Œuvres complètes (Rimbaud)/Bruxelles

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BRUXELLES


Juillet. Boulevard du Régent.


Plates-bandes d’amarantes jusqu’à
L’agréable palais de Jupiter.
— Je sais que c’est Toi qui dans ces lierres
Mêles ton bleu presque de Sahara !

Puis comme rose et sapin du soleil
Et liane ont ici leurs jeux enclos,
Cage de la petite veuve !…
Cage de la petite veuve !…Quelles
Troupes d’oiseaux, o ia io, ia io !…

— Calmes maisons, anciennes passions !
Kiosque de la Folle par affection.
Après les fesses des rosiers, balcon
Ombreux et très bas de la Juliette.


— La Juliette, ça rappelle l’Henriette,
Charmante station du chemin de fer,
Au cœur d’un mont, comme au fond d’un verger
Où mille diables bleus dansent dans l’air !

Banc vert où chante au paradis d’orage,
Sur la guitare, la blanche Irlandaise.
Puis, de la salle à manger guyanaise,
Bavardage des enfants et des cages.

Fenêtre du duc qui fais que je pense
Au poison des escargots et du buis
Qui dort ici-bas au soleil.
Qui dort ici-bas au soleil.Et puis
C’est trop beau ! trop ! Gardons notre silence.

*


— Boulevard sans mouvement ni commerce,
Muet, tout drame et toute comédie,
Réunion des scènes infinies,
Je te connais et t’admire en silence.