Œuvres complètes de Béranger/La Fille du Peuple
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LA FILLE DU PEUPLE
Fille du peuple, au chantre populaire,
De ton printemps tu prodigues les fleurs.
Dès ton berceau tu lui dois ce salaire ;
Ses premiers chants calmaient tes premiers pleurs.
Va, ne crains pas que baronne ou marquise
Veuille à me plaire user ses beaux atours.
Ma muse et moi nous portons pour devise :
Je suis du peuple ainsi que mes amours.
Quand, jeune encor, j’errais sans renommée,
D’anciens châteaux s’offraient-ils à mes yeux ;
Point n’invoquais, à la porte fermée,
Pour m’introduire, un nain mystérieux.
Je me disais : Tendresse et poésie
Ont fui ces murs, chers aux vieux troubadours.
Fondons ailleurs mon droit de bourgeoisie ;
Je suis du peuple ainsi que mes amours.
Fi des salons où l’ennui qui se berce
Bâille entouré d’un luxe éblouissant !
Feu d’artifice éteint par une averse,
Quand vient la joie, elle y meurt en naissant.
En souliers fins, chapeau frais, robe blanche,
Tu veux aux champs courir tous les huit jours :
Viens ; tu me rends les plaisirs du dimanche.
Je suis du peuple ainsi que mes amours.
Quelle beauté, simple dame ou princesse,
A plus que toi de décence et d’attraits ;
Possède un cœur plus riche de jeunesse,
Des yeux plus doux et de plus nobles traits ?
Le peuple enfin s’est fait une mémoire :
J’ai pour ses droits lutté contre deux Cours ;
Il te devait au chantre de sa gloire.
Je suis du peuple ainsi que mes amours.
Air noté dans Musique des chansons de Béranger :
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