Accommodement d’un différend mathématique résultant d’un malentendu




XI


ACCOMMODEMENT


D'UN


D'UN DIFFÉREND MATHÉMATIQUE


RÉSULTANT D'UN MALENTENDU.


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1796









Dans un article de la Revue mensuelle de Berlin (mai 1796), j’avais, par forme d’exemple du mysticisme, auquel des questions mathématiques peuvent conduire, placé dans la bouche d’un pythagoricien mystique en fait de nombres, la question de savoir ; « Ce qui fait que le rapport rationnel des trois côtés d’un triangle rectangle ne peut être que le nombre 3, 4, 5. » — J’avais donc regardé cette proposition comme vraie. M. le docteur et professeur Reimarus la réfute, et prouve (dans le même recueil n° 6) que d’autres nombres que ceux-là peuvent être dans le rapport indiqué.

Rien ne semble donc être plus clair que de nous comprendre dans une question toute mathématique (où, en général, il n’y a presque pas de désaccord). Aussi, le différend provient-il d’un malentendu. Le même mot a été pris par chacun de nous dans un sens particulier ; aussitôt après s’en être expliqué l’un à l’autre, la difficulté a disparu, et les deux parties out eu raison. — Thèse et antithèse présentent donc le rapport qui suit.

R. dit (ou du moins il conçoit ainsi sa proposition) : dans le nombre infini de tous les nombres possibles (conçus séparément), il y a, en ce qui concerne les côtés du triangle rectangle, plus de rapports rationnels que ceux qui sont représentés par ces nombres 3, 4, 5. »

K. dit (c’est du moins ainsi qu’il conçoit la contre-proposition) : dans la série infinie de tous les nombres progressifs dans l’ordre naturel (depuis zéro par l’addition successive d’une unité), il n’y a pas d’autre rapport rationnel de ces côtés entre ceux qui se succèdent immédiatement (par conséquent comme unis) que celui des nombres 3, 4, 5. »

Les deux prnposilions ont pour elles des preuves strictes, et ni l’un ni l’autre des contendants n’a le mérite d’être l’inventeur de ces preuves.

Il ne s’agit donc plus que de décider lequel des deux a été cause du malentendu. — Si la question (Thema) était purement mathématique, cette faute serait imputable à K. ; en effet la proposition exprime d’une manière universelle la propriété en question des nombres (sans penser à la série qu’ils forment). Mais la question ne doit servir ici que comme exemple du désordre introduit avec les mathématiques par le mysticisme numérique des Pythagoriciens, quand on veut philosopher sur des propositions arithmétiques. Et alors on pouvait bien supposer que cette antithèse serait prise dans le sens suivant lequel un mystique pouvait espérer de trouver quelque chose de singulier et d’esthétiquement remarquable parmi les propriétés des nombres ; telle est une liaison limitée à trois nombres qui se tiennent immédiatement dans la série infinie des nombres, quoique les mathématiques n’y trouvent rien de merveilleux.

M. Reimarus, je l’espère, ne m’accusera donc pas d’avoir été cause qu’il ait pris la peine inutile de prouver une proposition dont personne, que je sache, n’a jamais douté.