Œuvres complètes de Béranger/La Nostalgie

Pour les autres éditions de ce texte, voir La Nostalgie, ou la Maladie du pays.


LA NOSTALGIE


OU


LA MALADIE DU PAYS


Air de la République (Air noté )


 
Vous m’avez dit : « À Paris, jeune pâtre,
« Viens, suis-nous, cède à tes nobles penchants.
« Notre or, nos soins, l’étude, le théâtre,
« T’auront bientôt fait oublier les champs. »
Je suis venu ; mais voyez mon visage.
Sous tant de feux mon printemps s’est fané.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
        Et la montagne où je suis né !

La fièvre court triste et froide en mes veines ;
À vos désirs cependant j’obéis.
Ces bals charmants où les femmes sont reines,
J’y meurs, hélas ! j’ai le mal du pays.
En vain l’étude a poli mon langage ;
Vos arts en vain ont ébloui mes yeux.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
        Et ses dimanches si joyeux !

Avec raison vous méprisez nos veilles,
Nos vieux récits et nos chants si grossiers.
De la féerie égalant les merveilles,
Votre Opéra confondrait nos sorciers.

Au Saint des saints le ciel rendant hommage,
De vos concerts doit emprunter les sons.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
        Et sa veillée et ses chansons !

Nos toits obscurs, notre église qui croule,
M’ont à moi-même inspiré des dédains.
Des monuments j’admire ici la foule ;
Surtout ce Louvre et ses pompeux jardins.
Palais magique, on dirait un mirage
Que le soleil colore à son coucher.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
        Et ses chaumes et son clocher !

Convertissez le sauvage idolâtre ;
Près de mourir, il retourne à ses dieux.
Là bas, mon chien m’attend auprès de l’âtre ;
Ma mère en pleurs repense à nos adieux.
J’ai vu cent fois l’avalanche et l’orage,
L’ours et les loups fondre sur mes brebis.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
        Et la houlette et le pain bis !

Qu’entends-je, ô ciel ! pour moi rempli d’alarmes :
« Pars, dites-vous, demain pars au réveil.
« C’est l’air natal qui sèchera tes larmes ;
« Va refleurir à ton premier soleil. »
Adieu, Paris, doux et brillant rivage,
Où l’étranger reste comme enchaîné.
Ah ! je revois, je revois mon village,
        Et la montagne où je suis né.



Air noté dans Musique des chansons de Béranger :


LA NOSTALGIE.

Air de la petite Gouvernante.
No 282.



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Vous m’a -- vez dit "« À" Pa -- ris jeu -- ne pâ -- tre
Viens suis- nous cède à tes no -- bles pen -- chans
Notre or nos soins l’é -- tu -- de le thé -- â -- tre
T’au -- ront bien -- tôt fait ou -- bli -- er les "champs. »"
Je suis ve -- nu mais vo -- yez mon vi -- sa -- ge
Sous tant de feux mon prin -- temps s’est fa -- né
"Ah !" ren -- dez- moi ren -- dez- moi mon vil -- la -- ge
Et la mon -- tagne où je suis né
"Ah !" ren -- dez- moi ren -- dez- moi mon vil -- la -- ge
Et la mon -- tagne où je suis né.
}

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