Œuvres posthumes (Verlaine)/Avertissement du second volume

Œuvres posthumesMesseinSecond volume (p. 1-3).

AVERTISSEMENT DE L’ÉDITEUR


Voici un second Posthume de Verlaine, très probablement — mais que sait-on jamais ? — le dernier tome de ses Œuvres Complètes.

Il était de notre devoir de ne négliger aucune page qui portât la précieuse signature, authentiquement. Il ne nous appartenait pas d’apprécier la valeur en soi de chacun des écrits que le Poète n’avait pas eu le temps de réunir, ni même peut-être, de revoir.

Car le lecteur de ces œuvres posthumes devra toujours, avant de porter sur elles un jugement, se souvenir que l’auteur, ne leur ayant point conféré le caractère de la rédaction ne varietur, n’en saurait porter, au regard de la critique, la responsabilité entière. Elles sont, du reste, de dates très diverses : de la jeunesse, — de la maturité, — des dernières années.

Ainsi permettent-elles, et c’est leur double intérêt, de jeter un regard d’ensemble sur toute sa carrière, sur les transformations de sa pensée, et de voir cette pensée en action, pour ainsi dire, et parfois dans l’instant de la composition, alors qu’elle cherchait encore sa forme définitive. — Et partout cette pensée atteste la primesautière et intense personnalité du poète qui fut si grand avec tant de bonhomie et de passion à la fois, de celui qu’on a tour à tour comparé à La Fontaine et à Villon, parce qu’il est comme eux, et leur égal, de pure race française.

Nous avons joint à ces textes une série de croquis originaux.

Verlaine, bien qu’il ait, comme il le raconte dans ses Confessions, enseigné (en Angleterre) le dessin, ne l’avait pas appris. Mais, d’eux-mêmes, et sans avoir reçu les conseils d’aucun maître, tous les enfants, on le sait, dessinent sans correction, il va de soi, mais d’une manière amusante et expressive. Verlaine, dans ses croquis comme dans ses vers — toutes proportions de mérite et d’intérêt, comme l’on entend bien, gardées — resta jusqu’à la fin cet enfant dont rien ne pouvait altérer la spontanéité, bien que sa pensée atteignît aisément à la profondeur des plus viriles génies.

Il n’était pas inutile de donner ce témoignage de plus de ce caractère si particulier, que les contemporains de Verlaine retrouvèrent dans sa personne même, dans sa parole, dans son rire, dans ses moindres gestes. C’est à ce titre que ces croquis[1] — en eux-mêmes, d’autre part, si curieux — ont très légitimement leur place dans ce volume.

Albert Messein.
  1. Nous les devons pour une part, à M. Henri Floury, éditeur, qui nous les a obligeamment communiqués.