Œuvres poétiques de Chénier (Moland, 1889)/Plutarque, au traité qu’un prince doit être savant

Œuvres poétiques, Texte établi par Louis MolandGarnierVolume 2 (p. 225-226).


XVII[1]


Plutarque, au traité qu’un prince doit être savant :


Tout le monde le craint ; mais il craint tout le monde.
Le Pont a vu son roi, pendant la nuit profonde,
Enfermé dans un coffre, attendre le soleil.
Et dormir, en secret, d’un horrible sommeil,
Que des songes sanglants épouvantaient sans doute ;
Comme le noir serpent s’éloigne de la route
Et seul au fond du bois, craignant le fouet vengeur,
Se dérobe sous terre à l’œil du voyageur.


L’esprit humain incertain et mobile
Est fort semblable au funambule agile.


Doux souris, doux regards, douce voix, doux silence.


Bacchus, sous ces forêts que tes plaintes troublèrent,
Ô fille de Minos, consola tes douleurs.
Les larmes de Philis sur ces rives coulèrent ;
Elles firent naître ces fleurs.


Ces vallons redisaient les caresses d’Œnone ;
Ce fleuve s’arrêtait aux baisers d’Arion ;

Et ces grottes ont vu la fille de Latoae
Descendre au sein d’Endymioa.


Mer qui, pour séparer les amis, les amants,
Amoncelles entre eux tes remparts écumants ;
Inexorable mer dont les fureurs jalouses
Dévorent les époux qui cherchent leurs épouses,

Ô mer, du jeune amant..........

Ne pus vaincre l’espoir, la jeunesse et l’amour.
Ô mer, tu fus domptée, et ta rage écumante
Ne l’engloutit qu’à son retour[2].

  1. Édition G. de Chénier.
  2. Voy. Voltaire, Dictionnaire philosophique, au mot épigramme :

    Léandre, conduit par l’Amour,
    En nageant disait aux orages :
    Laissez-moi gagner les rivages.
    Ne me noyez qu’à mon retour.