ABC : Petits ContesMaison Alfred Mame et fils (p. 45-46).

TORTUE


Jean, Pierre et Paul étaient allés aux courses avec leurs parents. Ils avaient vu courir des chevaux, et cela les avait beaucoup amusés.

Rentrés à la maison, Jean dit à ses frères :

« Si nous faisions courir, nous aussi ?

— Mais nous n’avons pas de chevaux, répondit Pierre.

— Qu’est-ce que cela fait ? Nous avons chacun une tortue, et des tortues peuvent tout aussi bien courir que des chevaux ; plus lentement, voilà tout. »

Chaque enfant alla donc chercher sa tortue. Puis ils choisirent trois beaux escargots, qui seraient les jockeys.

Jean apporta sa boîte à couleurs, et il peignit à chaque escargot une casaque différente, une jaune, une rouge, une verte.

Il voulut aussi leur fabriquer des casquettes. Mais les escargots dirent : « Non, merci, » et rentrèrent leurs cornes.

Les trois enfants préparèrent une piste dans le jardin, avec des poteaux au bout, et une tribune avec des roses et des œillets, qui figuraient les dames élégantes.

Puis ils alignèrent leurs trois tortues montées par les trois escargots, et Jean donna le signal du départ.

Mais, hélas ! aucune des trois tortues ne bougea.

Alors Pierre courut chercher son tambour, et Paul chatouilla la queue des tortues avec des brindilles.

Les tortues se décidèrent enfin à partir. Mais, au lieu d’aller droit devant elles, elles allaient à droite ou à gauche, et la tortue de Paul revint même en arrière.

Alors Jean eut une idée :

« Si nous mettions des salades au lieu de poteaux ! »

Et vite, au bout de la piste, les enfants plantèrent trois belles salades.

Quand les tortues virent cette appétissante verdure, elles se mirent en marche toutes seules, et celle de Jean avança si rapidement que son jockey, je veux dire son escargot, roula à terre.

Elle arriva la première au but ; et, pour sa récompense, on lui donna à manger les poteaux, je veux dire les salades, et même les roses et les oeillets de la tribune, qui figuraient les dames élégantes.