Œuvres inédites de l’Empereur
La Revue blancheTome XV (p. 186-193).

Œuvres inédites de l’Empereur

XI
L’EMPEREUR AU MAJOR GÉNÉRAL
19 janvier 1898.
Il faut se mettre en mesure ; parler paix et agir guerre. Si le procès Zola comporte des conséquences favorables, il pourrait devenir nécessaire de hâter les préparatifs. Écrivez aux sénéchaux de m’envoyer une situation claire des israélites établis dans leur ressort, afin que l’on voie ceux qui pourront être mis en route d’abord. La plupart nous sont acquis dès maintenant à cause de la sottise des jésuites. Sachez, sous le couvert de la propagande électorale, ce qu’ils veulent. Beaucoup, m’a-t-on dit, retireront leur appui au Pouvoir et le donneront aux révolutionnaires. Faites rappeler dans nos gazettes la biographie, les œuvres et l’influence du juif Karl Marx. Il convient aussi de s’aboucher avec les promoteurs du sionisme. Tâchez en outre de faire tâter les officiers israélites, dont la position devient intolérable dans l’armée. Il nous en arrivera prochainement bon nombre. Dans chaque sénéchaussée, on formera une légion juive. Les sémites, les socialistes, les anarchistes et les intellectuels constitueront une bonne armée. On ne fait pas assez dire que l’état-major actuel date du demi-siècle, que, contemporain des Bazaine, des Mac-Mahon, des Lebœuf, il conserve les défauts de cette époque : hypocrisie, jalousie, ignorance, suffisance, présomption. Il serait urgent de réformer ces infirmes. Mes malheurs de jadis se précipitèrent lorsque mes généraux vieillirent. En 1800, au milieu des victoires, Vandamme, Grouchy, Decaen, Ney, Desaix, Gouvion-Saint-Cyr, Lannes, ne dépassaient guère trente ans ; Moreau, Augereau, ni Lecourbe, quarante ans. Si, en 1810, j’avais renouvelé mon personnel de maréchaux, Moscou serait encore chef-lieu de département français. Les vieillards impotents ne valent rien. Voyez Billot. Il ânonne. Ces invalides ne nous gêneront pas plus qu’ils ne gêneraient les Allemands. Les Japonais ont battu la Chine en quelques semaines. Nous avons encore été vaincus hier au Tonkin. Un « homme » doit être poète ou soldat de vingt à trente, général de trente à quarante, politicien de quarante à cinquante ; ensuite, il doit écrire ses mémoires, un traité de philosophie, ou s’occuper de finances et d’élevage. Répandez de ces propos, parmi les jeunes capitaines brevetés que prépara l’École de guerre. Ils attendent impatiemment la justice qui les mettra en la place des podagres. Ils espéreront en nous. Ils ont en tête le plan de campagne indispensable. Il faut les avoir par ce moyen.
N.
XII
L’EMPEREUR À M. DÉROULÈDE
20 janvier 1898.
Je n’aime pas vos patriotes. Ils crient dans les rues. Ils tapent du poing sur les tables de café. Ils braillent « vive l’armée ! » en bande. Mais ils supportent patiemment que leur ministre de la guerre déclare impossible de rendre la justice sans craindre la colère du roi de Prusse. Ce sont de petits caractères. Il ne leur vient pas à l’esprit de trouver monstrueux qu’après vingt-sept années d’armements, et la dépense de tant de millions, la France ne puisse ouvertement juger les siens. Cette raison qu’on leur présente, la peur de la Triplice, leur semble naturelle et conforme à l’honneur du pays. À leur place, je fusillerais un état-major qui m’avouerait de la sorte son impuissance devant l’étranger. Quoi ? Les alliés campent-ils encore sur la place de la Concorde, que l’on ne puisse rendre la justice sans leur demander permission ? Vos patriotes diffèrent des patriotes de Jeanne d’Arc qui purgèrent la France de l’Anglais. Ils diffèrent de leurs aïeux qui, avec moi, de 1792 à 1810, imposèrent à l’Europe le respect des Droits de l’Homme, qui me suivirent en Egypte, eux, pour empêcher M. Pitt d’y faire bombance et de tuer en Orient notre avenir commercial, tandis qu’aujourd’hui les vôtres laissent lord Salisbury occuper le canal de Suez et boucher le chemin de la Chine au détriment de l’industrie française. Puisqu’ils parlent si haut de l’armée et du drapeau, que ne marchent-ils au Rhin ? Pourquoi laisser depuis vingt-sept ans l’Alsace-Lorraine aux mains de l’ennemi ? Leur patriotisme consiste-t-il seulement à brailler, afin de se donner l’illusion d’un courage imaginaire ? Faites cesser cela. Pour relever l’honneur de l’armée française, il faut d’autres victoires que Fourmies.
N.


XIII
LE MAJOR GÉNÉRAL À M. MIRMAN
L’Empereur vous mande, M. Mirman, que vous recommandiez aux jeunes professeurs et répétiteurs l’étude de la campagne de Masséna en Suisse, les préliminaires de la bataille de Zurich, et les mouvements de Lecourbe vers le lac de Constance. Ce serait la meilleure façon de connaître le théâtre des opérations prochaines. La région du Rhône aux Cévennes devra particulièrement intéresser les géographes de la sénéchaussée d’Albi et ceux de la sénéchaussée de Provence, puisque là s’effectuerait la réunion de l’armée méridionale. Cette armée devra, en gardant les défilés des montagnes et en détruisant les ponts du Rhône, conserver libre un certain temps toute la rive droite jusqu’à ce que soient accomplies les jonctions entre les différentes troupes et que celles-ci aient pu franchir le fleuve, soit à Lyon, si la Commune y est maîtresse, soit à Givors pour gagner Genève par Annecy. L’armée septentrionale remontera la vallée de la Meuse, en s’appuyant à la Forêt d’Argonne, où s’engageront sans doute de graves hostilités contre les forces capitalistes du plateau de Langres. Selon les événements, l’armée septentrionale marchera, dans la suite, sur Lyon ou sur Paris. La région de l’Argonne attirera donc l’attention particulière des géographes. Je vous prie de vouloir bien vous conformer en cela aux intentions de S. M. l’Empereur.

Le Major général, prince
de Neuchâtel


XIV
LE MARÉCHAL DU PALAIS AU MINISTRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE
L’Empereur trouve mauvais, Monsieur le Ministre, que vous ayez reconduit jusque la porte une sorte de giton perdu de mœurs, sous prétexte qu’il a de la voix. Personne n’ignore quel chantage permit à cet histrion de tirer des sommes d’un ancien président de la République en échange de lettres écrites par la fille de celui-ci. Il est honteux que le ministre représentant l’intellectualité française accueille publiquement un tel personnage, et avec une telle attitude. S. M. espère que cela ne se reproduira plus.

Le Maréchal du Palais
Caulaincourt


XV
L’EMPEREUR AU GÉNÉRAL BILLOT
21 janvier 1898.
Ne comptez point trop sur le jury dans l’affaire Zola. Je sais ce qu’il en est. Lorsque je voulus me débarrasser de Moreau et que pour cela je le fis mettre dans la conspiration Pichegru, il fallut envoyer quelqu’un vers ces drôles qui l’avaient acquitté au premier tour de vote. Un certain Lecourbe eut même l’impudence de demander à voir les pièces du dossier dans la Chambre des délibérations. On lui fit répondre que c’était inutile, qu’elles n’avaient pas encore pu être imprimées et qu’on les distribuerait après le jugement. Sept juges sur douze votèrent d’abord l’acquittement. Le président Hémart se vit contraint de leur dire : « Vous voulez mettre en liberté Moreau, il n’y sera pas mis ; vous forcerez le gouvernement à faire un coup d’État, car ceci est une affaire politique plutôt qu’une affaire judiciaire ; et il faut quelquefois des sacrifices nécessaires à la sûreté de l’État. » J’envoyai Savary qui en avait vivement fini, quelques mois avant, avec le due d’Enghien, à Vincennes. Il enjoignit au juge Thuriot de ne point laisser partir les jurés à dîner, et de les faire dîner céans, jusqu’à ce qu’ils eussent voté mieux. Pendant le dîner, il y eut beaucoup d’allées et venues grâce auxquelles on représenta à ces mauvais esprits que le jugement qui condamnerait Moreau à une peine légère lui sauverait la vie, tandis qu’en cas d’absolution, il subirait le sort même de Pichegru proprement expédié dans sa prison par les mameluks. Alors ils se rendirent à nos raisons. Aujourd’hui il vous serait moins facile de persuader militairement. Songez que j’avais pu, dès mon installation au Consulat, supprimer les journaux d’avis contraire, sans que personne dans Paris, non plus qu’ailleurs, y redit. Et Moreau était soutenu. J’ai dû faire rayer des cadres de l’armée quantité d’officiers trop occupés de sa justification. On s’agitait au camp de Boulogne. Sur ce, je prie que Dieu vous ait en sa sainte et digne garde.
N.


XVI
L’EMPEREUR AU SÉNÉCHAL FLAISSIÈRES
22 janvier 1898.

Une armée qui a des chefs comme celle-ci n’est pas redoutable. L’état-major appartient encore aux promotions qui lâchèrent pied devant les Prussiens de Wissembourg à Sedan et à Buzenval, malgré les exemples stratégiques de mes campagnes. Ils n’acquirent d’autre gloire qu’à la Semaine sanglante, en accordant à leurs hommes de dévaliser les fédérés mis à mort. Contre les Chinois, ils ont passé dix ans à ne point conquérir le Tonkin, alors que les Japonais ont battu naguère les mêmes troupes en quelques semaines. Leur honneur et leur intelligence cahotent dans les voitures Lefèvre de Madagascar. Le moindre de nos licenciés ès-mathématiques saura mieux prévoir que Bazaine ou Négrier ; et le moral de nos soldats luttant pour la liberté sociale, pour la liberté religieuse, aura vite raison du troupeau incohérent mené par de pareils ânes à la défense de ce qui semble l’Injustice. Si Mac-Mahon avait seulement été capable de lire le récit de ma campagne de Wagram, ou de celle d’Iéna, il n’aurait pas commis des fautes dignes d’un enfant. Bazaine ne savait même pas mesurer la profondeur des colonnes. Il calcula que la moitié du temps qu’il fallut suffirait au passage de ses divisions, de Borny à Rezonville. Celles-ci, pour déboucher, durent mettre le feu à leurs convois qui, envoyés au hasard, bloquaient l’artillerie dans les chemins. À Madagascar, ceux d’aujourd’hui emportèrent des voitures pour rouler sur des routes inexistantes. C’est même incurie. Lisez le commandant Rousset et Alfred Duquet. Ils vous renseigneront. N’importe qui de sensé, d’instruit et d’énergique doit obtenir de les vaincre. Donc, mettez-vous en mesure. Mon intention, si la guerre commence, est de vous donner le commandement depuis Marseille jusque Genève. Vous vous arrêterez dans la Savoie Française : et des que vous aurez pris contact avec les armées socialistes de Suisse, d’Italie, d’Allemagne, vous manœuvrerez pour tendre la main aux armées de Hollande, de Belgique, descendues avec nos mineurs de Flandre et nos Parisiens vers Langres, par la forêt d’Argonne. Tout se décidera entre Langres et Lyon. Dès les premiers jours de présence avec l’ennemi, il vous arrivera bon nombre de déserteurs. Formez les bataillons, et donnez-leur à garder les points importants. Comme ils seraient passés par les armes, sitôt que repris, ayez pour assuré qu’ils s’y défendront le mieux.

Il faut que vous choisissiez une bonne place d’appui en dessous de Lyon, au cas où la commune de cette ville ne pourrait se maintenir, Givors me semblerait celle-là. Envoyez quelqu’un au courant des choses de tactique et de fortification. Vous m’adresserez ensuite son mémoire. Il y aura mis le plan des écluses avec un croquis de la défense par le Rhône et le canal de Givors. Le premier jour on pourra faire occuper cette ligne par les verriers de Rive-de-Gier, les forces socialistes du département. Au cas où les renseignements de la commune lyonnaise ne nous seraient point favorables, on pourrait faire descendre les canuts sur la ligne de Rive-de-Gier-Givors. Ils attendraient là le sénéchal Jaurès et l’armée méridionale en marche depuis Nîmes. Les socialistes de Montluçon et de Saint-Étienne s’y concentreraient aussi. La commune de Marseille expédierait facilement vivres et munitions par le chemin de fer de la rive droite que le Rhône couvre. D’autre part, nos bataillons de Perpignan, renforcés par les Espagnols, occuperont d’abord les Monts Garrigues et la vallée de l’Aude. Le bataillon de Bessèges gardera les défilés du Vivarais. Nos forces de Saint-Étienne et de Rive-de-Gier demeureraient en ce cas derrière le canal de Givors. Ces dispositions couvriraient à l’Ouest, par les montagnes, la voie ferrée Cette-Lyon qu’il ne faut perdre à aucun prix, puisque nos approvisionnements en vivres et en munitions seront débarqués à Cette ou à Marseille ou sur la côte entre ces deux villes. C’est notre ligne de communication.

Il ne semble pas improbable, qu’au premier signal, les Internationalistes de Genève ne passent en Savoie française pour tâcher de rejoindre par Culoz, Pressins et Givors. Cela fait, on pousserait vers Langres, ensemble. Je vous salue.
N.


XVII
LE MAJOR GÉNÉRAL AU SÉNÉCHAL JAURÈS
S. M. l’Empereur vous fait savoir, Monsieur le Sénéchal, que, s’il vous était impossible de gagner la vallée de l’Aude par le chemin de fer de Castres, son intention est que vous vous portiez avec toutes vos forces dans la vallée du Tarn. Votre quartier général serait à Mende. Vous occuperiez les monts de la Lozère et tenteriez de descendre par les rives de l’Allier, sans trop vous aventurer, mais de manière à tendre la main aux troupes parties de Montluçon-Nevers. Vous auriez derrière vous le Sénéchal Flaissières ; votre droite serait couverte par les bataillons de Saint-Étienne, et votre gauche, par la division de Perpignan, qui recueillerait les régiments espagnols. Vous feriez filer vos blessés et vos malades sur Nîmes, où l’Empereur aura son quartier général et une partie de ses approvisionnements. Vous vous appuierez sur la voie de fer Nîmes à Riom, qui sera celle de vos ravitaillements. La réunion de l’armée s’opérera entre les Cévennes et le Rhône, sous la protection de la ligne St-Étienne-Rive-de-Gier-Givors. Vous formerez l’aile gauche ; le Sénéchal Flaissières, le centre ; et les Internationalistes genevois, l’aile droite. De cette façon, que l’attaque vienne du centre, Bourges-Dijon, ou du Dauphiné, il suffira de faire face en avant, ou face en arrière. Il semble probable que les armées socialistes septentrionales, belges et hollandaises occuperont suffisamment les corps capitalistes de Langres et de l’Est pour que votre tâche se borne d’abord à installer fortement une brigade vers Riom, dont la protection vous permettra d’agir selon les événements vers Lyon ou vers Dijon. Dans ce dernier cas, le Sénéchal Flaissières aurait occupé Lyon, et les Internationalistes marcheraient aussi sur Dijon par la ligne Lausanne-Pontarlier-Dôle, dans le but d’opérer entre Langres et l’Argonne, la jonction définitive des trois forces méridionale, septentrionale, internationaliste, après quoi, S. M. l’Empereur aviserait.

Le Major général, prince
de Neuchâtel


XVIII
S. M. L’EMPEREUR DES FRANÇAIS À S. M. L’EMPEREUR D’ALLEMAGNE
29 janvier 1898.
Sérénissime et très puissant Prince, Monsieur mon très cher et très aimé bon frère, nous avons reçu la lettre par laquelle Votre Majesté a bien voulu nous faire part de la résolution qu’elle a prise et effectuée d’occuper la baie de Kiao-Tchéou et de marquer ainsi son désir de faire pénétrer en Chine l’influence européenne d’une manière durable. Nous pensons, comme Votre Majesté, le temps venu, de réunir en un même état économique, l’étendue du vieux monde, afin qu’aucun sujet de guerre ne puisse, dans les siècles suivants, interrompre jamais l’essor de la pensée savante et humanitaire. Le malaise ressenti en Europe aussi bien qu’en Amérique par le quatrième État, provient de ce que, ayant augmenté son domaine intellectuel, des besoins lui sont nés, dont la satisfaction ne peut être attendue du présent régime industriel. Les quatre cent millions de Chinois habiles dans les métiers, dépourvus de besoins matériels excessifs, peuvent facilement remplacer les Européens du quatrième État, au labeur de créer le machinisme nouveau qui réduira au vingtième la nécessité du travail humain. Dans sa grande sagesse, Votre Majesté Sérénissime a pensé que les ouvriers européens devaient se répandre en Chine afin d’instruire aux tâches mécaniques de production ce peuple immense. Pour cela, nous sommes convaincus que l’invasion industrielle de l’Europe internationale dans l’Empire du Milieu, se doit accomplir le plus tôt, par tous les moyens que Dieu a mis en notre pouvoir. À la suite de nos armées, nos ingénieurs, nos contremaîtres, nos ouvriers et nos agronomes s’établiront dans ce pays, édifieront les usines, installeront des voies de fer, multiplieront l’outillage agricole et minier, expédieront jusque nos villes occidentales, jusque nos centres d’industrie, les ouvriers jaunes pour remplacer les travailleurs européens dont l’exode éducateur en Asie aura propagé les meilleurs systèmes de production agricole et industrielle. Ainsi, s’améliorera très vite le sort des hommes ayant mieux réparti leur effort et leur science sur une plus grande surface de la planète. Nous pensons avec plaisir que le nouvel ordre de choses établi en Chine et les mesures que Votre Majesté a cru devoir prendre relativement à l’Internationalisme, loin de porter atteinte à la bonne harmonie qui existe heureusement entre nous, ne peuvent, en dégageant les rapports futurs de nos deux empires de tout intérêt mesquin et particulier, que consolider et resserrer davantage les liens de l’Europe Internationale. Notre plus grand désir est de n’avoir, à l’avenir, que des relations de commun effort à entretenir avec Votre Majesté, et nous ne cessons de former des vœux pour sa prospérité personnelle et pour celle des peuples soumis à son gouvernement.
N.


XIX
L’EMPEREUR AU GRAND ÉCUYER
26 Janvier 1898.

Monsieur Joseph Reinach, faites arranger mes jumelles. Faites partir demain pour Nîmes, soixante chevaux de mes écuries, parmi lesquels il y en aura huit de ceux que je monte. Vous me remettrez l’état de ceux de mes chevaux que voulez faire partir. Je désire que cela se fasse avec tout le mystère possible. Tachez qu’on croie que c’est pour la chasse de M. Félix Faure, dans la forêt d’Amboise. Faites aussi partir mes mulets et mes cantines munies de tout ce qui est nécessaire, aussi mes petits portemanteaux dont je me suis servi avec tant d’avantage dans ma première campagne. Dans la journée de demain, préparez mes wagons. Si vous n’en n’avez pas le nombre, demandez à Mme  Sarah Bernhardt, et vous les ferez remplacer sur le champ. Vous ferez partir demain avec mes chevaux, mon petit cab de guerre. Mes wagons avec le reste de mes chevaux, et mes bagages de guerre, habillement, armes, etc., ainsi que toute la partie de ma maison, que le grand maréchal aura préparée, seront prêts à partir dimanche.

En vous indiquant le jour de dimanche pour le départ de ma maison, mon intention est que vous teniez tout préparé et que vous preniez mes ordres samedi au lever.
N.
XX
L’EMPEREUR À M. DE ROTHSCHILD
28 janvier 1898.
Envoyez, si cela est nécessaire, 2 500 000 francs pour les vivres à Nîmes, Mende, Riom et Givors. Cette place paraît être le pivot de nos mouvements. Achetez des capotes pour six mille grenadiers sémites. Il faut vingt mille francs pour le fourrage de chaque régiment à trois escadrons. Achetez le plus possible de la rente française dès que l’on signalera les premiers mouvements socialistes. Faites-en acheter le plus de façon à obtenir la hausse et à mettre dans notre parti les petits porteurs de titres. Achetez de l’Emprunt Chinois, de façon à ce que nos voix aient de la valeur dans la commission européenne des douanes. Ce que vous perdrez sur la rente française, après la socialisation, vous sera rendu par la dette chinoise.
N.

(Correspondance réunie par Paul Adam.)