois la région du grand fessier de celle du moyen.

La graisse qui double toujours la peau en cet endroit joue un rôle morphologique important. Elle acquiert son maximum d’épaisseur à la partie inférieure et interne. Et la saillie de toute la région est bien plus souvent due à l’accumulation graisseuse qu’au développement musculaire. La chose est de la dernière évidence chez la femme, dont le système musculaire est généralement peu développé et dont la région fessière est néanmoins fort saillante. Les fesses fermes et en pointe de la jeunesse sont dues à un tissu adipeux dense et résistant. Les fesses aplaties des vieillards tiennent en grande partie à la disparition du même tissu. On peut remarquer en outre que, chez les individus qui présentent un développement musculaire exagéré avec un pannicule adipeux peu abondant, comme les athlètes et les gymnastes, la saillie de la fesse n’est relativement pas considérable. Elle est aplatie et, à moins que le muscle n’entre en contraction, elle présente une consistance molle et fluctuante que les fesses graisseuses ne présentent pas toujours au même degré.


PLI FESSIER DANS LA STATION DEBOUT.
La partie gauche de la figure montre les rapports avec le muscle grand fessier dont les limites en haut et en bas sont indiquées par un trait ponctué.

Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de le faire remarquer plus haut, la stéatopygie des femmes boschimanes n’est que le développement exagéré du pannicule adipeux, et il n’est pas sans intérêt de noter que, chez les Européennes, le relief des fesses est fort variable et qu’elles offrent pour ainsi dire tous les degrés d’atténuation de cette curieuse disposition anatomique.

En dehors, la saillie de la fesse est séparée du grand trochanter par une dépression due au mode d’insertion des fibres charnues sur une large aponévrose d’insertion.


PLI FESSIER DANS L’ATTITUDE HANCHÉE (FEMME).

En bas, la fesse est bornée par un sillon qui, très profond en dedans, se perd en dehors, ce qui est dû aux fibres charnues du muscle grand fessier qui descend vers la cuisse à laquelle appartient véritablement la partie la plus inférieure du muscle.

Ce sillon a une direction horizontale et croise celle du bord inférieur du muscle qui est très oblique en bas et en dehors. C’est donc à tort que les auteurs classiques établissent entre les deux une relation de cause à effet.

Le simple examen du nu suffit pour se convaincre que le pli fessier est rattaché aux parties profondes par des adhérences solides. Par exemple, dans l’attitude hanchée, le pli fessier du côté de la jambe portante se creuse profondément et forme comme un lien qui enserre solidement la racine du membre à sa partie interne, pendant que, du côté opposé, il suit le mouvement du bassin qui penche, descend plus bas et tend à s’effacer.

L’anatomie nous donne la raison de ces apparences. Ainsi que nous l’avons vu dans la partie anatomique, la face profonde de la peau non seulement contracte, au niveau du pli fessier, des adhérences avec l’aponévrose fémorale qui elle-même prend insertion à l’ischion, mais elle est rattachée au même os directement par de solides trousseaux fibreux signalés dernièrement par mon ami Paul Poirier, chef des travaux anatomiques à la Faculté[14].

Il en résulte entre le pli cutané et le bassin une connexion intime qui fait que l’un suit les mouvements de l’autre. On peut constater en effet que, si le bassin s’élève d’un côté, il entraîne avec lui le pli fessier du même côté qui se trouve alors situé sur un plan plus élevé que celui du côté opposé, et inversement, comme nous venons de le voir, dans la station hanchée.

Une autre conséquence de cette disposition, c’est que la graisse de la région est en quelque sorte contenue dans une espèce de poche formée inférieurement par les adhérences fibreuses qui vont de la peau à l’ischion, et qui, l’empêchant de descendre vers la cuisse augmente la saillie de la fesse ; C’est dans cette même poche que se trouve retenue une partie de la masse charnue du muscle qui, dans le relâchement complet, retombe en bas et en dedans sous l’influence de la pesanteur.

Quand le tronc se fléchit en avant, comme nous le verrons plus loin, le pli-fessier tend à disparaître, et le muscle contracté dessine sa forme très exactement sous la peau avec son bord inférieur très oblique en bas et en dehors. (Voy. pl. 94.)

Les attaches du pli fessier à l’ischion n’existent que dans sa partie interne où il est profond ; en dehors, ainsi que nous l’avons déjà dit, le pli fessier se perd avant d’atteindre la face externe de la cuisse, et il est remplacé par un plan incliné qui descend vers la cuisse et ménage une transition entre les deux régions voisines. Ce plan incliné est vraiment dû au muscle fessier lui-même.

Il existe quelquefois un second pli fessier situé un peu au-dessous et en dehors du précédent.

L’articulation de la hanche proémine en dehors. La saillie est formée par le grand trochanter et occasionnée par une disposition anatomique dont il est facile de se rendre compte par l’examen du squelette.

La saillie du grand trochanter est plus considérable que celle de l’os de la hanche.


Article V. — MOUVEMENTS DE L’ÉPAULE.


L’épaule est susceptible de mouvements très variés qui se résument dans les suivants : elle peut se porter en avant, en arrière et en haut, entraînant nécessairement le bras avec elle. Le mouvement d’abaissement de l’épaule n’existe guère que lorsque celle-ci a été préalablement soulevée.


§ 1. — Mécanisme articulaire.


Je rappellerai ici que le squelette de l’épaule se compose de deux os, la clavicule en avant, l’omoplate en arrière, formant une véritable demi-ceinture osseuse, embrassant latéralement le sommet de la poitrine. (Voy. page 31, pl. 16 et suiv.) L’extrémité antérieure de cet arc osseux est reliée assez étroitement à la cage thoracique par l’articulation sterno-claviculaire ; latéralement, le centre de l’arc s’éloigne du thorax et s’articule avec l’os du bras (articulation scapulo-humérale) ; enfin la branche postérieure s’en rapproche, mais sans y être rattachée plus intimement que par un simple rapport de contact. L’omoplate, en effet, doublée des muscles qui revêtent ses surfaces, est appliquée sur la cage thoracique sans autre moyen d’union que la pression atmosphérique et les muscles qui servent à provoquer et à régler ses mouvements.

Les mouvements de l’épaule se décomposent en glissements de l’omoplate contre la cage thoracique et en mouvements de moindre étendue qui se passent dans les articulations de la clavicule avec le sternum (articulation sterno-claviculaire) et avec l’omoplate (articulation omo-claviculaire). Nous ne reviendrons pas sur le mécanisme de ces petites articulations. (Voy. page 33 et pl. 11.)

Dans la station droite, les bras retombant sans effort le long du corps, le bord spinal de l’omoplate est dirigé à peu près verticalement, distant de la ligne médiane d’environ la moitié de sa longueur.

Lors de l’élévation de l’épaule, l’omoplate n’opère pas un simple mouvement de translation en haut, elle subit en même temps un léger mouvement de rotation sur elle-même, en vertu duquel le bord spinal devient oblique, l’angle interne se rapprochant de la colonne vertébrale, l’angle inférieur s’en éloignant et se portant en même temps en dehors.

Si l’on songe à l’attache solide de la clavicule au sternum par son extrémité interne et à la direction de cet os transversalement en dehors, on comprendra facilement que le mouvement de l’épaule directement en avant soit fort limité et qu’il ne devienne possible que s’il est accompagné en même temps d’un mouvement d’élévation.

En arrière, au contraire, aucun obstacle au rapprochement des omoplates ; aussi le mouvement des épaules en arrière est-il très facile. Il paraît s’accompagner, par contre, d’un léger abaissement du moignon de l’épaule ; mais il s’opère en même temps, ainsi que nous le verrons plus loin, un renversement du haut du corps en arrière qui peut faire illusion sur ce dernier point.


§ 2. — Action musculaire.


L’élévation du moignon de l’épaule directement en haut est produite par la contraction de la moitié supérieure environ du trapèze qui s’attache à la clavicule, à l’acromion et à la partie avoisinante de l’épine de l’omoplate.

Lorsque ce mouvement a lieu avec effort, comme dans l’acte de soulever un fardeau sur l’épaule, on voit s’ajouter à celle du trapèze la contraction du rhomboïde, de l’angulaire de l’omoplate, du grand rond et de la portion supérieure du grand pectoral.

Le grand dentelé reste presque totalement étranger à cette action.

L’épaule est entraînée en arrière par le tiers inférieur du trapèze et par le rhomboïde qui, tout en rapprochant l’omoplate de la ligne médiane, élève le moignon de l’épaule. Mais cette dernière action est contre-balancée par le grand dorsal qui, par l’intermédiaire de la tête de l’humérus, déprime l’omoplate de dehors en dedans et d’avant en arrière, et a en outre le pouvoir d’abaisser les épaules ; il redresse en même temps le tronc.

Lorsque ce mouvement s’accentue avec violence, comme dans l’acte d’attirer à soi un corps pesant, d’autres muscles s’ajoutent aux précédents, ce sont le grand rond et le tiers postérieur du deltoïde.

Le mouvement de l’épaule en haut et en avant est exécuté par le tiers supérieur du grand pectoral. Il exprime la crainte. S’il se produit avec violence, comme dans l’action de pousser de l’épaule un corps lourd et résistant, le grand dentelé se contracte synergiquement.


§ 3. — Attitude normale de l’épaule.


Les quelques détails qui précèdent permettent de mieux apprécier la raison de l’attitude normale de l’épaule, qui résulte naturellement des forces toniques combinées de tous les muscles qui y prennent insertion.

C’est ainsi que l’affaiblissement de la moitié supérieure du trapèze et de l’angulaire de l’omoplate occasionne un abaissement du moignon de l’épaule et, par suite, un allongement du cou. L’exagération de leur force produira un effet tout opposé.

La faiblesse de la partie inférieure du trapèze et du grand dorsal arrondit transversalement le dos, creuse la poitrine en faisant saillir les clavicules et avancer le moignon de l’épaule. La prédominance d’action tonique du grand pectoral et du grand dentelé conduit au même résultat.


§ 4. — Modifications de la forme extérieure du tronc dans les mouvements de l’épaule. (Pl. 89 et 90.)


Dans le mouvement direct de l’épaule en haut, la partie moyenne du trapèze devient très saillante, elle refoule par en haut les téguments du cou qui forment au-dessus d’elle plusieurs gros plis. La dépression scapulaire se rapproche de la ligne médiane, pendant que l’angle inférieur de l’omoplate s’en éloigne. En avant, la clavicule, dont l’extrémité externe est entraînée en haut, devient oblique, et la fosse sus-claviculaire plus profonde.

Les mouvements de l’épaule en avant et en arrière apportent les plus grandes modifications à la morphologie de tout le torse.

L’épaule portée en avant arrondit le dos, creuse la poitrine et amène l’exagération de la courbure de la colonne dorsale. Tout le modelé de la partie postérieure du tronc subit des changements que la planche 89 met bien en lumière. Sur cette figure, en effet, l’épaule droite est seule portée en avant, pendant que l’épaule gauche, demeurée dans la position normale, sert de point de comparaison. On peut ainsi constater que la région scapulaire, déplacée en dehors et en avant, présente quelque peu atténués ses reliefs habituels dus aux muscles grand rond, sous-épineux et tiers postérieur du deltoïde. La région spinale, dans la moitié supérieure, se trouve élargie transversalement, le plan du trapèze y est surbaissé et plus étendu. Au-dessous de lui, on découvre l’extrémité inférieure du rhomboïde, à son attache à l’angle inférieur de l’omoplate.

Mais la région sous-scapulaire est celle qui présente les modifications les plus importantes. En effet, entre le bord postérieur du grand dentelé et la masse des muscles spinaux, se découvre toute une région nouvelle, déjà signalée dans l’attitude du repos, mais qui acquiert ici sa plus grande étendue. C’est une surface arrondie sur laquelle se lisent plus ou moins distinctement les reliefs des côtés, et sur la limite inférieure de laquelle on peut également constater, chez quelques sujets, la saillie des différents faisceaux du petit dentelé inférieur. En dedans, apparaît très nettement le relief des muscles spinaux, dont la limite externe est marquée d’un sillon très distinct (sillon latéral du dos).

On remarquera que le grand dorsal n’entre Pour rien dans les formes qui viennent d’être décrites, et que, distendu et relâché, ce muscle se moule exactement sur les parties profondes qui seules influent sur la morphologie de la région. En dehors, au contraire, le bord antérieur du grand dorsal forme un relief puissant dont l’obliquité s’accuse en haut et en avant, et qui recouvre presque complètement les digitations du grand dentelé contracté.

Le mouvement des épaules en arrière (pl. 89, fig. 2) s’accompagne toujours de l’aplatissement du dos, de la saillie de la poitrine et du renversement du torse en arrière. Le rapprochement des omoplates n’a pour limite que le contact des masses musculaires voisines. La région spinale est réduite latéralement à sa plus petite étendue. Elle est, dans sa moitié supérieure, occupée par les reliefs musculaires puissants du trapèze doublé du rhomboïde, et ces reliefs arrivent à se toucher sur la ligne médiane. La région scapulaire se distingue par l’accentuation de ses saillies musculaires, grand rond, sous-épineux, tiers postérieur du deltoïde. Quant à la région sous-scapulaire, elle s’efface sous la contraction du grand dorsal, dont la ligne d’insertion des fibres charnues sur l’aponévrose devient très apparente. Toute la région des reins est parcourue de striations qui continuent la direction des fibres du grand dorsal, et qui sont dues à la traction de la large aponévrose qui lui sert d’insertion.

Latéralement, le bord antérieur du grand dorsal devient oblique en haut et en arrière, et découvre, dans une grande étendue, les digitations aplaties du grand dentelé non contracté.


Article VI. — MOUVEMENTS DU BRAS.


Les mouvements du bras se passent premièrement dans l’articulation scapulo-humérale qui, grâce à la disposition des surfaces articulaires, est d’une excessive mobilité et permet les déplacements du membre dans toutes les directions. Mais ils ne se complètent et s’achèvent que grâce aux déplacements associés de l’omoplate. Ainsi, dans l’élévation du bras, l’omoplate subit un mouvement de rotation en vertu duquel son angle inférieur est entraîné en dehors et en avant, pendant que l’angle supérieur s’abaisse. Le bras étendu horizontalement, porté en avant ou en arrière, entraîne l’omoplate dans le même sens.

Nous ramènerons les mouvements du bras aux suivants :

1° Mouvements dans un plan vertical et parallèle au corps. Ils se produisent autour d’un axe de rotation antéro-postérieur ; le membre supérieur parcourt ainsi presque un demi-cercle dont le centre est à l’articulation scapulo-humérale. A son départ, il s’éloigne du tronc en dehors, devient bientôt horizontal (élévation horizontale du bras), puis continuant sa course, il se rapproche par en haut de l’axe prolongé du corps jusqu’à ce qu’il atteigne, ou peu s’en faut, la verticale (élévation verticale du bras).

2° Le bras, placé préalablement dans l’élévation horizontale, peut décrire dans le plan horizontal des mouvements très étendus autour d’un axe de rotation vertical. En avant, la main dépasse la ligne médiane du corps. En arrière, ce mouvement est limité assez tôt, et le bras, dans cette direction, n’arrive à faire avec le dos qu’un angle obtus.

3° Enfin le bras exécute des mouvements de rotation sur lui-même.


§ 1. — Mécanisme et action musculaire.


Le mouvement d’élévation du bras est exécuté par le sus-épineux et le deltoïde. Le premier, muscle profond, ne se traduit guère à l’extérieur : l’épaisseur de la portion du trapèze qui le recouvre masque le plus souvent son relief. Le second, au contraire, entièrement sous-cutané, joue un rôle capital dans la morphologie de la région. Par sa contraction, le deltoïde élève le bras horizontalement, mais là est sa limite d’action. L’élévation de l’humérus est complétée par le grand dentelé (faisceau radié) qui fait tourner l’omoplate sur son angle externe.

Nous avons vu qu’au point de vue anatomique le deltoïde est formé de trois portions parfaitement séparables par la dissection ; physiologiquement, on peut le considérer comme formé de trois muscles distincts : le faisceau antérieur, le faisceau moyen et le faisceau postérieur, qui peuvent agir isolément ou même devenir antagonistes. Lorsque le mouvement se fait sans effort, chaque faisceau se contracte indépendamment et isolément pour produire l’élévation, soit en avant, soit en dehors, soit en arrière. Ces trois faisceaux sont antagonistes entre eux dans les mouvements en avant et en arrière. Enfin le faisceau postérieur est antagoniste des deux autres dans le mouvement d’élévation verticale ; il est en effet très peu élévateur, et lorsque le bras est élevé verticalement, on constate son relâchement, tandis que les deux autres sont manifestement contractés ; s’il se produit, alors, un mouvement d’abaissement du bras, on constate, au contraire, que ce faisceau postérieur entre en contraction.

D’après les auteurs, le grand dentelé ne se contracterait que lorsque le bras est déjà étendu horizontalement par le deltoïde et pour compléter l’élévation. Il est facile de constater, par l’examen des formes, que le grand dentelé agit dès le début du mouvement d’élévation, non seulement, comme le dit Duchenne de Boulogne, pour fixer le bord spinal de l’omoplate contre le thorax, mais pour commencer le mouvement de rotation qui est le propre de son action sur l’omoplate. D’ailleurs, il importe de distinguer, au point de vue de la part que prend le grand dentelé dans l’élévation horizontale du bras, car la différence est totale, suivant que la main est en même temps portée en avant ou en arrière. Le grand dentelé, en effet, peut être suppléé par la portion moyenne du trapèze, ainsi qu’il ressort de ce qui va suivre. Lorsque le bras étendu horizontalement est porté en avant, on constate une contraction énergique du grand dentelé dont les digitations s’accusent nettement. A mesure que la main se porte en dehors, le bras restant toujours dans le même plan horizontal, la contraction du grand dentelé devient moins forte en même temps que la portion moyenne du trapèze commence à se durcir. Enfin, lorsque le bras est porté en arrière à son extrême limite, le grand dentelé montre ses digitations aplaties et nullement contractées, alors que la contraction s’est faite énergique dans le tiers moyen du trapèze.

Les mouvements de rotation de l’humérus sont exécutés par le sous-épineux et le petit rond en avant, par le sous-scapulaire en arrière. Ce dernier muscle seul est sous-cutané ; mais il est bridé par une forte aponévrose, et son relief est toujours surbaissé. Ces muscles rotateurs de l’humérus jouent un rôle important dans les mouvements de supination et de pronation de la main, ainsi que nous le verrons plus loin.

Lorsque le bras est élevé verticalement, il peut retomber dans sa position normale en vertu de son propre poids, et alors ce sont encore les muscles élévateurs qui entrent en action pour modérer cette chute, plutôt que les muscles abaisseurs qui n’interviennent réellement que pour déterminer le sens du mouvement ou le produire avec force.

L’abaissement en avant et en dedans est exécuté par le grand pectoral en entier jusqu’à la direction horizontale, et, au-dessous de ce niveau, par la portion inférieure seulement du même muscle.

L’abaissement en arrière est produit par le tiers postérieur du deltoïde jusqu’à la position horizontale, puis par le grand rond, le rhomboïde, enfin par le grand dorsal et la longue portion du triceps.

L’abaissement directement en dehors est sous la dépendance de tous les muscles abaisseurs, à l’exception du tiers supérieur du grand pectoral.


§ 2. — Modifications de la forme extérieure du tronc dans les mouvements du bras. (Pl. 91, 92 et 93.)


Les planches 91, 92 et 93 nous permettront d’être bref et nous éviteront de longues et fastidieuses descriptions. Les modifications de forme portent principalement sur la région scapulaire en arrière, et sur la région pectorale en avant. Latéralement et en avant, l’élévation du bras découvre une région nouvelle fort importante au point de vue morphologique la région de l’aisselle, que nous étudierons séparément.

Le bras élevé verticalement entraîne les modifications les plus notables dans la région du dos. Elles sont la conséquence de l’action musculaire et du mouvement de bascule qu’exécute l’omoplate. Ainsi l’épine de l’omoplate, marquée par une dépression chez les sujets bien musclés, pivote pour ainsi dire sur son extrémité externe, et, de presque transversale qu’elle était, devient presque verticale. La fossette scapulaire qui marque son extrémité interne est reportée en bas et en dehors, et le plan du trapèze se trouve considérablement élargi ; le modelé en est très différent suivant les régions. Ainsi la portion moyenne du trapèze, qui s’attache à l’acromion et à la partie voisine de l’épine, forme un relief de contraction fort distinct, tandis que toute la portion du trapèze située au-dessous est au contraire aplatie, distendue et comme striée dans la direction des fibres. Le bord spinal de l’omoplate, dégagé de dessous la partie inférieure du trapèze qui le recouvre en partie dans le repos du bras, épaissi par la présence du sous-épineux qui comble la fosse sous-épineuse, forme un relief très accentué et dirigé obliquement de haut en bas et de dedans en dehors. Au-dessous de lui, se trouve une dépression triangulaire, limitée d’autre part, en dedans par le relief des spinaux, en bas par le bord supérieur du grand dorsal. Dans l’angle supérieur de cette dépression, on remarque le relief de la pointe inférieure du rhomboïde. L’angle inférieur de l’omoplate, reporté très en dehors, doublé par le grand rond, fait saillie sous le grand dorsal qui le bride et dont le bord supérieur peut, chez les gens maigres et musclés, être suivi jusque dans l’aisselle par-dessus le relief allongé du grand rond. De cet angle part, en dehors, le relief triangulaire du grand dentelé recouvert par le grand dorsal. La région sous-scapulaire est également bouleversée ; entre la saillie des muscles spinaux et le bord inférieur du grand dentelé, la cage thoracique se découvre, recouverte seulement par le grand dorsal.

Le deltoïde prend la forme d’un cœur de carte à jouer, à pointe dirigée en haut vers le bras, et ses trois portions se lisent quelquefois distinctement. Les téguments refoulés forment un pli au niveau de l’extrémité externe de la clavicule et de l’acromion.

En avant, le changement de forme de la région pectorale est également à signaler. Elle perd en largeur ce qu’elle gagne en hauteur. Le relief de son bord inférieur s’efface, et toute la portion qui supporte le mamelon est aplatie. L’angle externe est reporté très haut.

La région sous-mammaire est marquée par les digitations du grand dentelé, dont le relief s’accuse en avant de la saillie verticale du bord antérieur du grand dorsal. Dans ce mouvement d’élévation du bras, le grand dorsal relâché se moule exactement sur le relief durci du muscle grand dentelé contracté. Mais si, le bras demeurant élevé, la main tire avec énergie, soit qu’on cherche à attirer à soi un objet résistant, soit qu’on tente de se soulever par les bras, le modelé subit de grands changements ; le plan du grand dorsal durcit et s’aplanit, les faisceaux musculaires se dessinent, et les insertions aux côtes deviennent apparentes, pendant que le grand dentelé redevenu flasque est comme refoulé par en haut, et que ses digitations deviennent moins distinctes et plus obliques.

Étendu horizontalement en dehors, le bras entraîne des modifications de forme du tronc que l’étude qui précède nous permettra de comprendre facilement ; il nous suffira de faire remarquer que l’attitude dont il est question est comme l’intermédiaire entre la position du repos et l’élévation verticale. Nous retrouverons les mêmes caractères, mais avec un degré moindre d’accentuation. L’inspection des figures nous permettra de ne pas insister. Je me contenterai de faire observer que, dans cette attitude, le mouvement de rotation de l’omoplate a déjà commencé, révélant ainsi l’action synergique du grand dentelé, qui, au lieu d’être consécutive à l’action du deltoïde dans l’élévation du bras, l’accompagne dès le début, ainsi que je l’ai déjà dit. En avant, la région pectorale devient très irrégulièrement quadrangulaire, le sillon pectoro-deltoïdien se plaçant dans le prolongement de la clavicule.

Si le bras est en même temps porté en avant ou en arrière, il entraîne avec lui l’omoplate qui glisse sur la cage thoracique, s’éloignant ou se rapprochant de la colonne vertébrale. Il en résulte certaines modifications des formes que je me contenterai de rappeler, puisqu’elles se rapprochent beaucoup de celles déjà signalées dans l’étude sur les déplacements de l’épaule en avant et en arrière.


§ 3. — Aisselle. (Pl. 91.)


Lorsque le bras pend naturellement le long du corps, l’aisselle affecte la forme d’un sillon très profond à direction antéro-postérieure. Ce n’est que lorsque le bras s’écarte du tronc que ce pli, en s’élargissant, devient le creux de l’aisselle. En se portant en dehors, l’humérus entraîne avec lui les muscles du tronc qui s’y insèrent et qui forment les deux parois transversales du creux axillaire : grand pectoral en avant, grand dorsal et grand rond en arrière. En dehors, le creux de l’aisselle se trouve limité par le faisceau du biceps et le coraco-huméral, en dedans par la paroi thoracique revêtue du grand dentelé. C’est dans cet espace quadrangulaire que la peau s’enfonce sous l’influence de la pression atmosphérique. Elle est en outre maintenue en cette situation par des faisceaux aponévrotiques très résistants qui, de sa face profonde, vont s’attacher au squelette de la région (sommet de l’apophyse coracoïde, col de l’humérus, face inférieure de la capsule articulaire, col de l’omoplate), de façon à former une sorte de cloison verticale et dirigée dans le sens antéro-postérieur[15].

Les parois latérales du creux axillaire se continuent sans ligne de démarcation avec les régions voisines, la paroi interne avec le thorax, la paroi externe avec le bras. Mais les deux autres parois forment de véritables rebords, sortes de môles jetés entre le thorax et le membre supérieur. La paroi antérieure épaisse et arrondie est formée par l’enroulement des faisceaux superficiels et profonds du grand pectoral. La paroi postérieure, qui descend plus bas que l’antérieure, se compose de deux plans : supérieurement, le plan du grand rond, et au-dessous, le plan du grand dorsal qui contourne à ce niveau le bord inférieur du muscle précédent. Il résulte de l’inégalité d’étendue de ces deux parois que le creux axillaire s’ouvre en avant et en dehors, et qu’il n’apparaît point sur une figure vue par derrière.

Dans l’élévation verticale du bras, le creux axillaire change de forme. Il est alors représenté par un vaste sillon vertical bordé en avant par le grand pectoral, en arrière par le grand dorsal et le grand rond, et qui aboutit en haut à la saillie du coraco-huméral, généralement fort distincte chez les gens maigres et musclés. À ce niveau, le sillon se bifurque : sa branche antérieure, profonde et étroite, contourne le coraco-huméral, le biceps, et suit le bord du grand pectoral jusqu’à la rencontre du deltoïde ; la branche postérieure, plus superficielle, remonte vers la face interne du bras, où elle se continue avec le sillon qui sépare le biceps du triceps ; il nous faut encore signaler le sillon oblique en dehors qui, partant du creux axillaire, contourne la racine du membre supérieur séparant le grand rond d’un côté du triceps et de l’autre côté du tiers postérieur du deltoïde. L’aisselle est en cette position obliquement dirigée. Elle empiète sur la face antérieure du torse et regarde obliquement en dehors et en avant.

Nulle région n’est donc aussi variable d’aspect, puisqu’elle se modifie à tout instant avec les mouvements si variés du membre supérieur. Mais il sera toujours facile d’y reconnaître les saillies musculaires que je viens de signaler, et qui seront les meilleurs guides pour une bonne représentation de la région.


Article VII. — MOUVEMENTS DU TRONC.


Nous avons à examiner maintenant les changements de forme survenus dans les mouvements du tronc lui-même. Dans la station droite, le torse exécute des-mouvements sur lui-même et sur les membres inférieurs. Ce sont les premiers que nous avons particulièrement en vue ici, les seconds pouvant être rattachés aux mouvements de la cuisse sur le bassin. Mais on ne saurait les séparer complètement dans l’étude, parce que dans la nature ils sont souvent associés, se complètent, et parfois même se confondent, au point de ne pouvoir être distingués que par une analyse minutieuse.


§ 1. — Mécanisme articulaire.


C’est dans la colonne dorsale et lombaire que se trouve le siège articulaire des divers mouvements du tronc ; mais ces mouvements sont bien inégalement répartis entre les deux parties du rachis.

Ils sont, en effet, très minimes dans la région dorsale, et il suffira de les avoir signalés. Mais ils n’en sont pas absents, et c’est une erreur de croire que l’adjonction latérale des arcs costaux transforme la colonne dorsale en une tige rigide et immuable, n’étant plus susceptible de déplacement que dans son ensemble. Tous les mouvements de la colonne lombaire qui sont si étendus y retentissent à un certain degré, soit dans le même sens pour accroître le mouvement produit, soit en sens contraire pour le corriger, pour ainsi dire, par un déplacement dit de compensation[16].

La région lombaire du rachis, sans être aussi mobile que la région cervicale, n’en est pas moins douée de mouvements très étendus s’exécutant dans tous les sens. Ils dirigent les mouvements du torse, qui peuvent être réduits à trois sortes de mouvements principaux :

1° Autour d’un axe transversal (flexion et extension) ;

2° Autour d’un axe antéro-postérieur (inclinaison latérale) ;

3° Autour d’un axe vertical (torsion et rotation).

Dans la flexion, la cage thoracique se rapproche du bassin, et la colonne vertébrale se courbe en avant, la région dorsale accentuant sa courbure normale, la région lombaire, au contraire, effaçant la sienne pour en affecter une nouvelle en sens inverse. De telle sorte que toute la colonne dorso-lombaire suit une même direction curviligne à concavité antérieure. Le point le plus mobile m’a paru se trouver dans la partie supérieure de la région lombaire ; mais il y a de grandes variations individuelles.

Ce mouvement est limité par la résistance à la compression de la partie antérieure des disques intervertébraux, et par la distension des ligaments surépineux et interépineux. (Voy. pl. 7.)

L’extension se produit en vertu du redressement de la région dorsale et de l’exagération de la courbure normale de la région lombaire. Sa limite est plus rapidement atteinte que celle de la flexion.

Dans l’inclinaison latérale, les côtes arrivent presque au contact de la crête de l’os des iles. La direction verticale des surfaces articulaires de la colonne lombaire rend ce mouvement indépendant du mouvement de rotation, ce qui n’a pas lieu pour la colonne cervicale, ainsi que nous l’avons vu plus haut. Mais dans la nature, ces deux mouvements, rotation et inclinaison latérale, sont le plus souvent associés ; et ce n’est que pour les facilités de la description que nous les séparerons dans l’étude qui va suivre.

Par lui-même, le mouvement de rotation de la colonne vertébrale est assez limité, mais il est d’ordinaire complété par un mouvement de rotation du bassin sur les fémurs, et par une torsion des épaules qui augmentent singulièrement son étendue.


§ 2. — Action musculaire.


C’est ici surtout que je dois rappeler le rôle de la pesanteur dans le jeu musculaire, et l’espèce de paradoxe qui en résulte, d’où il suit, par exemple, que dans la flexion, ce sont les extenseurs qui se contractent, et vice versa. Mais il faut rappeler également que ceci n’a lieu que dans les mouvements peu accentués et qui n’ont aucune résistance à vaincre.

La flexion est obtenue par les muscles de l’abdomen, grand droit antérieur de l’abdomen, petit oblique et grand oblique ; l’extension par les muscles spinaux lombaires et dorsaux, par le transversaire épineux situé au-dessous d’eux et qui ne se révèle point à l’extérieur.

L’inclinaison latérale est sous la dépendance du sacro-lombaire, du carré des lombes et des intertransversaires des lombes, du grand et du petit oblique.

Dans les mouvements de rotation, deux muscles, le petit oblique et le long dorsal, dirigent la face antérieure du tronc du côté où ils sont situés. Les autres, le grand oblique de l’abdomen et le transversaire épineux, la tournent du côté opposé.


§ 3. — Modification des formes extérieures dans les mouvements du tronc. (Pl. 94 et 95.)


A. Flexion du tronc.


Après la description détaillée que nous avons donnée du tronc dans la station droite, nous nous bornerons à mentionner ici sommairement la transformation qui s’opère dans les diverses régions déjà connues.

En avant, les formes de la poitrine subissent peu de changement. Il n’en est pas de même du ventre qui diminue considérablement de hauteur. Il est divisé par un pli profond qui se creuse un peu au-dessus de l’ombilic ou à son niveau. Sur les côtés, ce pli aboutit à une dépression profonde au fond de laquelle on sent la saillie costo-abdominale qui a disparu. Il est souvent accompagné de quelques autres plis moins profonds, soit au-dessous, juste au niveau de l’ombilic, soit au-dessus. La région sous-mammaire est légèrement altérée par les téguments refoulés en haut par les plis de flexion. Enfin, le pli semi-circulaire de l’abdomen, situé à quatre ou cinq travers de doigt de l’ombilic, s’accuse davantage. Le bas-ventre tend à faire saillie, et les plis qui le bornent en bas, pli sus-pubien et pli des aines, se creusent.

Le flanc diminue de hauteur en avant, où il forme une sorte de bourrelet qui se continue avec le repli sous-ombilical, effaçant ainsi le sillon latéral du ventre. Le sillon iliaque descend un peu, et se creuse à sa partie antérieure, pendant que sa partie postérieure tend, au contraire, à s’effacer.

Sur les côtés, le bord antérieur du grand dorsal forme un vigoureux relief.

Je ne ferai que signaler les changements dans la forme du dos ; ils sont, d’ailleurs, peu considérables, et dépendent plutôt de l’éloignement du bras et du déplacement de l’omoplate qui en résulte (formes que nous avons déjà étudiées). La région sous-scapulaire se développe, et, dans sa partie inférieure, laisse voir le dessin des côtes, entre le relief formé par le bord inférieur du grand dentelé et celui des muscles spinaux.

Les modifications les plus importantes ont lieu dans la région lombaire, qui augmente considérablement d’étendue dans le sens vertical, et dont les reliefs musculaires et osseux subissent de notables changements. Mais elles diffèrent suivant le degré de flexion, et nous devons étudier cette région dans deux positions : flexion légère et flexion forcée.

Toutes les modifications de forme, sur lesquelles nous allons insister, dépendent du degré de contraction ou de distension des muscles spinaux. En effet, au début de la flexion produite par les puissances musculaires antérieures du tronc, les muscles spinaux, bien qu’extenseurs, entrent en action en vertu de la loi de synergie qui règle les muscles antagonistes : ils ont pour but de maintenir le tronc et de l’empêcher d’obéir d’un seul coup à l’action qui le sollicite en avant, et qui se trouve secondée par la pesanteur. Tout le temps que s’accuse la flexion en avant, les muscles spinaux sont donc en contraction, jusqu’au moment où, le mouvement atteignant sa limite, cette contraction devient inutile. D’ailleurs, ces mêmes muscles se trouvent alors dans un état de distension extrême qui ne leur permet pas de se contracter à nouveau sans ramener le tronc vers l’extension.

Flexion légère. — Dans la station droite, lorsque le tronc est bien en équilibre sur les fémurs, les muscles spinaux ne sont nullement contractés, pas plus que les muscles fessiers. Aussitôt que le tronc se penche un peu en avant, les uns et les autres entrent en contraction.

Les fossettes latérales lombaires se modifient, les supérieures tendent à s’effacer, pendant que les inférieures deviennent plus manifestes, à cause de la contraction des muscles environnants qui, ainsi que nous l’avons vu, sont l’unique raison de leur existence.

De chaque côté du sillon lombaire médian, au fond duquel s’accentuent les saillies des apophyses épineuses lombaires, la masse des muscles spinaux dessine plusieurs saillies différentes de forme et de volume.

Inférieurement sur le sacrum, la saillie est unique. A la hauteur de la fossette latérale inférieure, un relief interne en forme de corde se prononce, qui borde le sillon lombaire et monte en ligne droite jusque dans le haut de la région où il disparait sous les fibres du grand dorsal. Il est dû à la contraction des fibres musculaires sous-aponévrotiques du long dorsal. A son côté externe, surmontant soit immédiatement, soit à quelques centimètres de distance, la fossette lombaire latérale supérieure, on voit se former une seconde saillie plus forte que la première, globuleuse par en bas, et remontant jusque dans la région dorsale, où on la retrouve très distinctement au travers du corps charnu du grand dorsal.

Cette seconde saillie est occasionnée par le relief des fibres charnues du sacro-lombaire sur l’aponévrose spinale. Son bord interne remonte obliquement vers la colonne vertébrale qu’il atteint à des hauteurs variables suivant les sujets. Chez ceux qui ont les spinaux très développés, on voit cette saillie, passant par-dessus le relief interne déjà signalé, rejoindre la ligne médiane plus bas que le sillon du grand dorsal, au-dessous duquel elle dessine alors un second sillon dirigé dans le même sens. Ce sillon suit l’insertion des fibres charnues du sacro-lombaire et du long dorsal sur l’aponévrose spinale.

En dehors du relief du sacro-lombaire, se creuse un sillon qui descend jusqu’à la fossette lombaire latérale supérieure, sillon latéral des reins de Gerdy, le plus souvent invisible dans la station droite.

Les fesses sont étroites, globuleuses, rapprochées de la ligne médiane, et la dépression post-trochantérienne très accentuée. Nous avons vu plus haut que tels sont les signes morphologiques de la contraction des muscles fessiers.

Dans la flexion forcée, les formes que nous venons de décrire sont complètement modifiées. Les fossettes lombaires latérales inférieures sont remplacées par les saillies des épines iliaques postérieures et supérieures ; ce qui se comprend facilement, vu l’aplatissement des muscles qui les entourent. Pour la même raison, la fossette lombaire médiane est également remplacée par la saillie des vertèbres sacrées. Il existe toujours une dépression sur la ligne médiane au point de jonction du sacrum et de la colonne lombaire.

Le sillon lombaire médian a quelquefois complètement disparu, il est remplacé alors par une saillie médiane fusiforme due à la proéminence de la crête épinière lombaire. Cette saillie n’est pas uniforme, elle est marquée des renflements qui répondent aux sommets des apophyses épineuses et sont généralement au nombre de cinq. Mais il existe de grandes variétés individuelles quant au nombre et à la régularité des apophyses saillantes. A la jonction de la colonne lombaire et de la colonne dorsale, on observe d’ordinaire une dépression, au-dessus de laquelle la crête épinière dorsale est quelquefois saillante. Voilà pour les formes occasionnées par les os. Quant aux reliefs musculaires, ils offrent plus de simplicité. Il n’en existe plus qu’un de chaque côté, à une faible distance de la saillie osseuse médiane. Il est ovoïde, proportionnel au développement des spinaux ; prenant naissance au niveau des fossettes lombaires latérales, il s’atténue, en haut, aux confins de la région lombaire.

Les fesses sont larges et aplaties à cause de la distension des muscles fessiers dont les différents faisceaux tiraillés se dessinent parfois sous la peau.


B. Extension. (Pl. 96.)


L’extension du tronc paraît avoir le centre de son mouvement à la partie inférieure de la colonne lombaire. C’est à ce niveau, à la hauteur de la fossette lombaire latéro-supérieure, que se trouve le sommet de l’angle rentrant formé par le torse et le bassin ; c’est aussi là que se forment les plis cutanés transversaux.

La région lombaire est par suite notablement modifiée. Les reliefs latéraux des muscles spinaux forment deux masses arrondies, molles au toucher et marquées de gros plis transversaux dus au corps charnu lui-même relâché. Les muscles spinaux, en effet, n’entrent en contraction que si le mouvement d’extension rencontrant une résistance se produit avec effort. (Voy. p. 202.) Les fossettes lombaires se creusent, les fossettes latérales supérieures disparaissent au fond d’un pli qui se continue en dehors avec le sillon de la hanche, ou vient mourir un peu au-dessous de lui.

L’étendue des flancs diminue en arrière au voisinage des reins. Le défaut des côtes, accentué par une dépression transversale plus profonde, marque leur limite supérieure à ce niveau. Ils sont occupés dans toute leur hauteur par le bourrelet graisseux qui souvent alors se distingue du relief formé en avant par le grand oblique. En effet, le grand oblique, déprimé en avant, s’élargit sur les côtés. Il est distendu dans sa moitié antérieure où se lisent les différents faisceaux musculaires, pendant qu’il est relâché postérieurement.

L’épine iliaque antérieure et supérieure fait en avant une vive saillie ; le sillon iliaque s’efface dans sa partie antérieure, tandis que, en arrière, il est plus profond et légèrement descendu.

Le ventre dans sa totalité est distendu et aplati, et le rebord costal se dessine avec vigueur sous la peau. La poitrine ne subit pas de modifications dignes d’être notées, si ce n’est celles qu’entraînent les mouvements concomitants des membres supérieurs, et nous n’avons pas à y revenir ici.


C. Inclinaison latérale. (Pl. 97 et 98.)


La colonne lombaire s’incurve latéralement, et le sommet des apophyses épineuses est souvent visible au fond du sillon lombaire médian entraîné dans la même direction. Cette courbe du sillon lombaire médian n’est pas la même chez tous les individus ; elle est plus souvent uniforme, portant également sur toute la région, et se continuant en haut avec la raie du dos ; d’autres fois, elle est plus anguleuse, et la colonne vertébrale suit une ligne brisée, dont la cassure correspond au milieu environ de la région lombaire.

Du côté de la convexité, c’est-à-dire du côté opposé à l’inclinaison, la région lombaire est occupée par un relief dur qui remonte jusqu’à la région dorsale où il se perd ; il est dû aux muscles spinaux contractés, pendant qu’ils sont relâchés du côté opposé, où la saillie qu’ils forment est moindre et altérée par des plis transversaux se prolongeant jusque dans la région du flanc. Mais si le mouvement, au lieu de s’exécuter sans effort, a une résistance à vaincre, on voit la contraction musculaire changer de côté et les spinaux, du côté de l’inclinaison, se tendre et se durcir.

Les flancs sont les régions du tronc où se font le plus sentir les effets de l’inclinaison latérale. Des deux côtés, ils sont notablement modifiés, mais en sens inverse : d’un côté, le flanc est augmenté de hauteur, aplati, distendu ; de l’autre, il est diminué, ramassé sur lui-même, saillant. Ces changements de forme sont la conséquence naturelle du rapprochement de la cage thoracique du bassin, d’un côté, et de l’éloignement de ces deux pièces osseuses, de l’autre.

Il s’ensuit que, du côté de la flexion, le flanc forme un bourrelet saillant marqué de plusieurs plis transversaux, peu distinct en arrière de la région des reins, mieux limité en avant, et bordé en bas par le sillon de la hanche transformé en un pli profond. Supérieurement, le flanc est limité en arrière par un pli répondant au défaut des côtes, et qui, suivant l’état de contraction ou de relâchement des obliques de l’abdomen, s’arrête sur le côté ou se prolonge en avant jusqu’au voisinage de l’ombilic.

Du côté opposé, on note l’aplatissement de toute la région, l’effacement du sillon de la hanche, le relief de la crête iliaque et de la saillie costo-abdominale, l’accentuation des deux sillons latéraux qui limitent le flanc, en avant le sillon abdominal latéral, en arrière le sillon lombaire latéral.

L’abdomen n’éprouve pas, dans la région sous-ombilicale, de modifications bien appréciables. C’est au-dessus qu’existe le centre du mouvement, et c’est dans la partie sus-ombilicale que le sillon abdominal médian s’incurve latéralement, répondant en avant à l’incurvation du sillon lombaire médian en arrière ; il en résulte, dans le modelé du plan des muscles grands droits de l’abdomen, des modifications sur lesquelles il est inutile d’insister.


D. Torsion du tronc. (Pl. 99 et 100.)


Dans la station debout, la rotation du tronc s’accompagne presque inévitablement d’un mouvement de rotation du bassin sur les têtes fémorales, en même temps que d’un mouvement des deux épaules, l’une se portant en avant, l’autre en arrière.

C’est à la région du ventre et des reins que se remarquent les modifications de forme dues exclusivement à la torsion du torse. Elles sont, d’ailleurs, assez minimes, le mouvement lui-même ayant peu d’étendue. Nous remarquons que les muscles spinaux lombaires ne se contractent pas en même temps des deux côtés lorsque le mouvement est pur et exempt d’extension. Si le mouvement se fait sans effort, ce sont les spinaux du côté opposé à la direction du mouvement qui se contractent. Mais le mouvement rencontre-t-il une résistance, on voit aussitôt les spinaux du même côté entrer en contraction. Pour ce qui est des obliques de l’abdomen qui sont également des rotateurs, une distinction semblable est difficile à établir. En effet, de chaque côté nous avons deux muscles superposés, le grand et le petit oblique, dont les fibres dirigées en sens inverse agissent en sens opposé, de telle sorte que, quel que soit le sens du mouvement, il y a toujours de chaque côté un muscle contracté, soit le superficiel, soit le profond.

Les changements de forme les plus importants qu’entraîne la torsion du tronc se passent à la partie supérieure du torse et au bassin, sous l’influence des mouvements associés des épaules et des hanches. Nous n’avons pas à nous étendre ici sur les mouvements des épaules ; l’étude que nous avons faite précédemment nous en dispense, et nous retrouvons ici sur le même torse, d’un côté toutes les formes qui résultent de l’épaule portée en avant, et de l’autre toutes celles qu’entraîne l’épaule ramenée en arrière. (Voir page 194.)

Quant aux mouvements de rotation du bassin sur le fémur, ils sont exécutés par les muscles rotateurs de la cuisse, dont le point fixe est déplacé et porté du bassin au fémur. Cette rotation du bassin s’obtient par le concours des muscles antagonistes agissant de chaque côté du corps, par exemple : les rotateurs en dedans à droite, en même temps que les rotateurs en dehors à gauche. Du côté où le mouvement se dirige, ce sont les rotateurs en dedans qui se contractent, pendant que du côté opposé ce sont les rotateurs en dehors qui entrent en action.

C’est ainsi que nous trouvons, dans les régions de la fesse et de la hanche, de grandes différences d’un côté à l’autre du corps. Du côté opposé à celui où se dirige le mouvement, du côté droit, par exemple, si le tronc se tourne vers la gauche, on voit la moitié postérieure du moyen fessier (rotateur en dehors) faire en haut de la fesse un relief fort distinct, le grand fessier lui-même est contracté et le creux post-trochantérien plus accusé ; pendant que de l’autre côté, à gauche, c’est la partie antérieure du moyen fessier (rotatrice en dedans), soulevée par la moitié antérieure du petit fessier, qui fait relief.


FIGURES SCHÉMATIQUES POUR LES MOUVEMENTS DU BASSIN DANS LA ROTATION DU TRONC.
A, bassin dans l’attitude normale ; P, pubis ; S, sacrum ; T, grand trochanter. B, rotation du torse sur la gauche. Le bassin, entraîné dans le même sens, pivote sur les deux têtes fémorales, et ce mouvement s’exécute sous l’action des muscles rotateurs du fémur dont le point fixe se déplace et au lieu d’être au bassin se transporte sur l’os de la cuisse : ce sont, à droite, les rotateurs en dehors R’, et, à gauche, les rotateurs en dedans R.

CHAPITRE III

FORMES EXTÉRIEURES DU MEMBRE SUPÉRIEUR


Je rappellerai que, dans l’attitude de convention du type choisi pour l’étude, le membre supérieur est placé en extension avec supination, la paume de la main tournée en avant.

J’étudierai successivement l’épaule, le bras, le coude, l’avant-bras, le poignet et la main.


Article premier. — ÉPAULE. (Pl. 80, 81 et, 82.)


Nous n’avons à nous occuper ici que de la partie la plus saillante de l’épaule, désignée vulgairement sous le nom de moignon de l’épaule. La région scapulaire qui, au point de vue anatomique, appartient à l’épaule, a été étudiée plus haut avec le tronc, dont on ne saurait la séparer morphologiquement.

De forme arrondie, le moignon de l’épaule dépasse en dehors la saillie de l’acromion. Un seul muscle, le deltoïde, soulevé lui-même par la tête humorale, occupe la région limitée en avant par le sillon oblique pectoro-deltoïdien, et confondue en arrière, sans limite précise, avec la région scapulaire où pénètre le tiers postérieur du muscle. Saillante en avant et en haut, plus aplatie en arrière, la surface deltoïdienne se déprime en dehors et en bas, au niveau de l’insertion inférieure du muscle, et reproduit, en les adoucissant, les formes de l’écorché. En effet, la peau, en ce point, est doublée d’une assez grande quantité de graisse qui atténue la dépression deltoïdienne, pendant que des adhérences qui l’unissent aux parties profondes en maintiennent la constance.


Article II. — BRAS. (Pl. 80, 81 et, 82.)


D’une forme générale cylindrique chez les sujets peu musclés et chez la femme, le bras est aplati latéralement chez les gens dont le système musculaire possède un certain développement. Il présente alors dans le sens antéro-postérieur une plus grande étendue que dans le sens latéral.

Toute la partie antérieure du bras est occupée par le relief allongé du biceps (voy. p. 111), bordé par deux sillons latéraux que la contraction du muscle accentue, pendant que le biceps lui-même prend un aspect globuleux. Dans le mouvement de rotation en dedans du membre supérieur, le sillon externe s’efface, et un nouveau sillon oblique en bas et en dehors coupe le bord externe du muscle et ne saurait être attribué qu’à une disposition de l’aponévrose d’enveloppe. Le sillon interne qui sépare le biceps du triceps est comblé en partie par les vaisseaux et les nerfs du membre supérieur réunis en cet endroit.

La moitié postérieure du bras a moins d’uniformité que la moitié antérieure ; le relief du triceps, bien plus considérable que celui du biceps, l’occupe en entier. Dans le relâchement musculaire, la forme en est pleine et arrondie ; dans la contraction, on voit s’y dessiner très nettement les diverses portions du muscle. (Voy. p. 112.) En bas se dessine le large méplat, oblique en haut et en dehors, du tendon commun, entouré des reliefs des masses charnues dont la plus volumineuse, située en haut et en dedans, est due à la longue portion, pendant que, en dehors, se trouve le relief du vaste externe, et, tout à fait en bas et en dedans, celui encore moins volumineux du vaste interne. Deux sillons plus ou moins distincts séparent entre elles les trois portions du muscle.

Sur la face externe du bras, les deux muscles biceps et triceps, séparés en haut par l’insertion du deltoïde, s’écartent encore plus l’un de l’autre au fur et à mesure qu’ils descendent. L’espace qu’ils interceptent est occupé par un plan triangulaire à surface légèrement saillante, séparée des deux muscles voisins par deux sillons superficiels et répondant au muscle brachial antérieur et à l’extrémité supérieure du long supinateur. Un sillon accessoire, qui sépare ces deux derniers muscles, ne devient évident que dans la flexion avec effort (pl. 104, fig. 1) ou dans la pronation. (Pl. 101, fig. 3.)

Deux veines parcourent le bras dans le sens de sa longueur et sur les côtés : en dedans, la basilique, qui se cache dans le sillon interne ; en dehors, la céphalique, qui remonte sur le bord externe du biceps pour gagner le sillon pectoro-deltoïdien.


Article III. — COUDE. (Pl. 80, 81 et, 82.)


La région du coude prend le nom de saignée dans sa partie antérieure. Elle est intermédiaire au bras et à l’avant-bras, et répond, sur le squelette, à l’articulation de l’humérus avec le cubitus et le radius. Elle est aplatie dans le sens antéro-postérieur.


Saignée. (Pl. 80.)


Trois reliefs musculaires s’y distinguent : l’un, médian et supérieur, est formé par l’extrémité inférieure du biceps, dont les fibres charnues descendent plus ou moins bas sur le tendon, suivant les individus. Les deux autres, latéraux et inférieurs, circonscrivent par en bas le relief médian.

De ces deux reliefs, l’interne, plus élevé, arrondi, est formé par l’extrémité supérieure du rond pronateur ; l’externe, déprimé et situé sur un plan plus reculé, répond au long supinateur. Entre le plan de ce dernier muscle et la saillie médiane du biceps, s’observe une surface plus ou moins étendue, suivant que le biceps lui-même descend plus ou moins bas, et où le brachial antérieur se trouve sous-cutané.

Il résulte de cette disposition que le pli de la saignée, circonscrit par ces trois reliefs musculaires, a, dans l’extension du membre, la forme d’un V ouvert supérieurement, et dont la branche externe est la plus profonde. Vers la pointe du V, on sent la corde formée par le tendon du biceps ; cette corde devient très saillante lors de la flexion. Lorsque la flexion est portée à sa dernière limite, la saignée prend la forme d’un pli transverse très profond.

Les veines qui occupent la face antérieure du coude dessinent la forme d’un M dont le V central est formé par la réunion de la veine médiane céphalique en dehors et de la veine médiane basilique en dedans. Cette dernière est généralement la plus volumineuse et la plus apparente. Les jambages latéraux de l’M répondent, en dehors, à la veine radiale, en dedans, à la veine cubitale. (Pl. 72.)

La région est parcourue transversalement par plusieurs plis cutanés de flexion assez rapprochés et situés au niveau du tendon du biceps.

En dehors de ce tendon, ces plis sont marqués d’une dépression qui peut recevoir la pulpe du doigt et qui s’accentue chez les sujets gras et chez la femme, alors que tous les autres accidents de la région tendent à s’effacer. En outre, on distingue deux autres plis superficiels, dirigés transversalement, et qu’un léger degré de flexion met en évidence. Ils affectent chacun une direction légèrement curviligne, dont la concavité regarde le centre de la région ; ils sont situés à une assez grande distance des premiers l’un, supérieur, traverse la saillie du biceps à plusieurs centimètres au-dessus du tendon ; l’autre, inférieur, descend jusque sur la face antérieure de l’avant-bras.


Coude proprement dit. (Pl. 81.)


La partie postérieure de la région porte plus particulièrement le nom de coude. On y voit vers le milieu, mais plus près du bord interne que de l’externe, la saillie de l’olécrane surmontée, dans l’extension, d’un repli transversal cutané. Chez les gens gras et souvent chez la femme, un pli transversal se creuse pendant que s’efface la saillie olécranienne, et ce pli profond domine toute la morphologie de la région.

L’olécrane est bordé en dedans par une gouttière qui le sépare de l’épicondyle. Au fond de cette gouttière passe le nerf cubital. En dehors, on observe une dépression remarquable par sa constance et bordée en haut par le relief du premier radial externe. Cette dépression est située au niveau du condyle de l’humérus, d’où le nom de dépression condylienne qui lui convient. On sent, en effet, avec la plus grande netteté, à son niveau, le condyle et la tête radiale avec l’interligne articulaire qui les sépare. Cette dépression existe chez la femme et chez l’enfant, où elle forme la fossette du coude.

Entre l’olécrane et la dépression condylienne se trouve un méplat triangulaire, dont la base, tournée en dedans, se confond avec le bord externe de l’olécrane, et dont le sommet se perd dans la susdite dépression. Ce méplat répond au muscle anconé.

Des deux bords de la région, l’un, proéminent, est situé en dedans ; on y observe la pointe de l’épitrochlée surmontée, chez les gens maigres, de la saillie en forme de corde due à la cloison intermusculaire interne. Le bord externe est formé par le relief puissant du long supinateur et du premier radial externe qui comblent l’angle rentrant que décrit le squelette à ce niveau.


Article IV. — AVANT-BRAS. (Pl. 80, 81 et 82.)


L’avant-bras est aplati dans le sens antéro-postérieur, contrairement à ce qui arrive pour le bras qui, ainsi que nous l’avons vu, est aplati latéralement. D’où il suit que, sur le profil latéral (pl. 82), le maximum de largeur du membre supérieur est au bras, pendant que, sur la face antérieure ou postérieure (pl. 80 et pl. 81), le maximum de largeur est situé à la moitié supérieure de l’avant-bras. Dans la moitié inférieure environ, l’avant-bras diminue de volume et se rapproche de la forme cylindrique.

Ces changements dans le volume du membre dépendent de la structure des muscles de la région qui, pour la plupart, se composent d’une masse charnue supérieure et d’un long tendon qui occupe la partie inférieure de l’avant-bras. La proportion entre la portion charnue d’un muscle et sa partie tendineuse n’est pas la même pour tous les individus. Nous avons vu plus haut qu’il existe des sujets à muscles longs et d’autres à muscles courts. Cette loi générale a pour la région qui nous occupe des conséquences faciles à prévoir. Chez les gens à muscles courts, la portion inférieure, tendineuse, mince de l’avant-bras, dominera et formera un contraste saisissant avec la partie supérieure, charnue, plus massive ; pendant que, chez les gens à muscles longs, c’est cette partie supérieure qui l’emportera et, empiétant sur la portion tendineuse, donnera à l’ensemble du membre un aspect fusiforme plus puissant et moins heurté.

La face antérieure ou palmaire, aplatie dans son ensemble, offre en haut deux reliefs musculaires latéraux, séparés par un méplat médian. Le relief externe, uniforme, est constitué par le corps charnu du long supinateur, soutenu par le premier radial externe, qui le déborde un peu en dehors. Le relief interne est dû au groupe des muscles épitrochléens qui forment plusieurs masses distinctes. La saillie du rond pronateur, que nous avons vue au pli du coude, occupe la partie supérieure. Elle est séparée par un sillon très superficiel oblique en bas et en dehors, d’une seconde saillie qui est due aux palmaires soutenus par les fléchisseurs, et qui se continue avec le bord interne du membre.

L’expansion fibreuse du tendon du biceps coupe obliquement ces saillies musculaires internes, les bride et devient parfois la cause d’un sillon perpendiculaire à la direction des fibres charnues.

Chez les sujets peu musclés, ces deux masses musculaires, qui se partagent la partie supérieure et antérieure de l’avant-bras, sont séparées par un sillon large et superficiel parallèle à l’axe du membre ; mais, chez les sujets bien musclés, ce sillon disparaît en partie et est remplacé par un méplat. Ce qui résulte de ce que les deux groupes musculaires se joignent au milieu et se recouvrent même partiellement, le bord interne du long supinateur passant au devant du grand palmaire. (Voy. p. 117.)

A la partie inférieure, la face palmaire de l’avant-bras se rétrécit, elle offre une surface plus arrondie et parcourue en son milieu par deux cordes tendineuses que nous retrouverons au poignet et que nous étudierons alors, ainsi que les gouttières qui les avoisinent.

La face postérieure de l’avant-bras est parcourue par plusieurs saillies musculaires distinctes. Elle est naturellement divisée en deux parties par la crête du cubitus transformée en sillon par les muscles voisins. En dedans, se trouve une surface uniforme parcourue par des veines et se continuant avec le bord interne du membre. Cette surface répond au muscle fléchisseur profond des doigts recouvert par le cubital antérieur qui, par l’intermédiaire de l’aponévrose antibrachiale, prend insertion tout du long de la crête du cubitus. En dehors, sont placés les muscles qui appartiennent plus spécialement à la face postérieure de l’avant-bras, et dont les reliefs, obliquement dirigés de haut en bas et de dehors en dedans, apparaissent d’une façon très distincte dans l’extension du membre avec effort. C’est tout d’abord, parallèlement au sillon cubital, le relief du cubital postérieur qui semble se continuer supérieurement avec le plan de l’anconé, puis en dehors, la saillie plus étendue de l’extenseur commun, avec laquelle se confond généralement celle de l’extenseur propre du petit doigt. Cette saillie de l’extenseur naît en haut de la dépression condylienne par une partie étroite. Un nouveau sillon la sépare en dehors des muscles du bord externe, que nous allons étudier maintenant.

Le bord externe de l’avant-bras est occupé par trois reliefs musculaires échelonnés de haut en bas, et qui, sur le profil, décrivent trois courbes distinctes. C’est, tout en haut, la courbe du premier radial externe, qui se continue avec celle du deuxième radial externe pour embrasser la partie supérieure charnue de l’avant-bras. Puis, inférieurement, dans la portion tendineuse, une nouvelle courbe est formée par les deux petits corps charnus du long abducteur du pouce et du court extenseur du pouce accolés. Le relief allongé de ces deux muscles naît, sur la face postérieure, en dehors de la saillie des extenseurs, et se dirige obliquement vers le bord externe du membre pour mourir au poignet, où nous retrouverons les tendons auxquels il donne naissance. Au-dessus d’eux, le relief du deuxième radial externe est fort net, fusiforme, terminé en pointe inférieurement et dirigé dans le sens de l’axe du membre. Il est contigu, en arrière, au relief de l’extenseur. En haut, il est séparé du premier radial externe par un petit sillon oblique qui forme dépression sur le profil. Le corps charnu de ce dernier muscle se confond avec celui du long supinateur, pour constituer une masse qui, d’abord externe au niveau du coude, se dirige ensuite obliquement vers la face antérieure de l’avant-bras, où nous l’avons décrite.

Quant au bord interne de l’avant-bras, il offre une surface de transition uniformément arrondie entre la face antérieure et la face postérieure.

Les veines croisent obliquement les bords de la région, se dirigeant de la face dorsale du poignet vers la région antérieure du coude. Au nombre de plusieurs de chaque côté, elles forment, à proprement parler, deux groupes : en dehors les veines radiales, en dedans les veines cubitales. On distingue encore un groupe médian à la face palmaire de l’avant-bras, celui des veines médianes qui se rendent aux jambages moyens de l’M de la saignée.


Article V. POIGNET. (Pl. 80, 81 et 82.)


Le poignet, région intermédiaire entre la main et l’avant-bras, ne possède point de limites naturelles précises qui le séparent des deux segments du membre supérieur qu’il unit. De forme générale aplatie, comme l’avant-bras, il offre à l’étude une face antérieure ou palmaire, une face postérieure ou dorsale et deux bords latéraux.

La face palmaire est sillonnée transversalement par des plis de flexion généralement au nombre de trois. Ils suivent une direction légèrement oblique, leur extrémité interne étant plus élevée que l’externe. Le pli inférieur est le plus accusé, il borne en haut le talon de la main et décrit plusieurs ondulations. Le pli moyen, situé à moins d’un centimètre au-dessus, décrit une seule courbe très légère à concavité inférieure ; enfin le pli supérieur, situé bien plus haut, affecte une direction semblable et se trouve être le plus superficiel. Il s’accentue, et devient très manifeste aussitôt que se produit une flexion même légère de la main sur l’avant-bras.

En outre de ces plis cutanés, ce qui frappe quand on examine la face antérieure du poignet, ce sont les deux cordes longitudinales formées par les tendons des deux palmaires. Elles ne suivent pas exactement l’axe du membre, mais se dirigent un peu obliquement de haut en bas et de dedans en dehors. La corde la plus interne, la plus grêle et en même temps la plus saillante appartient au petit palmaire dont le tendon passe au-dessus du ligament antérieur du carpe. Elle occupe à peu près le milieu de la région. En dedans du petit palmaire, une surface déprimée qui répond aux tendons des muscles fléchisseurs conduit au relief du tendon du cubital antérieur situé tout au bord interne. En dehors du grand palmaire, il existe une gouttière large, peu profonde, où se sent la saillie de l’extrémité inférieure du radius et bordée en dehors par le tendon du long abducteur du pouce.

Au point où aboutit le tendon du grand palmaire, le poignet présente une saillie médiane due au scaphoïde. Cette saillie se confond en bas et en dehors avec l’éminence thénar, elle est séparée par une légère dépression de l’éminence hypothénar, au-dessus de laquelle s’isole, tout près du bord interne, la saillie du pisiforme ; ce dernier relief remonte plus haut que les précédents.

La face dorsale du poignet doit les principaux traits de sa morphologie au squelette de la région. En dehors, l’extrémité inférieure du radius forme une large surface saillante. En dedans et sur un plan plus élevé, se voit la saillie plus circonscrite de l’apophyse styloïde du cubitus. Enfin, au milieu, les tendons des muscles extenseurs que nous retrouverons à la main, sont ici accolés les uns aux autres et ne forment point, comme plus bas, des reliefs distincts.

Les deux bords du poignet dessinent sur les silhouettes du membre vu de face deux échancrures peu profondes. Le bord interne, épais, étend sa surface légèrement aplatie entre deux saillies tendineuses, le tendon du cubital antérieur en avant, et le tendon du cubital postérieur en arrière.

Le bord externe est parcouru, en son milieu et dans la direction de l’axe du membre, par les deux tendons réunis du long abducteur du pouce et du court extenseur ; en arrière de ces tendons, se creuse, au-dessous de l’apophyse styloïde du radius, une dépression limitée d’autre part par le tendon oblique du long extenseur du pouce et que l’on désigne sous le nom de tabatière anatomique.


Article VI. — MAIN. (Pl. 80, 81 et 82.)


La main termine le membre supérieur. Elle se compose de la main proprement dite et des doigts.

Les détails si complexes de la morphologie de la main sont trop connus pour que nous entreprenions ici des descriptions qui deviendraient vite fastidieuses et sont pour le moins inutiles. Je me contenterai d’établir la relation de la forme extérieure avec les dessous anatomiques.


Main proprement dite.


La main proprement dite, aplatie d’avant en arrière, présente une face antérieure ou paume de la main, une face postérieure ou dos de la main et deux bords latéraux libres ; le bord inférieur donnant naissance aux doigts.

La paume de la main, déprimée à son centre, se relève sur les bords en plusieurs saillies différentes de forme et de volume. La plus forte est située en dehors, elle répond à la base du pouce et porte le nom d’éminence thénar. Elle est composée de deux plans : l’un supérieur, saillant et ovoïde, repose par en haut sur les saillies osseuses du scaphoïde et du premier métacarpien, il répond à un groupe musculaire dont le relief uniforme ne se subdivise jamais ; l’autre, situé plus bas, déprimé et d’une étendue moindre, répond à l’extrémité externe d’un seul muscle, le court adducteur du pouce, qui devient superficiel en cet endroit. Au côté interne de la main, l’éminence hypothénar, due au groupe musculaire qui porte le même nom, s’étend dans toute la hauteur de la région, se continuant sans limites précises avec le creux médian d’un côté et avec le bord cubital de la main de l’autre. En haut, les deux éminences thénar et hypothénar se rejoignent, sans se confondre toutefois, et forment ce qu’on appelle le talon ou racine de la main. Plus bas, ces deux éminences s éloignent l’une de l’autre en s’écartant de l’axe du membre et circonscrivent ainsi le creux de la main, limité en bas par une autre saillie allongée dans le sens transversal et répondant aux reliefs des articulations métacarpo-phalangiennes. Cette dernière saillie n’est pas uniforme, elle reproduit d’ailleurs dans son ensemble la courbe du métacarpe à concavité antérieure, c’est-à-dire qu’elle se relève par ses deux extrémités qui répondent à la base de l’index et à la base du petit doigt. Elle est en outre marquée, dans l’extension des doigts, de petites saillies qui correspondent aux espaces interdigitaux et sont occasionnées par de petits pelotons graisseux refoulés par la tension que subissent, au niveau de chaque doigt, les parties aponévrotiques intimement adhérentes à la face profonde de la peau.

La paume de la main dépasse donc par en bas les limites du métacarpe, puisqu’elle comprend dans sa charpente osseuse les extrémités supérieures des premières phalanges qui concourent à la formation des articulations métacarpo-phalangiennes. Enfin la dépression centrale qui constitue le creux de la main est maintenue par les adhérences de la peau à l’aponévrose palmaire qui en occupe toute l’étendue.

La paume de la main est sillonnée de plis fort nombreux, mais qui peuvent se réduire à quatre, deux principaux et deux accessoires. Ils sont occasionnés par les mouvements de flexion des doigts et d’opposition du pouce.


PLIS DU POIGNET ET DE LA MAIN.

L’éminence thénar est circonscrite, en dedans et en bas, par un long sillon curviligne qui s’accuse dans les mouvements d’opposition, c’est le pli du pouce. D’autre part, dans la flexion des doigts, on voit se dessiner, à quelques centimètres de leur base, un pli transversal légèrement courbe et qui, né sur le bord interne, vient mourir dans l’espace interdigital de l’index et du médius. Il répond à la flexion des trois derniers doigts, c’est le pli des doigts. Le pli de flexion de l’index se confond avec la partie la plus inférieure du pli du pouce. Tels sont les deux plis principaux qui se trouvent doublés en quelque sorte par deux autres plis moins profonds. Ainsi en dedans du pli du pouce, on voit un sillon qui, né de la racine de l’éminence hypothénar, se dirige en ligne droite vers la commissure de l’index et du médius. Il s’accuse dans le mouvement d’opposition du pouce et du petit doigt. Gerdy a désigné ce sillon sous le nom de sillon longitudinal, c’est l’accessoire du pli du pouce. Enfin un autre sillon oblique naît de l’extrémité inférieure du sillon du pouce pour se diriger vers le milieu du bord cubital de la main ; c’est l’accessoire du pli des doigts. On a dit que les différents sillons de la main dessinaient un M majuscule. Les deux jambages extrêmes en seraient formés par le pli du pouce et par le pli des doigts, et les deux sillons accessoires par leur rencontre formeraient le V central.

La face dorsale, ou dos de la main, reproduit dans son ensemble la forme générale convexe transversalement du squelette. La partie culminante répond au deuxième métacarpien. La surface de la région est le résultat des formes combinées des éléments anatomiques qui la composent et qui sont multiples. Je nommerai d’abord les métacarpiens, et dans leurs intervalles, les muscles interosseux qui forment saillie ; le premier interosseux dorsal, entre le premier et le deuxième métacarpien, mérite une mention spéciale ; puis les tendons des muscles, qui du centre du poignet se dirigent, en divergeant, vers chaque doigt ; puis enfin les méandres plus ou moins capricieux des veines, qui, venues des doigts, décrivent sur le métacarpe une arcade plus ou moins irrégulière à convexité inférieure.

Le bord interne de la main est arrondi, plus épais en haut qu’en bas, et formé par la masse charnue des muscles de l’éminence hypothénar qui débordent en dedans le cinquième métacarpien.

Le bord externe doit être divisé en deux parties : l’une supérieure qui porte le pouce, l’autre inférieure qui répond à l’articulation métacarpo-phalangienne de l’index. Le premier métacarpien est situé sur un plan antérieur par rapport à celui des autres métacarpiens ; il est en outre dirigé obliquement en bas et en dehors ; sa face antérieure regarde en dedans, de sorte que sa face dorsale est dirigée en arrière et en dehors. Cette face dorsale est parcourue par deux tendons, l’un parallèle à l’os et qui s’arrête à l’extrémité supérieure de la première phalange, c’est le tendon du court extenseur ; l’autre, le tendon du long extenseur, est oblique. Distant en haut du précédent, il y est accolé au niveau de l’articulation métacarpo-phalangienne et se prolonge jusqu’à la dernière phalange. Ces deux tendons sont très visibles dans l’extension avec abduction du pouce. Dans ce mouvement, une commissure très étendue relie le pouce à la base de l’index. Cette commissure, formée par un repli de la peau, offre un bord libre, mince, dirigé en dehors et légèrement échancré.

Enfin le bord inférieur de la main porte les doigts reliés à leur base par des replis cutanés qui occupent la face palmaire et le plan le plus inférieur de la commissure. En effet, les commissures interdigitales sont taillées obliquement dans l’épaisseur de la main, de telle sorte que, du pli cutané palmaire inférieur qui répond au milieu de la phalange, elles remontent vers le dos de la main, jusqu’au niveau de l’articulation métacarpo-phalangienne.

Ce bord inférieur est convexe. Il remonte très peu vers le doigt indicateur et beaucoup plus vers le petit doigt.


Doigts.


Il résulte de la disposition spéciale sur laquelle je viens d’insister et qui concerne les rapports des doigts avec la main proprement dite, que tous les doigts (je ne parle pas du pouce) sont plus longs vus par leur face dorsale que par leur face palmaire. A la face dorsale, en effet, les doigts commencent à l’articulation métacarpo-phalangienne, tandis qu’à la face palmaire, la paume de la main qui descend jusque vers le milieu de la première phalange, recouvrant toute l’articulation métacarpo-phalangienne, diminue d’autant la longueur du doigt.

Je ne m’étendrai pas sur les différences de volume et de longueur des doigts. Le médius descend le plus bas, l’index arrive à peine à la racine de l’ongle du médius, tandis que l’annulaire atteint à peu près au milieu de la hauteur de l’ongle du même doigt. L’index dépasse le pouce de ses deux dernières phalanges, et l’annulaire dépasse le petit doigt de la dernière phalange seulement.

Irrégulièrement cylindriques, les doigts offrent quatre plans distincts, l’un antérieur ou palmaire, l’autre postérieur ou dorsal, et les deux autres latéraux. Le dos des doigts reproduit assez exactement la forme des phalanges osseuses. Il est arrondi, marqué au niveau des articulations des phalanges avec les phalangines de plis transversaux figurant une ellipse et de quelques plis superficiels au niveau de l’articulation suivante. L’extrémité du doigt se termine par l’ongle situé à la face dorsale.

La face palmaire est divisée en trois parties par les plis de flexion. Le pli supérieur sépare les doigts de la paume de la main et se perd sur les côtés dans les commissures interdigitales. Il est double pour les deux doigts du milieu, médius et annulaire, qui paraissent un peu étranglés à ce niveau. Des trois segments, celui du milieu est le plus court. Le pli qui le limite en haut est généralement double. Celui du bas est simple. La peau de la face palmaire est doublée d’un tissu cellulaire dense et élastique, abondant surtout à la dernière phalange où il forme la pulpe du doigt. Les plans latéraux des doigts sont plus simples, présentant la terminaison des plis qui se voient à la face dorsale et à la face palmaire.

Chaque doigt se compose donc de trois segments qui portent le nom des os qui leur servent de squelette, les phalanges, les phalangines et les phalangettes.

Le pouce n’a que deux segments, la phalange et la phalangette.


Article VII. — ROTATION DU MEMBRE SUPÉRIEUR.


Les mouvements d’élévation du membre supérieur dans les différents sens ont été étudiés avec le tronc, en raison des modifications qu’ils amènent dans la forme extérieure de cette partie du corps. Mais nous avons réservé l’étude des mouvements de rotation qui se trouve ici plus à sa place, en raison des connexions intimes que la rotation de l’humérus présente avec les mouvements de pronation et de supination de l’avant-bras.


§ 1. — Mécanisme.


En tournant sur elle-même, la tête de l’humérus, par sa partie articulaire à peu près sphérique, glisse sur la cavité glénoïde de l’omoplate, et ce mouvement s’exécute autour d’un axe qui passe par le centre de la tête humérale et se continue par en bas avec celui autour duquel se font les mouvements de pronation et de supination de l’avant-bras. Son étendue ne dépasse pas l’angle droit, ainsi qu’il est facile de s’en rendre compte sur le vivant, en prenant l’épitrochlée comme point de repère. On voit, en effet, que cette éminence osseuse décrit dans ce mouvement à peine un quart de cercle. Mais ce mouvement de rotation, ainsi commencé au bras par la rotation de l’humérus, est continué à l’avant-bras par les mouvements de pronation et de supination.

Ces derniers mouvements se passent dans les articulations qui réunissent les deux os de l’avant-bras par leurs extrémités inférieures et supérieures. Dans l’articulation supérieure, la tête du radius tourne sur elle-même au milieu du ligament annulaire qui l’entoure ; dans l’articulation inférieure, l’extrémité inférieure du radius, entraînant la main avec elle, décrirait autour de la tête du cubitus, si on la supposait immobile, un arc comprenant environ les deux tiers de sa circonférence.

Mais dans ce mouvement de rotation de l’avant-bras, le radius n’est pas, ainsi qu’on l’enseigne généralement, le seul os qui se déplace. Le cubitus y contribue également par un mouvement en sens inverse, ainsi que nous l’avons indiqué plus haut. (Voy. p. 49.) Pour bien étudier ce mouvement à l’état d’isolement, il faut le considérer, l’avant-bras ayant été préalablement fléchi. On constate, en effet, que cette flexion n’entrave en aucune façon la rotation des deux os de l’avant-bras, qui devient absolument indépendante de la rotation de l’humérus. Si l’on recherche alors quelle est la situation relative des deux os de l’avant-bras aux divers degrés du mouvement de rotation, on remarque ce qui suit. Dans l’attitude de supination, les deux os sont étendus côte à côte et parallèlement, mais non tout à fait dans le même plan, le radius étant situé sur un plan un peu antérieur à celui du cubitus. Aussitôt que le mouvement de pronation commence, la tête du radius roule dans son anneau cubito-fibreux, et les extrémités inférieures des deux os se déplacent en sens inverse : le radius vient en avant, le cubitus passe en arrière. Au fur et à mesure que la pronation s’accentue, le croisement des deux os s’accuse davantage. Enfin à la limite du mouvement, l’extrémité inférieure du cubitus devient externe et l’extrémité inférieure du radius devient interne ; mais les deux os n’arrivent pas à se placer dans le même plan transversal qu’ils occupaient au début du mouvement. Ils demeurent dans un plan oblique assez proche. Il en résulte que le mouvement de chaque extrémité osseuse n’est pas tout à fait d’une demi-circonférence.

Si l’on additionne l’étendue de rotation de chaque segment du membre, rotation humérale et rotation antibrachiale, on voit que le mouvement exécuté par le membre tout entier ne dépasse guère trois quarts de cercle.

Ce qui est d’ailleurs clairement démontré par l’étude de la forme, et ce que les figures des planches 101, 102 et 103 mettent en lumière. En effet, dans la supination, attitude du départ, la paume de la main est tournée en avant ; elle se dirige en dedans dans la demi-pronation, elle regarde en arrière dans la pronation, puis en dehors dans la pronation forcée qui est la limite du mouvement de rotation. Mais elle n’arrive jamais à se replacer la paume en avant comme dans l’attitude première, ce qui serait si le tour qu’elle exécute était complet.


§ 2. — Action musculaire.


Les mouvements de rotation du membre supérieur se produisent en grande partie sous l’action de muscles profonds. Ainsi la rotation en dedans de l’humérus est produite par le sous-scapulaire, muscle caché sous l’omoplate. Son action est complétée par le grand rond, qui apparaît à la région scapulaire, et par deux autres muscles superficiels dont l’influence sur les formes extérieures est considérable, le grand dorsal et le grand pectoral. Mais ces deux derniers muscles n’interviennent que dans les mouvements violents. La rotation en dehors est produite par deux muscles de la région scapulaire, le sous-épineux et le petit rond.

A l’avant-bras, la supination est due au court supinateur et aussi un peu au biceps ; la pronation, au carré pronateur enfoui dans les couches profondes de la région antérieure de l’avant-bras, au rond pronateur et, accessoirement, au long supinateur.


§ 3. — Modifications des formes extérieures. (Pl. 101, 102 et 103.)


Dans l’extension du membre supérieur, le mouvement de pronation et de supination de l’avant-bras n’est pas indépendant du mouvement de rotation du bras. Le membre étant en supination, dès que la pronation commence, on voit presque en même temps un léger mouvement de rotation du bras se produire, mais il convient d’ajouter que ce mouvement de rotation est très peu marqué dans toute la première partie du mouvement, et ce n’est que lorsque la pronation de l’avant-bras arrive à sa limite que la rotation humérale s’accentue franchement, continuant et complétant la rotation antibrachiale.

Nous ne séparons point, dans l’étude qui va suivre, la rotation du bras de celle de l’avant-bras. Nous étudierons les modifications morphologiques dans toute l’étendue du membre, dont le mouvement de rotation comporte quatre degrés représentés sur les planches 101, 102 et 103, la supination, la demi-pronation, la pronation et la pronation forcée.

Les formes du tronc lui-même sont modifiées par ces mouvements. En avant, le grand pectoral, relâché dans la supination, se contracte au fur et à mesure que se produit la rotation. Dans la pronation forcée, il est dur, saillant, globuleux, les faisceaux secondaires se dessinent à sa surface. En arrière, les omoplates, d’abord rapprochées et portées en arrière, s’éloignent ; le moignon de l’épaule a tendance à se porter en avant, ce qui arrive à la fin du mouvement. Le deltoïde, d’abord au repos, subit un mouvement de torsion sur lui-même, ses faisceaux distincts parfois sous la peau ont subi, lorsque le membre est à la limite extrême du mouvement, une sorte d’enroulement autour de la tête humérale ; les muscles du bras, biceps et triceps, subissent un enroulement de même sorte qui se traduit, dans les formes extérieures, par l’obliquité des saillies musculaires et des sillons qui les séparent.

L’avant-bras éprouve dans sa forme générale des changements considérables. Aplati en supination, il est arrondi en pronation, ce qui résulte de la superposition des os qui se croisent. Les planches 101, 102 et 103 sont destinées à éviter de longues et difficiles descriptions. L’artiste suivra facilement, grâce aux croquis anatomiques qui les accompagnent, les déplacements des différents muscles. Il faut noter que le poignet conserve à peu près sa forme aplatie. Il est plus étroit dans la pronation que dans la supination.


Article VIII. — MOUVEMENTS DU COUDE.


§ 1. — Mécanisme.


Je rappellerai que l’articulation du coude est une véritable charnière qui ne permet qu’une seule sorte de mouvement (voy. page 49) : mouvements de flexion et d’extension autour d’un axe transversal passant par l’extrémité intérieure de l’humérus. Cet axe n’est pas perpendiculaire à celui du membre, mais un peu oblique de haut en bas et de dehors en dedans, de sorte que l’avant-bras ne se fléchit pas directement sur le bras, et que la main, au lieu de joindre l’épaule, se porte en dedans.

Dans la flexion, les faces antérieures de l’avant-bras et du bras n’arrivent au contact que dans la partie voisine de l’articulation.

Ce mouvement est limité par la rencontre de l’apophyse coronoïde avec la cavité de même nom de l’humérus. L’extension ramène les deux segments du membre dans la même direction. Il arrive même parfois que la limite est dépassée et que l’avant-bras forme avec le bras un angle obtus ouvert en arrière. J’ai observé cette disposition, que l’on pourrait ranger parmi les déformations acquises, chez quelques sujets qui avaient souvent répété avec violence les mouvements d’extension, comme il arrive pour les boxeurs.


§ 2. — Action musculaire.


L’extension est produite par deux muscles superficiels, l’anconé et le triceps brachial, dont l’importance au point de vue morphologique n’échappera à personne.

Chacune des portions latérales du triceps amène l’extension de l’avant-bras avec une force égale. Par contre, le faisceau moyen ou longue portion est faiblement extenseur, il est principalement destiné à fixer solidement la tête humérale contre la cavité glénoïde pendant les mouvements d’abaissement du bras.

La flexion de l’avant-bras sur le bras est produite par trois muscles fléchisseurs qui ont chacun une action spéciale. Le biceps est en même temps supinateur ; le long supinateur, contrairement à sa dénomination, est à la fois fléchisseur et pronateur ; le brachial antérieur est seul fléchisseur direct et indépendant.

Les mouvements de pronation et de supination de l’avant-bras s’exécutent très bien, ainsi que je l’ai déjà fait remarquer, lorsque l’avant-bras est fléchi. Si ces mouvements sont faits avec effort, les muscles adducteurs et abducteurs du bras entrent en contraction. C’est ainsi que, pendant la supination, on voit le coude se rapprocher du corps, tandis qu’il s’en éloigne lors de la pronation.


§ 3. — Modifications des formes extérieures. (Pl. 104.)


Les formes du membre supérieur, l’avant-bras étant en extension sur le bras, ont été déjà décrites, puisque cette extension fait partie de l’attitude du type conventionnel choisi pour l’étude. A la partie postérieure du bras, le modelé du triceps contracté ne se dessine que lorsque l’extension est portée à son extrême limite ou produite avec effort. En effet, lorsque le bras tombe naturellement le long du corps, la pesanteur suffit à maintenir l’extension, qui n’est jamais alors tout à fait complète.

Lorsque la flexion se produit, on voit que le triceps est distendu et que la face postérieure du bras subit un certain aplatissement. Par contre, en avant, le biceps devient globuleux, il forme une saillie qui augmente avec l’effort déployé et avec le degré de flexion. Le brachial antérieur est aussi contracté, et son relief externe apparaît plus distinct, bordé par des sillons plus profonds.

Si la flexion se produit, l’avant-bras étant en demi-pronation, et si elle est maintenue à angle droit avec persistance de l’effort musculaire comme dans l’acte de maintenir un poids (pl. 104), on voit très nettement le long supinateur se dessiner sous la peau et faire un relief distinct de celui du premier radial externe, avec lequel il est confondu dans toutes les autres positions du membre. L’expansion tendineuse du biceps, tendue par la contraction du muscle, coupe d’un sillon profond la masse interne des muscles de l’avant-bras.

La flexion de l’avant-bras peut s’accompagner de tous les degrés de pronation ou de la supination ; il en résulte des formes complexes que je signale sans les décrire.

Enfin lorsque la flexion est portée à la dernière limite, le coude prend une forme anguleuse dont la pointe est formée par l’olécrane.


Article IX. — MOUVEMENTS DE LA MAIN.


§ 1. — Mécanisme.


Les mouvements de la main sur l’avant-bras sont de deux espèces. Ils se passent autour de deux axes :

a) Autour d’un axe transversal, mouvement de flexion et d’extension ;

b) Autour d’un axe antéro-postérieur, mouvement d’adduction et d’abduction.

La flexion et l’extension ont leur siège dans les articulations radio-carpienne et médio-carpienne.

La flexion est plus étendue que l’extension. La flexion atteint facilement l’angle droit, c’est-à-dire que la main se place dans un plan perpendiculaire à celui de l’avant-bras, à condition toutefois que les doigts soient étendus. En effet, si le poing est fermé, le mouvement de flexion a moins d’étendue, et la main ne forme plus avec l’avant-bras qu’un angle obtus, ce qui tient à ce que les muscles extenseurs des doigts, distendus déjà par la flexion des doigts, ne permettent pas à la main de descendre davantage.

Dans l’extension, la main forme toujours avec l’avant-bras un angle obtus ouvert en arrière. Mais la flexion simultanée des doigts augmente le degré d’extension de la main, pour une raison analogue à celle que je viens de signaler à propos du mouvement inverse et qui réside dans la distension que font subir aux muscles fléchisseurs les extenseurs des doigts.

Les mouvements d’adduction et d’abduction ont lieu dans l’articulation radio-carpienne. Ils sont peu étendus ; l’adduction l’est beaucoup plus que l’abduction, qui est très limitée.


§ 2. — Action musculaire.


Les muscles extenseurs sont au nombre de trois, ayant chacun une action spéciale.

Le second radial externe est extenseur direct, le premier radial externe est extenseur abducteur, et le cubital postérieur, extenseur adducteur.

Si le mouvement se fait avec effort, les trois muscles se contractent simultanément. La flexion des doigts s’accompagne toujours de la contraction synergique des extenseurs du poignet.

Les fléchisseurs sont également au nombre de trois.

Ce sont : le grand palmaire, le petit palmaire et le cubital antérieur.

Ces muscles ne sont ni adducteurs ni abducteurs. Ils sont synergiques des extenseurs des doigts. Leur situation superficielle à l’avant-bras rend facilement appréciable le relief qu’ils forment lorsqu’ils entrent en contraction.


Inclinaison latérale.


La main s’incline latéralement sur le bord radial de l’avant-bras, abduction, ou sur le bord cubital, adduction. Le premier mouvement est produit par le premier radial externe et le long abducteur du pouce, le second par le cubital postérieur.


§ 3. — Modifications des formes extérieures.


Dans la flexion du poignet, le talon de la main se trouve refoulé par en bas, des plis cutanés nombreux se dessinent, et les tendons des muscles fléchisseurs font de fortes saillies à la face antérieure du poignet. Ces saillies sont variables, suivant que les muscles en action meuvent les doigts ou le poignet. Il en est de même de la face antérieure de l’avant-bras qui est modelée différemment, suivant que ce sont les fléchisseurs des doigts on les fléchisseurs du poignet qui entrent enjeu. En arrière, la surface du poignet se développe et s’arrondit. Le grand os dont la tête se découvre fait une saillie médiane, au-dessus de laquelle se retrouvent les deux saillies latérales des extrémités inférieures des os de l’avant-bras.

Le mouvement d’extension efface au poignet les plis de flexion de la région antérieure. Le relief du scaphoïde s’exagère, et les tendons des deux palmaires distendus se perdent au voisinage du poignet. En arrière, le sommet de l’angle formé par la main et l’avant-bras est comblé par une sorte de plan incliné intermédiaire situé près du bord radial, et qui repose sur les tendons des deux radiaux, au-dessus de leur insertion au métacarpe. Des plis cutanés limitent par en haut et par en bas ce plan des radiaux. A l’avant-bras, le corps charnu des mêmes muscles se dessine vigoureusement.


Article X. — MOUVEMENTS DES DOIGTS.


§ 1. — Mécanisme et action musculaire.


Dans la flexion, les différents segments des doigts arrivent à former entre eux un angle droit, généralement dépassé dans l’articulation phalango-phalangienne. Il faut faire une exception toutefois pour le pouce, dont l’angle de flexion est moindre. Dans l’extension, les phalanges se placent en ligne droite. Ce mouvement a généralement plus d’étendue dans les articulations métacarpo-phalangiennes, et les doigts forment un angle obtus ouvert en arrière avec le dos de la main.

Il y a d’ailleurs, sous ce rapport, de grandes variétés individuelles. Les mouvements de l’index ont une grande liberté, mais les trois derniers doigts sont plus ou moins dépendants les uns des autres.

Les mouvements de flexion et d’extension existent seuls entre les diverses phalanges, mais les articulations métacarpo-digitales sont en outre susceptibles de mouvements de latéralité, en vertu desquels les doigts s’éloignent de l’axe de la main (abduction) ou s’en rapprochent (adduction).

Le pouce doit ses mouvements étendus et variés à la mobilité du premier métacarpien, d’où résultent les mouvements d’opposition. Nous avons insisté plus haut sur l’attitude normale du pouce placé sur un plan antérieur et dirigé la face palmaire un peu en dedans. Dans les mouvements d’opposition, la face palmaire de la phalangette du pouce s’oppose successivement à l’extrémité des autres doigts. Ce mouvement est secondé, pour le petit doigt, par la mobilité très grande des deux derniers métacarpiens et surtout du cinquième qui vient, par un mouvement analogue, à la rencontre du premier.

L’action musculaire qui dirige tous les mouvements des doigts est fort complexe. Sa connaissance, indispensable au médecin, nous semble inutile aux artistes. Il nous suffira de rappeler qu’un certain nombre des muscles qui meuvent les doigts ont leur corps charnu à l’avant-bras, dont le modelé devra donc subir des changements, même dans les mouvements limités aux doigts.

Je signalerai en outre l’action synergique des fléchisseurs des doigts et des extenseurs du poignet dans le poing fermé, et celle du cubital postérieur dans les mouvements d’abduction du pouce.


§ 2. — Modifications des formes extérieures.


Je serai bref dans ces descriptions de formes extérieures que tout le monde connaît et a constamment sous les yeux. Dans la flexion, les plis dorsaux des doigts s’effacent, et les saillies osseuses angulaires qui les remplacent sont dues à l’extrémité inférieure de l’os qui occupe la partie supérieure de l’articulation. Dans l’articulation métacarpo-digitale, la tête du métacarpien est surmontée par la corde tendue du tendon extenseur, d’où résulte l’aspect anguleux de la forme extérieure qui ne répond point à la surface arrondie de la tête osseuse. A la face palmaire, les plis des doigts se creusent. A la paume de la main, les plis que nous avons décrits s’accusent davantage, plis de flexion des doigts, plis de flexion du pouce. Dans le mouvement d’opposition du pouce aux autres doigts, le creux de la main devient plus profond, pendant que la face dorsale s’arrondit.

CHAPITRE IV

FORMES EXTÉRIEURES DU MEMBRE INFÉRIEUR


Nous étudierons successivement la cuisse, le genou, la jambe, le cou-de-pied et le pied.


Article premier. — CUISSE. (Pl. 83, 84, 85 et, 86.)


La cuisse n’est fusiforme et arrondie que chez les sujets gras et chez la femme. Lorsque la musculature est un peu développée, la cuisse est formée de trois masses distinctes qui répondent aux trois groupes musculaires que nous avons étudiés plus haut, et qui sont ainsi disposées : en avant et en dehors, la masse du quadriceps ; en dedans et en haut, la masse des adducteurs ; en arrière, la masse des muscles de la région postérieure.

La masse antéro-externe occupe toute la face externe de la cuisse et une partie seulement de la face antérieure. En dehors, elle commence au-dessous du grand trochanter, et descend jusqu’au genou ; elle est due au relief du vaste externe bridé par la forte aponévrose, désignée sous le nom de fascia lata, et dont le muscle tenseur, situé à la racine du membre, fait une saillie très distincte qui passe au devant du grand trochanter. Le relief du vaste externe est limité en arrière par un sillon profond, sillon latéral externe ; en avant, il se confond avec la saillie du droit antérieur et du vaste interne. Limitée en dedans par le plan oblique du couturier, cette saillie occupe la partie antérieure et inférieure de la cuisse. Elle succède, tout en haut, à une dépression déjà signalée sous le nom de dépression fémorale, et occasionnée par l’écartement des deux muscles qui s’attachent à l’épine iliaque antérieure et supérieure, le couturier et le tenseur du fascia lata.

Le fond de la dépression fémorale repose sur le tendon du droit antérieur qui disparaît à ce niveau pour gagner l’épine iliaque antérieure et inférieure, où il prend insertion. Le corps charnu du même muscle, situé au milieu de la face antérieure de la cuisse, reproduit en avant la courbure du fémur, sur lequel il repose. Il ne forme un relief distinct que dans la contraction ; ce relief fusiforme est marqué, en son milieu, d’un méplat dû à la disposition de l’aponévrose supérieure du muscle.

En bas et en dedans de la cuisse, le vaste interne dessine une sorte de masse ovoïde dont la pointe se perd, en haut, entre le droit antérieur et le couturier, et dont la grosse extrémité descend jusqu’au niveau du milieu de la rotule, si nous y comprenons un relief souvent distinct formé par les fibres les plus inférieures, désigné par Gerdy sous le nom de repli sus-rotulien et que nous étudierons avec le genou.

Le plan du couturier ne mérite guère de description spéciale ; il coupe obliquement la cuisse, passe de la face antérieure à la face interne et répond exactement au muscle décrit plus haut. (Voy. p. 127.) Supérieurement, ce plan est parfois réduit à un sillon plus ou moins large. Toute la masse des adducteurs est située en haut et en arrière de lui. Cette masse occupe, en effet, l’angle décrit par le couturier et le pli de l’aine, puis elle descend, en augmentant de puissance et de volume, pour occuper toute la partie interne et supérieure de la cuisse. Elle est composée par la réunion de tous les muscles adducteurs auxquels vient se surajouter le droit interne ; mais aucun de ces muscles ne s’accuse individuellement. Elle se continue en arrière sans ligne de démarcation avec la masse postérieure de la cuisse ; sa surface est parcourue par la veine saphène interne.

En arrière, la cuisse forme, dans sa partie supérieure, un relief arrondi qui s’étend du bord interne jusqu’au sillon latéral externe. En haut, ce relief est séparé de la fesse par le pli fessier ; il va en s’affaiblissant et en se rétrécissant par en bas, où il se trouve bordé par deux sillons : l’un, en dedans, qui limite d’autre part le méplat formé par les tendons du droit interne, du demi-tendineux et du demi-membraneux ; l’autre, en dehors, qui n’est qu’une division du sillon latéral externe de la cuisse. Nous retrouverons ces deux sillons au jarret.

Chez les sujets gras, les reliefs musculaires s’effacent, et la cuisse, ainsi que je l’ai déjà dit, prend un aspect fusiforme et arrondi. C’est ce qui a lieu communément chez la femme. Je dois en outre rappeler qu’il existe parfois chez celle-ci un véritable paquet adipeux à la partie supérieure et externe de la cuisse. (Voy. page 145.) C’est là une disposition que l’on trouve à son plus haut degré de développement chez les Boschimanes et les Hottentotes, ,en même temps que la stéatopygie, mais dont il est très fréquent d’observer, dans la race blanche, divers degrés d’atténuation.


Article II. — GENOU. (Pl. 83, 84, 85 et 86.)


Région intermédiaire à la cuisse et à la jambe, le genou répond à l’articulation fémoro-tibiale qui en détermine la forme générale. Les condyles du fémur surmontant les tubérosités du tibia constituent une masse quadrangulaire, en avant de laquelle proémine la rotule haut située et dont l’extrémité inférieure descend à peine jusqu’à l’interligne articulaire. Le genou présente donc quatre faces : la face antérieure et les deux faces latérales gardent plus particulièrement le nom de genou, la face postérieure forme le jarret.

La contraction des muscles de la cuisse amène de grands changements dans la morphologie de la région antérieure du genou. La station debout ne s’accompagne pas nécessairement de la contraction du muscle extenseur de la jambe, qui est le muscle quadriceps ; mais, lorsque ce muscle se contracte, on voit la rotule s’élever, s’appliquer plus exactement contre les surfaces osseuses, les téguments se tendre, et certains reliefs s’effacer.

Nous devons, pour l’instant, décrire le genou, le membre dans l’extension et dans le repos musculaire qui accompagnent d’ordinaire la station debout.

Au milieu de la région, la rotule proémine. Sa base, tournée en haut, présente deux angles arrondis, en arrière desquels se creusent deux fossettes (fossettes péri-rotuliennes). Sa face antérieure est plus arrondie qu’elle ne l’est sur le squelette, à cause de la présence d’une bourse séreuse, interposée entre elle et la face profonde de la peau. Son angle inférieur, qui se continue avec le tendon rotulien se trouve d’ordinaire masqué par un léger soulèvement transversal de la peau rejoignant les deux saillies latérales formées par les pelotons adipeux sous-rotuliens, dont le relief déborde de chaque côté les angles supérieurs de la rotule.

Sur la ligne médiane et au-dessous de la rotule, le tendon rotulien ne se révèle à l’extérieur que pendant la contraction du quadriceps. Dans le relâchement musculaire, il est souvent coupé par un pli cutané profond dirigé transversalement, et qui s’accuse d’autant plus que le relâchement musculaire est plus grand. On trouve ce sillon très profond sur la jambe portante du « Doryphore » de Polyclète (fig. p. 233). Quand ce sillon n’existe pas, toute cette région sous-rotulienne a l’aspect d’un relief cordiforme, dont la pointe descend au niveau du tubercule antérieur du tibia où s’attache le tendon rotulien et dont la base qui correspond aux deux saillies latérales adipeuses embrasse la pointe d’une seconde saillie plus petite, mais de forme analogue, et constituée par la rotule elle-même.

Au-dessus de la rotule s’étend un méplat qui répond au tendon inférieur du droit antérieur et qui est bordé latéralement par les saillies inégales des extrémités inférieures du vaste interne et du vaste externe.

Cette région sus-rotulienne mérite d’être étudiée avec quelques détails. J’y ai signalé, il y a déjà plusieurs années, quelques particularités intéressantes qui trouvent tout naturellement leur place ici.

Gerdy après avoir décrit la saillie du vaste interne, ajoute : « Le relief du vaste interne est souvent masqué ou altéré au-dessus de la rotule par un repli sus-rotulien de la peau dirigé en bas et en arrière. Ce repli est dû, soit à une disposition sous-cutanée, soit à la diminution de l’élasticité de la peau ; aussi ne l’observe-t-on si souvent chez l’adulte et le vieillard que parce que cette membrane, depuis longtemps tiraillée par la flexion répétée du genou, ne pouvant plus revenir sur elle-même, faute d’élasticité, se replie quand la jambe est étendue[17]. »

Cette opinion est encore aujourd’hui généralement acceptée ; elle me paraît cependant consacrer une erreur et une confusion une erreur parce que la saillie signalée par Gerdy est un relief musculaire ; une confusion parce que, si parfois il existe un repli réellement cutané, il présente une direction et une localisation complètement différentes de celles qui ont été indiquées par cet auteur. Le repli sus-rotulien de Gerdy est formé par la partie la plus inférieure du corps charnu du vaste interne, faisant une saillie distincte du reste du muscle dans de certaines conditions et sous l’influence d’une disposition anatomique spéciale. Les fibres les plus inférieures du vaste externe produisent souvent un relief analogue.


GENOU PENDANT LE RELACHEMENT DU MUSCLE QUADRICEPS.
(Plan antérieur.)

GENOU, LE MUSCLE QUADRICEPS CONTRACTÉ.
(Plan antérieur.)

Ces formes, que l’on peut désigner sous le nom de saillies inférieures du vaste interne et du vaste externe, apparaissent avec la plus grande évidence dans l’extension du membre qui accompagne la station hanchée. Elles coïncident avec le relâchement musculaire, et sont d’autant plus accusées que le relâchement est plus complet. Lorsque le muscle se contracte (le membre étant toujours en extension), elles s’atténuent, et même chez certains sujets disparaissent complètement. La saillie inférieure du vaste interne, malgré un léger degré de flexion, persiste parfois chez les sujets très fortement musclés mais généralement elle disparaît, ainsi que celle du vaste externe, par l’effet de la distension des muscles, résultat d’une plus grande flexion du membre.


GENOU PENDANT LE RELACHEMENT DU MUSCLE QUADRICEPS.
(Plan latéral externe.)

GENOU, LE MUSCLE QUADRICEPS CONTRACTÉ.
(Plan latéral externe.)

Enfin, contrairement à ce que pensait Gerdy, ces formes existent souvent chez les plus jeunes sujets et aussi chez les femmes (voy. p. 234), mais atténuées, et parfois plus ou moins masquées par le tissu graisseux sous-cutané.

Les artistes, les anciens comme les modernes, ont représenté ces reliefs musculaires avec une sincérité et une exactitude vraiment remarquables[18].

Au point de vue morphologique, ces reliefs ont les caractères suivants. Celui du vaste externe, le plus haut situé, a une forme arrondie plus ou moins écrasée ; celui du vaste interne représente une sorte de bourrelet dirigé obliquement de haut en bas et de dehors en dedans. Inférieurement, il descend jusqu’au niveau de la partie moyenne de la rotule[19].

En arrière, il se prolonge par une extrémité arrondie jusqu’à la saillie allongée du couturier. (Pl. 86.) En haut et en avant, il remonte en s’atténuant jusque vers la ligne médiane de la cuisse, où il se termine.

Quelquefois un soulèvement de la peau établit une sorte de pont qui réunit, les deux reliefs et traverse obliquement le méplat rotulien.


GENOU DROIT (JAMBE PORTANTE) DU « DORYPHORE » DE POLYCLÈTE.

J’ai signalé plus haut la raison anatomique de ces reliefs musculaires partiels. (Voy. p. 126.) Elle réside dans la présence, à la partie inférieure de l’aponévrose fémorale, d’une véritable bride aponévrotique sur la disposition de laquelle je n’ai pas à revenir ici. Il me suffira de rappeler qu’elle termine en quelque sorte par en bas le fourreau aponévrotique résistant, qui maintient les muscles de la partie antérieure de la cuisse. Dans le relâchement du quadriceps, les extrémités charnues du vaste interne et du vaste externe viennent faire hernie au-dessous d’elle. Par l’étranglement que ses fibres exercent sur le corps charnu du vaste interne, elle détermine le sillon qui limite supérieurement le relief inférieur et le sépare de celui que forme au-dessus le corps même du muscle. Ce sillon varie de profondeur suivant les individus, et ces variétés ne sauraient dépendre que du degré de tension de la bride et de la condensation plus ou moins grande, à ce niveau, des fibres aponévrotiques qui la composent.

Au lieu d’être, ainsi que le pensait Gerdy, une forme de convention et le signe d’une distension des tissus, indice de sénilité, le relief inférieur du vaste interne est une forme naturelle, en relation directe avec le développement musculaire. Il appartient à tous les âges, mais c’est un modelé accidentel ; il ne se produit que dans certaines attitudes du membre, et il doit être classé parmi ces modifications incessantes des formes que le mouvement imprime aux diverses parties du corps humain. L’intérêt qui s’attache à son étude n’en est pas moins grand, car il est, au même titre que le relief dû à la contraction musculaire, mais dans un sens opposé, un signe révélateur de l’état physiologique dans lequel le muscle se trouve, et il appartient essentiellement à l’anatomie du vivant.

Un repli sus-rotulaire d’origine cutanée se rencontre quelquefois. Je l’ai observé nettement sur le vieillard, mais il occupe une tout autre place que celle assignée par Gerdy. Il est immédiatement situé au-dessus de la rotule, recouvrant l’extrémité inférieure du tendon du droit antérieur. Enfin, signe absolument distinctif, le pli d’origine cutanée qui se produit également dans l’extension de la jambe, s’accuse davantage lors de la contraction du quadriceps, à cause de l’élévation de la rotule qui en résulte, tandis que le relief musculaire s’atténue ou s’efface lorsque le muscle entre en action, ainsi que je l’ai dit. On comprend que chez certains sujets, les deux replis, l’un cutané, l’autre musculaire, puissent exister simultanément et confondre leurs formes[20].


GENOUX DE FEMME.
(Pan antérieur.)

Je reviens maintenant à la description des faces latérales du genou.

La face externe paraît déprimée à cause des reliefs que forment au-dessus d’elle les muscles de la cuisse, et au-dessous d’elle ceux de la jambe ; la face interne, au contraire, est saillante.

La face externe du genou est parcourue, de haut en bas et vers son milieu, par la terminaison du sillon latéral externe de la cuisse. De chaque côté de ce sillon, on voit deux saillies longitudinales, inégales de relief et d’aspect, et qui, toutes deux, se terminent en bas à une éminence osseuse. La saillie antérieure surbaissée, aplatie, répond au faisceau tibial du fascia lata. Elle se continue par en haut avec la masse du vaste externe, elle masque un relief plus puissant, mais qui ne se produit que dans la flexion, et est dû aux fibres charnues du crural ; enfin, elle se termine à la tubérosité externe du tibia. La saillie postérieure arrondie, plus volumineuse, est formée par le tendon du biceps fémoral et par les fibres charnues de la courte portion. Elle naît, en haut, dans l’angle formé par le sillon latéral externe de la cuisse et la bifurcation de ce sillon qui descend vers le jarret. En bas, elle se termine à la tête du péroné.

La face interne du genou est divisée à peu près en deux parties égales par le sillon qui longe le bord antérieur du muscle couturier. Dans la moitié antérieure on remarque, en allant de haut en bas, l’extrémité postérieure du relief inférieur du vaste interne, puis une surface arrondie, correspondant aux deux tubérosités contiguës du fémur et du tibia, et divisée quelquefois par une dépression linéaire transversale au niveau de l’interligne articulaire. Plus en avant, se trouvent échelonnées de haut en bas les saillies dues à l’angle interne de la rotule, au coussinet adipeux et au tendon rotulien. La partie postérieure de la région est plus uniforme. On y voit le plan de l’extrémité inférieure du couturier dont les fibres charnues descendent plus ou moins bas, mais généralement dépassent le niveau de l’interligne articulaire, puis en arrière un méplat dû à la réunion des tendons du droit interne, du demi-membraneux et du demi-tendineux. Inférieurement la face interne du genou se continue sans ligne de démarcation précise avec le plan tibial que nous décrirons tout à l’heure et qui appartient à la jambe.


Jarret. (Pl. 84.)


Le jarret qui se creuse dans la flexion du membre, forme, dans l’extension, un relief longitudinal qui dépasse en haut et en bas les limites de la région, pour se confondre avec les masses musculaires postérieures de la cuisse et de la jambe. Ce relief s’étrangle vers la partie moyenne. Il est formé, en haut, par le bord interne du biceps et l’extrémité inférieure du demi-membraneux qui s’isole souvent en un relief ovoïde distinct, en bas, par l’extrémité supérieure des deux jumeaux. Le creux en forme de losange, intercepté sur l’écorché par ces différents muscles, est comblé par des vaisseaux, des nerfs et de la graisse, si bien que la forme extérieure n’en conserve aucune trace.

Deux sillons bordent latéralement le relief médian du jarret. Le sillon externe est le plus profond, il suit le tendon du biceps, puis remonte obliquement pour rejoindre le sillon latéro-externe de la cuisse ; il descend en bas, jusque derrière la tête du péroné.

Le sillon interne plus superficiel se continue en haut avec le sillon ou le plan du couturier, inférieurement il décrit une courbe qui embrasse le genou dans sa concavité tournée en avant et le sépare des jumeaux. Ce sillon est souvent plus marqué chez la femme que chez l’homme, en raison de la graisse qui s’accumule d’ordinaire dans toute la région interne du genou. Sur son parcours il est marqué de plusieurs dépressions, dont la plus inférieure est située à la rencontre du pli cutané de flexion.


SILLON ET PLIS DU JARRET.

Situé vers la partie inférieure de la région, ce pli cutané est étendu transversalement et un peu obliquement de bas en haut et de dedans en dehors. Il correspond, dans la profondeur du membre, à l’interligne articulaire dont il croise un peu obliquement la direction. Peu visible lorsque le membre est étendu et chez les gens maigres, il s’accuse chez la femme et généralement chez les sujets dont le pannicule adipeux est un peu abondant.

Le jarret se trouve ainsi encadré par deux saillies latérales déjà décrites à propos de la face interne et de la face externe du genou c’est en dehors la saillie du biceps et en dedans le méplat tendineux qui conduit au plan du couturier. Dans la flexion, ce méplat dessine les cordes saillantes des divers tendons qui le composent : tendon du droit interne en avant, et en arrière tendon du demi-membraneux et du demi-tendineux réunis. Ils forment ensemble le bord interne du creux du jarret, dont le bord externe descendant moins bas est formé par le tendon du biceps crural.


SILLONS ET PLI DU JARRET CHEZ LA FEMME.


Article III. JAMBE. (Pl. 83, 84, 85 et 86.)


Le squelette de la jambe, formé de deux os d’inégal volume et placés côte à côte, est entouré, de trois côtés seulement, par des muscles qui se groupent en deux masses distinctes, une masse antéro-externe et une masse postérieure de beaucoup la plus importante. En dedans, la face interne du tibia est sous-cutanée dans toute son étendue.

Renflée en son milieu, la jambe s’amincit en bas parce que, à ce niveau, les muscles qui la composent deviennent tendineux. Cet amincissement se produit plus ou moins brusquement, plus ou moins haut, suivant que les fibres charnues s’arrêtent plus ou moins haut sur les tendons, et que les muscles appartiennent au type des muscles courts ou à celui des muscles longs.

La masse antéro-externe, bombée dans son ensemble, offre trois plans distincts : le plan du jambier antérieur, celui des extenseurs et celui des péroniers.

a) Le plan interne et le plus antérieur succède au tubercule antérieur du tibia, il répond au muscle jambier antérieur dont le corps charnu, fusiforme, dirigé obliquement en bas et un peu en dedans, dépasse la crête tibiale. Il en résulte que le bord antérieur de la jambe est mousse et décrit sur le profil une courbe bien plus accentuée que celle du squelette. Au corps charnu du jambier antérieur, succède, vers le milieu de la jambe, un tendon qui suit la même direction et que nous retrouverons au cou-de-pied.

b) Le plan des extenseurs occupe toute la hauteur du membre ; étroit en haut, il est plus large inférieurement où il repose sur trois muscles l’extenseur propre du gros orteil, l’extenseur commun et le péronier antérieur. Dans le repos musculaire, il se confond souvent en haut avec le précédent.

c) Tourné tout à fait en dehors, le plan des péroniers, large de plusieurs travers de doigt, répond aux muscles de ce nom soutenus par le péroné. Sa surface qui commence en haut au-dessous de la saillie due à la tête de l’os, n’est uniforme que dans le relâchement musculaire. Dans la contraction, il est marqué inférieurement d’un méplat médian dû aux tendons superposés des deux muscles. Enfin, il est oblique en bas et en arrière, et il découvre l’extrémité inférieure de l’os à quelques travers de doigt au-dessus de la malléole. L’os étant situé sur un plan plus déprimé que celui des muscles, il se produit à ce niveau une dépression constante. En arrière, le plan des péroniers touche au bord externe du soléaire.

Toute la masse postérieure de la jambe est formée par un seul muscle, le triceps sural, qui se compose, d’ailleurs, de plusieurs corps charnus distincts. (Voy. page 133.) Les deux jumeaux sont superficiels et forment le relief du mollet. Ils reposent sur le soléaire dont les bords seuls apparaissent à la surface du membre de chaque côté.

Accolés l’un à l’autre, les deux jumeaux forment sur la ligne médiane une saillie unique, longitudinale, qui répond aux bords charnus des deux muscles. De chaque côté de ce relief médian, on observe les méplats latéraux des aponévroses supérieures d’insertion. Le jumeau interne plus volumineux descend un peu plus bas que l’externe. Il forme à la face interne du membre un relief puissant, pendant que le jumeau externe ne dépasse pas la saillie des muscles voisins, d’où il résulte que, sur les profils de la jambe vue de face, le jumeau interne seul est visible. Les bords inférieurs arrondis des deux jumeaux interceptent entre eux un angle ouvert en bas qui marque le défaut du mollet. Ils font sur le tendon d’Achille un brusque relief situé plus ou moins haut suivant les individus[21].

Aux jumeaux succède le plan du tendon d’Achille, qui se rétrécit par en bas et se confond sur les côtés avec les bords du soléaire. En dehors, le bord externe forme un plan étroit qui remonte jusqu’au niveau de la tête du péroné ; en dedans, la saillie de ce muscle est plus accentuée ; elle n’occupe que le milieu de la jambe. Le soléaire soutient le mollet, et de son degré de développement dépend l’élargissement ou l’effilement de la jambe dans sa moitié inférieure.

A la face interne de la jambe, nous retrouvons le relief du jumeau interne et du bord interne du soléaire. Ce double relief est limité en avant par une grande ligne courbe à convexité antérieure qui se continue en haut avec le sillon courbe en sens inverse embrassant le genou et qui remonte jusqu’au sillon latéral interne du jarret. Toute la partie antérieure surbaissée, et large de deux doigts environ, est occupée par la face interne du tibia sous-cutanée dans toute sa hauteur. Cette surface est légèrement plus arrondie que la surface osseuse à laquelle elle correspond, ce qui est du au tissu cellulaire qui double la peau. Elle est parcourue, de bas en haut, par la veine saphène interne qui remonte en haut sur le bord interne du triceps sural.


Article IV. — COU-DE-PIED. (Pl. 83, 84, 85 et 86.)


Le cou-de-pied forme la jonction du pied et de la jambe qui se réunissent à angle droit. Le squelette constitué par l’extrémité inférieure des os de la jambe articulés avec l’astragale, compose presque toute la région avec les tendons des muscles. Le squelette apparaît sur les côtés, les tendons en avant et en arrière. En dedans, la malléole interne volumineuse est portée en avant ; en dehors la malléole externe plus étroite, plus basse, occupe le milieu de la région en avant, les tendons sont peu distincts, couchés sur les os ; en arrière, un fort tendon très éloigné du squelette s’attache à angle droit sur le calcanéum, et forme un relief très accusé.

Nous considérerons successivement les quatre côtés que nous venons de signaler.

En avant, le cou-de-pied présente une surface arrondie transversalement, qui regarde en dehors, et où les tendons ne se dessinent que dans les mouvements violents. Cette surface se termine en dedans et en avant par le relief toujours bien distinct du tendon du jambier antérieur, qui se dirige obliquement en dedans et en bas, pour se terminer au bord interne du pied, à la saillie du scaphoïde. La saillie de ce tendon tient à une disposition anatomique sur laquelle je n’ai pas à revenir. (Voy. p. 131.)

En dedans, immédiatement après le tendon du jambier antérieur, se voit la saillie de la malléole interne qui occupe la moitié antérieure de la face interne. Toute la moitié postérieure est creusée en une large gouttière (gouttière rétro-malléolaire), dont le fond repose sur les muscles profonds de la jambe qui gagnent la gouttière du calcanéum pour atteindre la plante du pied. La gouttière rétro-malléolaire est bordée en arrière par le tendon d’Achille. Elle se prolonge en bas et en avant pour contourner la malléole, et perd en même temps de sa profondeur.

Le milieu de la face externe du cou-de-pied est occupé par la malléole externe qui se confond en avant avec le plan des extenseurs. Cette malléole est formée par l’extrémité inférieure du péroné et par les tendons des péroniers qui y sont accolés par derrière. Ces tendons atténuent la forme anguleuse de l’extrémité osseuse, en même temps qu’ils augmentent son volume. Ils n’en deviennent distincts que dans certains mouvements du pied.

Une gouttière rétro-malléolaire, plus étroite que du côté interne, borde la malléole en arrière et se prolonge au-dessous d’elle où elle prend le nom de gouttière sous-malléolaire. Cette dernière est coupée par une corde oblique qui, du sommet de la malléole, se dirige, en bas et en avant, jusqu’à l’apophyse du cinquième métacarpien. Cette corde est due au tendon du court péronier latéral.

Enfin, à la partie postérieure du cou-de-pied, se trouve le tendon d’Achille, le plus fort de tous les tendons du corps. Il décrit dans le sens antéro-postérieur une courbe légère à concavité postérieure. Il offre son minimum de largeur à la hauteur de la malléole externe, et présente un léger renflement à son insertion au calcanéum.


Article V. — PIED. (Pl. 83, 84, 85 et 86.)


Le pied doit être divisé en deux parties distinctes : le pied proprement dit ou voûte du pied, et les orteils.


Voûte du pied.


Le squelette composé du tarse et du métatarse indique la forme générale de la région, à laquelle on peut considérer : deux faces, l’une supérieure et l’autre inférieure ; deux bords, l’un externe et l’autre interne, et deux extrémités. La voûte que forme le pied est ouverte en dedans, surbaissée en dehors ; elle prend appui sur le sol par le calcanéum en arrière, par les têtes des orteils en avant, et par le cinquième métatarsien au bord interne. Les os de la jambe ne reposent pas sur son milieu, mais sur le point culminant situé plus en arrière et formé par l’astragale. (Voy. pl. 29 et 31.)

Face supérieure ou dos du pied. — Le dos du pied s’étend en avant de la jambe qui repose sur la moitié postérieure environ de la face supérieure du pied, de sorte que la face inférieure du pied, complètement libre, a beaucoup plus d’étendue. Le dos du pied reproduit la forme du squelette, sa surface arrondie s’incline en avant et en dehors. Son point culminant répond au premier et au deuxième cunéiforme articulés avec le premier et le deuxième métatarsien, il est parcouru par un grand nombre de tendons qui vont en divergeant, du milieu du cou-de-pied, à la circonférence antérieure du pied. En procédant de dedans en dehors, ce sont le tendon du jambier antérieur qui se rend au bord interne du pied, le tendon de l’extenseur propre du gros orteil, ceux de l’extenseur commun, puis celui du péronier antérieur qui descend vers l’apophyse styloïde du cinquième métatarsien.

Il faut signaler, en dehors, le relief si caractéristique du pédieux situé au-dessous et bien en avant de la malléole externe. Avant d’atteindre le bord interne, la surface du dos du pied se déprime parfois en une sorte de vallée très marquée sur la plupart des statues antiques. Enfin, sous la peau de la région, on voit se dessiner de nombreuses veines et particulièrement l’arcade veineuse du métatarse.

Plante du pied. — On désigne ainsi toute la partie du pied qui repose sur le sol. Elle représente le creux de la voûte ouverte par le dedans, et fermée en dehors, en arrière et en avant, quand le pied touche à terre.

La peau, épaisse et chargée à sa face profonde d’une graisse assez abondante, — et, en vertu d’une disposition anatomique spéciale, destinée à faire office de coussinet, — ne laisse paraître aucun détail des muscles de la région. La morphologie, comme au dos du pied, est dominée ici par le squelette, et c’est au niveau de ses points d’appui que la peau présente les caractères que je viens de signaler. Ainsi l’on remarque, en avant, un épais bourrelet étendu sous les articulations métatarso-phalangiennes ; la saillie la plus forte répond au gros orteil en raison du volume de son extrémité antérieure et de la présence des os sésamoïdes à la face inférieure de l’articulation. Ce bourrelet empiète sur les orteils qui, vus par la face plantaire, paraissent plus courts. Nous avons vu aux doigts une disposition identique. Tout le long du bord externe du pied la peau présente les mêmes caractères, ainsi qu’en arrière, au-dessous du calcanéum, au niveau d’une vaste surface d’appui de forme ovalaire. Au sommet de la voûte, la peau plus fine présente des plis obliques, qui s’exagèrent lorsque le pied se cambre.

En résumé, les points d’appui sur le sol, talon, bord externe et base des orteils, décrivent plus des trois quarts de la circonférence du pied.

Le bord interne, épais, surélevé, opère la transition entre la voûte plantaire et la gouttière rétro-malléolaire interne. On y sent, en arrière, le relief musculaire de l’abducteur du gros orteil, puis la saillie osseuse du scaphoïde où aboutit la corde du jambier antérieur, et, tout en avant, la volumineuse articulation du gros orteil. Il est parcouru par les réseaux veineux de la grande veine externe du pied.

Le bord externe, bien plus mince, repose en entier sur le sol. Il est marqué, en son milieu, du relief de l’extrémité postérieure du cinquième métatarsien.


Orteils.


Les doigts du pied présentent tous les caractères des doigts de la main, mais, à l’exception du ponce, ils sont petits, recourbés, terminés par une extrémité élargie qui repose sur le sol.

Le pouce, beaucoup plus volumineux, est séparé des autres orteils par un intervalle que les anciens utilisaient pour le passage des courroies de leurs sandales. Nos chaussures altèrent nécessairement la direction des orteils, en les rapprochant les uns des autres ; ils subissent en outre, en vertu de la compression à laquelle ils sont soumis, un véritable aplatissement latéral. Tout en faisant la part de ces déformations acquises, voici, touchant la direction des orteils, le résultat de nos observations. Le gros orteil ne continue pas la direction du premier métatarsien, lequel forme le bord interne du pied. Il s’incline un peu en dehors vers l’axe médian du pied. Cette disposition, qu’exagère certainement l’usage des chaussures, existe à un degré très manifeste sur les statues antiques. Le deuxième et le troisième orteil sont à peu près parallèles au premier. Leur axe prolongé en arrière rencontrerait la malléole interne. Le dernier ou cinquième orteil suit une direction inverse. Son axe converge avec celui des orteils précédents, et, prolongé en avant, les rencontrerait environ à une demi-longueur de pied. Quant au quatrième orteil, dont je n’ai pas encore parlé, il suit une direction variable, tantôt semblable à celle des troisième et deuxième orteils, tantôt parallèle à celle du cinquième. C’est cette dernière disposition qu’on rencontre le plus souvent sur les statues antiques. On remarque en outre, sur ces mêmes statues, que le petit orteil soulevé ne repose pas sur le sol.

Comme les doigts de la main, les orteils sont de longueur inégale. Le gros orteil est souvent le plus long. D’autres fois, c’est le second orteil qui l’emporte. On retrouve, sur l’antique, l’une et l’autre de ces dispositions. Le troisième orteil est plus court que le deuxième de toute la longueur de l’ongle. Le quatrième n’atteint pas l’ongle du troisième, et le cinquième est situé encore plus en arrière.

La surface dorsale des orteils est arrondie, de légers renflements trahissent les articulations phalangiennes. Si l’on considère la face inférieure, le pied au repos, on ne voit qu’un sillon profond qui sépare la plante de l’extrémité élargie des orteils. Il faut étendre ces derniers pour découvrir leur face inférieure dans toute son étendue, et distinguer les plis de flexion, au nombre de deux, correspondant aux articulations.


Article VI. — MOUVEMENTS DE LA HANCHE.


§ 1. — Mécanisme.


L’articulation coxo-fémorale préside aux mouvements de la cuisse sur le bassin. Sans revenir sur les détails anatomiques donnés plus haut (voy. p. 60), je rappellerai que, si la tête fémorale est profondément située, le grand trochanter est sous-cutané et qu’il subit, dans les différents mouvements de l’articulation, des déplacements que l’artiste a grand intérêt à connaître.

Ces mouvements sont de trois espèces : 1° flexion et extension ; 2° abduction et adduction ; 3° rotation.

La flexion et l’extension ont lieu autour d’un axe transversal. Le grand trochanter, à cause de l’inclinaison du col, est situé sur un plan inférieur à la tête fémorale, d’où il suit qu’il s’élève dans la flexion et se rapproche un peu de la crête iliaque.

Dans la rotation, le grand trochanter décrit un arc de cercle antéro-postérieur, et se porte en avant dans la rotation en dedans, et en arrière dans la rotation en dehors.

Dans l’abduction, le grand trochanter s’élève et se rapproche de la crête iliaque ; il s’en éloigne et descend dans l’adduction.


§ 2. — Action musculaire.


a) Rotation. — Tous les rotateurs en dehors sont des muscles profonds. Ce sont : le pyramidal, les jumeaux, l’obturateur interne, l’obturateur externe et le carré crural[22]. Leur action est puissante, malgré leur petit volume et à cause de la direction des fibres charnues perpendiculaires aux leviers à mouvoir.

Elle est contre-balancée, mais incomplètement, par l’action moins énergique des rotateurs en dedans, qui sont le petit fessier et le moyen fessier dans leur moitié antérieure seulement. De sorte que dans le repos musculaire la pointe du pied se dirige naturellement en dehors. De tous ces muscles, le moyen fessier, seul superficiel, influe sur la forme extérieure. Ainsi, dans la rotation en dehors, son relief est très augmenté.

b) Flexion et extension. — Les muscles fléchisseurs sont le psoas-iliaque, le tenseur du fascia lata, le couturier, le pectiné et un peu le droit antérieur.

Le psoas-iliaque et le pectiné, muscles profonds, ne se révèlent guère à l’extérieur ; il n’en est pas de même du tenseur du fascia lata, du couturier et du droit antérieur.

Le psoas-iliaque est en même temps rotateur en dehors. Cette dernière action est contre-balancée par une action rotatrice en sens inverse du tenseur du fascia lata. Le pectiné est en même temps adducteur. Le couturier agit en outre sur la jambe, qu’il fléchit également. Le droit antérieur est surtout extenseur de la jambe, son action de flexion de la cuisse sur le bassin est très limitée, il intervient dans les mouvements de force, la jambe étant préalablement fléchie.

Les muscles extenseurs de la cuisse sur le bassin sont le grand fessier et les muscles postérieurs de la cuisse. Le grand fessier est un muscle puissant, mais il n’intervient guère que dans les mouvements qui exigent un grand déploiement de force.

c) Abduction et adduction. — L’abduction est produite par le moyen et le petit fessier. Ces deux muscles, prenant leur point fixe sur le fémur, maintiennent le bassin, lorsque, dans la marche, la jambe du côté opposé quitte le sol.

L’adduction possède des muscles puissants dans le groupe des adducteurs, dont quelques-uns sont un peu fléchisseurs en même temps et rotateurs de la cuisse en dehors, à l’exception de la portion inférieure du grand adducteur qui est rotatrice en dedans et à laquelle Duchenne de Boulogne attribue un rôle important dans l’attitude du cavalier[23].

§ 3. — Modifications des formes extérieures. (Pl. 105, 106 et 107.)


RÉGION DES FESSES DANS LA STATION SUR UN PIED.

LA JAMBE DROITE EST PORTÉE EN ARRIÈRE.

LA JAMBE DROITE EST PORTÉE EN AVANT.
STATION SUR LE PIED GAUCHE.

A. Extension. — L’attitude d’extension a déjà été étudiée. Elle existe dans la station debout, et il est curieux de constater que le muscle extenseur par excellence de l’articulation, le grand fessier, n’est pas contracté. Toute paradoxale qu’elle puisse paraître, la chose s’explique facilement. Dans la station debout, le centre de gravité du tronc passe en arrière de l’articulation coxo-fémorale, et l’action de la pesanteur suffit ainsi à maintenir l’extension limitée par la distension du fort trousseau fibreux, situé à la partie antérieure de l’articulation et désigné sous le nom de ligament de Bertin. Le grand fessier n’intervient alors que pour rétablir l’équilibre, lorsque, par un déplacement des parties supérieures du corps, le tronc a tendance à tomber en avant. Il se contracte également dans tous les mouvements violents du torse. Lorsqu’il prend son point d’appui sur le bassin, le grand fessier porte le membre inférieur en arrière. Sa contraction apporte de grands changements à la morphologie de la région fessière. Considérons, par exemple, le modèle dans la position du type choisi pour l’étude. (Voyez pl. 78.) Les grands fessiers ne sont point contractés. Mais si nous prions le modèle de porter en arrière le membre inférieur droit, par exemple, oh voit aussitôt la fesse de ce côté devenir étroite, globuleuse et allongée ; la gouttière rétro-trochantérienne qui se creuse l’échancre en dehors, et lui donne un aspect réniforme. (Voy. les figures de la page précédente.) Le pli fessier disparaît presque, et le bord inférieur du muscle se dessine avec son obliquité naturelle. A la surface, les faisceaux musculaires secondaires apparaissent quelquefois. Le contraste est frappant avec la fesse du côté opposé, qui est large et aplatie. Mais si, au lieu d’être porté en arrière, le même membre inférieur est porté légèrement en avant, on observe une transformation complète des formes de toute la région. C’est la fesse opposée qui entre en contraction, ce qui s’explique par la nécessité de maintenir la rectitude du tronc entraîné par le poids de la jambe portée en avant, pendant que de ce même côté, la fesse est large, distendue et aplatie. Dans la flexion légère du tronc en avant, on voit les deux fesses se contracter simultanément. (Voy. pl. 94.)

B. Flexion. — Nous étudierons la flexion de la cuisse sur le bassin produite sans effort, afin de faire la part exacte des muscles fléchisseurs, dans les formes extérieures de la région. (Voy. pl. 105 et 106.) En effet, les deux muscles fléchisseurs, couturier et tenseur du fascia lata, se dessinent vigoureusement sous la peau. Leurs tendons, qui se rejoignent à l’épine iliaque antérieure et supérieure, font une vive saillie qui augmente la profondeur de la dépression qu’ils interceptent (dépression fémorale). Le fascia lata tendu par son muscle tenseur, repousse en avant la masse du vaste externe, le droit antérieur n’est pas contracté.

En arrière, la fesse aplatie, élargie, se continue avec la face postérieure de la cuisse. Le pli fessier est supprimé. En dehors, au niveau de l’articulation de la hanche, des formes nouvelles se produisent qui méritent une mention spéciale. Le grand trochanter est moins visible ; il disparaît presque sous le tendon du grand fessier, d’où l’élargissement de la fesse. Le moyen fessier non contracté est divisé en deux parties par le faisceau aponévrotique fémoral qui va de la crête iliaque au tendon du grand fessier (voy. page 107). La tension de ce faisceau limite le mouvement et creuse un sillon à son niveau. La partie postérieure du moyen fessier se confond avec le grand fessier, pendant que sa portion antérieure forme un relief allongé qui embrasse la vive saillie du muscle tenseur contracté.

En avant, le pli de l’aine se creuse, il existe à son niveau plusieurs plis cutanés. Dans la flexion plus accusée, on retrouve les mêmes caractères morphologiques ; il me semble superflu d’y insister.

C. Abduction. — Le relief du moyen fessier s’observe en deux circonstances, quand la jambe se porte en dehors, et lorsque le bassin a besoin d’être incliné ou maintenu, par exemple, si la jambe du côté opposé est soulevée du sol. Dans ce dernier cas, il prend son point fixe en bas sur le fémur.

D. Adduction. — L’adduction ne peut exister sous la flexion ; elle augmente la saillie du grand trochanter.


Article VII. — MOUVEMENTS DU GENOU.


§ 1. — Mécanisme.


Les mouvements de la jambe sur la cuisse se passent dans l’articulation du genou, et sont de deux espèces :

a) Mouvement autour d’un axe transversal, à la manière d’une charnière, flexion et extension ;

b) Mouvement de la jambe autour d’un axe vertical, rotation. La pointe du pied est portée en dedans on en dehors ; la rotation est plus grande en dehors qu’en dedans.

Ce dernier mouvement n’est possible que dans les positions intermédiaires entre la flexion et l’extension.


§ 2. — Action musculaire.


Extension de la jambe sur la cuisse. — Ce mouvement est sous la dépendance du muscle puissant qui occupe toute la partie antérieure de la cuisse, le quadriceps crural, dont les diverses portions ont une action un peu différente. Celles qui s’attachent au fémur, vaste externe, crural, vaste interne, produisent exclusivement l’extension de la jambe. Le droit antérieur est en outre fléchisseur du bassin.

Flexion. — La flexion est déterminée par les muscles superficiels suivants : le couturier, qui est en même temps rotateur en dedans ; le droit interne, qui est aussi adducteur de la cuisse et rotateur de la jambe en dedans ; le demi-tendineux et le biceps, qui sont en même temps rotateurs de la jambe ; le demi-membraneux, exclusivement fléchisseur, et les jumeaux, qui sont à la fois extenseurs du pied.

Le poplité, muscle profond, faible fléchisseur, est surtout rotateur en dedans.

Rotation. — Les muscles rotateurs sont en même temps fléchisseurs de la jambe sur la cuisse. Ce qui s’explique, puisque le mouvement de rotation n’a lieu que dans la flexion du membre.

Les rotateurs en dedans sont : le demi-tendineux, le droit interne et le couturier, ces deux derniers peu puissants. Il faut encore désigner le poplité, faible fléchisseur, mais puissant rotateur en dedans, qui, avec les précédents, contre-balance l’action puissante du biceps rotateur en dehors.


§ 3. — Modifications des formes extérieures. (Pl. 105, 106 et 107.)


A. Extension. — L’extension a déjà été étudiée, comme pour la hanche, dans les descriptions consacrées aux formes au repos. Dans l’attitude conventionnelle, le genou est étendu, mais on constate que le muscle extenseur, le quadriceps, n’en est pas moins dans le relâchement, ce qui s’explique par ce que le centre de gravité du tronc, qui passe en arrière de l’articulation coxo-fémorale, passe en avant de l’articulation du genou, et que, ici comme là, l’article est maintenu par le seul fait de la pesanteur en extension passive, mouvement limité par la résistance des ligaments distendus. On voit alors, ainsi que je l’ai déjà décrit, les diverses portions du quadriceps se fondre, pour ainsi dire, en une masse uniforme d’où se détachent en bas deux saillies inégales, sur lesquelles je me suis longuement étendu, les reliefs des extrémités inférieures du vaste interne et du vaste externe. Lorsque le quadriceps se contracte, tout change. Le droit antérieur se dessine nettement au milieu de la cuisse et, sur les côtés, le vaste interne et le vaste externe, pendant que les reliefs inférieurs disparaissent. La région sous-rotulienne offre, par contre, des formes plus simples, les plis transversaux sont supprimés, le relief du tendon rotulien s’accentue.

B. Flexion. — Dans la flexion du genou, la rotule, appliquée contre la trochlée fémorale, s’enfonce dans le vide ouvert en avant entre le fémur et le tibia, et la saillie qu’elle fait dans l’extension, s’efface d’autant plus que la flexion est plus prononcée.

Le tendon rotulien est distendu, et, de chaque côté, les pelotons adipeux font des saillies qui augmentent avec le degré de flexion, si bien que, dans la flexion extrême, elles dépassent le niveau du tendon, qui se trouve alors au fond d’une sorte de gouttière.

Les deux condyles du fémur forment, plus en arrière, deux reliefs latéraux très appréciables sous la peau, mais inégaux et avec des caractères distincts. En dedans, le condyle interne n’apparaît que dans une petite étendue ; il est coiffé, pour ainsi dire, par l’extrémité inférieure du corps charnu du vaste interne, ce qui donne à tout ce côté du genou une forme arrondie, pendant que le côté externe, où le rebord de la trochlée est très visible, forme un angle tranchant, se continuant avec la tubérosité externe. Le vaste externe est situé plus haut ; mais on observe la saillie très distincte du crural découvert par le fascia lata, dont la corde se sent plus bas. L’interligne articulaire est surtout visible en dehors. (Pl. 105.)

En arrière, se creuse le jarret, limité latéralement par les tendons des muscles postérieurs de la cuisse qui font comme deux rebords. Le rebord interne descend plus bas, de sorte que le jarret s’ouvre, non pas directement en arrière, mais en arrière et en dehors. Il est formé par les tendons du droit interne et du demi-tendineux doublés en dedans par l’extrémité inférieure du couturier. Le rebord externe est constitué par le fort tendon du biceps qui s’arrête à la tête du péroné.

Le creux du jarret est profond près de la jambe ; il s’atténue progressivement du côté de la cuisse. Il constitue une sorte d’excavation qui reçoit, dans la flexion forcée, l’extrémité supérieure des jumeaux.


Article VIII. — MOUVEMENTS DU PIED.


§ 1. — Mécanisme.


Les mouvements du pied sont de deux sortes :

a) Ceux qui ont lieu autour d’un axe transversal, et en vertu desquels la pointe du pied est soulevée ou abaissée ; si la pointe du pied est soulevée, c’est la flexion ; si elle s’abaisse, c’est l’extension ou flexion plantaire ; ces mouvements se passent dans l’articulation tibio-tarsienne ;

b) Ceux qui ont lieu autour d’un axe antéro-postérieur, et en vertu desquels la pointe du pied est dirigée en dedans, adduction, ou en dehors, abduction.

L’adduction s’accompagne d’un mouvement de torsion qui fait que le bord interne du pied s’élève, que l’externe s’abaisse, et que la voûte plantaire se creuse.

Dans l’abduction, c’est le contraire : le bord interne s’abaisse, l’externe s’élève, et la voûte plantaire est surbaissée. Ce dernier mouvement est moins puissant et plus limité que l’adduction. Tous deux se passent dans les articulations du tarse.


§ 2. — Action musculaire.


Extension. — Ainsi que l’a démontré Duchenne de Boulogne, deux muscles agissant simultanément sont nécessaires pour l’extension directe : le triceps sural, qui est en même temps adducteur du pied, et le long péronier latéral, qui est aussi abducteur. Les muscles long fléchisseur commun des orteils et long fléchisseur du gros orteil sont impuissants comme extenseurs du pied sur la jambe.

Flexion. — Comme l’extension, la flexion directe exige le concours simultané de deux muscles le jambier antérieur qui est en même temps adducteur, et l’extenseur commun des orteils qui est aussi abducteur. Le péronier antérieur est une dépendance de l’extenseur commun des orteils dont l’action sur la jambe est plus puissante que sur les orteils, lesquels sont étendus avec force par le pédieux.

Abduction et adduction. — Le court péronier latéral porte le pied directement dans l’abduction, et le jambier postérieur dans l’adduction.

L’un et l’autre maintiennent le pied à un degré intermédiaire entre la flexion et l’extension.


§ 3. — Modifications des formes extérieures.


Flexion. — Dans la flexion, l’avant-pied se porte en haut, faisant un angle aigu avec la jambe pendant que le talon descend.

Si la flexion est directe, le tendon du jambier antérieur et ceux de l’extenseur commun des orteils font des saillies fort distinctes au cou-de-pied. Si le pied est en même temps porté en dedans, la saillie du tendon du jambier augmente. S’il est dirigé en dehors, on voit sous la malléole se dessiner le tendon du court péronier latéral.

A la jambe, le corps charnu du jambier antérieur s’accuse vigoureusement, et son extrémité supérieure se confond avec le relief de l’extenseur commun.

Extension. — Dans l’extension, l’avant-pied se place dans la direction de la jambe, le talon s’élève, la saillie du dos du pied s’accentue. Sur le devant de la jambe, le relief supérieur du jambier antérieur et de l’extenseur commun est remplacé par une dépression, mais, plus en dehors, sous la tête du péroné, apparaît une nouvelle saillie très accentuée, due au long péronier latéral. Ce relief très intéressant relève, sur la silhouette externe du membre vu de face, la courbe qui cerne la jambe à sa partie supérieure. Cette forme apparaîtra toujours sur une figure qui porte sur la pointe des pieds. On voit, en outre, en arrière de la malléole externe, le tendon du long péronier latéral faire une saillie distincte.

Le modelé de la partie postérieure de la jambe diffère suivant que le membre inférieur est étendu ou fléchi.

Dans la station sur la pointe du pied, la contraction du triceps sural est très forte. Elle dessine toutes les formes du muscle, les saillies et les méplats des jumeaux, les reliefs latéraux du soléaire et la corde du tendon d’Achille, qui décrit une courbe au-dessus du talon.

Si le membre inférieur est étendu sans que le pied touche le sol, on peut encore observer, lors de l’extension du pied, que le triceps tout entier se contracte, bien qu’à un degré moindre.

Si enfin le genou est préalablement fléchi, l’extension du pied se produit néanmoins ; mais on note une flaccidité absolue de tout le mollet et, par suite, le relâchement complet du tendon d’Achille.


Article IX. — MOUVEMENTS DES ORTEILS.


Les orteils exécutent des mouvements de flexion et d’extension, et aussi des mouvements de latéralité assez limités. Dans la flexion, les orteils se pressent les uns contre les autres ; dans l’extension, ils ont une tendance à s’écarter.

Dans la flexion, l’extrémité arrondie de la phalangette vient toucher le bourrelet antérieur de la plante du pied qui se trouve, dans toute son étendue (moins le talon), sillonnée de plis nombreux, à direction fort variable. A la face dorsale, les articulations des phalanges entre elles, et surtout l’articulation des phalanges avec les métatarsiens, se dessinent en saillie.

L’extension des orteils efface les plis de la plante du pied et y fait saillir une corde épaisse qui comble le sommet de la voûte, se dirige du talon vers le gros orteil, et est due à la tension de l’aponévrose plantaire.

Quelques plis cutanés se dessinent à la face dorsale de l’articulation phalango-métatarsienne du gros orteil, où se voit également le tendon de l’extenseur propre.

A la face inférieure du pied, le relief ordinaire de cette même articulation s’accroît d’autant plus que l’extension est plus prononcée.

CHAPITRE V

DES PROPORTIONS DU CORPS HUMAIN.


De tout temps les artistes se sont préoccupés des proportions du corps humain ; ils ont cherché à les fixer en un type qui devient la règle à suivre dans les ouvrages d’art et qui porte le nom de canon.

Les ouvrages de ce genre, dus aux artistes de l’antiquité, ne sont pas arrivés jusqu’à nous[24].

Les textes qui les signalent sont formels, mais peu circonstanciés, et l’on en est réduit, presque entièrement, aux conjectures tirées des œuvres d’art exécutées sous leur inspiration.

Sans entrer dans de grands détails sur un sujet qui exerce depuis longtemps la sagacité des artistes et des archéologues, il nous a paru utile d’indiquer, en quelques mots, l’état de la question.

Le plus ancien est le canon égyptien dont Ch. Blanc a cru trouver la clef dans la mesure du doigt médius qui serait compris dix-neuf fois dans la hauteur totale du corps.

Les Grecs auraient eu plusieurs canons, tous bien différents de celui des Égyptiens. Celui de Polyclète, le plus célèbre, définit le type de l’athlète répondant à l’idée que se faisaient les Grecs, et surtout les Doriens, de l’homme sain et fort, apte aux exercices du gymnase et au maniement des armes de guerre. Le Doryphore et l’Achille Borghèse en sont des exemples. D’après M. Guillaume, la palme ou la largeur de la main au niveau de la racine des doigts serait l’unité de mesure choisie par Polyclète. Cette mesure ne s’applique plus au canon de Lysippe qui introduisit plus d’élégance dans la structure de l’homme, fit les têtes plus petites, les corps moins carrés, et donna à l’ensemble de la figure un aspect plus élancé. L’Apollon du Belvédère répond à ce type.

C’est ce canon de Lysippe « qui est, selon toute vraisemblance, dit M. Guillaume, celui qui nous a été conservé par Vitruve, celui que suivaient les Byzantins, que l’on retrouve dans le livre de Cennino Cennini, et qu’ont en partie adopté les modernes. Dans ce canon ce n’est plus la palme ou le pied, mais c’est la tête avec ses subdivisions qui sert de module. »

En traçant ces règles des proportions humaines, les artistes poursuivaient un double but. Ils cherchaient d’abord à mettre en lumière la raison des harmonies du corps humain, à en fixer la symétrie dans le sens que les Grecs attribuaient à ce mot, c’est-à-dire les rapports qui existent entre l’ensemble et les diverses parties qui le composent ; tous leurs efforts tendaient vers la réalisation, par ce moyen, d’un certain idéal de beauté.

Mais, comme le dit l’auteur de l’article Canon du Dictionnaire de l’Académie des beaux-arts, « l’idée abstraite que l’on peut se faire de la proportion reste supérieure aux choses les mieux proportionnées. La proportion comme la beauté elle-même est un noble tourment de l’intelligence, un puissant mobile de progrès, mais elle ne saurait être réalisée dans ce qu’elle a d’absolu. Les plus grands artistes l’ont poursuivie, et chacun d’eux n’a pu la réaliser qu’en lui imprimant son sentiment individuel. »

D’ailleurs, en formulant un canon, les artistes n’ont pas songé à exécuter toutes leurs figures d’après ce même modèle. Leurs ouvrages le prouvent surabondamment. Dans l’antiquité, ces règles variaient avec le caractère du sujet à représenter, et elles étaient certainement bien différentes, suivant qu’il s’agissait de la statue d’un mortel ou d’un dieu, et, parmi les dieux, d’Apollon, de Mars, de Mercure, ou de Eros, par exemple. On peut donc dire que le canon variait avec le modèle, et qu’il devait exprimer le rapport exact du caractère physique et du caractère moral et intellectuel.

Tel était le but poursuivi par Polyclète lorsqu’il exécuta son Doryphore, type de l’athlète accompli, qui eut tant de renommée, et au sujet duquel on disait qu’il avait mis l’art tout entier dans une œuvre d’art.

Le second mobile, auquel ont obéi les artistes en donnant des règles de proportions, — et il semble que ce soit surtout celui cherché par les modernes, — est moins élevé et d’ordre technique pour ainsi dire. Il consiste à mettre entre les mains de l’artiste un moyen simple qui lui permette de construire des figures proportionnées, de déterminer facilement, par exemple, étant donnée la dimension du personnage, qu’elles doivent être les mesures de chacune des parties ou inversement. Ce n’est plus alors qu’une sorte de guide, dont l’artiste s’éloigne à son gré et qui n’a pas d’autre prétention que de faciliter son travail.

Toutes les recherches des modernes dérivent d’un passage assez obscur de Vitruve, qu’elles commentent, expliquent et cherchent à compléter. Il y est dit, entre autres, que la tête est comprise huit fois dans la hauteur du corps et la face dix fois ; que la taille est égale à la dimension des bras étendus en croix ; et que le centre du corps est au nombril.

Léonard de Vinci expliqua et fixa ces données de Vitruve dans la double figure bien connue de l’homme inscrit dans le carré et dans le cercle.

L’homme, étendant les bras en croix et les mains ouvertes, peut être inscrit dans un carré dont il touche les quatre côtés par la tête, les pieds et les extrémités des doigts du milieu. Les bras étant un peu plus élevés et les jambes écartées, l’homme peut alors être inscrit dans un cercle dont le centre est au nombril, et dont les pieds et l’extrémité des mains touchent à la circonférence. Léonard de Vinci indiqua en outre, ainsi qu’on peut le voir sur la figure ci-jointe, les proportions des diverses parties du corps. Nous aurons occasion de revenir par la suite sur quelques-unes des mesures qu’il donne.


FAC-SIMILÉ D’UN DESSIN DE LÉONARD DE VINCI.

Je me contenterai de citer le volumineux et obscur mémoire d’Albert Durer, ainsi que les travaux de Lomazzo, de Christophe Martinez, de Rubens, et de bien d’autres qu’on ne consulte plus guère qu’à titre de curiosité, pour m’arrêter comme il convient sur les quelques ouvrages qui résument tous les autres.

De tous les auteurs qui ont écrit sur la matière, le plus clair, le plus précis est sans contredit Jean Cousin, dont le petit livre est actuellement encore très répandu dans les écoles.

La tête est prise comme unité de longueur ; elle est mesurée du sommet du crâne à la limite inférieure du menton. La tête elle-même est subdivisée en quatre parties.

La première section divise le front ; sur la seconde sont les yeux ; sur la troisième, le nez, et sur la quatrième, l’extrémité du menton à quoi l’on ajoute une cinquième partie, qui détermine la longueur du col.

La ligne du milieu, sur laquelle sont les yeux, doit être divisée en cinq parties ; la seconde et la quatrième sont occupées par les yeux. La longueur de chaque œil se divise en trois parties dont l’une est occupée par la prunelle. L’ouverture de l’œil est du tiers de sa longueur. La largeur du nez est égale à l’espace compris entre les yeux. La bouche a de longueur un œil et demi. Les oreilles s’étendent en hauteur depuis la ligne des yeux jusqu’à celle du nez.

La hauteur du corps, du sommet de la tête au sol, est divisée en huit parties, dont chacune égale la longueur de la tête, et ainsi réparties : la première et la plus élevée comprend la tête ; la seconde s’étend du menton jusqu’aux tetons ; la troisième, des tetons au nombril ; la quatrième, du nombril aux organes génitaux ; la cinquième, des organes génitaux à la moitié de la cuisse ; la sixième, de la moitié de la cuisse au dessous du genou ; la septième, du dessous du genou au dessous du mollet ; enfin la huitième, du mollet à la plante du pied. Le milieu du corps se trouve donc placé au niveau des organes génitaux.

Les principales mesures de largeur sont : deux têtes au niveau des épaules ; deux faces ou six longueurs de nez au niveau des hanches.

Le membre supérieur présente trois longueurs de tête ainsi réparties : depuis son attache à l’épaule jusqu’à l’articulation (?) du poignet, deux têtes du poignet à l’extrémité du doigt médius, une tête.

Il en résulte que la grande envergure, se composant des deux bras et de la largeur des épaules, égale huit têtes ou la hauteur totale de l’individu.

La main égale une face ou trois nez ; le pied a une tête de long.

Ainsi qu’on le voit, le canon de Jean Cousin est simple, rapportant toutes les dimensions du corps à la hauteur de la tête, subdivisée elle-même en quatre parties égales, répondant chacune à la longueur du nez ; et son application facile explique la faveur dont il jouit.

Il faut convenir néanmoins qu’il ne présente pas toute la précision désirable, et qu’il y règne quelques obscurités. Par exemple, la quatrième division qui marque le milieu du corps répond aux organes génitaux, mais à quel niveau de ces organes ? C’est ce qui n’est point dit. De même pour les subdivisions du membre inférieur, ou se trouve le milieu de la cuisse ? A quoi répond le dessous du genou, le dessous du mollet ? Parmi les mesures du tronc, le texte dit, d’un côté, que la deuxième division correspond aux tetons, et, à un autre endroit, qu’elle est placée au-dessous des pectoraux.

On pourrait espérer, par l’intelligence des figures, suppléer aux obscurités et aux omissions du texte ; mais là encore les figures relatives aux diverses parties du corps ne répondent plus à la figure d’ensemble. Par exemple, dans les proportions du torse, sur les figures qui y sont spécialement consacrées, on voit les divisions correspondre au sommet des épaules, au-dessous des pectoraux, à l’ombilic et aux organes génitaux ; il n’en est plus de même sur la figure d’ensemble, où les deux divisions les plus élevées correspondent, la première à la base du menton, et la deuxième aux tetons. Pour le membre inférieur, la division qui est au dessous du genou sur la figure d’ensemble le coupe par la moitié sur le dessin de la jambe isolée.

Les mesures adoptées par Gerdy ne diffèrent pas beaucoup de celles de Jean Cousin. Il conserve les mesures de hauteur, à l’exception de celle du cou, auquel il donne une partie et demie à deux parties. Il complète les mesures de largeur, mais le point capital à relever dans le canon que donne cet auteur, c’est la tendance à une plus grande précision en introduisant, parmi les points de repère qui servent aux mesures, les saillies dues au squelette, telles que la saillie de la proéminente, la saillie costo-abdominale, l’épine du tibia.

Comme celui de Jean Cousin, le canon de Gerdy mesure huit têtes dans la hauteur du corps. Cette proportion ne se rencontre qu’exceptionnellement dans la nature. Les artistes eux-mêmes l’ont parfaitement reconnu, et si nous trouvons sur certaines statues de l’antiquité grecque la dimension en hauteur mesurant huit têtes, sur nombre d’autres elle est réduite à sept têtes trois quarts, sept têtes et demie et même sept têtes.

La proportion de sept têtes et demie a été conservée dans un canon que donne Ch. Blanc sous le nom de « Canon des ateliers », et qui, en conséquence, diffère sensiblement de celui de Jean Cousin. Nous devons nous y arrêter un instant.

La tête, comme je l’ai dit, est comprise sept fois et demie dans la hauteur du corps, le cou a deux parties de hauteur, ce qui paraît excessif, et le tronc neuf parties du pubis au creux sus-sternal, ce qui par contre semble court. Le tronc se subdivise aussi en trois parts égales, composées chacune de trois parties ou une face : une part du creux sus-sternal au-dessous des pectoraux, une seconde de ce point à l’ombilic, et une troisième de l’ombilic au pubis.

La position du genou est aussi vaguement indiquée que dans celui de J. Cousin. On compte six parties de la racine de la verge au-dessus du genou, une partie et demie au genou, six parties du dessous du genou au cou-de-pied, et une partie et demie du cou-de-pied au sol. Mais où commence et finit le genou ? C’est ce que Charles Blanc n’indique pas.

En résumé, ce qui frappe lorsqu’on considère les canons artistiques, c’est le peu de précision des points de repère en général, de telle sorte qu’il est possible de construire, sur un même canon, des types de proportions vraiment bien différentes suivant l’interprétation que l’on fait subir à certaines mesures. Il est vrai que la chose en soi n’a pas grande importance, puisque le canon n’est qu’un guide que l’artiste modifie à son gré. Mais il semble néanmoins que, puisque le guide existe, la précision ne saurait lui nuire, ne serait-ce que pour servir à l’artiste de point de comparaison, et lui permettre de se rendre un compte exact des modifications qu’il juge à propos de lui faire subir. Je ne parle pas des avantages qui pourraient en résulter, au point de vue technique, pour la construction des figures.

On peut se demander, d’autre part, jusqu’à quel point les canons artistiques, dont nous venons de donner les proportions, sont conformes à la réalité des choses. Les tendances actuelles qui poussent l’art dans la voie de la vérité et de la nature, font naître cette question, et l’on est tout naturellement tenté de vérifier, sur le modèle, les mesures recueillies par la tradition artistique. Mais les proportions individuelles sont fort variables, il faudrait donc mesurer un grand nombre d’individus, puis prendre des moyennes. Il faudrait, en outre, distinguer entre les différents âges, les différents sexes, les différentes races. Or, c’est la justement le rôle qui incombe à une science née d’hier, mais dont les développements ont été si considérables et si rapides ; je veux parler de l’anthropologie.


figure extraite du Traité de la peinture de léonard de vinci.

Cette figure montre que la distance du sommet de l’épaule à l’olécrane égale la distance de ce dernier à l’articulation métacarpo-digitale du médius


figure extraite du Traité de la peinture de léonard de vinci.

Cette figure montre que la largeur des épaules égale l’avant-bras et la main mesurés de l’extrémité du doigt médius qu-dessus de l’olécrane.

C’est à l’anthropologie que revient la détermination des proportions du corps humain, mais son point de vue diffère essentiellement, de celui des artistes. Elle admet qu’il y a autant de canons que de types multiples qui composent le genre humain. Elle s’appuie sur des statistiques et procède par moyennes. Au lieu de chercher un module comme point de départ et de le répéter une ou plusieurs fois dans chacune des parties dont se compose la figure, elle consigne le fait brutal par lequel certains rapports entre les parties sont constatés, sans que ces rapports soient nécessairement simples.

Ces idées ont été exposées avec beaucoup de justesse par le docteur Topinard, qui a indiqué clairement la voie à suivre dans la détermination des différents canons humains. Mais il reconnaît que, sur ce point, la science est encore presque-tout entière à faire. Il faut pour arriver à un résultat des mensurations en grand nombre, faites avec méthode et précision, sur des sujets dont l’âge, le sexe et surtout la race soient nettement déterminés, et ce dernier point surtout, étant donné le mélange des races, n’est pas toujours facile à réaliser. En attendant ce que nous réservent les travaux futurs des anthropologistes, le docteur Topinard, utilisant les documents déjà considérables qui existaient sur les mesures de l’Européen, a fait la première tentative de ce genre. Il a dressé sur ce point spécial le bilan de la science, suivant sa propre expression, et, ne prenant en considération que les mensurations les mieux comprises et offrant le plus de garantie, il a établi le canon moyen de l’homme européen et adulte.


PARTIES DU CORPS AYANT COMME COMMUNE MESURE UNE TÊTE OU DEUX DEMI-TÊTES

Les mesures sont formulées en termes scientifiques, c’est-à-dire qu’elles sont toutes rapportées à la taille totale prise pour 100. Il ne peut donc être d’aucune utilité directe pour les artistes, mais il est intéressant de le comparer aux canons artistiques. Or, il est curieux d’observer qu’il existe entre le canon scientifique et le canon artistique de très grandes ressemblances. « Ce qui témoigne à la fois, dit le docteur Topinard, de l’excellence du coup d’œil des artistes et de la valeur des mensurations prises par les anthropologistes. » Il existe néanmoins quelques divergences.

La mesure de huit têtes, comprise dans la hauteur du corps, n’existe que chez les individus de haute taille. Dans les petites tailles, la tête n’est comprise que sept fois. Dans le canon scientifique, la tête est comprise sept fois et demie dans la hauteur du corps, comme dans le canon des ateliers de Blanc. D’autre part, la grande envergure n’est égale à la taille qu’une fois sur dix. La règle des artistes n’est donc à cet égard qu’une exception. Dans le canon scientifique, la grande envergure est de 104, la taille étant considérée comme 100. Le membre supérieur serait un peu trop court dans le canon artistique ; le cou, trop court dans le canon de J. Cousin, serait trop long dans celui de Blanc, etc… Je passe sur les autres détails comparatifs qui sont en somme sans importance.

En présence de ces résultats si intéressants, j’ai pensé que s’il n’y avait pas lieu de créer de nouveaux canons artistiques, peut-être pouvait-on chercher à introduire dans ceux qui existaient déjà un peu de la précision scientifique, principalement dans la détermination des points de repère qui président aux mensurations partielles. Tel a été le but que je me suis proposé en dessinant les trois planches 108, 109 et 110.

J’ai cherché, en outre, à simplifier les mesures en supprimant autant que possible les fractions.


PARTIES DU CORPS MESURANT UNE TÊTE ET DEMIE

Cet essai que je soumets aux artistes conserve la plupart des traditions qu’on enseigne dans les ateliers, il contient en outre, surtout aux membres inférieurs, des points de repère nouveaux, empruntés au squelette et qui, par leur fixité, ont le grand avantage de conserver leur situation relative dans les différents mouvements ; enfin il répond aux principales mensurations du canon scientifique.

C’est ainsi que, conformément à ce dernier, la tête est comprise sept fois et demie dans la hauteur ; la grande envergure dépasse la taille ; le milieu du corps est situé un peu au-dessus du pubis. Comme dans le canon de J. Cousin, la longueur de la tête sert de module.

Le tronc, y compris la tête, mesure quatre longueurs de tête. Les divisions correspondent à des points de repère situés à la partie antérieure et postérieure. La première division est tangente au menton. La deuxième division répond aux mamelons ; la troisième, en avant, au nombril ou un peu au-dessus, et en arrière, à la limite supérieure des fesses. La quatrième, qui coupe, en avant, les organes génitaux à leur partie inférieure, est située en arrière, juste au niveau du pli fessier.

Le membre inférieur comprend également quatre longueurs de tête, à partir du sol jusqu’au milieu du pli de l’aine qui répond à l’articulation coxo-fémorale. Mais ces deux mesures, tronc et membre inférieur, chevauchent l’une sur l’autre d’une demi-tête, ce qui donne comme hauteur totale de la figure sept têtes et demie et ce qui place le milieu de la figure à mi-distance de la limite inférieure du tronc et de la limite supérieure de la jambe, à un point qui correspond au bas du pubis.


PARTIES DU CORPS AYANT COMME COMMUNE MESURE DEUX TÊTES

Les subdivisions du membre inférieur se répartissent ainsi du sol à l’interligne articulaire du genou, deux têtes ; de ce point au dessus du grand trochanter, à la hauteur du milieu du pli de l’aine, deux têtes. Ces points de repère nous ont paru précieux, parce qu’ils sont fixes, appartenant au système osseux, et qu’ils peuvent servir aussi bien sur le membre fléchi que sur le membre étendu. L’interligne articulaire du genou est toujours facile à déterminer, aussi bien dans la flexion que dans l’extension. On trouvera au chapitre qui traite des formes extérieures du genou tous les détails nécessaires à ce sujet. La longueur de la cuisse ne variera pas, puisque les points de repère appartiennent au même os ; dans la mesure de la jambe prise de la limite supérieure du tibia à la plante du pied, il sera toujours facile de faire la part des changements qui pourraient résulter des mouvements du pied[25].

On peut constater que, vu par la face interne, le membre a trois têtes et demie du sol au périnée. Le centre de la rotule occupe le milieu entre l’épine iliaque et le sol. Le membre supérieur mesure trois têtes, du creux de l’aisselle à l’extrémité du doigt médius.

La limite supérieure manque de point de repère fixe ; elle arrive au-dessous de l’articulation scapulo-humérale, à une distance de moins d’une demi-tête du bord supérieur de la clavicule. Une détermination plus précise de la longueur du bras peut avoir lieu par un moyen détourné, ainsi que je vais l’indiquer dans un instant. De l’extrémité inférieure du doigt médius au dessus de l’olécrane, on compte deux têtes. Dans la première longueur de tête se trouve compris le poignet, la main dépasse par son talon trois quarts de tête ; le doigt médius, y compris la tête du troisième métacarpien, égale une demi-tête.

L’olécrane occupe juste le milieu de l’espace compris entre le sommet de l’épaule et l’articulation métacarpo-phalangienne du médius. Cette dernière mesure peut être utilisée pour fixer la longueur du bras.


PARTIES DU CORPS AYANT COMME COMMUNE MESURE TROIS ET QUATRE TÊTES

Cette mesure doit être prise du dessus de l’acromion, le sommet de l’acromion étant souvent difficile à découvrir à cause de l’insertion du deltoïde. Il est important de noter que cette mesure n’est vraie que dans l’extension du membre supérieur. Dans la flexion, en effet, la descente de l’olécrane amène un allongement proportionnel de la moitié supérieure du membre. On pourrait remplacer avec avantage le point olécranien par le point condylien, situé au fond de la dépression condylienne, et qui, dans la flexion du coude, a l’avantage de ne point changer de place. Mais il nous faut encore faire observer que suivant la position de l’humérus, la longueur du bras, ainsi mesurée de l’acromion au point condylien, est susceptible de quelques changements. C’est ainsi qu’elle se raccourcit dans l’élévation du bras en dehors, tandis qu’elle s’allonge si le bras est porté horizontalement en avant.

La tête est divisée par moitié par la ligne des yeux ; les autres subdivisions données par J. Cousin peuvent être consultées avec fruit, en faisant remarquer toutefois que le nez, qui occupe la troisième division, est trop long, et que la quatrième division devient trop étroite pour contenir la bouche et le menton. Léonard de Vinci donne une autre mesure qui paraît généralement exacte, c’est celle-ci : la base du nez occupe le milieu entre l’arcade sourcilière et la base du menton.

La distance du menton au creux sus-sternal est d’un tiers de tête.

Les principales mesures de largeur du tronc sont les suivantes : la plus grande largeur des épaules est de deux têtes ; la distance qui sépare les deux fossettes sous-claviculaires égale une tête ; la largeur de la poitrine au niveau de l’aisselle est d’une tête et demie ; l’intervalle qui sépare les deux tetons mesure moins d’une tête ; le diamètre bi-iliaque dépasse une tête ; enfin le diamètre bi-trochantérien est d’une tête et demie.

Parmi les mesures de hauteur du tronc, celles qui suivent sont faciles à retenir : de l’épine iliaque à la clavicule, il y a deux têtes ; on compte une tête et demie de la clavicule à la saillie costo-abdominale en avant, et au défaut des côtes en arrière ; ces deux points indiquent la limite supérieure du flanc, qui aurait donc en avant une demi-tête de hauteur et en arrière beaucoup moins. On compte une tête du bord supérieur du trapèze à l’angle inférieur de l’omoplate. La douzième vertèbre dorsale se trouve située environ au milieu de la troisième division du torse.

Enfin, la distance du creux sternal au pubis en avant égale en arrière celle de la proéminente au sommet du sacrum.

La longueur du pied dépasse la hauteur de la tête d’un septième environ.


Pour résumer ce qui précède, j’indiquerai sommairement quelques-unes des parties du corps qui ont une commune mesure :

1/2 tête =

Le médius, y compris la tête du troisième métacarpien ;

La hauteur du flanc en avant ;

La rainure interfessière ;

1 tête =

Du menton à la ligne des tetons ;

Des tetons à l’ombilic ;

La longueur du bras, du creux de l’aisselle au dessus de la saignée ;

La main, y compris le poignet ;

La hauteur des fesses ;

La distance qui sépare les deux fossettes sous-claviculaires ;

La hauteur de la région scapulaire, du bord supérieur du trapèze à l’angle inférieur de l’omoplate ;

(Le diamètre bi-iliaque, mesuré aux épines iliaques, dépasse une tête.)

1 tête 1/2 =

La hauteur du thorax, du dessus de l’épaule à la limite supérieure du flanc ;

La distance qui sépare les deux centres des articulations scapulo-humérales ;

Le diamètre bi-trochantérien ;

La distance qui sépare le périnée de l’interligne articulaire du genou ;

2 têtes =

La jambe, du sol à l’interligne articulaire du genou ;

La cuisse, de l’interligne articulaire du genou au dessus du grand trochanter ou au milieu du pli de l’aine ;

L’avant-bras et la main, de l’extrémité du doigt médius au dessus de l’olécrane ;

La hauteur du tronc, de la clavicule à l’épine iliaque, et de la proéminente à la tubérosité iliaque marquée par la fossette lombaire latérale inférieure ;

3 têtes =

Le torse, du menton au pli fessier ;

Du sommet de la tête à l’ombilic, ou à la limite supérieure des fesses ;

Le membre supérieur, du fond de l’aisselle à l’extrémité du médius.

Enfin je rappellerai, aux membres, les deux égalités qui, pour ne pas affecter avec les mesures de la tête des rapports simples, n’en sont pas moins importantes. Aux membres supérieurs, il y a égalité de l’olécrane au sommet de l’épaule, d’une part, et à l’articulation métacarpo-phalangienne du médius, d’autre part ; et au membre inférieur, égalité entre la distance qui sépare le centre de la rotule de l’épine iliaque, d’une part, et du sol, d’autre part.

J’arrêterai ici ces quelques considérations sur les proportions du corps humain, dans lesquelles je n’ai eu d’autre but que celui de mettre à la disposition des artistes des mesures commodes et précises, et une sorte de moyenne dont il leur appartient de s’éloigner, dans l’exécution de leurs conceptions artistiques, au gré de leur fantaisie ou de leur génie.




  1. L’un a servi pour les membres, l’autre pour le torse.
  2. Leçon du mardi 30 oct. 1888. 2e année, p. 21.
  3. Les os sont principalement composés de phosphate de chaux, de carbonate de chaux et de phosphate de magnésie, qui ensemble entrent environ pour plus des deux tiers de leur substance.
  4. Cette manière de voir s’appuie sur le mode de développement des os et sur quelques faits d’anatomie comparée.

    Les os longs, par exemple, sont formés, à une certaine période de leur développement, de plusieurs pièces, pour le moins au nombre de trois le corps, ou diaphyse, et les extrémités, ou épiphyses, qui ne se confondent que plus tard en un même tout et que l’on ne considère pas comme autant d’os distincts.

    C’est par un processus analogue que les sutures, qui, loin de les séparer, réunissent les diverses parties du squelette de la tête, tendent à disparaître par les progrès de l’âge.

    Enfin, la constitution du crâne par une seule pièce osseuse n’est pas sans exemple dans l’échelle des êtres vivants ; on sait, en effet, que le crâne des oiseaux adultes est formé d’un seul os.

    « La tête des oiseaux, dit M. Oustalet, est relativement petite ; chez les très jeunes individus, le crâne se montre distinctement formé de deux os frontaux, de deux pariétaux, de deux temporaux, d’un occipital et d’un sphénoïde ; mais par les progrès de l’âge mûr, et même de fort bonne heure, toutes ces pièces se soudent intimement. »

    (Dictionnaire encyclopédique de Dechambre, art. Oiseaux.)
  5. Le mécanisme de ces articulations est étudié plus loin en même temps que celui de toute la colonne vertébrale.
  6. Sur presque tous les squelettes montés, le thorax est trop court et trop ouvert en avant. Il est beaucoup trop distant du bassin. Il en est de même sur la plupart des dessins anatomiques.
  7. De la mensuration des os longs des membres, par le docteur Étienne ROLLET, 1889.
  8. Des lois de la morphogénie chez les animaux, par E.-J. Marey, in Archives de physiologie, 1889, nos 1 et 2.
  9. Duchenne distingue au point de vue physiologique :

    1° Les faisceaux du sacro-lombaire et ceux du long dorsal qui se terminent à la face externe de l’angle des dernières côtes, aux apophyses transverses ou costiformes des vertèbres lombaires et aux tubercules de leurs apophyses articulaires, comme exerçant une action identique sur les vertèbres lombaires et sur les dernières dorsales. Il leur donne le nom de spinaux lombaires superficiels.

    a) Les faisceaux interépineux du long dorsal qui produisent l’extension directe des vertèbres dorsales ; b) les faisceaux de renforcement du sacro-lombaire qui produisent l’extension et l’inflexion latérale vers le côté excité des cinq dernières vertèbres cervicales et des sept ou huit premières vertèbres dorsales ; c) les faisceaux de terminaison internes transversaires dorsaux du long dorsal (spinaux dorsaux superficiels).

    Les spinaux profonds dans les deux régions sont les transversaires épineux, rotateurs des vertèbres.

  10. Cette insertion est également commune au fléchisseur superficiel des doigts.
  11. Ces mesures ont été prises sur le vivant. Me basant sur ce fait que dans les replis que l’on fait à la peau en la pinçant largement, l’épaisseur de ces replis varie en raison directe de l’épaisseur du pannicule adipeux qui la double et qui se trouve entraîné avec elle, en glissant sur les parties profondes, j’ai mesuré avec un compas d’épaisseur spécialement construit pour cet usage les plis cutanés ainsi formés successivement dans les diverses régions du corps. En divisant par moitié les chiffres ainsi obtenus, j’ai eu l’épaisseur du pannicule adipeux, y compris, bien entendu, celle de la peau. Mais comme les variations de la peau elle-même sont relativement fort minimes, on peut, sans trop s’écarter de la vérité, la considérer comme une quantité constante et mettre sur le compte du pannicule adipeux sous-cutané les variations observées dans les chiffres. Quelques recherches sur le cadavre ont confirmé les résultats obtenus par ce procédé sur le vivant. En raison même de son principe, ce procédé n’a pu être employé que sur les parties mobiles de la peau. C’est pourquoi il n’est pas question dans nos mesures de l’épaisseur du pannicule adipeux de la face palmaire de la main et plantaire du pied, à cause des adhérences étroites de la peau de ces régions avec les surfaces aponévrotiques.
  12. Les anciens, rapporte Malgaigne, pensaient que le cou grossissait chez la femme immédiatement après les premières approches de l’homme, et cette idée s’est conservée dans le peuple jusqu’à nos jours. Ainsi quelques matrones mesurent encore la circonférence du cou d’une jeune mariée le jour et le lendemain des noces ; d’autres vont plus loin et prétendent pouvoir reconnaître la virginité par le procédé suivant : la circonférence du cou prise avec un fil à sa partie moyenne, on double la longueur de ce fil, on en fait tenir entre les dents incisives les deux extrémités et l’on embrasse le sommet de la tête avec l’anse qui en résulte. Si le fil passe librement par-dessus, le vertex, mauvais signe ; si, au contraire, l’anse se trouve trop étroite, on conclut en faveur de la virginité. Les physiologistes ont dédaigné ces traditions populaires. Je dois dire cependant que, sans leur accorder une grande valeur, elles ne sont pas sans quelque fondement. Ainsi, à moins de goitre ou d’une difformité quelconque, j’ai toujours vu l’anse du fil, trop étroite chez des jeunes filles de quinze à vingt ans, dont les mœurs ne pouvaient être soupçonnées ; chez les femmes mariées depuis plusieurs années, le cou est certainement plus large, et il m’a paru qu’il s’élargissait surtout par l’effet de la grossesse et de l’accouchement.
  13. Nous pensons utile de réunir dans un même tableau les muscles qui meuvent la tête et ceux qui meuvent la colonne cervicale, en les classant suivant le mouvement produit et en soulignant ceux qui agissent exclusivement sur le rachis :

    Flexion : Sterno-mastoïdien, muscles de la région sus et sous-hyoïdienne, scalènes, long du cou*.

    Extension : Trapèze, splénius, grand complexus, interépineux du cou*, transversaire du cou*, intertransversaire du cou*, angulaire.

    Inclinaison latérale : Trapèze, splénius, grand complexus, sterno-mastoïdien, scalènes, intertransversaire du cou*, angulaire.

    4° Rotation

    la face tournée du même côté, splénius, faisceau supérieur du long du cou*.
    la face tournée du côté opposé, sterno-mastoïdien, grand complexus, transversaire épineux*, faisceau inférieur du long du cou*.

    Nota. — Les muscles marqués d’un astérisque sont profonds et sans influence sur la forme extérieure.

  14. Communication orale.
  15. Poirier, Notes anatomiques sur l’aponévrose, le ligament suspenseur et les ganglions lymphatiques de l’aisselle, 1888.
  16. C’est surtout dans les attitudes vicieuses et pathologiques de la colonne vertébrale que se retrouve ce mécanisme compensateur ; mais il n’en existe pas moins à l’état normal.
  17. Anatomie des formes extérieures du corps humain.
  18. Il suffira de citer, parmi les antiques, l’Achille, le Doryphore, l’Apollon Sauroctone, etc., et parmi les modernes, le David de Mercié, le Saint Jean-Baptiste de Rodin, etc.
  19. Les fibres inférieures du vaste interne descendent plus bas qu’on ne le dit généralement. Dans le relâchement du muscle et sur le cadavre, il est facile de constater qu’elles dépassent le bord supérieur de la rotule et atteignent communément le niveau de sa partie moyenne.
  20. Avant Gerdy, cette saillie inférieure du vaste interne relâché avait été signalée en passant, bien que d’une façon très précise, par Salvage, dans son Anatomie du Gladiateur combattant.

    Mais l’opinion de Gerdy paraît l’avoir emporté, car ce relief musculaire spécial est complètement passé sous silence dans les auteurs modernes, parmi lesquels je citerai Fau, Morel, M. Duval, Cuyer, Harlers, Marchall, etc. Ce dernier auteur dit même expressément que les reliefs musculaires du tricepcs fémoral, très évidents lors de la contraction, sont altérés et cachés par des replis de la peau, lorsque le muscle est au repos, comme dans la station debout sans effort. Il est à noter qu’on ne retrouve cette disposition sur aucune des statues d’écorchés (à l’exception toutefois de celle qui a été faite d’après le Gladiateur combattant), bien que plusieurs d’entre elles présentent l’attitude hanchée, éminemment favorable à sa production.

  21. M. Marey a fait remarquer que, chez le nègre, le triceps sural était plus long dans sa partie charnue, aux dépens du tendon d’Achille, que chez le blanc. Cette disposition musculaire différente correspond à une inégalité dans la longueur des leviers osseux. Le calcanéum du nègre est plus long que celui du blanc dans un rapport de 7 à 5. Ces différences de structure sont en relation avec la fonction, le nègre possédant une aptitude incontestable à la marche. M. Marey ajoute qu’on trouvera dans l’anatomie comparée l’explication des variétés morphologiques du système musculaire dans la série animale et le véritable lien qui rattache les formes extérieures des animaux aux conditions dans lesquelles ils vivent.
  22. Accessoirement, le même mouvement est produit par d’autres muscles, par le psoas-iliaque, par les adducteurs…
  23. « Cette action rotative en dedans de la portion inférieure du grand adducteur, dit-il, est très utile dans certains mouvements des membres inférieurs, par exemple au cavalier, qui doit éviter de toucher le ventre de son cheval avec ses éperons, surtout lorsqu’il veut le serrer entre ses cuisses. Il y parviendrait difficilement s’il était privé de l’action rotatrice en dedans de la portion inférieure du grand adducteur. » Physiologie des mouvements, p. 360.
  24. La statue en marbre du Doryphore, actuellement au musée de Naples, ne serait, selon le dire autorisé de M. Guillaume, qu’une reproduction du célèbre ouvrage de Polyclète ; l’original devait être en bronze. Il était, en outre, accompagné d’un travail écrit dans lequel l’auteur en donnait l’explication, et qui a été perdu.
  25. M. le colonel Duhousset, dans une étude récente sur les proportions du corps humain (in Rev. d’anthropologie, n° 4, 1889), donne à peu près la même mesure, en signalant la longueur du fémur comme étant égale au tibia augmenté de la hauteur du pied.