Analyse du Flambeau des saints (Bar Hebræus)

ANALYSE

De l’ouvrage de Bar-Hebræus intitulé ܡܢܪܐ ܩܗ̈ܕܫܐ
le Flambeau des saints[1].

Nous ne donnerons point ici la biographie de l’illustre écrivain dont nous nous proposons d’examiner un ouvrage ; Assémani l’a déjà fait[2]. Nous nous contenterons de rappeler qu’Abou’l-Faradje naquit l’an 1226. Il était fils d’un médecin nommé Aron, d’origine juive, ce qui lui a fait donner le nom de Bar-Hebræus, ou fils de l’Hébreu. Sa patrie est Mélitène[3]. La position politique et topographique de cette ville fit qu’il apprit en même temps le syriaque, le grec et l’arabe. Il maniait avec la même facilité ces trois langues. Forcé de fuir devant les Tartares, qui envahissaient l’Arménie en 1243, il vint à Antioche, où il composa son Histoire des dynasties. Élevé au siége d’Alep en 1264, il devint peu de temps après maphrien, ou primat de l’église des jacobites, et il occupa plusieurs années cette place[4]. Il mourut à Maradje[5] en 1285.

Barsuma, son frère, qui succéda à sa dignité, et qui nous a donné des détails précieux sur sa vie, termine son éloge par ces mots : « Qui ne s’apitoierait sur le sort de l’illustre église des jacobites, en la voyant privée d’un homme aussi rare et d’un philosophe aussi admirable ? Qui mieux que lui pouvait vous éclairer sur une question théologique ou sur tout autre sujet profane, fût-il simple ou ardu ? Qui pourrait écrire une lettre avec le talent, la douceur et la grâce de cet homme que Dieu avait orné de toutes les connaissances imaginables ? Depuis l’âge de vingt ans jusqu’à son dernier soupir il ne cessa d’étudier ni d’écrire[6]. »

En effet Bar-Hebræus a écrit un nombre prodigieux d’ouvrages sur les sujets les plus variés. La théologie, la philosophie, l’histoire, la physique, la géologie, l’astronomie, la médecine et la grammaire lui ont fourni tour à tour la matière d’autant de traités spéciaux où il déploie la même érudition et la même pénétration d’esprit. Barsuma nous a transmis la liste de ses ouvrages, et il en énumère trente et un[7].

Le Flambeau des saints est peut-être, de toutes les productions de Bar-Hebræus, celle qui peut mieux nous donner une juste idée de la fécondité et de la multiplicité de son génie. Ici l’auteur est à la fois théologien, philosophe et naturaliste ; il soumet à ses investigations Dieu, l’homme et la nature. Cet ouvrage est une espèce de système philosophique, fortement conçu et assez rigoureusement lié dans toutes ses parties ; et la longue chaîne de ses déductions, rattachée à l’élément infini, à Dieu, redescend dans l’ordre fini de la création et en embrasse successivement tous les ordres, qu’elle lie en un seul faisceau pour les déposer ensuite aux pieds du souverain maître, comme un hommage rendu à sa grandeur et à sa toute-puissance. Toutefois le principe rationnel y est continuellement subordonné au principe traditionnel. La foi sert de point de départ et de base au vaste édifice que la science construit ; c’est elle qui en éclaire les parties obscures et mystérieuses, et qui nous sert de guide dans cet inextricable labyrinthe où la raison seule, ténébreuse et impuissante, s’égarerait infailliblement.

Cet ouvrage, qui embrasse toute la science contemporaine, montre que l’esprit philosophique faisait alors un grand effort pour enfanter une doctrine qui, résumant les connaissances des âges précédents, put les transmettre aux siècles à venir sous une forme nouvelle, plus compréhensible et plus en harmonie avec l’état actuel de l’esprit humain. Ce travail est comme une prolongation des vastes travaux des gnostiques, bien que la forme synthétique et intuitive y domine moins que dans l’école d’Alexandrie, et qu’on sente l’influence de l’esprit aristotélique qui pénétrait de toutes parts dans le monde arabe et qui desséchait en quelque sorte la sève du génie oriental avec les formules algébriques et les sophismes de sa logique. D’une autre part le Flambeau des saints, quand on considère sa méthode analytique, nous révèle la marche prochaine de la science en Europe pendant le moyen âge. On reconnaît déjà, dans ses divisions et subdivisions, dans ses catégories, qui ressemblent aux cases d’un médailler[8], et dans l’argumentation animée, mais trop uniforme, qui s’établit entre l’auteur et de subtils adversaires, qui ne sont quelquefois que des personnages fictifs ; on reconnaît, dis-je, la forme philosophique qui se reproduit à un plus haut degré dans la scolastique. Bar-Hebræus nous apparaît sous ce rapport comme le précurseur de saint Thomas, et il y a même une analogie frappante entre ses ouvrages et la Somme du grand théologien[9].

L’analyse du Flambeau des saints, que nous essayons de faire, aura, nous osons l’espérer, quelque intérêt pour ceux qui aiment à étudier l’esprit humain sous toutes ses faces, et elle pourra peut-être servir à compléter l’admiration que le nom d’Abou’l-Faradje a inspirée aux orientalistes qui connaissent déjà ce grand homme comme historien[10].

L’ouvrage se compose de douze traités ou fondements, autour desquels vient se grouper une multitude de vérités et de faits secondaires. Maintenant quelle est la manière de procéder de l’auteur ?

La vérité existe ; quiconque nie son existence se retranche par le fait même dans le scepticisme universel, absolu, et se condamne à un éternel silence. Cette vérité, une et immense comme Dieu, dont elle n’est que la substance, se subdivise, sous le regard analytique de l’esprit humain, en une riche variété de vérités partielles et secondaires qui, rapprochées les unes des autres et liées par la raison, recomposent un tout harmonique que l’on appelle science. La science est l’arène où l’intelligence s’exerce, et c’est là où nous devons commencer par nous placer pour nous livrer à une spéculation quelconque. Aussi le premier fondement du livre traite-t-il de la science dans sa notion simple et générale ܡـܛـܠ ܢــܕܥــܬܐ ܦܫܝܛܐܝܬ. L’homme, en tant qu’être intelligent, doit se nourrir et se rassasier de cette science ; elle est la respiration de son âme, l’aliment quotidien de son intelligence : s’en abstenir, c’est renoncer à la vie spirituelle[11].

Comme ce principe pourrait être contesté et être traité de simple assertion, particulière à la manière de juger de l’auteur, Bar-Hebræus prévient les objections et établit une forme d’argumentation évolutive, qui revient chaque fois qu’il veut prouver une vérité importante. Il s’appuie d’abord sur le témoignage des livres saints ; la parole de Dieu est la pierre angulaire sur laquelle la raison humaine, en se posant, demeure inébranlable[12]. Les pères de l’église viennent ensuite apporter le tribut de leurs preuves, corroborant par leur unanimité celles des saintes lettres ; et, en troisième lieu, l’auteur, dans sa méthode large et généreuse d’argumenter, ne dédaigne pas d’invoquer le témoignage des philosophes profanes, lorsqu’ils s’accordent avec les autres, en sorte qu’il enveloppe chaque vérité de la lumière la plus éclatante qu’elle puisse recevoir, et qu’il lui donne en même temps la plus haute sanction possible ici-bas.

Après avoir établi ce qu’il veut démontrer, l’auteur passe en revue toutes les objections et les difficultés que l’ignorance, la mauvaise foi ou le doute peuvent susciter et lui élever sur sa route. Ici il réfute naturellement le scepticisme et toute doctrine qui cherche à altérer ou à détruire la vérité[13].

L’existence et la véracité de la science étant admises, l’intelligence doit s’appliquer à connaître ce qui la compose et ce qui relève de son domaine. Sur quel objet s’exercera d’abord son activité ?

Bar-Hebræus suit la voie analytique ; il s’élève du fini à l’infini. Ce qui frappe, selon lui, d’abord l’attention de l’homme, ce sont et cette terre sur laquelle il est jeté, et les êtres innombrables qui la couvrent, et les phénomènes divers qui la caractérisent, et toutes ces sphères lumineuses qui semblent se mouvoir autour d’elle dans l’espace. Cet ensemble forme le monde, et la connaissance de ce monde est le sujet du second fondement.

L’homme, par une loi secrète de son être qui s’est développée en lui lors de sa déchéance, est sans cesse abaissé des hauteurs de l’intelligence vers la matière et les sens. Il est porté à s’identifier à a nature sensible et à croire plutôt ce qu’il voit, et ce qu’il palpe et ce qu’il sent, que les vérités qui lui sont révélées par la foi. Le sage et admirable économie de cet univers, loin d’élever son esprit à l’idée d’un ordonnateur suprême, peut quelquefois déconcerter sa raison, lorsqu’elle a fait divorce avec la foi, et la conduire à se représenter ce même univers comme un grand être se suffisant à lui-même, ayant sa vie et ses fonctions propres, et se mouvant dans une éternelle indépendance. C’est pourquoi, en parlant du monde, l’auteur doit aborder la question de sa création. Il commence par prouver qu’il n’est point éternel[14], et il réfute longuement les philosophes qui ont cru à son éternité[15]. Toutefois, s’appuyant sur le mystérieux passage de saint Pierre[16], il croit à l’éternité à posteriori de ce monde et à sa future régénération[17].

Ensuite, par une conception grande et synthétique, Bar-Hebræus, pour expliquer le monde, suit l’ordre traditionnel des six jours de la création. Cette idée néanmoins ne lui est pas propre ; plusieurs pères, et entre autres saint Basile, avaient suivi un plan analogue[18]. Dans le premier jour de la création, il encadre ses réflexions sur les cieux[19], la terre, les montagnes, le sable, les métaux, ܡܐܛ̈ܒܩܝܘ, les fossiles, ܡܬܚ̈ܦܪܝܐ, et les autres questions sur la fixité de la terre, sur sa division en sept[20] climats, qu’il décrit les uns après les autres, sur la distinction des races d’après les fils de Noé, sur la nature de l’eau, sur les éléments de l’air, sur les nuages, la pluie, la neige et la rosée[21]. L’arc-en-ciel, le tonnerre, les éclairs[22], les comètes, la voie lactée[23], les ouragans, les tempêtes, les vents et la direction de leurs souffles, les tremblements de terre, le feu, sa nature et ses éléments, les volcans[24] : tous ces phénomènes sont examinés et expliqués avec les données de la science actuelle. Il disserte ensuite sur la lumière, et il prouve qu’elle n’est pas corporelle. La présence ou l’absence de la lumière fait la nuit ou le jour, ce qui le conduit à parler du temps et de ses divisions.

En passant aux autres jours de la création, il parle de la mer, de son flux et reflux, de sa position et de son étendue, des fleuves, des rivières et des fontaines, des poissons, des oiseaux, des reptiles, des quadrupèdes ; et, après avoir soumis à ses investigations tout ce qui se trouve sur cette terre, il s’élève au ciel et en décrit les constellations, base de la science astronomique de ce temps. Nous pensons que leur énumération, sous le rapport lexicographique, ne sera pas sans un certain intérêt, vu qu’elles manquent dans nos dictionnaires[25] et que, d’un autre côté, leurs noms serviront à prouver que les Syriens ne faisaient guère que traduire le langage scientifique et technique des Arabes. Nous supprimons les douze signes du zodiaque déjà connus et classés dans les lexiques, et, en énumérant les trente-trois constellations que cite notre auteur, nous suivrons scrupuleusement l’ordre dans lequel il les range.

Nous avons vérifié, dans le savant ouvrage de M. Ideler[26], les noms arabes et grecs correspondants aux noms syriaques, et qui sont fidèlement traduits dans l’exemplaire arabe écrit en caractères syriaques. L’exemplaire syriaque porte en marge les noms grecs également écrits en langue syriaque.

اللتنين ,ܬܢܝܢܐ, Δράκων, le dragon.
ܩܝܦܐܘܣ, اللتهن
قيغاوس
Κηφεὺς, Céphée.
الاڪليل الجنوى ,ܢܛܪ ܥܪܒܝܐ, Βοώτης, le gardien du nord.
الاڪليل الجنوبى ,ܟܥܝܠܐ ܓܪܒܝܐ[27], Στέφανος νόπος, la couronne boréale.
.ܗܘ ܕܒܪܝܚ ܥܠ ܒܘܪ̈ܟܘܗ

La traduction arabe est littérale :

الجـالس عل نـركـتـيـه
L’homme à genoux[28].

اللور ,ܠܘܪܐ, Λύρα, la lyre.
الدجلجة ,ܬܪܢܘܓܠܬܐ, Ὄρνις, le cigne[29].
ذات السرير اعنى الڪرسى ou ܡܪܬ ܥܪܣܐ ,صاحبة, Κασσιέπεια, la dame du lit.

پرشاوش ,ܒܪܫܐܘܫ, Περσεὺς, Persée.
ܐܝܝܕܥܪ̈ܘܐ, l’homme qui tient les rênes ; ماسك الاعنة ou هسك, Ἡνώχος, le cocher.
الجيّة ,ܣܘܝܐ, Ὄφις, le serpent.
الحاوى ,ܢܘܝܐ ܕܢܥܝܐ, Ἠφιοῦκος, le serpentaire.
السهم ,ܓܐܪܐ, Ὀϊστὸς, Antinoüs.
النسر الطاير ,ܢܫܪܐ ܕܦܪܚ, Ἀετὸς, l’aigle volant.
الدلغين ,ܕܘܠܦܝܢܐ, Δελφὶν, le dauphin.

جزء الغرس ,ܡܢܬ ܣܘܣܝܐ, la portion de cheval. Ce nom correspond probablement au الغرس الثانى, le petit cheval.
الاعظم ,ܣܘܣܝܐ ou الغرس الاكبر, Πήγασος, le cheval par excellence.

المساساة ,ܐܢܕܪܘܡܝܐ, Andromède.
المثلث ,ܛܪܝܓܘܢܘܢ, Δελτωτὸν, le triangle.
فيطس ,ܩܝܛܘܣ, Κῆτος, la baleine.
الجنّار ,ܓܢܒܪܐ, Orion.
النهر ,ܢܗܪܐ, Ποταμὸς, Éridan.
الارنب ,ܐܪܢܒܐ, Λαγωὸς ou Λαγώς, le lièvre.
الكلب الاڪبن ,ܟܠܒܐ ܪܟܐ, Κύων, le chien.
الكلن الاصغر ,ܟܠܒܐ ܙܥܘܪܐ, Προκυὼν, Procyon.
الشغال ,ܠܘܝܬܘܢ, Ἀργὼ, le navire.
الشغال[30], ܠܘܢܬܘܢ, Ὕδρα, le léviathan, l’hydre.

اكومر, ܟܣܐ ou الناطية, Κρατὴρ, la coupe.
الغران ,ܒܘܪܟܐ, Κόραξ, le corbeau.
القنطوروس ,ܣܢܛܘܪܘܣ, Κένταυρος, le centaure.
ܟܬܢܘܪܐ[31].
ڪليل الغبلية ,ܟܠܝܠܐ ܬܝܡܢܝܐ, Στέφανος νόπος, la couronne australe.
الجنودى ,ܢܘܢܐ ܕܬܝܡܢܝܐ ou الحوت التباية, Ἰχθυς νόπος, le poisson austral.

Au sixième jour, l’homme, qui est comme le couronnement de la création tout entière, sort des mains de Dieu, et c’est sur lui que Bar-Hebræus fixe maintenant ses regards. Il l’étudie en tant qu’être organique, et il résume en une dizaine de pages toutes les connaissances anatomiques de son siècle[32].

Puis, conformément à l’esprit d’analyse qui distingue sa méthode semi-aristotélicienne, il remonte de l’effet à la cause, du fini à l’infini, de l’homme à Dieu. La connaissance de Dieu, ou autrement la théologie, ܡـܡـܠܘܐ ܐܠܣܘܬܐ, tel est le sujet du troisième fondement. Les arguments qu’il produit sur l’être nécessaire[33], sur son éternité à priori et à posteriori[34], sur son immensité[35], sur son immatérialité[36], et les réfutations des philosophes qui combattent ou qui nient en Dieu ces propriétés, tous ces développements sont clairs et concluants, et pourraient trouver une place dans nos traités de théologie. Il s’étend assez longuement sur l’anthropomorphisme, sur la prescience[37], sur l’incompréhensibilité de l’essence divine ; et, passant au mystère de la Trinité, il nous montre comment, avec l’unité et l’identité de substance, coexiste la distinction des personnes[38] ; pourquoi la filiation[39] appartient à la seconde personne, et la procession[40] à l’Esprit saint ; comment encore chacune des personnes est et doit être appelée Dieu, et pourquoi le fils, engendré par le père, et l’Esprit saint, procédant du père et du fils, ne sont point cependant ni formés, ni créés[41].

Après nous avoir fait connaître Dieu, dont la notion générale est celle de la première personne de la Sainte-Trinité, Bar-Hebræus passe à la seconde personne, au fils, et il développe le mystère de l’Incarnation[42], ce qui fait le sujet du quatrième fondement.

Tout le christianisme repose sur ce dogme ; il est donc de la plus haute importance pour tout théologien, mais surtout pour Bar-Hebræus, maphrien ou patriarche des jacobites, ainsi que nous allons l’expliquer.

Le dogme catholique est que le fils de Dieu, en se disant homme, a uni la nature humaine à la nature divine, en donnant à l’une et à l’autre de ces deux natures pour hypostase sa personnalité divine, en sorte qu’il y a dans Jésus-Christ unité de personne et dualité de nature. Ce point de la foi, compréhensible jusqu’à un certain degré à la raison humaine, mais renfermant toujours en soi de saintes et impénétrables obscurités, fut fortement attaqué par les novateurs des premiers siècles de l’ère chrétienne. Nestorius crut que la conséquence de la dualité de natures était la dualité des personnes. Eutychès, en le combattant, tomba dans l’excès contraire, et, en revendiquant l’unité des personnes, fut entraîné à soutenir l’unité des natures[43]. On donna à ses partisans le nom de monophysites, dénomination générique qui comprend les dioscoriens, les sévériens, les théodosiens, les acéphales, les théopachistes et dix-neuf autres sectes qu’il serait trop long d’énumérer[44]. Au nombre de ces hérésiarques était un certain Jacobus Baradæus, ou Zanzalus[45], qui se distingua par son zèle à répandre la doctrine du monophysisme dans la Syrie et la Mésopotamie. C’est lui qui donna naissance à la secte des jacobites, bien que ceux-ci prétendent faire remonter leur nom à saint Jacques, parent de notre seigneur Jésus-Christ.

Bar-Hebræus embrassa ses erreurs, ou plutôt ses opinions, suivant lui, car, en étant jacobite, il ne se regardait point comme retranché de l’unité catholique, ainsi qu’il le dit dans plusieurs de ses ouvrages, et notamment dans celui-ci[46] ; ainsi, loin de se regarder comme un disciple d’Eutychès, il combat cet hérésiarque et lui reproche de mêler et de confondre les deux natures[47], et de nier la possibilité de Jésus-Christ avant sa résurrection. Il réfute également les julianistes et ces autres sectaires appelés phantastici, qui se subdivisent en plusieurs autres branches[48]. Toutefois il serait facile de lui prouver qu’il est conduit logiquement aux mêmes conséquences que ceux qu’il attaque si ardemment, puisqu’il part toujours, ainsi qu’eux, de ce principe que la personnalité et la nature sont identiques, qu’une seule personne suppose une nature unique, et réciproquement.

Le mystère de l’incarnation étant le plus grand prodige de la miséricorde divine, Ber-Hebræus, qui veut en prouver la possibilité, commence par établir une théorie sur les miracles. Il les divise en trois grandes catégories : la première comprend ceux opérés en faveur de Jésus-Christ[49] ; la seconde ceux opérés par Jésus-Christ ; et la troisième se compose de tous les autres prodiges qu’ont opérés les saints par l’intermédiaire des mérites de Jésus-Christ[50]. Toutes les objections contre la possibilité, l’authenticité, l’opportunité et la convenance des miracles sont savamment et longuement réfutées, et, chose remarquable, quelques-uns de ses adversaires lui opposent certains arguments reproduits avec assez d’éclat dans la dernier siècle, entre autres ceux-ci : que le miracle peut être possible en soi, mais qu’il y a impossibilité pour l’homme de discerner tel cas miraculeux de tout autre fait naturel ; qu’un miracle étant une sorte d’infraction aux lois de la nature, il est incompatible avec la sagesse divine[51].

Du mystère de la trinité l’auteur passe à ces êtres surnaturels, les plus élevés dans l’ordre de la création après Dieu, et que l’Écriture nous représente dans une extase perpétuelle d’adoration et d’amour, je veux dire les anges, ܡܠܿܐܿܒܐ, ce qui fait l’objet du cinquième fondement. Ces êtres bienheureux existent[52], les livres saints en font foi, et le témoignage des philosophes profanes vient à l’appui de leur autorité. On retrouve, dans la classification de leur céleste hiérarchie, quelques-unes des idées gnostiques de Denys l’Aréopagite[53], aussi le cite-t-il plusieurs fois. Il disserte sur leurs noms, et, de concert avec saint Thomas[54] il déploie à nos regards les ordres hiérarchiques de leur milice, rangés devant le trône de l’Éternel et disposés comme des espèces de miroirs symétriques qui se renvoient l’un à l’autre les rayons toujours pâlissants de la lumière incréée à mesure que celui qui les réfléchit est plus éloigné de la source. L’ordre supérieur initie[55] aux secrets divins l’ordre inférieur, et l’ordre inférieur purement passif reçoit cette initiation sans pouvoir rien lui rendre en échange. Leur nature est finie et bornée, quelle que soit d’ailleurs leur puissance ; ils sont libres[56], immortels, supérieurs en gloire et en mérites aux simples élus[57] ; ils sont préposés à la garde des hommes, des villes et des nations.

Au-dessous des êtres du monde surnaturel la foi chrétienne place immédiatement le prêtre, qui doit vivre aussi de contemplation et de prières, et qui, par la sainteté de sa vie et la grandeur de son ministère, doit en quelque sorte être sur la terre comme le prolongement de la chaîne des esprits célestes. Le sacerdoce[58] fait la matière du sixième fondement. Bar-Hebræus l’embrasse sous toutes ses faces ; il nous montre la hiérarchie sacerdotale se développant parallèlement à celle du ciel ; il nous explique la nature, l’ordre de ses degrés, les conditions requises pour y être élevé, le mode de sa consécration, les rites symboliques de ses cérémonies[59]. La fonction la plus haute et celle qui exige la plus grande perfection est l’oblation sacramentelle de l’autel[60]. Ici l’auteur nous donne un traité complet de liturgie, où le savant abbé Renaudot a puisé autrefois d’utiles renseignements[61].

En descendant le dernier degré de l’échelle des êtres intelligents, nous arrivons à cette classe d’esprits mauvais et déchus que toutes les croyances antiques nous montrent expiant dans un éternel supplice une faute ancienne, inconnue et immense comme leur misère : on les appelle ܫܐ̈ܕܐ, ou démons. Ce nouveau traite compose le septième fondement. Les démons sont des êtres réels et non pas fictifs[62], ainsi que le prétendent certains philosophes, qui ne voient en eux qu’une personnification des sens corrompus et du principe mauvais qui est en nous[63]. Néanmoins ils ne sont pas, comme l’enseignaient les mages, les manichéens et tous les partisans du dualisme, les représentants du principe mauvais, être infini et co-éternel à l’être bon[64]. Comme les anges, ils ont été créés bons, et s’ils sont tombés dans le mal, c’est par un effet de leur libre arbitre. Ils sont tous égaux entre eux, et nulle hiérarchie n’est possible dans l’enfer, parce que le mal n’est que l’absence de l’être, ou le néant, et que l’on ne peut concevoir de degré dans ce qui n’est pas[65]. Leur tourment n’aura pas de fin, il durera autant que la justice de Dieu. À toutes ces considérations l’auteur joint des conseils relatifs à la vie spirituelle et ascétique, sur la manière de prévenir les tentations ou d’en triompher[66].

Ce triomphe de l’âme sur les sollicitations des esprits mauvais dépend-il de la volonté ou de la grâce divine ? Pour résoudre cette question il faut connaître d’abord la nature et les puissances de l’âme humaine en général, et, d’un autre côté, la part d’influence qu’exerce sur nous l’intervention de la grâce ou de la volonté de Dieu. Cette double question donne naissance aux deux livres ou fondements suivants, intitulés de l’âme rationnelle[67], de la liberté et du destin[68]. Qu’est-ce que l’âme humaine ? Est-elle immatérielle ? oui[69]. Les âmes de tous les hommes sont-elles semblables et identiques ? non. Égales quant à la nature de la substance dont elles sont formées, elles diffèrent essentiellement quant à leurs puissances et à leurs facultés internes[70]. L’âme est attirée, par une loi constitutive de sa nature, vers la science et la connaissance de la vérité ; elle a des affections que nous nommons passions, lesquelles forment le fond de son activité et de son énergie. Sa création est concomitante à celle du corps[71], et elle n’est point éternelle à priori, comme l’ont affirmé plusieurs philosophes ; mais elle est réellement éternelle à posteriori, c’est-à-dire qu’elle survivra à la dissolution du corps, et que dans cet état elle aura une pleine connaissance de tous les actes de sa vie terrestre[72]. L’élévation, le bonheur et la perfection qui embelliront cette phase nouvelle de son existence seront proportionnés aux mérites qu’elle aura acquis dans la vie terrestre[73].

Ces mérites supposent le libre arbitre, d’où la question de la liberté[74]. Comme au temps de Bar-Hebræus le mahométisme, répandu dans tout l’Orient par les rapides conquêtes des Arabes, comptait de nouveaux prosélytes parmi les populations de la Mésopotamie et de la Syrie, et que l’idée fondamentale de sa doctrine résumée dans la loi de fer du destin, laquelle conduit à l’annihilation complète du moi humain, réagissait sourdement et d’une manière occulte, et tendait à altérer la pureté du dogme chrétien sur la liberté, notre théologien sent le besoin d’insister sur cette question et de montrer sa compatibilité avec l’idée de Ia providence et de a prescience divines. L’homme est libre dans ses actes ; il n’est point nécessité à faire soit le bien, soit le mal, et il établit cette définition par cette distinction juste et lumineuse que le bien est naturel, ܟܝܢܝܬܐ, tandis que le mal est simplement légal, ܢܡܘܣܝܬܐ ; c’est-à-dire que le mal n’est point quelque chose d’existant par soi, qu’il n’est que l’infraction de la loi à laquelle l’homme est tenu de se conformer, et qu’en conséquence le rien ne peut modifier la volonté humaine ; qu’il n’est point poussé tantôt au bien ou tantôt au mal, en vertu de deux principes égaux et opposés, suivant la doctrine des dualistes. Dieu veille sur l’homme comme une mère sur l’enfant qu’elle tient par la lisière et à qui elle laisse, en le soutenant, la faculté de se mouvoir et de tomber[75]. L’idée du destin[76] n’est que l’idée de la providence faussée par les philosophes. Tout ce que nous faisons, Dieu l’a prévu ; mais il l’a prévu parce que nous agissons de la sorte, tandis que notre acte n’est aucunement modifié par cette prescience[77]. Tous les témoignages de l’ancien et du nouveau Testament, des pères et des philosophes, viennent confirmer cette vérité.

Ces développements touchaient à cette question tant débattue parmi les Arabes et les musulmans en général, à savoir : si les hommes meurent dans[78] leur temps, et si l’époque fatale n’est point et ne peut être avancée ou reculée. Toute cette dispute, qui a donné naissance à une multitude d’écrits dans ce siècle, s’évanouit d’elle-même lorsqu’on a bien posé une fois la notion de la prescience divine. Aussi l’auteur combat-il les philosophes qui, après avoir ébranlé les fondements de la liberté humaine, cherchent encore à altérer la plénitude de la toute-puissance de Dieu[79].

L’homme donc meurt dans le temps fixé par la volonté divine. La mort est la séparation qui s’effectue entre l’âme et ses organes, séparation qui n’est que temporaire et qui doit finir au jour de la résurrection générale, sujet du dixième fondement. Le corps des élus éprouvera une transformation qui le rendra réellement spirituel, spirituale, selon l’expression de saint Paul[80], toutefois sans que l’état de ses parties et sans que sa confirmation soient radicalement changés. Ainsi, pour la communication de nos pensées, nous n’aurons plus besoin d’un langage articulé[81] ; quant aux autres changements, notre théologien ne fait guère que commenter ce texte de l’Écriture neque nent, neque nubent, etc. etc.

Telle sera la condition des bons ; quant à ceux qui auront abusé de la vie, le jour de la résurrection sera pour eux le jour du jugement[82] et des vengeances, titre du onzième fondement. Des signes avant-coureurs annonceront la venue du fils de l’homme ; mais cette seconde venue n’aura pas lieu sur la terre, ainsi que l’espèrent les Juifs[83]. Les peines des pécheurs seront moins des souffrances physiques et sensibles du corps que des peines de l’âme[84], et c’est dans le même sens qu’il faut entendre les plaisirs et les joies du ciel. La question de l’éternité des peines est longuement traitée, et toutes les objections qui tendent à montrer que tant de sévérité de la part de Dieu n’est pas compatible avec l’idée de sa justice sont combattues et renversées[85].

Bar-Hebræus montre ensuite que la perfection chrétienne consiste dans l’union de la foi et des œuvres. L’homme croyant doit agir ; s’il sépare l’acte de la croyance, il n’a qu’une foi morte et stérile. Le moyen le plus efficace de parvenir à la perfection chrétienne, c’est la confession[86], et il explique au long quel est ce sacrement et quelles sont les dispositions qu’il exige.

L’homme parfait aura pour récompense le bonheur du ciel, dont l’image typique se retrouve dans la tradition primitive du paradis terrestre. C’est par cette idée que Bar-Hebræus termine, et il commente savamment les premiers chapitres de la Genèse, pour nous expliquer la position de ce lieu fortuné, le nom des quatre fleuves et le mystérieux symbole de l’arbre de la science du bien et du mal[87].

On voit que l’illustre maphrien des jacobites se proposait de donner dans cet ouvrage un traité complet de la religion. Il a voulu nous montrer la science partant de la notion de la vérité et s’élevant, à l’aide de ce levier, jusqu’à la connaissance de Dieu, qu’elle étudie et qu’elle contemple dans l’unité mystérieuse de sa substance et la triplicité des personnes qu’elle renferme ; puis, redescendant de ces hauteurs dans la création et promenant ses regards sur tous les êtres qui la composent jusqu’à ce qu’ils s’arrêtent sur l’homme, qu’elle analyse physiologiquement et psychologiquement, en fixant sa place dans la hiérarchie des êtres intelligents et en développant la série de vérités qu’il doit croire et réaliser par ses œuvres pour remplir dignement la mission qui lui a été confiée et mériter Ia récompense qui lui est promise ; en sorte que Dieu est le principe sur lequel elle s’appuie et le terme dans lequel elle rentre après avoir achevé le cercle de ses démonstrations.

Ce plan est vaste et beau ; nous laissons au lecteur le soin de conclure, d’après l’analyse imparfaite et abrégée que nous en donnons, si Bar-Hebræus l’a véritablement exécuté.

Eug. Boré.
  1. Le titre latin apposé au manuscrit est celui-ci : Tractatus theologicus de ecclesiæ christianæ fundamentis, præcipua theologica capita complectens, autore Gregorio Abulfaragio. À cette note Joseph Ascari en ajoute une autre qui porte la date de 1736. Il traduit les mots syriaques par candelabrum sanctitatis, traduction incorrecte, puisqu’il faut lire candelabrum sanctorum. Le manuscrit fait partie du fonds syriaque de ia Bibliothèque royale, no 121. Cette copie est fort ancienne : on lit, dans une note syriaque à la fin de l’ouvrage, que le copiste, nommé Jacobus, termina son travail l’année des Grecs 1715, c’est-à-dire l’an de J.-C. 1393. Les caractères sont en général beaux et fort lisibles ; seulement, par l’effet de la vétusté, plusieurs feuilles sont largement trouées ; le papier se fend et tombe en poussière lorsqu’on y touche, et, sans le secours des additions marginales prises avec soin sur un autre exemplaire, on ne pourrait lire un grand nombre de passages. L’ouvrage en entier se compose de trois cent quatre-vingt-douze feuillets. À partir du feuillet 388 jusqu’à la fin, on reconnaît la main d’un nouveau copiste nomme Éliel. L’écriture est plus fine et moins élégante.
  2. Bibl. orient. tom. II, p. 360.
  3. Mélitène est une ville de Cappadoce qui fit ensuite partie de l’Arménie. Procop. Ædific. liv. III, chap. iv. — Strab. liv. XII, pag. 573. Elle est célèbre par la mort de saint Polyeucte, premier martyr de l’Arménie. Elle fut le berceau de saint Melèce, évêque d’Antioche au ive siècle, et de saint Euthyme, surnommé le Grand. La légion fulminante y tenait sa garnison. Voici ce qu’Abou’lfeda nous dit sur sa position, Tab. geog. man. 396 :

    و هر فر الجنون عن سبواس وبينهـا خو ثلاث مـراحل
    و هر فر الغرب عن كختا وڪرڪر وبينهما خو مر حلتين
    و هر شمالر زابطـرة مرحلة ڪبيرة

    « Posita est ad austrum Sebastes, tribus circiter mansionibus ab ea distans : ad occasum Cachtæ et Gargaræ, duabus ferè mansionibus ab iisdem dissita, et ad Aquilonem Zabatræ, à quâ longâ mansione distat. »

  4. Quant à l’étymologie du mot maphrien, quelques-uns ont voulu la ramener au mot ܐܠܰܦܶ, instruire, d’où ܡܠܦܢܐ : maître, docteur ; mais Assémani, avec plusieurs autres, fait dériver avec raison ce nom de dignité ecclésiastique de l’Aphel, ܐܦܪܝ, d’où ܡܦܪܝܐ, id est fœcunaitatem tribuens, quasi pater patrum. Ce titre répond à celui de catholicos chez les Arméniens.
  5. C’est une ville de l’Aderbidjane, ܡܪܓܐ. Abou’lféda, Tabl. geogr. pag. 417. — Renaud. Litur. orient. tom. II, pag. 40.
  6. Assém. Bibl. orient. tom. II, pag. 67.
  7. Voici ceux que possède la Bibliothèque royale et qui sont inscrits au catalogue des manuscrits syriaques :

    No 118. Opusculum ubi ad examen revocatur dictum illud Socratis, philosophian lesi præstare.

    No 199. Tractatus de moribus benè instituendis secundum christianæ religionis præcepta.

    No 198. Candelabrum sanctorum arabicè sed charactere syriaco. C’est la traduction du manuscrit no 221, que nous analysons.

    No 199. Liber splendorum et confirmationum ad religionem christianam probandam.

    No 130. Opera poetica.

    No 135. Demonstrationes intellectuales de præcipuis christianæ fidei fundamentis. C’est un résumé rapide et concis du Flambeau des saints.

    No 137. Jus civile et canonicum apud Syros jacobitas.

    No 138. Nomocanon Syrorum jacobitarum ex conciliorum canonmbus, arabicè, caractere syriaco.

    No 140. Idem.

    No 157. Opuscula theologica et philosophica.

    No 160. Liber confabulationum ubi historiæ complures, arabicè, caractere syriaco.

    No 169. Ascensio intellectualis.

    No 166. Grammatica syriaca.

  8. Les mots techniques dont l’auteur se sert sont nombreux, et nous en donnons ici la liste dans leur ordre logique. La division principale est ܫܬܐܗܬܐ ou fondement, puis ܦܣܘܩܐ, division ; ܩܦܠܐܘܢ, κεφάλαιον, chapitre ; ܢܝܫܐ, paragraphe ; ܠܘܬܕܐ, avant-propos, introduction ; ܡܚܘܝܢܘܬܐ, preuve ; ܬܘܣܦܬܐ, addition ; ܢܘܗܪܐ, éclaircissement ; ܫܘܪܪܐ, confirmation ; ܐܘܗܕܐ, avertissement ; ܬܐܘܪܝــܐ, θεωρία, théorie ; ܗܦܒܬܐ, objection, et ce mot est toujours suivi de ceux-ci : ܦܘܢܝܐ réponse, et ܣܗܕܘܬܐ, témoignage ; de même qu’après ܣܒܐ qui désigne une objection hérétique, calomnieuse, on lit ܫܕܝܐ, réfutation, et ܬܚܘܢܬܐ, démonstration, exemple.
  9. Grégoire Bar-Hebræus et saint Thomas vivaient non-seulement dans le même siècle, mais la date de leur naissance ne diffère que d’une année. En effet saint Thomas naquit en 1227, et il mourut douze ans avant celui auquel nous le comparons.
  10. Historia compendiosa dynast. ab ed. Pocock, Oxon. 1663. — Greg. Abulphar, Sive Bar-Hebræi chronicon syriæ, à Bruns et Kirsch. Leips. 1789.
  11. Man. pag. 4 et suiv.
  12. Voici la formule qui revient souvent :
    ܣܗ̈ܕܘܬܐ ܟܬܒ̈ܬܐ ܡܫܪܪܢܝܬܗ ܟܒܬܐ ܗܕܐ « Testimonia scripturaram confirmantia hoc argumentum. » Ms. pag. 5 et suiv.
  13. ܡܐܝܦ ܘܡܟܬܠ. Le premier mot manque dans les dictionnaires ; il est probablement identique à la racine chaldéenne זוף dans le sens d’altérer, falsifier. Man. pag. 11-12.
  14. Man. pag. 13.
  15. Man. pag. 14-16.
  16. Epist. Petr. ch. III, vers. 7 et 13.
  17. Notre langue manque de mots pour exprimer l’idée d’éternité à posteriori. La langue arabe est plus heureuse, elle a l’expression ابد et ازل pour l’éternité à priori. Voy. August. De civit. ch. xvi, et xiv. — id. S. Thom. in quartâ dist. xlviii, quest. 2, ant. 4.
  18. Basil. Op. tom. I, hexam.
  19. Le planisphère du manuscrit (pag. 38) sur lequel est marquée cette division est très-incorrect et fort confus. Damiette ܕܡܝܐܛ est placé entre Tyr et Jérusalem, Chypre ܟܘܦܪܘܣ avoisine Tripoli. Quelques noms ne nous sont pas clairement connus, tels que le pays qu’il appelle ܐܬܪܐ ܕܒܘܬܢ. Nous pensons que c’est כוה et כותה, mentionnés au livre II des Rois, 17, 30, que quelques interprètes ont placés dans la Perse ; la proximité du mot ܗܡܪܐܢ, هدان, justifierait notre conjecture. Le mot ܟܠܐܛ ne désigne-t-il pas خلاط qui se trouve en Arménie ? Les autres mots ܝܡܐ ܕܐܪܡܢܝܐ qui l’entourent paraissent nous autoriser à le croire. ܡܝܦܪܩܝܛ, placé au-dessus, est peut-être ܡܝܦܪܩܝܛ.
  20. Man. pag. 17, 34. Il explique en passant les mots de la Genèse (ch. I, vers. 2) : ורוח אלהים מרחפת על פני מים, et, comme plusieurs pères de l’Église, il pense que le mot ורוח désigne l’Esprit Saint, et il reproche à saint Éphrem d’avoir entendu par là un vent matériel et naturel, Voy. son comment. Bibl. orient. tom. I.
  21. Bar-Hebræus ajoute le mot ܐܡܝܬܐ qu’il n’explique pas et que l’on cherche inutilement dans les dictionnaires. Sa position porterait à croire qu’il entend par là la gelée blanche du matin.
  22. Il mentionne en outre plusieurs autres phénomènes appelés ܦܪܝܣܛܝܪ, περιστερὰ, ou colombe, forme sous laquelle le feu du ciel tombe souvent, dit-il. Les mots ܕܘܩـــܝــــܕܗܣ et ܠܩ̈ܩܦܐܕܐ δᾳδουχία, δαὶς, λαμπτὲς (telle est probablement leur étymologie) expriment des phénomènes analogues.
  23. ܫܒܠܬܟܢܐ. Les Arabes l’appellent aussi indifféremment سبيل التبن et سبيل اللبن.
  24. Il les désigne sous le nom de feux sortant des montagnes de Phrygie, de Crète et de Sicile.
  25. L’étude des textes nouveaux dans la langue syriaque offrira des difficultés insurmontables tant que les dictionnaires ne seront pas plus complets. L’orientaliste qui possède aujourd’hui le plus à fond cette langue, M. Étienne Quatremère, a ramassé dans ses immenses lectures tous les matériaux nécessaires à la composition d’un dictionnaire, lequel ferait disparaître tous les obstacles qui nous arrêtent. Espérons qu’il lui sera bientôt permis de publier ce précieux travail.
  26. Untersuchungen über den Ursprung und die bedeuntung der sternnamen von Lud. Ideler. Berlin, 1809.
  27. Le texte syriaque porte « septentrionalis aut borealis corona. » La traduction arabe de جنوبى est inexacte : il faut probablement lire الاڪليل الشمالى, στέφανος βόρειος. La cause de la méprise vient de ce que Ptolémée lui donne à la fois le nom de couronne du sud et du nord, Idel. ibid. pag. 58.
  28. En marge du manuscrit se trouve le mot ܗܐܢܓܘܢܐܣܝܢ qui évidemment est grec et doit se traduire probablement par les mots ὁ ὀν γόνασιν ; ce qui nous donne le même sens que les mots syriaques.
  29. En syriaque il y a poule.
  30. Ideler ne donne pas ce mot, qui se trouve dans le manuscrit de la traduction arabe.
  31. La fille du feu. Le nom de cette constellation nous a beaucoup embarrassé ; nous ne le retrouvons nulle part sous cette dénomination. On lit à la marge ܦܝܪܡܐ, qui est le mot grec πυρὰ, rogus, bûcher ; car le mot πυράμη ne donne aucun sens satisfaisant. Cette constellation se compose de sept étoiles, ܟܘܘ̈ܟܐ. Ne serait-elle point celle que nous nommons l’Autel, qui compte le même nombre d’étoiles et qui est également située entre le centaure et la couronne australe ?
  32. Man. pag. 59-62.
  33. Man. pag. 63.
  34. Man. pag. 66.
  35. Man. pag. 68.
  36. Il donne à ceux qui prétendent que Dieu a un corps le nom de ܡܓ̈ܫܡܢܐ. Il affectionne beaucoup une expression qu’il prodigue à tous ceux qui ont une opinion philosophique ou théologique contraire à la foi ; il l’appelle ܬܪܒܬܐ ܣܩܘܟܒܬܐ. Ce mot ܣܩܘܟܒܬܐ vient peut-être du mot grec Σκολιὸς, courbé, tortu, c’est-à-dire une opinion hétérodoxe, qui s’écarte de la vérité.
  37. Man. pag. 72, 77, 89, 86.
  38. Man. pag. 66.
  39. ܝܠܝܕܘܬܐ.
  40. ܦܢܘܩܘܬܐ, mot que Castel ne donne pas.
  41. ܐܠܒܪ̈ܝܐ ܘܠܐ ܒܟܝ̈ܕܐ.
  42. ܡܬܟܪܫܢܘܬܐ.
  43. Voy. Act. concil. Chalced. — Paggius, ad annum 451. Num. 38. ibid. p. 3 Apud Labb. tom. IV. Concil. p. 1079.
  44. Renaudot, tom. I. Lit. orient. pag. 365. — Galanus, tom. I et II. — Concil. ecclesias. Armen. cum Roman.
  45. Assem. Bibl. orient. tom. II, p. 4. De monoph.
  46. Man. 168, 169.
  47. Man. 166.
  48. Cette classe assez nombreuse de monophysites soutenait que le corps de Jésus-Christ et sa nature humaine n’étaient qu’apparents. Ils étaient très-répandus dans l’Arménie. Jean le philosophe, catholicos de l’Arménie, les a éloquemment réfutés. — Jean. Cathol. Orat. cont. Phantast. a P. bap. Aucher, Venise, 1816. Pag. 33, 42, 54 et pass.
  49. Cette première catégorie se subdivise elle-même en deux branches : 1o les miracles faits ܒܝܬܗ, in ente ejus, ; 2o ceux faits hors de lui, ܠܟܪܝܬܗ.
  50. Man. pag. 191.
  51. Man.198 et pass.
  52. Man.183.
  53. Dion. Areop. De nomin. divin. de cælest. hierar.
  54. Summ. S. Thom. quæst. cvi, art. 1, 2, 3. De hoc actu angelorum quod est invicem sese illuminare.
  55. Cette initiation véritable est ordinairement désignée sous le nom de ܡܐܪܙܘܢܘܬܐ, en tant qu’elle est active, et en tant que passive, il l’appelle ܡܬܐܪܙܢܘܬܐ. Ces deux mots manquent dans les lexiques.
  56. Man.197.
  57. Man. 200.
  58. ܒܗܢܘܬܐ. Man. pag. 207.
  59. Man. 208-217.
  60. Man. 208.
  61. Renaud. Lit. orient. tom. II. — Man. 219 et seq.
  62. Man. 225.
  63. Man. 226.
  64. Man. 227.
  65. Man. pag. 232. — Sum. S. Thom. quæst. cix. De ordine angelorum sive dæmoniorum.
  66. Man. 235. Le copiste écrit toujours le mot ܣܛܢܐ Saturnus, avec les lettres renversées, ce qui équivaut sans doute à quelque formule déprécative.
  67. Man. pag. 237.
  68. Man. pag. 292. Le texte contient trois mots différents pour exprimer cette idée : ܚܠܩܐ, qui équivaut à ܚܪܩܐ : شاو̈, proprement terminus, terme, et ܩܨܐ, qui correspond à قصاء.
  69. Man. 238.
  70. Man. 238, 244-256.
  71. Man. 266. Ici Bar-Hebræus réfute en passant la doctrine de la métempsycose et les assertions de ceux qui accordent aux bêtes une âme douée de raison.
  72. Man. 281.
  73. Man. 290.
  74. Man. 292.
  75. Il appelle la providence ܟܛܝܠܘܬܐ. Man. pag. 298.
  76. Man. pag. 292.
  77. Man. pag. 298. On trouve ici beaucoup de termes de l’école empruntés à Aristote, comme cette règle, a posse ad actum valet consecutio : ܡܢ ܫܚܠܐ ܠܡܥܟܕܢܘܬܐ.
  78. Man. 327.
  79. Man. 330-332.
  80. Bar-Hebræus s’occupe ici de ces questions scolastiques, rien moins que futiles et oiseuses, à savoir, si au jour de la résurrection il ne manquera à notre corps aucune de ses parties. Ressusciterons-nous avec la même taille ? Aurons-nous encore des cheveux et des ongles ? Aurons-nous besoin de vêtements ? Comment pourrons-nous traverser des milieux opaques ? etc., etc.
  81. ܡܠܬܐ ܢܦܘܩܬܐ.
  82. Man. 344.
  83. Man. 345-347. Il traite aussi de la venue de l’Antéchrist, et il nous montre à quels signes les hommes pourront le reconnaître.
  84. Man. 349.
  85. Man. 354.
  86. ܡܘܕܝܢܘܬܐ. Man. pag. 370-373.
  87. Man. 377-392.