Œuvres complètes de Béranger/Les Troubadours

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LES TROUBADOURS


DITHYRAMBE


Air : Je commence à m’apercevoir (Air noté )


        J’entonne sur les troubadours
                Un chant dithyrambique.
                Malgré goût et logique,
        Coulez, vers longs, moyens et courts.
                        Momus sommeille,
                        Qu’on le réveille ;
Gai farfadet, qu’il rie à notre oreille.
        Laissons, malgré maux et douleurs,
        L’espérance essuyer nos pleurs :
Lisette, apporte et du vin et des fleurs.
                Narguant des lois sévères,
                Troubadours et trouvères
Au nez des rois vidaient gaîment leurs verres.

        Toi, doux rimeur que la beauté
                Mène par la lisière,
                Unis parfois le lierre
        Aux roses de la volupté.
                        Coupe remplie
                        Par la Folie
Met en gaîté femme tendre et jolie.

        La colombe d’Anacréon,
        Dans la coupe de ce barbon,
Buvait d’un vin père de la chanson.
                Narguant des lois sévères,
                Troubadours et trouvères
Au nez des rois vidaient gaîment leurs verres.

        Toi qui fais de religion
                Parade à chaque rime,
                Qui sur la double cime
        Fais grimper la procession,
                        Ta muse en masque
                        Est lourde et flasque :
Mais qu’un tendron te tire par la basque,
        Tu lui souris ; et le bon vin
        Pour toi ne vieillit pas en vain,
Beau joueur d’orgue au service divin.
                Narguant des lois sévères,
                Troubadours et trouvères
Au nez des rois vidaient gaîment leurs verres.

        Toi qui prends Boileau pour psautier,
                Du joug je te délie.
                Veux-tu, près de Thalie,
        De Regnard être l’héritier ?
                        De cette muse
                        Parfois abuse ;
Enivre-la ; Molière est ton excuse.
        Elle naquit sur un tonneau :
        Pour lui rendre un éclat nouveau,
Puise la joie au fond de son berceau.
                Narguant des lois sévères,

                Troubadours et trouvères
Au nez des rois vidaient gaîment leurs verres.

        Du romantisme jeune appui,
                Descends de tes nuages ;
                Tes torrents, tes orages,
        Ceignent ton front d’un pâle ennui.
                        Mon camarade,
                        Tiens, bois rasade ;
C’est un julep pour ton cerveau malade.
        Entre naître et mourir, hélas !
        Puisqu’on ne fait que quelques pas,
On peut aller de travers ici-bas.
                Narguant des lois sévères,
                Troubadours et trouvères
Au nez des rois vidaient gaîment leurs verres.

        Oui, trouvères et troubadours
                Sablaient force champagne.
                Mais je bats la campagne ;
        L’ode et le vin font de ces tours.
                        Le ciel nous dote
                        D’une marotte
Tour à tour grave, et quinteuse et falote.
        Le soleil s’est levé joyeux,
        Le front barbouillé de vin vieux.
Ah ! tout poëte est le jouet des dieux.
                Narguant des lois sévères,
                Troubadours et trouvères
Au nez des rois vidaient gaîment leurs verres.



Air noté dans Musique des chansons de Béranger :


LES TROUBADOURS.

Air : Je commence à m’apercevoir (d’Alexis).
No 217.



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\addlyrics {
J’en -- ton -- ne sur les trou -- ba -- dours
Un chant di -- thy -- ram -- bi -- que
Mal -- gré goût et lo -- gi -- que
Cou -- lez vers longs mo -- yens et courts
Mo -- mus som -- meil -- le
Qu’on le ré -- veil -- le
Gai far -- fa -- det qu’il rie à notre o -- reil -- le
Lais -- sons mal -- gré maux et dou -- leurs
L’es -- pé -- rance es -- su -- yer nos pleurs
Li -- sette ap -- porte et du vin et des fleurs
Nar -- guant des lois sé -- vè -- res
Trou -- ba -- dours et trou -- vè -- res
Au nez des rois vi -- daient gaî -- ment leurs ver -- res.
}

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