Œuvres complètes de Buffon, éd. Lanessan/Histoire naturelle des minéraux/Mine de fer spathique

MINE DE FER SPATHIQUE

Cette matière ferrugineuse[NdÉ 1], qui se trouve souvent en grandes masses et qui est très riche en métal, n’est encore qu’une combinaison du fer décomposé par l’eau, car cette mine spathique n’est point attirable à l’aimant : le fond primitif de sa substance était un spath calcaire que le fer dissous a pénétré sans en changer la forme, ni même la texture apparente ; cette matière appelée mine de fer spathique, parce qu’elle conserve la forme du spath calcaire, se présente, comme ce spath, en cristaux de forme rhomboïdale, elle est ordinairement blanche ou grisâtre, un peu luisante, assez douce au toucher, et ses cristaux paraissent composés de petites lames toutes semblables à celles du spath calcaire ; elle n’a guère plus de dureté que ce même spath : on peut également les rayer ou les entamer au couteau, et ils n’étincellent ni l’un ni l’autre sous le choc de l’acier. Le fer, dissous par l’eau en une rouille très fine, s’est d’abord insinué dans la matière calcaire, et peu à peu a pris sa place en s’y substituant sans changer la figure des espaces, de la même manière que l’on voit les parties dissoutes du fer, du cuivre, des pyrites, etc., s’insinuer dans le bois, et le convertir en substance métallique sans déranger la forme de son organisation.

Ces mines de fer spathiques exposées au feu deviennent noires, et elles décrépitent lorsqu’elles sont réduites en poudre ; exposées à l’air, elles conservent leur couleur blanche si elles sont pures et sans autre mélange que la matière calcaire ; car celles qui sont mêlées de pyrites perdent peu à peu leur blancheur, et deviennent jaunes ou brunes par l’impression des éléments humides, et, comme le fond de leur essence est une rouille de fer, elles reprennent peu à peu cette forme primitive, et se changent en ocres avec le temps.

La plupart de ces mines spathiques sont en masses informes, et ne présentent la cristallisation spathique qu’à la surface ou à leur cassure ; les unes sont aussi compactes que la pierre calcaire, d’autres sont cellulaires, et toutes ont conservé dans leur intérieur la forme rhomboïdale des spaths calcaires ; mais, comme quelques-uns de ces spaths affectent une figure lenticulaire, on a aussi trouvé des mines spathiques sous cette forme ; et M. Romé de Lisle[1] observe, avec raison, que la mine de fer en crête de coq, qui se rencontre dans les minières de Baigory, a pour base le spath lenticulaire appelé spath perlé, dont elle a pris la forme orbiculaire en cristaux groupés par la base et séparés les uns des autres en écailles plus ou moins inclinées.


Notes de Buffon
  1. Mine de fer hépatique en cristaux lenticulaires groupés en crêtes de coq. — La minière des Trois-Rois, à Baigory en basse Navarre, a fourni de très beaux groupes de cette mine de fer apathique cristallisée en petites lames orbiculaires, posées de champ et diversement inclinées les unes sur les autres. Ce minéral doit sa forme à un spath perlé rhomboïdal, dont les petits cristaux groupés en recouvrement, les uns sur les autres, ont formé des corps lenticulaires, renflés dans leur milieu, minces et tranchants vers les bords.

    On voit, sur de certains morceaux, le spath perlé d’un côté qui est pur, et de l’autre côté il est converti en cette mine de fer spathique, en sorte qu’on ne peut douter de cette conversion. Cristallographie, par M. Rome de Lisle, t. III, p. 287 et suiv.

Notes de l’éditeur
  1. C’est un carbonate de fer.